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Utilisateur:Ps2613/Vie religieuse

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Histoire du concept de religion

Le concept moderne de religion remonte aux transformations de la situation religieuse de l'Europe au XVIe siècle. Jusqu'à cette époque le terme religion au singulier désignait une vertu engageant la relation entre Dieu et l'humanité. Cette religion était sans assise territoriale particulière, tandis que, dans l'usage courant les religions étaient des ordre religieux, c'est a dire des communauté de moines. A partir du XVI le terme religion a commencé a désigner les confessions religieuses chrétiennes issues de la réforme. Celles-ci se présentent comme des organisations ou des sociétés particulière, dans lesquelles on recommande ce qu'il faut faire et ce qu'il faut croire, en fonction d'un credo ou de croyances propre a chaque religion. Cette nouvelle pluralité confessionnelle européenne est devenue la norme a partir de laquelle a été pensée le religieux quel qu'en soit l'époque ou le lieu : il y a ainsi désormais un ordre catholique ou un ordre protestant, le protestantisme se décline lui-même en une mutiplicité d'églises, de confessions ou de religions, et par delà des religions chrétiennes, il est question du Judaïsme, de l'islam, de la religion des romains ou de celle des égyptiens de l'Antiquité.

Cette façon d'envisager des religions a été au coeur de la réflexion de la philosophie puis des sciences de religions. Emile Durkeim a ainsi définit en 1912

La mutation sémantique du terme religion au XVI siècle n'a cependant pas

L'idée de religion dans l'Antiquité gréco-romaine

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Le terme religion est attesté dès les IIIe et IIe siècles av. J.-C. dans les œuvre de Plaute et de Terence[1], cependant, ces textes n'évoquent la religion que de manière allusive et le sens dans lequel le terme latin religio y est employé est incertain. C'est seulement dans les œuvres plus tardives de Lucrèce[2] et de Cicéron[3], rédigées Ier siècle av. J.-C. et fortement marquée par la philosophie grecque, que l'idée de religion commence à être réfléchie et qu'il est possible de trouver des éléments de définition. La caractéristique commune aux différents discours sur la religion à Rome dans la littérature du Ier siècle av. J.-C. est que la religion se présente à la fois comme ce qui concerne les dieux, leur nature et le culte qu'il faut leur rendre et comme une organisation sociale et politique indifférente aux questions sur la nature et l'existence des dieux. La manière théologico-philosophique d'envisager la religion liée à la diffusion des idées grecques dans la société romaine semble ainsi s'opposer à ce qu'il est possible d'envisager comme la religion civile et traditionnelle des Romains.

L’hellénisation de la langue latine

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Virgile entre Clio et Melpomène, tenant en main l'Enéide. Mosaïque du IIIe s.

L'essentiel de ce que nous connaissons de la culture romaine de l'antiquité nous vient d'une littérature latine développée sous l'influence de celle des Grecs. Le développement de la littérature latine est ainsi l'un des aspect d'un phénomène que les historiens désignent comme l'hellénisation de la culture romaine. Pour Paul Veyne, ce que l'on appel la « culture romaine » n'existe pas sans celle des grecs, elle s'est entièrement construite sous son influence pour donner lieu à une culture greco-romaine[4]. Or les sources littéraires latines anciennes, fussent-elles helléniques, sont le seul moyen dont nous disposons aujourd'hui pour tenter de connaître la signification qu'a pu avoir anciennement le terme religion chez les Romains.

Selon José Kany-Turpin : « le latin est mal outillé pour l'abstraction et substitue souvent l'expressif au cognitif. » C'est une langue sans articles, dans laquelle il n'était pas évident de prendre un mot comme un objet afin d'en poser une définition[5]. Il n'y a ainsi pas de définition proprement latine de la religion, comme d'aucune autre notion, puisque le simple fait de prendre la religion pour « quelque chose » est déjà de soi procéder à une abstraction d'une manière que les Latins ont empruntée aux Grecs. Les auteurs latins du Ier siècle av. J.-C., notamment Lucrèce et Cicéron, ont eux-mêmes évoqué le phénomène de transformation de la langue latine en déclarant avoir du inventer des mots pour rendre en latin ce qui avait été exprimé par des auteurs grecs. Lucrèce s'est ainsi plaint de la pauvreté du latin : « Non je n'ignore pas qu'en vers latins il est difficile d'éclaire les obscures découvertes des Grecs, d'autant plus qu'elles requières bien des néologismes car notre langue est pauvre et le sujet nouveau[6]. » Cicéron, quant à lui, s'est vanté de la part qu'il a pris dans l'adaptation de la langue latine à la pensée des Grecs :

« Bien des gens versés dans les doctrines édifiées par les Grecs ne pouvaient pas communiquer leurs connaissances à leurs concitoyens parce qu'ils désespéraient d'exprimer en latin les idées venues de Grèce. J'ai cependant, à ce qu'il me semble, fait faire à notre idiome à cet égard des progrès tels que les Grecs ne l'emportent plus sur nous, même pour ce qui concerne la richesse du vocabulaire. »

— Cicéron, De natura Deorum, I,4.

Alors que Lucrèce, Cicéron et Virgile se sont montrés partisans de la promotion des idées et des lettres grecques chez les Romains, d'autres auteurs latins les ont combattu. Caton l'Ancien (234-149 av. J.-C.) aurait ainsi déclaré : « À propos des Grecs auxquels tu penses, […] voici ce que tu dois considérer comme parole d’oracle : le jour où cette engeance nous donnera sa littérature, elle corrompra tout, et bien plus encore si elle nous envoie ses médecins[7] ». Caton, bien qu'il ait lui-même a contribué à la diffusion de la philosophie stoïcienne dans la société romaine, est réputé être l'auteur latin ayant le plus farouchement défendu la tradition des Romains. Cependant, le terme religio n'est jamais employé dans ce qu'il nous reste de son œuvre. Le terme fait ensuite l'objet de quelques emplois dans les vers de Virgile notamment dans L'Enéide, monument fondateur de la littérature latine, qui raconte les origines grecques des Romains au travers de l'histoire d'Énée[8]. Dans ce qu'il nous reste de la littérature latine, l'œuvre de Cicéron et, dans une moindre mesure, le De rerum natura de Lucrèce font figure d'exception car pour la première fois, de auteurs latins font de la religion l'objet d'un discours et donnent ainsi des éléments de définition. Cependant ces discours sont présentés par leurs auteurs comme la traduction ou l'adaptation au latin de la pensée des grecs. Inversement, des auteurs que l'on peut qualifier de conservateurs ou de défenseurs des traditions romaines tels que Tite-Live (-59-17) et Pline (23-79) ont ensuite employé plus fréquemment le terme religion mais ils n'ont pas laissé de définition ou de discours sur la religion. Ainsi, dans les œuvres latine, l'intérêt pour la nature de la religion est d'autant plus présent que les auteurs déclarent vouloir faire leurs les idées des Grecs.

Au début du IVe siècle Augustin d'Hippone rappelait dans un passage de La Cité de Dieu, que les auteurs latins avaient choisit le mot religio pour traduire le terme grec de Treskeia désignant le culte rendu au divin. Il indiquait aussi que, dans le langage courant de son époque, le terme religion n'était pas nécessairement pris dans le sens qu'avaient voulu lui donner les auteurs latins :

« Le mot de religion semblerait désigner plus distinctement, non toute sorte de culte, mais le culte de Dieu, et c’est pour cela qu’on s’en est servi pour rendre le mot grec treskeia. Toutefois, comme l’usage de notre langue fait dire aux savants aussi bien qu’aux ignorants, qu’il faut garder la religion de la famille, la religion des affections et des relations sociales, il est clair qu’en appliquant ce mot au culte de la déité, on n’évite pas l’équivoque ; et dire que la religion n’est autre chose que le culte de Dieu, ce serait retrancher par une innovation téméraire l’acception reçue, qui comprend dans la religion le respect des liens du sang et de la société humaine. »

— Saint Augustin, La Cité de Dieu, X, 1.

Selon Daniel Dubuisson, ce que manifeste tardivement ce passage de La Cité de Dieu en parlant de religion comme d'un « respect des liens du sang et de la société humaine » est le « sens premier, latin et civique » du terme[9]. Aux dires d'Augustin, ce sens qui s'est maintenu dans la langue latine jusqu'à son époque ne convient pas bien à l'idée qu'il s'agissait de rendre en latin lorsque que fut employé le terme religion pour traduire l'idée grecque de Treskeia.

Le développement d'une idée de religion dans la langue latine a ainsi accompagné le phénomène d'hellénisation de la société romaine. Cette « invention » de la religion a consisté à désigner et à nommer, à la manière des Grecs, un aspect de la culture romaine qui n'apparaissaient pas comme un objet pensable et théorique auparavant. L'origine grecque de l'idée latine de religion n'abolit cependant pas ce que vivaient les Romains avec leur religio. Toutefois, la superposition d'un concept désignant le culte rendu à la déité, à un terme qui renvoie à une attitude civique n'est pas resté sans conséquences sur cette dernière. L'intérêt pour la religion et pour sa nature remonte ainsi à une époque que les historiens envisagent aussi comme marquant le début d'une crise religieuse dans la société romaine. Pour Yves Lehmann cette crise est due à une « manipulation de la religion par le politique » dans la Rome du Ier siècle av. J.-C., l'instrumentalisation de la religion nuisant à sa crédibilité[10]. Cette crise religieuse étant concomitante d'une invention de la religion dans la littérature latine, il est aussi possible de penser que l'évolution de l'attitude des politiques vis-à-vis de la religion est liée la naissance d'une idée de religion chez les Romains : la religion devenant quelque chose, il devient possible de la décrire, de la critiquer, de la défendre, de la combattre, d'en rire ou d'en faire usage.

Les attestations les plus anciennes du terme religion

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alternative de l'image à compléter
Masques de théâtre, mosaïque, Rome, Aventin.

Les emplois les plus anciennement attestés du terme latin religio se trouvent dans des pièces de théâtre traduites ou adaptées du grec par Plaute puis Térence aux IIIe et IIe siècles av. J.-C[11]. Dans ces comédies le terme est employé par des personnages au moment où ils doivent décider s'il convient ou non de faire telle ou telle chose.

Par exemple dans Le Marchand, nous voyons un personnage, Charin, qui déclare solennellement être prêt à tout pour retrouver celle qu’il aime. Il déclare ainsi : « J'y suis résolu, je la chercherai en quelque lieu du monde qu'on l'ait emmenée. Aucun obstacle ne m'arrêtera, ni fleuve, ni montagne, ni mer même. Je ne crains ni la chaleur, ni le froid, ni le vent, ni la grêle ; je supporterai la pluie, j'endurerai la fatigue, le soleil, la soif. Il n'y aura pour moi ni trêve ni repos, ni le jour ni la nuit, non certes, avant que j'aie trouvé ma maîtresse ou la mort ». Il invoque encore la protection des dieux de manière grandiloquente, puis un ami l'interpelle. Il lui fait valoir que le temps et les vents sont menaçants dans la direction qu’il prend alors que le ciel est clair de l'autre côté. Charin reporte aussitôt son départ en déclarant « La religion m’empêchant d’aller de ce côté, je me repli de l’autre. » (« Religionem illic obiecit, recipiam me illuc »). La religion est ici l’interprétation de phénomènes naturels. Dans le Charançon, la religion est invoqué par un personnage qui se serait bien passé d'une invitation a dîner mais qui déclare « il y a la religion, impossible de refuser », (« religio fuit, denegare nolui »). Ici la religion est de l'ordre de la politesse ou de la civilité[1].

Une autre situation dans laquelle la religion est invoquée concerne le serment (iurandi) et se trouve dans l’Andrienne de Térence. Deux comparses s’apprêtent à abandonner un nouveau-né au seuil d'une porte tout en ayant prévu qui le découvrirait. Celui qui tient l'enfant demande à l'autre de le poser à sa place : « pourquoi ne le fais-tu pas toi-même ? » - « Parce que, si par hasard il me faut jurer à mon maître que je ne l'ai pas mis là, je veux pouvoir le faire à l'aise (liquido) ». L'autre s'exécute en lui disant « c'est nouveau, maintenant la religion s'empare de toi instantanément. » (nova nunc religio in te istaec incessit)[1]

Au travers des quelques occurrences anciennes du terme religion qui nous soient parvenues, il semble que la religion relevait à la fois de de la parole donnée, de convenances sociales, de la politesse, et d'interprétation de présages naturels. Les emplois du mot religion dans des œuvres antérieures au Ier siècle av. J.-C. sont cependant très peu nombreux, huit en tout[1], et ils se trouvent tous dans des pièces destinées à faire rire.

Jusque dans les années 1970, ces passages de la littérature latine étaient cités pour conforter une idée de religion romaine de l'ordre de la « crainte superstitieuse » ou du « scrupule de conscience » telle que religio est défini dans les dictionnaires de latin depuis le XIXe siècle[12]. En échange, les termes « scrupule » et « superstition » remplaçaient le plus souvent celui de religio dans les traductions. Ainsi en 1960 Pierre Grimal, spécialiste de littérature latine, écrivait que « Le terme de religio est obscur, il ne désigne pas, d’abord, le culte rendu aux divinités, mais un sentiment assez vague, d’ordre instinctif, d’avoir à s’abstenir d’un acte donné, l’impression confusément ressentie que l’on se trouve face à un danger d’ordre surnaturel. Ce sentiment que l’on éprouve par exemple au moment de fouler un sol consacré, ou de partir en voyage ; il tient du pressentiment, de l’intuition superstitieuse[13]. » Cependant, quelques année plus tard, en 1978, John Scheid déclarait au contraire, dans une étude sur la religion de la Rome tardo-républicaine, que « la crainte superstitieuse individuelle de certains Romains, que tout les citoyens pieux et bien pensant condamnaient » n'a rien a voir avec « la religio proprement dite »[14].

