n’avait impérieusement attiré l’attention sur la question des ressources alimentaires. Aujourd’hui la pomme de terre entre à elle seule pour près de moitié dans l’alimentation des nations civilisées, et pour plus encore dans certains pays tels que l’Irlande.
Nous ne parlerons ici ni des variétés nombreuses que la culture a successivement obtenues du type primitif graduellement modifié, ni des maladies qui à diverses reprises ont sévi sur cette utile solanée[1]; nous nous bornerons à ajouter en passant que la morelle tubéreuse n’est pas la seule espèce du genre solanum qui produit des tubercules souterrains : il y en a beaucoup d’autres au Pérou, au Mexique, aux Philippines, en Chine, qui présentent ce même phénomène et sont utilisées comme plantes alimentaires. Une autre morelle bien connue, l’aubergine (Solanum melongena), est fort appréciée dans plusieurs de nos départemens méridionaux. La morelle douce-amère, vulgairement connue sous le nom de vigne de Judée, est une plante sarmenteuse dont les rameaux allongés et les grappes de fleurs violettes font parfois un assez joli effet dans les haies et à la lisière des bois. C’est là tout l’éloge qu’on en peut faire, car, somme toute, elle est de triste aspect, sans compter qu’elle est parfaitement vireuse et nauséabonde. Elle renferme de la solanine, et peut, à haute dose, amener le délire, l’affaiblissement de la mémoire, et même détruire en partie l’activité du système nerveux. Tour à tour prônée comme remède à tous les maux, puis dédaigneusement rejetée parmi les plantes absolument inefficaces, elle possède du moins certaines propriétés dépuratives suffisamment constatées. Quant à la morelle proprement dite (morelle noire, mourelle, crève-chien), c’est une détestable plante qui encombre impudemment tous les recoins équivoques ou solitaires. Les uns la déclarent une plante vénéneuse, les autres la mangent en guise d’épinards, ce qui permet de penser que les premiers se trompent ou exagèrent.
Au genre lycopersicum appartient la tomate, qui rachète sa vilaine mine et ses parfums nauséabonds par d’incontestables vertus culinaires. Au genre capsicum enfin se rattachent les pimens, qui sous le nom de piment de Cayenne ou de piment enragé figurent au premier rang sur la liste de ces épices violentes, incendiaires, dont l’emploi excessif sous les climats torrides paraît être un véritable défi porté à toute saine idée sur l’alimentation.
- ↑ C’est en 1830 que s’est montrée la première de ces épidémies sur les bords du Rhin, puis dans toute l’Allemagne. Une seconde parut en 1843 en Amérique, puis gagna l’Europe en 1845. D’autres se sont manifestées depuis sans qu’il ait été possible d’en arrêter la marche. La cause de ces maladies est jusqu’ici demeurée inconnue. Certains physiologistes l’attribuent à l’action d’un champignon presque microscopique, d’autres à une altération des tissus occasionnée par des influences météorologiques anormales.