Table ronde belgo-congolaise
La Table ronde congolo-belge, aussi appelée Table ronde de Bruxelles, fut une rencontre organisée en deux parties[1] en 1960 à Bruxelles (-[2] et -[3]) entre d'une part des représentants politiques et chefs coutumiers congolais et, d'autre part, des dirigeants publics et économiques belges[2]. Cette manifestation a abouti à l'adoption de seize résolutions portant sur l'avenir du Congo belge dont un consensus majeur portant sur la date de l'indépendance du futur État, fixée au , et l'organisation des institutions.
Histoire
[modifier | modifier le code]Soutenue dès 1959 par le Parti congolais du travail[4], rejoint par l'Alliance des Bakongo (ABAKO) et le Parti socialiste belge[4], l'idée d'une conférence bilatérale visant à organiser l'indépendance de la colonie belge fut adoptée à son tour par le Ministre August De Schryver[5], chargé du Congo belge et du Ruanda-Urundi. Ce projet a été le résultat d'une série de causes dont :
- l'activisme populaire de personnalités autonomistes telles que Joseph Kasa-Vubu et Patrice Lumumba[6] ;
- les émeutes de à Léopoldville[5] et la dégradation du climat sécuritaire[4] et le sentiment d'insécurité des colons[7] ;
- le sentiment inéluctable et irréversible du processus général de décolonisation en Afrique et dans le monde[8] ;
- la détérioration de l'économie locale (le déficit du trésor de la colonie passa de 4 à 46 milliards de francs belges entre 1949 et 1960[9]) ;
- l'échec du second voyage du Roi Baudouin au Congo belge, en , qui ne permit pas d'apaiser les tensions politiques dans la colonie[9].
La définition d'une grande concertation belgo-congolaise rejoignait également le sens du discours prononcé par le chef de l'État belge, le , lorsqu'il précisa la volonté du gouvernement « de conduire, sans atermoiements funestes, mais sans précipitation inconsidérée, les populations congolaises à l'indépendance dans la prospérité et la paix »[10].
C'est ainsi que fut annoncée le , par le gouvernement belge, la convocation d'une table ronde avec pour but d'aider la colonie congolaise à passer du régime de tutelle à l'indépendance[3]. L'ouverture solennelle des négociations eut lieu 17 jours plus tard, le avec un discours prononcé par le Premier ministre Gaston Eyskens[11].
Participants aux travaux
[modifier | modifier le code]Parmi les mouvements politiques congolais et leurs membres, peuvent être notamment cités[5] :
- Alliance des Bakongo : Edmond Nzeza-Nlandu, Joseph Kasa-Vubu et Daniel Kanza ;
- Mouvement national congolais-Kalonji : Albert Kalonji et Joseph Ileo ;
- Mouvement national congolais-Lumumba : Patrice Lumumba (libéré de prison peu après le début des travaux) et Victor Nendaka ;
- Confédération des associations tribales du Katanga (CONAKAT) : Moïse Tshombe ;
- Union des Bateke : Pierre Mombele (membre suppléant du PNP).
Outre un certain nombre de modestes chefs coutumiers qui avaient également été conviés pour diminuer la proportion des ténors de l'indépendance[12] dans la délégation congolaise, il faut également souligner la présence du journaliste Joseph Mobutu[12], alors proche du Mouvement national congolais de Patrice Lumumba, qui prendra le pouvoir à Léopoldville en 1965.
Au sein de la partie belge, il peut être cité entre autres[12] les personnalités suivantes :
- le Premier ministre Gaston Eyskens ;
- August De Schryver, ministre du Congo belge et du Ruanda-Urundi ;
- Arthur Gilson, ministre de la Défense nationale ;
- Pierre Harmel, ministre de la Fonction publique ;
- Albert Lilar, vice-Premier ministre ;
- Étienne Davignon, à l'époque jeune attaché aux affaires étrangères ;
- Charles du Bus de Warnaffe, ex-ministre.
Les accords de la conférence de la table ronde
[modifier | modifier le code]Au terme du conclave, il fut adopté notamment les délibérations suivantes[1] :
- la proclamation de l'indépendance du Congo le ;
- les principes de la loi fondamentale congolaise, votée par le parlement belge en ;
- l'organisation structurelle de l'État et la séparation des pouvoirs.
Voir aussi
[modifier | modifier le code]- La chanson Indépendance Cha Cha, créée en marge de la conférence.
- La chanson Table ronde, en commémoration de l'événement.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Joseph Kamanda Kimona-Mbinga, La stabilité du Congo-Kinshasa: enjeux et perspectives, Harmattan, , 344 p. (ISBN 9782747574389, présentation en ligne), p. 40
- Francis Kikassa Mwanalessa, « Des «Dialogues» belgo-congolais aux Dialogues intercongolais 1960-2001 : A la recherche de l'unité et de la légitimité en R.D.C. »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) [PDF], Réseau documentaire international sur la Région des Grands Lacs, ?
- Jules Gérard-Libois, Jean Heinen, Belgique Congo - 1960, 1993.
- Joseph Mbungu Nkandamana, « L'indépendance du Congo belge et l'avènement de Lumumba », 2008.
- Bernard Laba Nzuzi, L'équation congolaise : visiter le passé afin de mieux s'armer pour l'avenir, 2007.
- World Perspective Monde - Université de Sherbrooke, « Proclamation de l'indépendance du Congo belge », 2007.
- Pierre Stéphany, Les années 60 en Belgique, 2006.
- Persée – revues scientifiques, « L'avènement du Congo belge à l'indépendance ».
- Jean I. N. Kanyarwunga, République démocratique du Congo : les générations condamnées : déliquescence.
- CRISP – courrier hebdomadaire no 1 263-1 264, Les conseillers à la Table ronde belgo-congolaise 1989.
- Le Potentiel, « La table ronde de Bruxelles comparée à la conférence nationale souveraine », 1995.
- Le Potentiel, « La Table-Ronde de Bruxelles avait déjoué le plan Van Bilsen », 2006.