Définition de la religion par Cicéron

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Marcus Tullius Cicero

La définition la plus ancienne que nous possédions de la religion a été donnée par Cicéron (106-43 av. J.-C.), en 84 av. J-C. dans une œuvre de jeunesse. Cicéron écrit ainsi : « La religion est le fait de se soucier (curam) d'une nature supérieure, que l'on appelle divine, et de lui rendre un culte (caeremoniam)[15]. ». Cette définition se trouve dans un passage rhétorique du traité De l'invention oratoire à propos du droit. Elle fait partie d'une liste de définitions brèves, énumérées à l’appui de l’idée que le « droit coutumier » (consuetudine ius) se rapporte au « droit naturel » (naturae ius). L'idée est que le droit coutumier ne dépend pas d’opinions mais est fondé sur ce que la nature nous enseigne. De la même manière, la nature enseigne la religion, la piété, la reconnaissance, la vengeance, le respect et la vérité. Pour Cicéron, ce qui est coutumier chez les Romains doit être considéré comme rationnel être interprété rationnellement, car il relève d'un enseignement de la nature. Ici s’exprime chez Cicéron un point de vue philosophique stoïcien qui défend que la nature entière est régie par des principes rationnels, ces principes sont compris comme un ordonnancement divin et il nous est possible de le connaître par la raison.

« La justice est une disposition de l'âme, qui, sans blesser l'intérêt général, rend à chacun ce qui lui est dû. Elle a sa source dans la nature ; ensuite l'utilité a fait de certaines choses autant de coutumes ; enfin la crainte des lois et la religion ont sanctionné l'ouvrage de la nature, confirmé par l'habitude. Le droit naturel n'est point fondé sur l'opinion ; nous le trouvons gravé dans nos cœurs, comme la religion, la piété, la reconnaissance, la vengeance, le respect et la vérité :

La religion est le soin (curam) d'une nature supérieure, que l'on appelle divine, et le fait de lui rendre un culte.
La piété est l'exact accomplissement de nos devoirs envers nos parents et les bienfaiteurs de notre patrie.
La reconnaissance est le souvenir de l'attachement et de l'affection d'un autre, et le désir de lui rendre service pour service.
La vengeance repousse et punit la violence, l'injustice et tout ce qui peut nous nuire.
Le respect consiste dans les marques de déférence qu'on témoigne aux hommes supérieurs en mérite et en dignité.
La vérité est le récit et comme l'image fidèle du présent, du passé ou de l'avenir.

Le droit fondé sur la coutume consiste, ou dans le développement et la force que l'usage donne à des notions naturelles, comme à la religion, ou dans les choses que nous inspire la nature, confirmées par l'habitude, et que le temps et l'approbation du peuple ont changées en coutumes, comme un contrat, l'équité, un jugement antérieur[16]. »

— Cicéron, De l'invention oratoire, II, 53-54 ou 160-162

Suivant des études récentes sur la religion des Romains, la « cure » dont il est question dans la définition de la religion par Cicéron pourrait se comprendre comme une « occupation pratique » plutôt que comme une « préoccupation » ou un souci spéculatif de la nature divine. En ce sens, selon Catherine Salles, si les Romains prenaient grand soin de leurs dieux, ils ne se préoccupaient pas de leur nature[17]. Un auteur tel que John Scheid insiste quant à lui sur le fait que la religion des Romains se présente d'abord comme une organisation sociale et qu'elle ne s'accompagnait pas d'un discours spéculatif sur les dieux ou la nature du divin[18]. Cependant, la définition de Cicéron introduit de fait l'idée que ce à quoi les Romains rendent un culte par la religion est une « nature supérieure, que l'on appelle divine », et il défend l'idée selon laquelle les coutumes des Romains procèdent d'une nature qui elle-même est régie par les principes divins. En ce sens, Jean Greish, lorsqu'il cite cette première définition de la religion, traduit le mot latin curam par « souci ». Il incite ainsi à comprendre la religion définie par Cicéron comme une « préoccupation » d'ordre métaphysique concernant une « nature divine supérieure ».[19] La définition de la religion par Cicéron, bien qu'elle soit donnée par un Romain et qu'elle soit la plus ancienne connue, aurait ainsi d'emblée le caractère nouveau « des idées venues des Grecs », par rapport à ce qu'il est possible d'appeler rétrospectivement la religion des Romains.

La religion civile chez Cicéron

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Rome tenant en main la victoire.

Dans l'œuvre de Cicéron, en plus des livres dans lesquels il en traite en rapport à un questionnement sur la nature des dieux, certains passages expriment une conception civique de la religion sans égard pour l'idée de nature divine. John Scheid s’appuie sur ces passages pour défendre un concept de « religion civile » qui permettrait une plus juste compréhension de la religion des Romains que celles fondées sur une idée « théologique » de la religion[20].

Dans le Plaidoyer pour Flacus, Cicéron écrit « chaque cité a sa religion, nous avons la notre. »[21] Liant directement la religion à la citoyenneté, l'avocat romain cherche à disqualifier les Grecs et les Juifs qui ont témoigné à charge contre Flacus. Cicéron demande aux magistrats : « Croirez-vous des étrangers ? ». Les grecs sont dénoncés pour leur incapacité au testimoniorum religionem, c'est-à-dire celle de produire un témoignage scrupuleux, religieux, qui ait la valeur du serment qu’un Romain fait devant les dieux. Les juifs, quant à eux, ont, d'après Cicéron, une religion « trop peu digne de la majesté de notre empire, de la splendeur de notre nom, des institutions de nos ancêtres ». C’est donc pour souligner le peu de valeur du témoignage d’un Juif que Cicéron déclare que « chaque cité a sa religion »[21]. ». Comparant Rome à Jérusalem, il signifie que les citoyens de Jérusalem ne sont pas digne de foi, puisque que leur ville n'a pas de splendeur, tandis que du point de vu romain, si Rome domine le monde, c'est grâce à l'excellence religieuse de ses citoyens.

Ce plaidoyer de Cicéron est destiné à des citoyens romains qui jugent un autre citoyen romain selon les lois et la jurisprudence romaine. La manière dont Cicéron envisage ici la religion est sans doute assez conforme à l'opinion générale. Cicéron joue ici sur l'idée selon laquelle la religion vécue dans le respect de la tradition des ancêtres est ce qui garanti le succès de Rome alors qu'ailleurs dans son œuvre il développe des arguments assez critiques envers cette manière d'être religieux, notamment dans le traité De la nature des dieux qu'il écrivit tout à fait à la fin de sa vie.

Dans l'œuvre de Cicéron, il semble que ce soit une double idée de la religion qui se mette en place. D'un côté la religion est liée à une interrogation rationnelle sur la nature et l'existence des dieux, le culte qu'il convient de leur rendre et la place qu'il occupent dans la vie des hommes, d'un autre côté, la religion est une manière de vivre en société, une attitude citoyenne et vertueuse, fondée sur la tradition des ancêtres qui se passe d'autant mieux des interrogations sur la nature et l'existence des dieux qu'elle appelle une fidélité sans faille. Dès lors qu'elle apparaît dans la culture romaine, cette idée philosophico-théologique de la religion se pose en concurrence avec les exigences civiques qui ont trait au culte des dieux.

Attaques de Lucrèce contre la religion

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Épicure le front paré de la couronne des muses, par Raphaël, détail de la fresque de l'École d'Athènes, Vatican.
Cybèle, marbre romain, Ier siècle av. J.-C.

Lucrèce (98-54 av. J.-C.) a fait œuvre de traduction de la pensée d'Épicure. Il s'agit de traduire, non pas au sens moderne de la traduction, mais d'exprimer ou d'interpréter pour les Latins la pensée de cet auteur grec. Avec le De Rerum Natura, Lucrèce poursuit non seulement l'objectif de faire connaître la pensée d'Épicure mais aussi celui de détruire ce qu'il appelle « religion ». Faisant l’apologie du poème qu'il compose il écrit : « Joie d'aller aux sources vierges boire à longs traits, joie de cueillir des fleurs nouvelles, de glaner pour ma tête la couronne merveilleuse dont jamais les muses n'ont paré aucun front. Car j'enseigne de grandes choses : d'abord je viens défaire les nœuds dont la religion nous entrave, et puis, sur un sujet obscur je compose des vers si lumineux, imprégnant tout de charmes poétiques[22] ». Pour Lucrèce, la religion est contraire à la nature divine dont Cicéron défend qu’elle est issue, et il ne sert a rien de chercher a obtenir la faveur des dieux, la théologie épicurienne niant toute implication des dieux dans les affaires humaines[23] :

« La nature absolue des dieux doit tout entière
jouir de l’immortalité dans la paix suprême,
à l’écart, bien loin des choses de notre monde,
exempte de souffrance, exempte de périls,
forte de ses ressources, sans nul besoin de nous,
elle est insensible aux faveurs, inaccessible à la colère[24]. »

Pour Lucrèce, la religion est à la fois ce qui engendre les crimes et les souffrances dans le monde et ce qui empêche l'humanité d'accéder à la véritable nature des dieux :

« La vie humaine, spectacle répugnant gisait
sur la terre, écrasée sous le poids de la religion,
dont la tête surgie des régions célestes
menaçait les mortels de son regard hideux,
quand pour la première fois un homme, un Grec,
osa la regarder en face et l’affronter enfin[25]. »

Lucrèce parle d'Épicure comme de celui qui, ayant affronté et terrassé la religion, permis d'accéder à la nature divine. Il « força les verrous de la nature » et « parcourra par l’esprit l’univers infini ». Épicure revient vainqueur de son parcours spirituel, « Ainsi la religion est soumise à son tour, piétinée, victoire qui nous élève vers le ciel ».

La religion que combat Lucrèce est symbolisée par le culte de Cybèle, déesse qui a chez lui une laideur diamétralement opposée à la beauté de Vénus. Cybèle est une déesse d'origine orientale dont le culte s'est d'abord répandu chez les Grecs puis chez les Romains. Ayant enfanté Jupiter, elle est considérée comme la Mère de tous les dieux. Lucrèce décrit sa statue et le cortège qui défilait à Rome le premier jour des fêtes de cette déesse[26] : « Une couronne de rempart ceint le sommet de sa tête car la terre en ses hauteur est fortifiée de villes. Encore aujourd'hui, quand, terrifiante procession, sa statue est portée à travers les terres immenses, la divine Mère est parée de cet emblème. (II, 605-609) » Lucrèce décrit ensuite les processions violentes qui accompagnent ce culte : « Ils brandissent des armes emblèmes de leur fureur, et le cœur impie, l'âme mauvaise de la foule se laisse terrifier par la puissance de la déesse. (II, 621-623) » Lucrèce indique que selon les mythes des Grecs, ces procession armées et leur fracas visent à empêcher Saturne, le père de Jupiter, « de croquer le marmot (Jupiter) et d'infliger à sa mère (Cybèle) une blessure éternelle (II, 638-639) ». Mais pour Lucrèce ces processions pourraient aussi symboliser ce qu'il considère comme l'ordre de Cybèle : « défendre la partie par les armes et le courage, être la sauvegarde et l'honneur de ses parents. (II, 641-643) » La description allégorique de Cybèle renvoie ainsi autant aux mythes des Grecs sur les dieux qu'à ce qui par ailleurs peut être considéré comme constitutif de la religion des Romains : la cité et ses remparts, la piété filiale et les vertus héroïques des guerriers.

La théorie des trois genres de théologies

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L'empereur Auguste vêtu de la toge de pontife suprême, dit « Auguste de la via Labicana », Rome, env. 20 av. J.-C.

Au cours du Ier siècle av. J.-C., différents intellectuels latins ayant fait leurs les arguments philosophiques des grecs, ont tenté de rendre compte de la légitimité de la religion civile des Romains face, d'une part, aux pratiques mystiques d'interprétation des mythes et, d'autre part, aux courants rationalistes de la philosophie. Les écrits de Scævola, un pontife romain du début du Ier siècle av. J.-C., ceux de Varron ainsi que le traité De la nature des dieux de Cicéron ont en commun de distinguer trois manières comprendre la nature des dieux et les cultes qui leur sont rendus. La première se fonde sur les mythes et leurs interprétations, la seconde est la religion civile et traditionnelle des Romains, la troisième est une approche rationnelle du divin principalement fondée sur l'observation de la nature.

Dans les Antiquités Romaines, Denys d'Halicarnasse, observateur grec de la société romaine, identifie le problème que posait la confrontation de la religion civile des Romain aux pratiques théologiques et philosophiques venues de Grèce. Se chargeant de faire l'apologie de la religion des romains auprès d'un lectorat Grec qui les méprisait, Denys défend l'idée que le système d'organisation sociale et politique des Romains, qu'il décrit en racontant comment il a été mis en place par Romulus puis Numa Pompilius, est plus utile à l'humanité que la théologie des Grecs :

« Qu’on ne s’imagine pas cependant que je ne sache pas qu’une partie des mythes grecs est utile à l'humanité, soit en expliquant, comme ils le font, les travaux de la nature par des allégories, soit qu’ils sont conçus comme consolation aux malheurs humains, soit parce qu’ils libèrent l'esprit de ses agitations et de ses terreurs et le purifie des idées peu sensées, soit parce qu’ils ont été inventés pour tout autre but utile (ώφελια). Mais bien que je sache tout cela aussi bien que n’importe qui, néanmoins mon attitude envers les mythes est une attitude de méfiance, et je suis plus incliné à accepter la théologie des Romains (Ρωμαίων θεολγίαν), quand je considère que les avantages des mythes grecs sont minces et ne peuvent pas aider (ώφελέω) beaucoup de monde, mais seulement ceux qui se sont interrogés sur le but pour lequel ils sont conçus ; et cette attitude philosophique est partagée par peu de gens. »

— Denys D'Halicarnasse, Les Antiquité romaines, II, 20,1-2.

le Pontife Scævola a proposé une classification des dieux romains, distinguant les dieux « introduits par les poètes », ceux « introduits pas les philosophes » et ceux « introduits par les hommes d'Etat ». Selon le témoignage que donne Augustin de la pensée de Scaevola, « le premier genre n’est que badinage, parce qu’il comprend beaucoup de fictions indignes des dieux. Le deuxième ne convient pas aux cités, parce qu’il contient des choses superflues, certaines même dont la connaissance serait nuisible au peuple[27]. » Seul le troisième genre, celui des dieux introduites par les chef d'Etat, mérite qu'on s'y intéresse. Ainsi, en distinguant trois genre de dieux, Scævola indiquait ceux qu'il fallait honorer pour le bien de la cité, manière de signifier que si les Grecs ont des problèmes avec leur dieux à cause de leur poètes et de leur philosophes, cela ne doit pas concerner les Romains.

Un peu après Scaevola, Varron a distingué trois genres de théologies, la théologie mythique, la théologie physique et la théologie civile. En introduisant l'ensemble des sources se rapportant à ce qu'il appelle « la théologie tripartite de Varron », Jean Pépin remarquait que ces trois théologies se posaient comme des alternatives les unes aux autres, c'est-à-dire qu'il faut choisir entre la théologie mystique, la théologie politique et la théologie physique[28]. De fait, il ne s'agit pas d'une théologie qui se diviserait en trois domaines complémentaires comme il existait d'autres tripartitions de la philosophie ou de la théologie[29], mais plutôt d'une tentative de comprendre comment trois approches théologiques opposées peuvent s'articuler, et, le cas échéant, de savoir la quelle est la meilleure. Commentant la théorie des trois genres de théologies de Varron, Augustin d'Hippone relève que Varron n'a pas osé condamner une théologie civile qu'il ne jugeait pas meilleure que la théologie mythique ou bien qu'il n'a pas eu la liberté de parole qui lui aurait permis de la « mettre en pièce » comme il la fait pour la théologie mythique[30]. Ainsi, Varron n'aurait pas partagé pas les convictions populaires liées aux dieux civils mais les aurait ménagé pour des motifs qu'il n'avoue pas. Quatre siècle plus tard, pour Augustin, il ne fait aucun doute que la religion civile et la théologie mythique doivent être rejetées sans ménagement tandis que le christianisme trouve sa place « dans le domaine de la théologie physique et du rationalisme philosophique »[31].

Enfin dans La nature des dieux de Cicéron sont confrontés trois points de vues philosophiques sur la religion. Le premier est celui des épicuriens, courant philosophique qui se caractérise par l'importance du rôle qu'y joue le maître. C'est parce que le disciple lui reconnaît une expérience spirituelle de la vérité qu'il se met a son enseignement et cherche à vivre la même expérience. Les épicuriens ne tiennent pas les mythes pour des histoires vraies, mais y voient des allégories divinement inspirées. Face au disciple épicurien, un philosophe stoïcien cherche l'accord entre ce que la nature enseigne du divin et les pratiques religieuses concrètes. Le dialogue se déroule chez Cotta, un pontife qui défend la religion civile. Tandis que ce dernier montre un profond mépris pour l'interprétation de mythes qu'il juge indignes, il adopte un point de vue philosophique radicalement sceptique, pour montrer que l'on ne peut rien démontrer sur l'existence des dieux. Après avoir soutenu le stoïcien lorsqu'il s'agissait de répondre à l'épicurien, il entreprend de démonter tous l'argumentaire stoïcien. Le scepticisme de Cotta s'articule cependant à une attitude civique et patriote, exigeant une fidélité sans faille aux dieux de la cité et à la tradition, indifférente au doute comme de la recherche de preuves. L'école de philosophie qui d'après Cicéron soutient cette pensée à la fois sceptique en philosophie et fidèle en religion est celle des Académiciens. Cicéron réputé avoir été sceptique, se prononce dans ce traité, plutôt en faveur des arguments stoïciens[32].

Cicéron semble avoir cherché comme Varron, un accord entre la religion civile et la philosophie parce que selon eux, la religion civile est nécessaire à la préservation du lien sociale bien qu'elle ne paraisse pas rationnelle. Leur effort consiste à établir la rationalité de la religion civile mais, dans le même temps, ils mettent en évidence les défauts de cette rationalité. Ainsi, dans le traité De la Nature des dieux, le dialogue entre le stoïcien, Balbus, qui défend une approche rationnelle de la religion et le Pontife Cotta qui défend la religion des ancêtres, tourne court. Cotta adresse ce reproche à Balbus :

« Si tu as voulu démontrer, avec force arguments, l’existence des dieux, c’est que tu n’étais pas sûr qu’elle était aussi évidente que tu l’aurais voulu. Pour moi, assurément une chose suffit, c'est la tradition de nos ancêtres (nobis maioris nostros tradidisse). Mais tu méprises leur autorité et tu combats avec la raison. Permets donc que ma raison rivalise avec la tienne. »

— Cicéron, De la Nature des dieux, III, 4,9

Après l'exposé de Cotta, dans lequel il défend un point de vue totalement sceptique et démonte tous les arguments de Balbus en faveur de la religion, Balbus lui répond de manière cinglante :

« Dans cette discussion, j’ai combattu pour les biens les plus chers (pro aris et focis[33]), pour les temples des dieux et les sanctuaires, ainsi que pour les murs de la Cité que vous autres, Pontifes, vous considérez comme sacrés, et vous mettez un plus grand soin à défendre la religion de la cité (urbem religione) qu’en la ceignant de fortifications. Tant que je vivrai, je considérerai comme un sacrilège de renoncer à ces valeurs »

— Cicéron, De la Nature des dieux, III, 40, 94

Évolution de la religiosité dans l'Antiquité tardive

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A la fin du IIIe siècle, Lactance avait contesté l'étymologie relegere proposée par Cicéron. Pour Lactance, « C’est par le lien de piété que nous sommes reliés (religati) et rattachés (obstetrici) à Dieu. C’est de là que religion a reçu son nom, et non pas, comme Cicéron l’a expliqué, du mot relegere. »[34] Selon Pierre Gisel, le motif du lien mis en avant dans l'étymologie de Lactance correspond à l'évolution de la religiosité dans l'Antiquité tardive.[35] Le christianisme fait partie des composantes de la vie religieuse de cette époque, mais c'est la société dans son ensemble qui est passée d'une religion essentiellement rituelle, ce que soulignait l'étymologie relegere donnée par Cicéron, à une religion ou une philosophie de l'interrogation sur soi en « lien » avec ce qui n'est pas soi. Ainsi, la préférence pour l'étymologie religare soulignerai que l'individu n'est plus seulement une part du cosmos incité à la sagesse pour préserver l'équilibre du tout, il est membre d'une communauté qui n'est pas toute la cité, il a son réseau de relation, il peut se convertir, avoir ses dieux ou son Dieu : « dans l'Antiquité tardive, la nouvelle forme du religieux dont participe le christianisme est donc centrée sur l'humain, l'individu ou la personne, et le divin lui est directement rapporté ; réciproquement d'ailleurs : l'humain est polarisé par le divin. »[35]

Le soleil invicible, la lune et Jupiter, Rome seconde moitié du IIe siècle.

Selon Henri-Irénée Marrou : « Le paganisme classique exprimait son sens du Sacré par la notion neutre de divin (το θειον), dans cette nouvelle phase la conscience religieuse est envahie par l’idée de Dieu (ο Θεος) un absolu, un transcendant de caractère personnel, principe et fin de toutes choses, objet d’adoration et d’amour[36]. » Le pouvoir de l’Empereur est investi d’une dimension sacrée qui n’est plus seulement celle de la religion traditionnelle de l’époque républicaine mais du sacré transcendant de Dieu. « Le caractère sacré presque universellement reconnu au souverain est en relation directe avec l’idée plus ou moins élevée que l’on se fait de la divinité elle-même[36]. À partir de 285, Dioclétien a réformé l'institutions politiques de l'Empire, notamment par la mise en place la tétrarchie. Cette reprise en main du pouvoir a eut un succès indéniable puisqu’elle permis le maintien de l’Empire en Orient jusque en 1435. Elle se fait avec beaucoup de violences dont les persécutions lancées contre les chrétiens sont un aspect. C’est l’articulation du pouvoir impérial à une idée « païenne » de Dieu qui justifie sa violence. S’identifiant non plus aux « petits dieux du panthéon » mais à la majesté du Dieu unique, Dioclétien et ses successeurs seront investis de la puissance du Dieu suprême, celle de Jupiter Exsuperantissimus pour Dioclétien et celle du Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob pour Constantin.

Sous le règne de Constantin, Eusèbe de Césarée fut le principal théoricien chrétien d'une pensée du pouvoir impérial qui prolonge la pensée païenne du pouvoir. Dans ses Louanges de Constantin il considère l'Empereur comme l'image du Christ sur terre. Cependant, à la même époque, Lactance envisageait un pouvoir politique totalement désacralisé dans les Institutions divines. Un siècle plus tard, Augustin d'Hippone développera le thème du mélange et de la séparation deux cités, la cité terrestre et la cité céleste qui s'oppose à une théologie politique eusébienne devenue caduque ainsi qu'à toutes formes de sacralisation du pouvoir politique.

La religion des Pères de l'Eglise

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L'adoption du terme religion dans le vocabulaire chrétien

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Alors que le terme religion ne fait pas partie du vocabulaire du judaïsme ou du christianisme, des auteurs chrétiens du IIe siècle ont commencé à l'employer pour répondre à l'accusation d'irreligion ou de crime contre la religion. Ainsi, en 197, Tertullien se plaignait de ces accusations : « Nous sommes les seuls à qui l'on refuse le droit de posséder une religion à nous. Nous offensons les Romains et nous ne sommes pas regardés comme des Romains, parce que nous adorons un Dieu qui n'est pas celui des Romains (Apol. 24, 10) » Cependant, dans l'Empire Romain, avoir « une religion », c'est aussi respecter les obligation sociales et civiques de la religion. Durant l'antiquité tardive, l'axiome selon lequel « la vénération des dieux romains, si elle s’accomplissait selon les règles, garantissait la réussite de Rome » restait difficilement réfutable, même pour les chrétiens de la fin du Ve siècle.[37] A partir du IIIe siècle, la raison principales de persécutions religieuses légales et officielles fut ainsi que les devoirs de la religion romaine étaient aussi des devoirs civiques dont le respect n'était pas compatible avec le fait d'être juif ou chrétien.[38] Se distinguant de plus en plus clairement des juifs, les chrétiens ne jouissent pas officiellement du régime d'exception qui leur avait été accordé et qui les exemptait des devoir religieux officiels. Il se développe cependant assez tranquillement en dehors des épisodes de répressions.

Alors que le christianisme ne concerne encore qu'une petite minorité de personnes dans l'Empire, il focalise sur lui l'attention et les débats, ce qui transforme radicalement la perception du paysage religieux : la question que se pose toutes les élites est alors celle de savoir si l'on devient chrétien ou si l'on reste « païens ». Être païens n'est rien d'autre que le fait de ne pas être juif ou chrétiens. Le paganisme a ainsi commencé à apparaître comme une religion parce que le judaïsme et le christianisme se sont inscrits dans l'univers religieux de l'Antiquité tardive en étant très différents et très nouveaux par rapports aux autre « religions » ou cultes qui formaient ensemble le tout organique de la religio gréco-romaine. Par suite, la diversité des cultes antiques, autres que celle des juifs et des chrétiens se trouve résorbée en une seule figure : le paganisme. La littérature apologétique joue beaucoup sur le clivage qui se met alors en place, Tertullien et Arnobe parlant sans cesse de « notre religion » et « votre religion ». Et il cherchent à montrer que le christianisme est « vraie religion » contrairement à la religion au nom de laquelle se font les persécutions :

« S'il est certain que vos dieux n'existent pas, il est certain que votre religion n'existe pas non plus ; et s'il est certain que votre religion n'en est pas une, parce que vos dieux n'existent pas, il est certain aussi que nous ne sommes pas non plus coupables de lèse-religion. Mais, au contraire, c'est sur vous que retombera le reproche que vous nous faites, sur vous qui adorez le mensonge et qui, non contents de négliger la vraie religion du vrai Dieu, allez jusqu'à la combattre, et qui vous rendez ainsi véritablement coupables du crime d'une véritable impiété »

— Tertullien, Apologétique, 24, 9.

Le thème de « la vraie religion » chez les Pères de l'Église

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Dieu créant l'univers

La réflexion sur la nature de la religion par des auteurs chrétiens latins a été centrée sur le thème de la « vraie religion ». Il s'agit autant de montrer que le christianisme est vrai contrairement au paganisme, que de réfléchir aux conditions auxquelles « la religion », en tant qu'attitude ou vertu présente dans toute l'humanité depuis les origines, peut être vraie. Les pères de l'Église sont dans leur ensemble des convertis et leur culture est paradoxalement celle du paganisme qu'il combattent. D'un côté ils rejettent le paganisme, d'un autre ils inculture complètement le christianisme dans les cadres d'une pensée païenne qu'il n'entendent pas rejeter mais prolonger. Ainsi saint Augustin fait remonter sa conversion au christianisme à la lecture d'une œuvre « païenne », l'Hortentius de Cicéron. Le thème de la vraie religion chez les Père de l'Église recèle par conséquent la même ambiguïté que la situation de ces auteurs à la fois païens et opposés au paganisme, car la vraie religion est pour eux le christianisme par opposition à la fausse religion des païens, mais c'est aussi une religion vraie de toute antiquité que l'on trouve chez les païens comme chez les chrétiens, en particulier dans la philosophie païenne.

L'un des premiers a avoir parlé de « vraie religion » a été Minucius Felix dans L'Octavius.[39] Rien ne certifie dans ce texte probablement rédigé au tournant des IIe et IIIe siècles que son auteur ait été chrétien. Minucius Félix est cependant considéré comme un Père de l'Église, sa philosophie du Logos créateur étant semblable a celle développée par les auteurs chrétiens de l'Antiquité. Comme l'avait fait le philosophe chrétien Justin au cours du IIe siècle, Minucius Félix envisageait que le monde répond d'un ordre rationnel, celui de la création. Cet ordre c'est le Logos, terme qui en grec peut signfier « raison ». Le Logos est identifié au Christ, Verbe de Dieu, par lequel tout a été fait. Cet axiome fondamental du christianisme est clairement exprimé dans Prologue de l'évangile selon Jean rédigé au tournant des Ier et IIe siècles. Dans ce prologue, le terme latin « Verbe » correspond au grec « Logos » :

« Au commencement était le Verbe, et le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu. Il était au commencement auprès de Dieu. Par lui, tout s'est fait, et rien de ce qui s'est fait ne s'est fait sans lui. En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes ; la lumière brille dans les ténèbres, et les ténèbres ne l'ont pas arrêtée. »

— Evangile de Jean, I, 1-5.

La conséquence logique de ce principe est qu'une connaissance rationnelle de Dieu et une relation avec Dieu vécue dans la vérité est possible dans toute la création. Cette relation à Dieu guidée par le Logos peut donc se trouver même avant ou en dehors d'une annonce de l'Évangile par les chrétiens, et c'est cela qui est appelée « vraie religion ». Augustin précise ainsi dans les rétractations, qu'il considère que la vraie religion a existé dès l'origine du genre humaine avec la philosophie et que cette vraie religion prend aujourd'hui le nom de chrétienne :

« Quand j’ai ajouté: « C’est de notre temps la religion chrétienne dont la connaissance et la pratique fait la certitude et la sécurité du salut » j’ai eu égard au nom et non à la chose qu’il exprime. Car ce qui se nomme aujourd’hui religion chrétienne, existait dans l’antiquité et dès l’origine du genre humain jusqu’à ce que le Christ s’incarnât, et c’est de lui que la vraie religion qui existait déjà, commença à s’appeler chrétienne. [...] non pas qu’elle n’ait point existé dans les temps antérieurs, mais parce qu’elle a reçu ce nom dans les temps postérieurs. »

— Augustin, Les rétractations, I, XIII, 3

En développant le thème de la vraie religion, Lactance[40] puis Augustin ont défendu la thèse d'une identité entre religion et philosophie. Augustin écrit ainsi : « Nous croyons et nous enseignons, ceci est le principe de l'humanité que la philosophie, c'est-à-dire l'amour de la sagesse, n'est autre que la vraie religion[41] ». Prise en ce sens, « la vraie religion » n'est pas exclusive au christianisme, car elle se trouve partout où il y a « amour de la Sagesse ».

L'enjeu principal de la thèse de l'identité entre philosophie et vraie religion est de défendre la possibilité de prêter à la religion la dimension rationnelle de la philosophie et à la philosophie la dimension populaire de la religion. Il s'agit de penser une manière de vivre selon la raison qui ne soit pas réservée à une élite fréquentant les écoles de philosophie et une manière d'être religieux qui soit conforme à la raison. Augustin considère que cette vraie religion est une manière de vivre dans la vérité et d'être heureux :

« La seule voie qui nous conduise sûrement a une vie bonne et heureuse est la vraie religion, celle qui adore un seul Dieu et reconnaît en lui avec une piété éclairée, l'auteur de la nature entière, en qui tout commence, se perfectionne et se conserve dans un ordre parfait. »

— Saint Augustin, De vera Religione, I,1.

La religion et les religions dans l'occident médiéval latin

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La catégorie de religion n'a pas fait l'objet de grands débats à l'époque médiévale. Au singulier, « La religion », désigne la relation de l'humanité à Dieu, tandis que, dans le langage courant, « les religions » sont des communautés ou l'on vit selon une règle en aspirant à la perfection et au bonheur. C'est de cette signification que relève le terme religion dans l'expression « entrer en religion », c'est-à-dire entrer dans une communauté de moines.[42] La religion est la même dans toutes les « religions », c'est-à-dire les monastères, il n'est jamais question à cette époque de « religions » pour désigner des confessions religieuses tel que l'on entend ce mot aujourd'hui.

Notker le Bègue, moine de l'abbaye de Saint-Gall, Xe siècle

La vraie religion ayant été identifiée à la philosophie, et la vie religieuse étant par excellence la vie au monastère, les « religions » du Moyen Âge se présentent comme le prolongement des écoles de philosophie de l'Antiquité.[43]Gilbert Dahan rappelle a ce sujet que « pendant tout le haut Moyen Âge, l'enseignement et la transmission de la culture se font dans le cadre des monastères. »[44] A partir du XIe siècle ces « religions » ou monastères commenceront à céder la place de principaux centres de la vie intellectuelle aux écoles cathédrales, desquelles naîtront, à partir du XIIe siècle, les universités[45].

Les institutions de la vie intellectuelle ont évolué avec l'organisation sociale et politique de l'ancien Empire romain. La « renaissance carolingienne » au IXe siècle a été marquée d'une réforme scolaire qui a eut pour effet, d'une part, de ramener la philosophie à la cour de l'empereur avec la création de l'école du Palais, et de financer la création de très grandes Abbayes, telles tels que celles de Saint-Gall et de Saint-Riquier.[46] Le mouvement se poursuit avec la création de l'Abbaye de Cluny au début du Xe siècle qui deviendra la plus grande de tout l'Occident chrétien.

Un cours de philosophie à Paris, XIVe siècle

Avec la renaissance du XIIe siècle », les centres intellectuels se sont déplacés des campagnes vers les villes. Autour de cathédrales de plus en plus grandes ses sont ainsi développées des réseaux d'étude et d'enseignement. Peu institutionnalisés ils sont appelés « Écoles » telles que l'École de Chartres, celle de Paris, de Laon au nord ou encore de Toulouse au sud[47]. Ces écoles cathédrale sont devenues des universités lorsque que s'est mise en place la structure institutionnelle de l'« universitas studiorum » qui a fédéré la totalité des centres d'études d'une ville.[45] L'université donnait une identité collective aux « gens d'études », leur accordait un statut juridique proche de celui des clercs et garantissait leurs diplômes.[48] La première université a été fondée à Bologne au XIe siècle, celle de Paris au XIIe siècle. Une chronique médiévale de langue Syriaque, donne le témoignage du moine nestorien Raban Sauma à l'ambassadeurs des Mongoles sur sa visite à Paris en 1287 :

« Il y avait à Paris trente mille étudiants qui s'occupaient de l'étude des livres ecclésiastiques d'instruction, [...] et aussi de savoirs profanes ; ils étudiaient la sagesse, c'est-à-dire la philosophie, et la rhétorique, la médecine, la géométrie, l'arithmétique et l'astronomie ; ils étaient continuellement occupés à écrire, et tous ces élèves recevaient du roi de l'argent pour subsister.[49] »

La naissance des universités a été accompagnée des premiers développements du débat sur le rapport entre foi et raison.[50] Cette problématique deviendra plus tard la question centrale et inévitable de toute réflexion sur la religion, la religion paraissant de plus en plus difficile à concilier avec la rationalité philosophique. Cependant, à l'époque où le problème du rapport entre foi et raison commence à être formulé, la catégorie de religion n'y joue pas un grand rôle. Ainsi, au XIIIe siècle, Thomas d'Aquin a traité d'un vingtaine de questions sur la religion dans une section éloignée de sa très complète Somme de théologie.[51] Thomas d'Aquin parle de cette religion comme d'une vertu. Pour définir cette vertu, il reprend les éléments de définition que l'on trouve chez Cicéron et chez Augustin, et comprenant ainsi « la religion comme « culte » rendu à une puissance supérieur que l'on appelle divine[51] ». Thomas se demande demande ensuite si la religion est une « vertu morale » ou une « vertu théologale ». En clair, la question est de savoir si la religion est le fait de Dieu ou celui de l'humanité. Si c'est une vertu morale, il s'agit d'une disposition humaine à faire la volonté de Dieu, si c'est une vertu théologale, il s'agit d'une assistance que Dieu donne pour faire sa volonté. La réponse de Thomas est que la religion est une vertu morale, elle est donc une disposition humaine ou naturelle à faire la volonté de Dieu et non pas quelque chose que l'on reçoit directement de Dieu ou que l'on fait par une initiative divine.[52]. L'enjeu du débat est celui de la possibilité d'une pratique dévoyée de la religion. Thomas pense donc la religion dans l'ordre des pratiques humaines, cette religion n'a pas d'assise territoriale ou historique particulière, elle se trouve partout où est l'humanité[53].

La religion entre islam et christianisme

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La chrétienté et l'Islam

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La conquête arabe
  • Arabie au temps de Mahomet 612 à 632
  • Conquête des califes de 632 à 655
  • Conquête des Omeyades de 661 à 750
  • Un chrétien et un musulman jouant aux échecs en Andalousie, extrait du Livre des jeux d'Alphonse X de Castille, vers 1285.
    Bataille

    Au VIIe siècle un vaste empire sous domination arabe s'est constitué. Au VIIIe siècle, il s'étend vers l'est avec le Califat de Bagdad d'abord dirigé par les Ommeyades puis par les abbassides, la Perse, et au delà de l'Hindus. Vers l'ouest, il couvre tout le sud méditerranéen et jusqu'au royaume le plus occidental du monde musulman, celui de l'Espagne al-Andalus et du Maroc. Depuis cette époque et jusqu'à aujourd'hui la géographie de la région comprise entre l'Europe, l'Afrique et le Moyen-Orient se caractérise par la coexistence de deux grands ensembles que l'on appelle chrétienté et Islam.

    Rémi Brague estime que, sur un plan militaire, la conquête arabe fut semblable a beaucoup d'autres formations d'empire, ni plus ni moins rapide ou violente. Ce qui lui donne un caractère singulier c'est la façon dont elle a donné lieu à une culture, une littérature et une religion qui s'est formée et imposée dans l'espace de cette conquête. Au moment de leur conquête les arabes ne possédaient pas ce qui est devenu par la suite la littérature, la langue et la culture arabe. Or, dans les cas de conquêtes où un peuple peu équipé sur un plan culturel s'emparait de régions où la littérature et les arts étaient fort développés, tel que les Romains ayant vaincu les Grecs ou plus tard les tribus turques ayant conquis la Perse, les vainqueurs ont adoptés la culture et les lettres des vaincus. Dans le cas des arabes, ils ont forgé leur propre culture et l'ont imposées dans l'espace conquis.

    Historiens et islamologues distinguent l'islam, écrit avec une minuscule, qui désigne la religion des musulmans, de l'Islam, avec majuscule, qui est « la civilisation marquée par l'islam, mais dont la longue histoire et la vaste géographie couvre des phénomènes qui n'ont pas grand chose a voir avec la religion ».[54] La distinction entre islam et Islam est équivalente à celle que l'on peut faire entre christianisme et chrétienté.

    La perception de deux ensembles distincts, l'un identifié à l'islam, l'autre au christianisme, s'est construite très progressivement dans l’histoire et ces deux ensembles furent a tous moments marqués d'une grande diversité. Entre les IXe et XVIe siècles, les wisigoths, les Francs, les Germains, les Normands, les Anglais, Lombards, les Byzantins ou les vénitiens qui se sont affrontés, alliés ou succédés sur les territoires européens ont aussi eux des rapports différenciés avec les arabes, les Almohades, les Seldjoukides, les Ottomans, les Mamelouks qui eux-mêmes étaient loins de former un bloc homogène. D'autre part L'Islam comme civilisation comprend une certaine diversité religieuse dans la mesure où, au début et pendant longtemps, la majorité de la population des territoires gouvernés par ceux dont la religion est l'islam, n'étaient pas musulmans, mais juifs, chrétiens, zoroastriens ou autre. Ce n'est pas le cas chez les européens qui étaient dans leur grande majorité chrétiens avec un d'importantes communautés juives, tandis que : « Ce n'est que de façon exceptionnelle et provisoire que des musulmans vivent en terre chrétienne[55] ». .

    Lorsque fut lancé le premier appel à la croisade, il ne s'agissait pas pour les chrétiens de se battre contre des musulmans ou l'islam dont ils ignoraient presque tout. C'est plutôt l'arrivé en 1037 des tribus Turco-Mongoles dans la région qui va de la Perse à la Méditerranée qui provoqua l'évènement. Ceux-ci renversèrent le dernier des califes abbassides de Bagdad et repoussèrent les Byzantins. Leur arrivé coupa brutalement les routes du pèlerinage vers Jérusalem dont l'accès était possible du temps des arabes. les Seldjoukides, la tribu dominante, installent leur ligné à la tête d'un nouvel empire en s'affirmant comme des souverains musulmans, ce qui n'en fit pas pour autant les alliés des arabes.

    Outre qu'il s'agissait d'escorter les pèlerins vers leur but, la noblesse occidentale était appelée à se croiser pour soutenir les chrétiens d'Orient sur ce qui reste vue comme une limite de l'Empire hérité des Romains. Les francs et les germains se feront concurrence pour suppléer à l'Empereur d'Orient, installant pour un temps leurs royaumes dans ce qu'il restait de l'Empire Byzantin et les territoires qu'il disputaient aux Arabes. Le réçit de voyage de ... informe sur la situation générale de l'époque. Ayant accompli trois fois le pèlerinage de la Mecque depuis l'Espagne, il a traversé plusieurs fois la méditerranée en plein dans l'époque où l'on situe les croisades et il évoquent ainsi la situation :

    « Les Chrétiens font payer sur leur territoire aux Musulmans une taxe, qui est appliquée en toute bonne foi. Mais les marchands Chrétiens à leur tour, paient en territoire musulman une taxe sur leurs marchandises. L’entente est entre eux parfaite et l’équité est observée en toute circonstance. Les gens de guerre sont occupés à leur guerre, le peuple demeure en paix et les biens de ce monde vont à celui qui est vainqueur. Telle est la conduite des gens de ce pays dans leur guerre. »

    A partir du XIIIe siècle, la population des régions dominées par des souverains musulmans était devenue majoritairement musulmane et le fait qu'un souverain soient chrétiens ou musulmans à commencé a jouer un rôle plus important dans le jeu des alliances et des rivalités entre souverains et armées. Au XVIe siècle, l'alliance entre un souverain musulman et un souverain chrétien pour affronter un tiers devient de moins en moins concevable ou avouable. Ainsi François Ier conclue une alliance sans acte formel avec le sultan turc dont il hébergea la flotte à ... dans le cadre de leur lutte commune contre l'Empereur Charles Quint. L'achèvement de la Reconquista espagnole avec la chute de l'Emirat de Grenade en 1492, le siège de Vienne en 1529 ou la bataille de Lépante 1571 furent des étapes décisives dans l'évolutions des rapports entre chrétienté et Islam. Côté européen, l'heure était à l'union des souverains chrétiens contre l'envahisseur Turc, tandis que les victoires remportée à la faveur de certaines solidarités entre souverains européens étaient glorifiées par la papauté. Il faut cependant encore attendre le XVIIe siècle pour que les termes « musulmans » et « islam » fassent leur apparition dans le vocabulaire des langues européennes. Entre temps la situation religieuse de l'Europe avait été profondément bouleversée avec les réformes, les guerres de religions et la naissance des diverses confessions chrétienne. L'introduction des mots « islam » et « musulman » dans le vocabulaire de Européens pourrait ainsi répondre à une nécessité de désigner et de décrire la religion de ceux qui jusque là étaient appelée, arabes, turcs, mahométans, hérétiques ou païens. Ceci permet d’intégrer l'islam dans les discours visant à penser la diversité de religions que connaît l'Europe depuis le XIVe siècle. Ensuite, c'est surtout au XIXe siècle que l'histoire longue et complexe des rapports entre islam et chrétienté a commencée a être pensée comme celle d'une confrontation de religion, avec les thèmes historiographiques d'une conquête musulmane, des croisades ou d'une reconquête.

    Les religions en Islam

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    Dans le Coran, les termes formés sur la racine dîn, permettent d'envisager une catégorie qui présente une relative équivalence avec l'idée de religion.[56] Le dîn est l'ensemble des lois qui correspondent à la volonté de Dieu tandis que la charia (la loi) est la traduction de cette volonté. Yvonne Yazbeck Haddad nuance les significations des termes formés sur la racine dîn selon l'époque des sourates.[57] Dans la sourate 109, de période mécquoise, il est indiqué que les « infidèles » ont un dîn qui n'est pas celui des musulmans. Dans les sourates médinoises, le dîn est identifié de manière assez stricte à un dîn unique, appelé islâm : « une seule religion inchangée de Dieu, toujours présente sur terre à des degrés de pureté différents[56] ». Les juifs et les chrétiens ont connu cette religion mais ils l'ont corrumpue : « la religion proclamée par Mahomet viens pour restituer la pureté originelle de cette religion unique appellée islâm.[56] »

    Bien que l'islam permette de penser qu'il n'existe qu'une seule religion véritable, le statut des gens du Livre permettait de rester chrétien ou juif dans une société politiquement dominée par des musulmans. Il est possible d'avoir une autre religion que l'islam si l'on possède un livre saint, mais le paganisme est interdit.[55] Juifs et chrétiens possèdent ainsi une place définie par le droit dans la cité islamique, ils sont « protégés » comme la « matière des musulmans »[55]. Les raisons de cette protection semble être d'ordre économique et social. Les chrétiens sont majoritaires dans l'Empire conquis pas les arabes. Des sources anciennes font valoir l'intérêt que les musulmans ont a exploiter ces populations plutôt que de chercher à les convertir.

    Au statut de « gens du Livre » correspondent les droits et des devoirs fixés dans la charia.[58] L'Islam naît ainsi comme une organisation générale de la société qui garanti le respect des droits de Dieu par tout ceux qui vivent dans le « domaine de l'islam ». Cependant l’établissement de ce régime tient compte de ce que tous ne sont pas musulmans. En ce sens, l'Islam comme régime consiste à donner un cadre islamique à qui n'est pas l'islam.

    Le système progressivement mis en place pour gérer les religions des gens du Livre est celui de la dhimma. Ce système leur garanti le droit de garder leur religion tout en prévoyant un impôt spécial et des mesures vexatoires pour que chacun comprenne l'intérêt qu'il aurait à se convertir à l'islam. La possibilité de se convertir est à sens unique, une fois que l'on devient musulmans, on ne peut plus en changer, l'apostasie vaut la peine de mort[55].

    Le territoire dans lequel est observé la loi coranique est le dâr al-islam, c'est-à-dire le « domaine de l'islam » dont les limites géographiques et historiques correspondent à celle de l'Islam.[59] Idéalement, dans ce domaine tous les habitants forment l’umma, une seule communauté dans laquelle se pratique une triple distinction : homme-femme, personne libre-esclave, musulman-non-musulman.[59] L’umma n'abolie pas ces différences mais elle garantie le respect global des « droits de Dieu », chaque personne ayant à respecter les droits et les devoirs qui correspondent à son statut[59].

    En dehors du « domaine de l'islam » se trouve le dâr al-kufr, « domaine de l'infidélité ». Concernant les rapports entre ces domaines, Marie-Thérèse Urvoy écrit dans le dictionnaire du Coran que « Dans le domaine de l'islam, qui est censé coïncider avec le monde de la justice, les croyants ont pour devoir de conquérir le « domaine de l'infidélité », dâr al-kufr qui devient « domaine de la guerre », dâr al-harb, afin d'installer la communauté islamique et se valeurs. »[60]

    Méconnaissance des religions au Moyen Age

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    bataille de Roncevaux (778), gravure du XIVe siècle
    Le poète Süßkind von Trimberg portant une coiffe juive devant l'évêque.

    Rémi Brague a relèvé que les discours médiévaux déclarant s'adresser aux « autres », qu'ils soient faits par des chrétiens, des juifs ou des musulmans, sont toujours des discours destinés à prêcher des convaincus tandis qu'il est partout interdit de prêcher la religion autrement que dans le sens de celle du pouvoir en place : chrétien ou musulman[55].

    Les musulmans croient connaître le christianisme et le judaïsme dans la mesure ou l'islam propose une certain compréhension de ce qu'ils appellent les gens du Livre. Dans les faits ils en ignore presque tout parce que la connaissance des juifs et des chrétiens tirée du Coran est réputée nécessairement vraie et elle s'impose à la réalité du judaïsme et du christianisme. De plus la lecture de la Bible et des livres juifs et chrétiens est le plus souvent formellement interdite aux musulmans. De leur côté, les chrétiens latins reconnaissent volontiers ne pas de connaître l'islam. Ils en éprouver un léger regret lorsqu'ils estiment qu'une meilleur connaissance de l'islam en permettrai une réfutation plus étayées, mais ils font peu d'efforts pour le connaître mieux.

    L'islam a longtemps été entouré d'un grand flou dans la perception des européens. Les termes « musulman » et « islam » sont totalement absent de leur vocabulaire jusqu'au e. Il est plutôt question de maures ou de sarrasins, terme qui dérive du grec sarcène et qui signifie arabe. Ceux-ci sont considérés comme des étrangers ou des envahisseurs contre lesquels on fait la guerre. La chanson de Roland les évoque, mais la seule phrase de cette chanson qui pourrait laisser penser à l'islam est celle où il est affirmé que Marsile, roi de Saragosse, n'adore pas Dieu mais Mahomet et Apollon. La référence a Apollon revient à assimiler les arabes aux païens de l'Antiquité. L'islam n'est ainsi pas connue comme tel, il est vu comme une hérésie parmi d'autres à laquelle on donne le nom de celui qui est réputé en être l'auteur : Mahomet. Celui-ci est connu, ou plutôt méconnu, au travers de récits infamants tels que La vie de Mahomet par Embricon de Mayence[61].

    En vue d'une connaissance plus poussée de l'islam, une traduction latine du Coran est toutefois commandée en 1141 par Pierre le Vénérable abbé de Cluny. Sa motivation s'inscrit pleinement dans la logique de la réfutation des hérésies. Pour Pierre le Vénérable, « Qu’on donne à l’erreur mahométane le nom honteux d’hérésie ou celui, infâme, de paganisme, il faut agir contre elle, c’est-à-dire écrire. »[62] L'abbé de Cluny est préoccupé de ce que les Latins ne s'emploient pas à réfuter cette doctrine parce qu'il ne la connaissent pas. C'est pour cela qu'il veut une traduction du Coran. Cette traduction restera la seule disponible en latin pendant quatre siècles. Des copies circulent mais ne donnent pas lieux à beaucoup de travaux. Perçu comme une hérésie, l'islam est comparé au sabellianisme, au nestorianisme ou au manichéisme[63].

    Au XIIIe siècle, Thomas d'Aquin rédige une Somme contre les Gentils. Il aurait répondu en cela à une demande de missionnaires dominicains se trouvant en Espagne au milieu de juifs et de musulmans. Il s'agit de fournir des argument aux missionnaires. Thomas entend accomplir ce qu'il appelle le double office du sage, exposer la vérité et réfuter l'erreur. Pour cela il se concentre sur l'exposé de la vérité considérant qu'elle suffit à renverser l'erreur. Cette absence de réfutation de ce qui est alors considéré comme des hérésies, l'islam y compris, est ainsi expliquée par Thomas :

    « Réfuter toutes les erreurs est difficile et ce pour deux raisons. La première, c'est que les affirmations sacrilèges de chacun de ceux qui sont tombés dans l'erreur ne nous sont pas tellement connues que nous puissions en tirer des arguments pour les confondre. C'était pourtant ainsi que faisaient les anciens docteurs pour détruire les erreurs des païens, dont ils pouvaient connaître les positions, soit parce qu'eux-même avaient été païens, soit, du moins, parce qu'ils vivaient au milieu des païens et qu'ils étaient renseignés sur leurs doctrines. La seconde raison, c'est que certains d'entre eux, comme les Mahométans et les païens, ne s'accordent pas avec nous pour reconnaître l'autorité de l'écriture, grâce à laquelle on pourrait les convaincre, alors qu'à l'encontre des Juifs, nous pouvons disputer sur le terrain de l'Ancien Testament, et qu'à l'encontre des Hérétiques, nous pouvons disputer sur le terrain du Nouveau Testament, Mahométans et Païens n'admettent ni l'un ni l'autre. Force est alors de recourir à la raison naturelle à laquelle tous sont obligés de donner leur adhésion. Mais la raison est faible dans les choses de Dieu. »

    — Thomas d'Aquin, Somme contre les Gentils, I,2.

    Alors qu'ils reconnaissent volontiers ignorer l'islam, les chrétiens d'Europe estiment très bien connaître les juifs. Ils envisagent la venue du Christ comme l'accomplissement d'une attente du peuple hébreux et la réalisation d'une promesse que Dieu lui avait faite. L'erreur que les chrétiens attribuent aux juifs et donc de ne pas avoir reconnu le Christ comme envoyé de Dieu. Les juifs sont décrits, par défaut, comme ceux qui attendent toujours, même si l'attente messianique est loin d'être un thème centrale du judaïsme médiéval. La conviction dominante à leur égard est qu'ils finiront par se convertir mais, en « attendant », ils restent juifs. L'argument est employé par Bernard de Clairvaux pour dénoncer des violence faites contre les juifs dans une lettre où il est aussi question de croisades. Les communautés juives ont ainsi une présence légitime dans la chrétienté tout en étant régulièrement victimes de mesures d'austracisme et de violences.

    Un « dialogue des religions » au Moyen Age

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    Deux traités, a biens des égards exceptionnels, et dans lesquels sont comparés les doctrines du judaïsme du christianisme et de l'islam, ont été rédigé vers la fin du XIIIe siècle. Leur auteurs, Raymond de Lulle (1232-1316) et Ibn Kammuna ont vécu à la même époque mais en des lieux on ne peut plus éloignés l'un de l'autre, quasiment aux deux extrémités du monde musulman : Raymond Lulle né musulman et converti au christianisme peu après ses trente ans, vivait à Majorque, au large de l'Espagne. Ibn Kammuna était un médecin juifs de Bagdad. Dans la seconde moitié du XIIIe siècle, Majorque et Bagdad n'ont de commun que d'avoir récemment connu le renversement du pouvoir musulman par des conquérants qui ne l'étaient pas, tout en ayant un population majoritairement musulmane.

    En 1258 des troupes Mongoles de Houlagou Khan se sont emparées de Bagdad. Après avoir tué le calife et pris le pouvoir, les Mongoles ont appliqué leur politique de tolérance religieuse, ouvrant ainsi une brève période durant laquelle il sera possible de discuter des différentes doctrines. Ce fut l'occasion pour le médecin juif Ibn Kammuna de comparer les doctrine juive, chrétienne et musulmane, laissant ainsi ce qui peut être considérer comme la première étude comparative de ces trois religions. Son livre, paru en 1289, suscitât immédiatement le scandale chez les musulmans qui étaient alors majoritaires à Bagdad. Une chronique de l'époque raconte comment sont exfiltration dans une malle capitonnée lui a permis d'échapper au lynchage. L'année suivante, en 1290 le Khan Ahmad Teküder adopta la religion de la majorité de ses sujets. Il ne fut dès lors plus possible pour les juifs et les chrétiens de s'exprimer comme au cours des décennies précédentes. La biographie d'Ibn n'est pas bien connue, mais il est clair qu'il continua a écrire. Après les péripéties de 1289 l'avait conduit à se réfugier chez son file à Hilla où il vécu jusqu'à sa mort. 9 des 11 livres écrit par Ibn Kammuna nous sont parvenus. Il s'y trouve certaines expressions qui incitent a penser qu'après 1289, soit il s'est converti à l'islam, soit il s'exprimait d'une manière adéquate à la nouvelle religion du Khan. Redigé avant cela le livre ... comporte d'abord un chapitre sur les prophéties en générale, puis trois chapitres traitant successivement du judaïsme du christianisme et de l'islam. L'auteur se montre favorable au judaïsme, sceptique envers le christianisme et sévère envers l'islam contre lequel il emploi l'invective, le sarcasme et l'ironie. Il fait néanmoins l'éloge de Mahomet et de Jésus.

    A la même époque, Raymond de Lulle vivait sur l'île de Majorque au large de l'Espagne. IL y était né musulman en 1232, juste au moment où se terminait terminé une guerre qui avait conduit l'île a passer du domaines des souverains musulmans Almohades, à celui du roi chrétien Jacques Ier d'Aragon. Raymond de Lulle y vécu musulman toute sa jeunesse, puis se convertit au christianisme vers 1263 ou 1264 alors qu'il avait une trentaine d'année. Le traité des trois sages et du gentils écrit entre 1270 et 1271 est sont premier livre. Si sur le fond les livres de Lulle et de Kammuna sont assez différents, la structure générale est semblable. Elle compte d'abord un chapitre

    Interprétés à l'aune de problématiques modernes, ces textes se présentent comme des écrits précurseurs d'un dialogue des religions tel qu'il est possible de le concevoir aujourd'hui. Dans un autre sens, si l'on tient compte du contexte historique et géographique de leurs auteurs, on constate que la mise en rapport de trois sages : le juif, le chrétien et l'arabe, auxquels s'adjoint un Gentil, reflètent assez précisément la structuration sociale et politique des religions dans l'Islam : l'islam, les deux religions régies par la dhimma que sont le judaïsme et le christianisme, ainsi que le paganisme qui est interdit. Le caractère exceptionnel de ces ouvrage ne tient donc pas au fait que soit mis en rapport ces trois ou quatre religions, car c'est toute la société qui fonctionnait comme ça en terre d'islam. Ce qui est nouveau est que leurs auteurs ont eut l'un et l'autre la possibilité de s'exprimer en tant que juif ou chrétien sur les religions telles qu'elles sont organisée dans leur société parce que le pouvoir musulman venait d'être renversé. Le traité de Raymond Lulle est néanmoins considéré comme un précédent qui a ouvert une veine philosophique et littéraire en Occident. Il est en effet possible d'en voir la continuation et le dévelopement dans le Dialogue entre un philosophe un juif et un païen d'Abélard, puis le De pace Fidei de Nicolas de Cuse écrit dont certains analyste envisagent des échos dans le projet de paix perpétuelle de Kant. Quoi qu'il en soit, le Traité des trois sages, parce qu'il reflète une pensée mûrie en Terre d'islam et parce que nombre de ses lecteurs actuels lui trouvent une actualité pour penser la situations religieuse du monde moderne, est le témoin de ce que quelque chose est passé de cette terre d'islam à la façon moderne d'envisages les religions, leur coexistence, leur dialogue et leurs confrontations.

    Sur le plan lexical, Nicolas de Cuse est le premier auteur latin a employer le mot religio pour désigner les religions « des juifs, des chrétiens, des Arabes et des nombreux autres hommes ». Nonne paene omnis religio — ludaeorum, Christianorum, Arabum et aliorum)

    perducetur omnis religionum diversitas in unam fidem orthodoxam. (La diversité des religion se ramène à une seule foi orthodoxe.

    «Audivit Dominus, rex caeli et terrae, gemitum interfectorum et compeditorum et in servitutem redactorum, qui ob religionum diversitatem patiuntur. (Le Seigneur, Roi du ciel et de la terre, a entendu les gémissement de ceux qui ont été mis à mort, jetés dans le fers ou réduits en esclavage, et qui ont souffert a cause de la diversité des religions)

    Petrus: «Nonne paene omnis religio – Iudaeorum, Christianorum, Arabum et aliorum plurimorum hominum – tenet humanam mortalem naturam cuiuslibet hominis post mortem temporalem ad vitam perpetuam resurrecturam ?»

    Raymond de Lulle « Ah Dieu ! Quel grand bonheur si nous pouvions être tous les hommes en une seule loi et en une seule croyance ! Quel bonheur, si disparaissaient de parmi les hommes la rancune et la mauvaise volonté, qui les font s'affronter à cause de la pluralité des croyances et des sectes, et de leur opposition. » (p. 35) « Puisque nous ne pouvons nous mettre d'accord par autorité, nous essaierons de nous accorder par des raisons démonstratives et nécessaires. »

    Raison et religion au Moyen Âge

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    Le kalâm et la falsafa

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    alternative textuelle
    Socrate et deux étudiants. Miniature du manuscrit al-Mubashshir ibn Fatik, Mukhtar al-Hikam, Maximes choisies et meilleurs propos XIIIe siècle. Istanbul, Musé du Palais de Topkapi, Ms. Ahmet III, 3206.

    Dans l'islam, avec le kalâm et la falsafa, s'est précocement développée une tension entre un pôle théologique et un pôle philosophique, la falsafa étant le nom arabe de la philosophie. Cependant le kalâm ne correspond pas a ce que l'on entend par théologie dans le monde chrétien et la pratique de la philosophie n'y joue a pas le même rôle social et institutionnel[64].

    La falsafa a été perçue comme une « réalité étrangère » par les arabes, elle est toujours envisagée en référence aux Grecs et au monde héllénisé. Elle se présente aussi comme l'affaire privée ceux qui ont d'autre activités professionnelle. Bien qu'il ait lui-même des fondement philosophique, le kâlam s'est, quand à lui, développé dans le monde musulman sans références exclusives aux Grec. Le kalâm est davantage une pratique professionnelle que la falsafa, les Motécallemin étant enseignants.

    La critique qui fut sans cesse adressée au kalâm par des philosophes est qu'il ne chercherait pas tant la vérité mais à justifier, par tous les moyens, les principes de la religion. En somme, le kalâm ne démontrerait rien puisque ce qu'il donne comme des conclusions sont des pétitions de principes.[65] Au XIIe siècle, dans Le guide des égarés, Maïmonide (1135-1204) affirmait que le kalâm avait son origine dans une forme d'argumentation d'abord pratiquée par des chrétiens. Rémi Brague estime que cette origine chrétienne du kalâm peut être identifiée, comme l'a fait Maïmonide, au courant de l'apologétique grecque initiée par Jean Philopon, « premier auteur chrétien a avoir tenté de démontrer par des arguments philosophiques un dogme chrétien[65] ». Maïmonide décrit ensuite le kalâm comme une manière de faire de la théologie dont les défauts ont été augmentés par les musulmans puis qui a été à nouveau imitée par des juifs et des chrétiens. Le kalâm viserait non pas à chercher ce qui est vrai, mais à justifier des idées préconçues par des arguments d'apparence rationnelles :

    « Il surgit parmi les musulmans des doctrines particulières et dont il fallait nécessairement prendre la défense. En somme, tout les anciens motécallemîn (patriciens du kalâm), tant parmi les grecs devenus chrétiens que parmi les musulmans, ne s'attachèrent pas d'abord dans leurs propositions, à ce qui est manifeste dans l'être, mais ils considéraient comment l'être devait exister pour qu'il puisse servir de preuve à la vérité de leurs opinions, ou du moins ne pas la renverser. »

    — Maïmonide, Le Guide des égarés, I, 71.[66]

    La tension entre le kalâm et la falsafa a trouvé une expression particulièrement forte dans la rédaction en 1095 par al-Gazali (1058-1111) de L'incohérence des philosophes dont le titre peut aussi se traduire par La destruction de la philosophie. Près d'un siècle après la rédaction de ce traité, Averroès (1126-1198) répondit à al-Ghazali avec L'incohérence de l'incohérence.

    Ce qu'un philosophe tel qu'Averroès reproche au kalâm est de rester à un niveau très faible d'argumentation, celui de la dialectique, tandis qu'il serait incapable de mettre en œuvres les arguments les plus élevés des démonstrations logiques. Averroès fut cependant confronté, en tant que Cadi et conseillé du pouvoir, au problème des conflits d'interprétation du texte coranique et de l'autorité qu'il faut accorder, tant aux interprètes qu'à leurs interprétations. C'est au titre de ses fonctions officielles qu'il eut à rendre un avis juridique, une fatwa, terme qui se traduit en français par Traité décisif. Ce traité est donc d'un genre littéraire assez différent de celui dont il pouvait user a titre privé. La solution d'Averroès dans cette fatwa fut d'affirmer que l'usage des démonstrations logiques était obligatoire pour les élites et interdit au grand nombre. Alain de Libera considère à ce sujet qu'Averroès a défendu « un bon usage social de la raison ». Il estime aussi que l'intention d'Averroès n'était pas de montrer l'accord entre raison et religion mais seulement une connexion, car une analyse minutieuse du texte montre qu'Averroès n'établit pas cet accord mais s'en tient à une conexion. Inversement, Rémi Brague estime que l'intention d'Averroès était bien celle de convaincre ses lecteurs d'un accord entre religion et philosophie car il affirme formellement et explicitement qu'il l'a démontré par ce traité. Cependant, Averroès y a employé un type d'argumentation, ceux de la dialectique, qu'il a dénoncé par ailleurs dans son œuvre. C'est la raison pour laquelle Rémi Brague considère, comme Dominique Urvoy, que ce traité n'est pas l'expression la plus franche de la pensée d'Averroès.[67] Pour rendre compte de ce problème, Dominique Uvroy propose de décrire la solution d'Averroès selon l'expression paradoxale de kalâm philosophique dans la mesure où il réclame de substituer les philosophes aux praticiens du kalâm dans leur fonction sociale[67].

    Naissance de la théologie chrétienne

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    Avant de devenir structurante du concept de religion, la problématique de l'opposition entre foi et raison a reçu sa formulation dans les universités naissantes de l'Europe des XIIe et XIIIe siècles. De nombreux facteurs ont concouru à la formulation de cette problématique. Le premier est doute les développements les plus récents de la tradition philosophique latine marquée par des innovations que l'on trouve notamment dans les œuvres d'Anselme et d'Abélard. Ces œuvres offrent les prémisses d'une « théologie » pensée comme une discipline à part entière, l'invention de la théologie, au sens moderne du terme, étant la grande nouveauté intellectuelle de l'époque. Dans le même temps, le monde des gens d'études a commencé à s'approprier le corpus des œuvres philosophiques de l'antiquité d'abord traduite de l'arabe puis directement du grec. Enfin, les œuvres d'Avicenne et d'Averroès ont elle aussi joué un rôle important dans les débats de l'époque, leur traduction et leurs interprétations conduiront à la formation de ce que l'on a appelé rétrospectivement un courant avicennien et un courant averroïste de la théologie.

    Avec la naissance de la théologie, la philosophie est elle-même requalifié, alors que la théologie se polarise sur les énoncés se rapportant à la révélation chrétienne, la philosophie se tourne vers un nouveau corpus de textes, ceux de l'Antiquité et des philosophes naturels, c'est à dire, tout ce qui est jugé philosophique sans se rapporter directement à la révélation chrétienne. C'est en vue d'une intelligence de la foi que l'université s'est approprié le corpus des œuvres philosophiques de l'Antiquité, et c'est cela même qui conduira à une disjonction entre l'intelligence de la foi et l'enseignement philosophique.

    Selon les époques et le vocabulaire des auteurs y ayant réfléchit, cette l'opposition entre raison et foi peut être dite rapport entre nature et révélation, entre philosophie et théologie, entre religion naturelle et religion positive ou entre science et religion.

    Développements de l'opposition entre foi et raison

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    Effervescence religieuse européenne avant la Réforme

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    Les cathares...

    Les religions modernes

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    Mutation de la signification du terme religion à la Renaissance

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    « Le Seigneur, Roi du ciel et de la terre, a entendu les gémissement de ceux qui ont été mis à mort, jetés dans le fers ou réduits en esclavage, et ceux qui ont souffert a cause de la diversité des religions. »

    — Nicolas de Cuse, De Pace Fidei, III,9.

    En latin, l'un des tous premiers auteurs a utiliser le terme religio en un sens proche de son acception moderne est le Cardinal Nicolas de Cuse dans le De Pace Fidei, dialogue écrit en 1453, au moment où Constantinople tombait aux mains des Ottomans. Cette date marque pour les historiens la fin du Moyen Âge et le début de la Renaissance. L'auteur, qui préfère le dialogue à la guerre, est certain que la religion uni tous les hommes parce que Dieu est unique. Estimant que le dialogue conduit « selon la doctrine du Christ » amène à la paix, il imagine des représentants de toutes les religions dialoguant au ciel, en présence du Christ qui leur déclare que : « le Seigneur a eut pitié de son peuple et se plaît, avec le consentement de tous les hommes, à ramener dans la concorde, la diversité des religions à une religion unique et inviolable ». L'usage que fait Nicolas de Cuse du terme religio le situe à la charnière d'un monde dans lequel il est encore évident que la religion, pour autant qu'elle soit vraie, est nécessairement unique, en même temps qu'il voit se profiler les premiers signes d'un pluralisme religieux. Les années qui suivirent furent celle de la Réforme, qui allait amener les chrétiens a connaître en leur sein la diversité des religions et les guerre qui vont avec.

    En français l'usage du terme religion consistant à l'employer pour désigner des organisations recommandant ce qu'il faut faire et croire a commencé à se répandre dans les années 1560-1580. Vers 1560, il sert chez le réformateur vaudois Pierre Viret à désigner l'une ou l'autre des deux Églises, catholique ou protestante[68]. Vers 1580, dans les écrits de Montaigne, une religion peut être des catholiques ou de ceux qui se recommandent de l'un des réformateurs que sont Luther, Zwingli ou Calvin[69]. Il peut aussi s'agir de la religion des juifs, de celle des Mahométans, ou encore de la religion qu'avait voulu mettre en place Numa, c'est-à-dire la religion des Romains[70].

    Montaigne fut ainsi l'un des premiers à utiliser le vocable religion pour désigner des groupes ou des peuples dans lesquelles on recommande ce qu'il faut croire ou faire en fonction de l'une ou l'autre autorité religieuse. Selon Marcel Despland « l'usage et le ton de Montaigne feront école parce que bon nombre de Français auront besoin d'un mot pour parler des choses touchant à Dieu, à son Eglise et à la foi sur un mode autre que celui de l'adhésion et de la conviction, sur le mode de l'observation légèrement détachée. Ce mot qu'ils apprendront de Montaigne est celui de « religion »[68]. »

    Des schismes aux confessions religieuses

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    La réalité à partir de laquelle s'est forgée l'acception moderne du terme religion est en premier lieu celle des « confessions » ou « Églises » issues de la Réforme. Le terme « confession », qui aujourd'hui est synonyme de celui de religion, désigne d'abord une « confession de foi », c'est-à-dire un texte rédigé pour exprimer la foi de l'Église. Dès le début du XVIe siècle, la pratique de rédiger et de demander l'adoption de tels textes fut promue par les réformateurs. L'adoption d'une profession de foi devient l'acte qui entérine la réforme de l'Eglise pour le territoire ou la communauté où elle est approuvée. Ainsi, le terme confession, qui désignait d'abord un acte personnel consistant à dire sa foi, en vient à désigner l'organisation que se donnent les « confessants »[71]. La volonté des réformateurs n'était cependant pas celle de faire de nouvelles « religions » selon l'acception qu'a pris le terme par la suite. Il s'agissait plutôt de réformer le christianisme ou l'Église catholique pour lui rendre son état d'origine.[72] Ce qui était recherché était que tous adoptent la même confession de foi, manière de manifester l'unité de l'Église.

    Quelque soit le parti religieux dont ils se réclamaient, les européens chrétiens du XVIe siècle déclaraient croire en l'Église nécessairement « une » et « catholique »[73]. Dans ces conditions, la naissance des confessions protestantes s'est d'abord présentée comme une multitude de schismes, chaque Église revendiquant d'être l'unique et véritable Église catholique[72]. La multiplication des confessions à partir du XVIe siècle est un phénomène qui va progressivement se différencier de celui des schismes, des excommunications, des conflits entre Églises et de toutes autres formes de brouilles ecclésiales car, jusque là, les disputes et les schismes n'avaient jamais conduit les parties en conflit à penser qu'une division dans l'Église ait quoi que ce soit de légitime.

    Diète d’Augsbourg en 1530, Philippe Mélanchthon présente la Confessio Augustana à Charles Quint.

    En 1530, la réunion d’Augsbourg fut la dernière tentative d’éviter un schisme dans l'espace où s'étaient diffusées les idées des réformateurs. La confession de foi qui devait y être adoptée avait été rédigée par Mélanchthon et reprenait des idées de Luther. L'échec de cette Confessio Augustana, rejetée par l'assemblée à laquelle elle fut présentée, ne fut pas seulement celui du désaccord entre « luthériens » et « papistes », mais il marqua aussi l’impossibilité de manifester l’unité des communautés réformées. Il leur était dès lors devenu difficile de se considérer dans leur ensemble comme l'Église catholique de laquelle l'Église Romaine avait fait sécession, chaque confession pouvant revendiquer d'être catholique et le dénier aux autres selon le même argument que celui par lequel l'appellation catholique était contestée pour l'Église dite romaine. Selon Heinrich Fries, « L’échec de la réunion d’Augsbourg a eu pour effet de faire naître des confessions, c’est-à-dire des communautés autonomes et distinctes, soucieuses de se démarquer les unes des autres, et brandissant les unes contre les autres leur confession de foi spécifique[74]. » En 1555, après deux décennies de guerres, la Paix d'Augsbourg a entériné cet état de fait : « Elle reconnut l'existence de ces confessions récemment apparues, et les considéra dès lors comme des « partis » religieux égaux en droit, et susceptible de réclamer chacun la protection de l'Empire. »[74]

    L'Église catholique a ensuite progressivement été pensée comme une réalité « invisible » par les protestants : elle est tenue pour un lien mystérieux qui uni toutes les Églises entre elles dans la foi sans qu'aucune Église « visible » ne puisse revendiquer pour elle-même d'être l'Église catholique[72]. Cette façon de penser comme légitime la diversité et la multiplicité des Églises oblige aussi a reconnaître l'Église catholique « visible », au moins comme une Église parmi d'autres. Celle-ci sera systématiquement dite « romaine » par les protestants pour souligner qu'elle n'est pas à elle seule toute l'Église. De son côté, cette dernière s'affirme « catholique » avec la contre-réforme ou Réforme catholique. Dans ce contexte, le catholicisme se pose alors comme une confession ou une religion parmi d’autres, en dépit du paradoxe de constitue, pour les catholiques eux-mêmes, le fait de revendiquer un catholicisme pensé comme une religion sur le modèle d'une Église protestante.[75] Le terme « catholicisme » fait lui-même son apparition à la fin du XVIe siècle, le catholique Pierre Charron semblant être le premier à l'avoir employé dans un livre publié en 1595[76].

    Dans les débats qui ont accompagné la Réforme, les distances prises entre les Eglises orientales et occidentales depuis plusieurs siècles ont aussi été invoquées pour faire valoir que l'Église pouvait être « catholique » sans être rattachée à Rome. En 1054 avait eut lieu une spectaculaire dispute entre le Patriarche Michel Cérulaire et le Pape Léon IX qui avait débouché sur l'excommunication du Patriarche par les légats du Pape. Cependant, selon Yves Bruley, « l'événement de 1054 n'a pas la valeur qu'on lui attribue encore fréquemment. Il s'agit d'un affrontement personnel et non d'un schisme[77] ». La rupture a eut lieu plus tard au XIIIe siècle. Cependant, même à cette époque « Il n'existe pas de schisme stricto sensu : c'est l'habitude de la polémique et l'affrontement des principes qui crée la rupture[77] ». Au moment de la Réforme, cette rupture consommée entre Églises d'Orient et d'Occident est interprétée comme ayant conduit à la formation de deux religions : le catholicisme et l'orthodoxie ; l'un et l'autre sont alors envisagés rétrospectivement comme des confessions comparables à celles issues de la Réforme.

    Des confessions chrétiennes aux religions du monde

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    Les religions du monde, gravure du XVIIIe siècle siècle.

    La « confessionnalisation[78] » qui s'est engagée au XVIe siècle est un phénomène englobant ou contagieux car, une fois que des « confessions religieuses » sont reconnues comme des religions, il n'y a plus guère de place pour du religieux qui ne soit pas une religion comme les autres. Sur un plan lexical, dès que le terme religion prend pour signification de désigner l'une des organisations que sont désormais les confessions protestantes ou le catholicisme dans leur rapports et leurs différences, ce qui ressemble de près ou de loin à une religion et qui entre en rapport à ces religions paraît être « une autre religion », c'est-à-dire une religion comme le sont le catholicisme, le luthéranisme, le calvinisme ou l'anabaptisme. C'est ce qui arrive immédiatement à l'orthodoxie, au judaïsme et à l'islam, puis plus tard au bouddhisme, à l'hindouisme et à toutes les religions du monde.

    Les noms qui permettent de désigner les confessions chrétiennes qui se constituent n'existent pas encore ou se cherchent. Montaigne appelle « martinistes » plutôt que luthériens ceux qui suivent la doctrine de Martin Luther[68]. La terminologie se met en place sous forme de sobriquets plus ou moins bienveillants. Luther avait précisément recommandé à ceux qui le suivaient de ne pas se dire « Luthériens » mais « Évangéliques », il appelait « papistes » ceux que l'on dit aujourd'hui catholiques. Pour sa part, Calvin traite les hérétiques de chiens et les catholiques de singes[79]. En 1562, Sébastien Castellion fait preuve d'une politesse rare pour l'époque en écrivant « Il y a aujourd'hui en France deux sortes de gens, qui pour la religion, s'entrefont la guerre, dont les premiers sont par leurs adversaires appelés Papistes et les autres Huguenaux, et eux s'appellent les Huguenaux Evangéliques et les Papistes Catholiques. Je les appellerai comme eux-même pour ne pas les offenser. » A ce sujet Marcel Despland écrit : « En arriver à désigner chaque groupe confessionnel pas l'étiquette neutre de protestants et de catholiques est un triomphe tardif des bonnes manières[80]. »

    A la fin du XVIe siècle, au delà des religions chrétiennes, il est question du judaïsme, de l'islam et des religions anciennes telles que celle des Égyptiens, des Grecs ou des Romains. Les musulmans sont appelés « mahométans » ou « turcs » dans la plus grande indétermination sur le fait de savoir si l'on parle d'une nation ou d'une religion. Dans les siècles suivants le nombre de ces religions s’accroîtra avec celui des époques et des continents explorés. En 1694, le Dictionnaire de l'Académie Française défini la religion comme « Culte qu'on rend à la Divinité, suivant la créance que l'on en a. La Religion Juive ; la Religion Chrétienne ; la bonne, la fausse Religion ; la Religion de Mahomet ; professer une Religion ; faire profession d'une Religion ; faire une nouvelle Religion. ». Et il précise que « On appelle en France Religion Prétendue Reformée, la croyance des Calvinistes. Quelquefois même l'on dit absolument : « Cet homme est de la Religion », pour dire, qu'il est de la croyance des Calvinistes. » Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle l'encyclopédie de Diderot et d'Alembert écrit « Religion, se dit plus particulièrement du système particulier de créance et de culte qui a lieu dans tel ou tel pays, dans telle ou telle secte, dans tel ou tel termes, etc. Dans ce sens, on dit la religion romaine, la religion réformée, la religion des Grecs, celle des Turcs, des sauvages d'Amérique, des Siamois, etc. ». La « religion de Bouddha » apparaît dans la liste des religions du Littré en 1872-1877[81]. Il est par la suite possible de reconnaître ou de créer autant de religions que l'occasion se présente. Les estimations les plus larges évaluent à dix-mille le nombre des religions qu'il serait possible de compter aujourd'hui[82].

    Les religions, les nations et les États

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    Allégorie de la Réforme et de la Paix d'Augsbourg (1555), Gravure de 1732. En haut l'empereur et les princes allemands, en médaillons les portraits de Luther et Melanchthon, à droite et à gauche, le texte de la Confession d'Augsbourg.

    Les réalités qui commencent à êtres appelées religions à la fin du XVIe siècle correspondent aussi à des communautés qui ne sont pas seulement des groupes d'adeptes volontaires. Une religion peut être envisagée pour une ville, une principauté ou une nation. En Angleterre, le Roi Henri VIII que le Pape Léon X avait déclaré protecteur de la foi en 1521 pour sa réfutation des idées de Luther, romps avec Rome en 1531 et se fait reconnaître « protecteur et chef suprême de l'Église et du clergé d'Angleterre »[83]. Sa fille Elisabeth établira ce qui s'appelle aujourd'hui l'anglicanisme en faisant adopté en 1549 une réforme religieuse par le parlement[83]. A partir de 1541 se met en place la République de Genève dirigée par une bourgeoisie acquise aux idées de Calvin. En 1555, la Paix d'Augsbourg, en Allemagne, prévoit la religion de chaque territoire sera déterminée selon celle de son souverain. Au siècle suivant, ce principe sera désigné par la formule Cujus regio, ejus religio (à chaque principauté sa religion). En France se pose la question du gallicanisme. Ainsi, entre les XVIe et XVIIe siècles, tandis que les différents pays d'Europe se constituent en Etats, se pose partout la question des religions des nations, celle des Allemands, des polonais, des Anglais, des Français, des Espagnols ou des Portugais notamment, et au delà, celle des Européens ou les Turcs. Cependant l'idée moderne de nation se pose aussi d'emblée, chez les humanistes, comme une forme d'unité des peuples au delà des conflits entre partis religieux. « pour une partie des Européens, l'unité nationale peut constituer un au-delà des religions et la confession n'est pas fatalement le principe d'unité d'une nation. »[84]

    La situation religieuse de chaque nation fait partie des « États » qui se mettent alors en place dans la mesure ou au sens premier, l'État c'est le status, la stabilisation et l'organisation d'une population, d'un territoire et d'un mode de gouvernement dans l'« état » où ils sont, sa religion ou ses religions y compris. Dans un écrit de Machiavel publié en 1531, le terme « état » désigne ainsi, pour la première fois, l'autorité politique qui s'exerce sur un territoire donné. Si les États naissant jouent un rôle important dans la formation des religions à cette époque, les religions ou confessions ont aussi un rôle moteur dans la genèse des États modernes. Selon Nicole Lemaître, « le schisme protestant transforme profondément les logiques de construction étatiques à l'œuvre depuis le XIIIe siècle, en créant des constructions politiques qui se veulent différentes selon les territoires et leur religion, en provoquant une évolution en miroir des communautés désormais face à face et rivales[85]. »

    Les historiens discutent beaucoup de la question du rôle des États dans la formation des religions et de celui des religions dans la formation des États. Des travaux sur le phénomène de confessionnalisation tendent ainsi à montrer que la mise en place des religions est en grande partie un fait politique qui en retour détermine la formation des États modernes. La mise en place de la diversité confessionnelle ne réduit cependant pas à un fait politique et, Selon Olivier Christin, la situation religieuse de l'Europe ne s'est pas uniquement décidée « d'en haut ». Le principe Cujus regio, ejus religio a fini par être abandonné dans le Brandebourg, dont le prince était calviniste, mais dont les sujets refusaient de le devenir. Plus largement « ce sont bien souvent les intérêts et les demandes des fidèles qui constituent le moteur d'une confessionalisation « par le bas » ou, au contraire, le frein qui interdit durablement de supplanter le vieux christianisme communal a-confessionnel qui organisait les vie des communautés rurales et dans lequel les individus continuent à se désigner comme « chrétiens » sans plus de précision. » D'autre part la confessionnalisation, pour ce qu'elle procède d'initiatives étatiques, est un phénomène qui trouve son origine et ses formes les plus claires en Allemagne. L'histoire de France n'en est pas indemnes, mais elle est marquée de beaucoup plus de réticences ou d’hésitations sur l'encadrement de la religion par l'Etat, qu'il agisse de mettre en place une religion nationale telle qu'aurait put l'être le gallicanisme, ou bien de donner un cadre légal à un pluralisme confessionnel[86].

    Les religions en guerre

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    En changeant d'acception pour désigner les partis politico-religieux qui se sont affrontés dans l'Europe du XVIe siècle, le terme religion a aussi commencé a désigner quelque chose semblant inextricablement lié à la guerre et à la violence. A cet égard, les premiers emplois du terme religion en son sens moderne se trouvent dans une littérature qui traite de guerres de religions, chez Montaigne en particulier. Depuis et jusqu'à aujourd'hui, nombre de guerres et de massacres mettent effectivement en jeux des religions, des Etats et des nations tandis que la réflexion sur la religion et les religions reste mobilisée par des problématiques semblables à celles du siècle des Réformes, des guerres de religions et de l'émergence des États-nations.

    La thèse selon laquelle des affrontements liés aux religions sont une fatalité a été récemment développée par Samuel Huntington. Celui-ci prédit que le monde va vers un choc des civilisations trouvant ses raisons profondes dans des différences religieuses insurmontables. Ce choc de civilisations pourrait être en cours, se manifestant dans des conflits actuels tandis que la seule limite à son développement serait celle de la puissance destructrices des armes modernes. Au lieu du cauchemar de religions conduisant fatalement à la guerre, d'autres font le rêve d'un monde sans religion et sans pays tel que l'a chanté John Lennon dans Imagine. Enfin, dans le but d'éviter la guerre, de résoudre les conflits et de promouvoir la paix, des « religieux » appellent au dialogue et à l'entente entre religions. C'est la raison d'être que s'est donnée la Conférence Mondiale des religions pour la Paix, crée à Kyoto en 1970[87]. Ces trois positionnements sur la question du rapport entre guerres et religions sont assez différents les uns des autres, mais ils ont en commun d'alerter sur un danger de guerre liés aux religions et, éventuellement, de chercher à le prévenir,.

    Le lien entre guerre et religion se fait à partir d'une conception plurielle ou pluraliste des religions. Cette façon d'envisager la religion comme se déclinant en des religions s'opposant les unes les autres semble remonter au XVIe siècle. De ce fait, si les religions font partie de ce par quoi s'organise la guerre et la paix aujourd'hui, il pourrait ne pas y avoir universellement et éternellement des religions qui conduisent à la guerre. La guerre pourrait être un trait de certaines des choses que l'on appelle aujourd'hui religion, mais tout ce que l'on appelle religion n'est pas ce qui conduit à la guerre. Il est aussi possible que le lien que l'on établit entre religion et guerre tienne au réflexe acquis d'appeler religion ce qui a conduit à la guerre ou bien que la conception plurielle et moderne de la religion favorise la formation et l'organisation de religions prédisposées à la guerre.

    Par ailleurs, la conception plurielle et historiquement datée de la religion reste en contradiction avec ce que d'autres envisagent comme une « essence de la religion » intemporelle et universelle, présente partout où il y a de l'humanité[88]. A ce sujet, Nicole Lemaitre conclu son étude sur L'Europe et les réformes du XVIe siècle en affirmant que :

    « La croyance en l'éternelle présence du religieux est trop naïve ou simpliste pour ne pas être questionnée, mais elle peut aussi être une façon de penser l'avenir et le sens de l'histoire, une manière de refuser de façon rationnelle les dangereuses formules trop simples à la manière de Huntington. L'observation historique doit permettre de lutter contre ces étiquettes en noir et blanc qui alimentent toujours les puritanismes destructeurs de communication entre les communautés. Lutter contre l'occultation de l'infinie et féconde variété de celles-ci, les mettre en demeure d'entamer le dialogue est une façon de maintenir l'espérance dans le monde à venir, aujourd'hui comme au XVIe siècle. »

    Les religions et les Lumières

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    Le vocabulaire et les définitions avec lesquels sont aujourd'hui étudiées les religions s'est mis en place avec les écrits des philosophes des Lumières. « Toute une série de mots, jusqu'alors relativement anodins sont élevés au rang de concept clés »[89], c'est le cas du mot religion comme de celui de culture. Selon Ulrich Bart, « dans une époque marquée par l'expérience d'un pluralisme confessionnel de plus en plus prononcé et par les premiers signes d'un pluralisme inter-culturel, il s'agissait de justifier le contenu de vérité des religions historiquement donné devant le for universel de la raison humaine. »[90] La mise en place d'un concept de religion à cette époque serait ainsi « une manière de tirer les conséquences sémantiques des bouleversements de l'expérience culturelle du monde dont les Lumières sont moins la cause que le symptôme. »[89]

    La tolérance

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    Au XVIIe siècle la préoccupation première de certains intellectuels vis-à-vis des religions était de penser les moyens de sortir des guerres. L'idée de tolérance est alors discutée comme l'un de ces moyens par quelques humanistes, notamment Érasme et ses amis Thomas More et John Fisher. Le terme tolérance, issu du vocabulaire médical, a cependant d'abord un sens très négatif. Il s'agit de « souffrir ce que l'on ne peut empêcher »[91]. Chez Érasme le terme tolérance désigne « la patience dans les épreuves et les persécutions ». Il s'agit de privilégier le temps et la douceur persuasive pour venir a bout des hérésies.(p. 179) Ainsi, bien qu'il s'opposait à Luther, Érasme déclarait à son sujet dès 1519 : « S'il est dans l'erreur, je voudrais qu'il soit guéri et non perdu. », et en 1526 il réclamait la tolérance civile du culte luthérien. Cet humanisme pacifique exaspérait Luther qui y voyait tiédeur et scepticisme. En 1534 il se répandait en injure sur Érasme dans sa lettre à Amsdorf. L'année suivante Thomas More et John Fisher se faisaient décapiter sur ordre du roi d'Angleterre Henri VIII pour avoir refusé la rupture avec Rome.

    En France, dans le contexte des guerres de religions, la tolérance s'est concrétisée par des édits à partir de 1562 jusqu'à l'Édit de Nantes en 1598. Ces édits de tolérance laissaient le choix entre deux religions : la religion « catholique, apostolique et romaine » commence alors à être appelée catholicisme ; et la « religion prétendue réformée », que l'on appellera plus tard protestantisme. La tolérance reste cependant généralement mal considérée. Le catholique Jean Béguart déclara même en 1563 « La tolérance de deux religions est pire que la licence des bordels. » En 1625, dans le droit de la guerre et de la paix, Grotius envisage la tolérance en un sens encore assez négatif comme « droit du prince de ne pas punir et de ne pas poursuivre les hérétiques en son pays comme en d'autres[92]. ».

    L'idée de tolérance prend ensuite une connotation plus positive en étant associée au principe de liberté de conscience. L'un des premiers a avoir envisagé une forme de tolérance à partir de la liberté de conscience avait été Thomas More dans L'Utopie en 1516. Il y écrivait « conformément à une très ancienne coutume, il n'y a pas chez les Utopiens de délit pour fait de religion ». Le texte qui témoigne d'un changement de réputation de l'idée de Tolérance et le début de son association systématique au principe de la liberté de conscience fut la Lettre sur la tolérance de John Locke publiée vers 1685 à l'insu de son auteur. Au cours du XVIIIe siècle la tolérance devient une vertu sociale enviable et « un grand vecteur de l'audience des Lumières ». « La plupart des grands scandales et débats publics à travers lesquels se dessine et émerge la catégorie d'« opinion publique » [...] ont traits à la religion et aux exigence qu'on lui prête. » Les « précurseurs de la figure de l'intellectuel (p.576) » appellent les consciences libres à la tolérance, c'est notamment le cas de Voltaire avec le Traité sur la tolérance publié en 1763 à l'occasion du scandale que suscita l'affaire Callas.

    La Lettre sur la tolérance de John Locke porte sur la religion en Angleterre dans un contexte de changement de monarque et de réformes politiques. John Locke envisage le pouvoir civil comme le garant des libertés. C'est lui qui dispose de la force publique et Locke souhaite qu'il limite strictement ses interventions à ce qui permet de conserver une liberté pour tous. La religion, quant à elle, doit pouvoir être vécues sans aucune contrainte pour être vraie : « Les églises ne doivent pas servir d'asile aux rebelles et aux criminels ; mais le concours des hommes doit y être aussi libre que dans une foire ou dans un marché, et je ne vois pas pour quelle raison l'une serait plus blâmable que l'autre. p.31 » Cependant la tolérance que réclame John Locke connaît certaines restrictions. Pour préserver la liberté, il faut interdire ce qui s'y oppose. Pour Locke, ce qui fonde la liberté, c'est la religion chrétienne et seulement elle. Il juge donc que toutes les hérésies sont possibles et permises à l'intérieur du christianisme, mais il ne doit pas être permis d'avoir une autre religion que celle qui fonde la liberté. Pour John Locke, les catholiques ne sont pas chrétiens parce qu'ils acceptent une autorité doctrinale, ce que Locke juge contraire à la liberté de conscience. Il ne voit donc pas plus de raison d'autoriser la religion des catholiques que celle des musulmans. Enfin l'athéisme doit aussi être interdit, parce sans la conviction qu'il faut obéir à la loi de Dieu, les hommes ne peuvent profiter des libertés qui leurs sont accordées sans commettre de crimes. A part ces deux limites à la tolérance, tout est possible au sein du christianisme, qu'il s'agisse « des Luthériens, des Calvinistes, des Remontrants, des Anabaptistes et des autres sectes ». John Locke estime leurs doctrines extravagantes, mais les tiens simplement pour hérétiques les unes par rapports aux autres. Tant que l'hérésie ne donne pas lieu à une autre religion que le christianisme, elle doit être autorisée.

    La religion civile

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    les réflexions de Jean-Jacques Rousseau sur la religion sont commandées par le soucis d'établir une société juste. Contrairement à John Locke qui restait de plain-pied dans la religion chrétienne, Rousseau n'envisageait d'abord aucune nécessité de la religion, mais il y vient tout à fait à la fin du Contrat social pour des raisons somme toutes assez semblables à celles données par Locke : sans un minimum de religion rien n'incite à respecter les lois. Rousseau estime donc qu'une religion à minima est nécessaire, il l'appelle « religion civile », c'est « une religion consensuelle, à vocation unificatrice ». Celui qui n'admettrait pas une telle religion devrait être banni « non comme impie, mais comme insociable, comme incapable d'aimer sincèrement les lois, la justice, et d'immoler au besoin sa vie à son devoir ». Des tentatives d'instaurer une religion civile auront lors de la révolution française dont les fait les plus visibles furent la transformation d'églises en temple de l'Être suprême, celle l'église Saint-Geneviève en Panthéon ou plus tard la rédaction d'un catéchisme républicain.

    La religion civile américaine. Les réflexions d'Alexis de Tocqueville sur la place de la religion dans l'Etat moderne et la démocratie avec De la démocratie en Amérique.

    Vincent Peillon propose une analyse du projet de religion civile, de ses échecs et de son actualité dans Une religion pour la République.

    Religions révélées et religion naturelle

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    Aux XVIIIe siècle les religions existantes, dites « positives » ou « révélées », ont été pensées selon leur opposition à une religion naturelle ou rationnelle. Les philosophes ont entre eux des différences de vocabulaire assez importantes, ce qui fait que les expressions « religion naturelle », « religion rationnelle » ou « religion de la nature » ne désignent pas toujours la même chose. Il est cependant possible de reconnaître un clivage entre une religion rationnelle et des religions qui le sont moins ou ne le sont pas du tout, comme un lieu commun de Locke, Hume, Voltaire, Rousseau, Montesquieu, Diderot, Kant, Fichte, Jacobi, etc. Ce clivage est d'abord celui entre le singulier et le pluriel de religion. L'idée d'une religion naturelle apparaît chez Charron ou Grotius comme la recherche du plus petit dénominateur commun en les différentes religions pour sortir des guerres de religions. Chez Hume la religion naturelle se cherche dans une histoire des religions. L'encyclopédie de Diderot et d'Alembert construit entièrement son article « religion » sur une opposition entre « religion révélée » et « religion naturelle ». La religion révélée est de l'ordre de l'histoire et de la tradition, tandis que la religion naturelle est le fond commun des religions de l'humanité et elle peut être connue par la raison.[93]. Voltaire, quant à lui, réservait le nom de religion à ce qu'il exécrait et il défendait contre la religion un théisme et une moralité rationnels. Dans La religion dans les limites de la simple raison, Kant opposait la « pure foi religieuse », qu'il situe dans les limites de la raison, à la « croyance d'Église » : « La question : comment Dieu veut être honoré dans une église, ne paraît pas pouvoir être résolue par la raison pure, mais nécessiter une législation statutaire que nous fait connaître seulement une révélation, par conséquent une foi historique que l’on peut nommer par opposition à la pure foi religieuse, la croyance d’Église.[94] »

    L'opposition entre « religion rationnelle » et « religions positives » a pris une dimension historique et géographique. La religion naturelle est « lointaine » tant dans le temps que dans l'espace. Sur un plan historique, elle est recherchée du côté des origines ou bien c'est une religion à venir, celle vers laquelle devrait tendre l'humanité. Elle est aussi réfléchie dans la religion de ceux qui sont loin de l'Europe, parfois appelés sauvages ou primitifs. Au contraire, les religions positives sont celles du présent de l'Europe, ce sont les religions les mieux connues et les plus proches des Européens. Les philosophes des Lumières et les sciences des religions porteront beaucoup d'intérêt à la religion lointaine. L'expression « religion des sauvages d'Amérique », que l'on trouve dans l'Encyclopédie Diderot et d'Alembert, se trouvait, par exemple, dans le titre du mémoire de l'explorateur et marchand de fourrure Nicolas Perrot qui publia ses observations sur les « mœurs, coutumes et religion des sauvages de l'Amérique septentrionale » en 1704. Ce genre de documents sur l'Amérique, l'Afrique l'Inde ou la Chine, qu'ils soient le fait d'explorateurs ou de missionnaires, donna à penser aux philosophes européens sur les religions du monde par opposition à celles des Européens. Les religions ou la moralité de ces peuples lointains est l'objet de beaucoup d'éloge. Diderot et Rousseau s'intéressent à la moralité du bon sauvage qui échappé à sa corruption dans la société, tandis que Voltaire considérait que les chinois devaient être loués d'avoir su développer des lois et une moralité, et même de connaître Dieu, sans avoir de religion.

    Après les Lumières, l'opposition entre religion naturelle et religion positive est contestée, notamment par Schleiermacher et Hegel. Ce dernier avait consacré quelques écrits à la religion positive dans sa jeunesse[95]. Il a ensuite estimé cette façon d'envisager les religions calée sur l'opposition entre foi et raison dépassée et il a cherché à rendre compte en raison de toutes les religions. Il ne les dit plus « positives » mais « effectives » ou « déterminées », en tant qu'elles seraient la détermination ou l'effectivité de la religion absolue, cette religion absolue n'étant autre que la raison à l'œuvre dans l'histoire[96]. Cependant le XIXe siècle siècle voit surtout se développer une pensée franchement hostile à la religion. Le thème de la religion naturelle ou rationnelle est largement écarté, tandis que de nombreuses théories proposent de penser les religions sur l'horizon de leur disparition, celles-ci refluant à mesure qu'avance la raison.

    Les sciences des religions

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    Les sciences des religions forment un domaine d'étude universitaire qui, dans le monde francophone, peut au moins se définir comme celui rassemblant les études menées dans les institutions qui en ont le titre, notamment, l'Institut européen en sciences des religions, la faculté éponyme de l'Université Laval de Québec ou ce qui se fait sur le sujet au CNRS ou à l'EHESS. Dans le monde universitaire anglophone ce champs disciplinaire est intitulé study of religion, littéralement « étude de la religion », tandis qu'en allemand le terme Religionswissenschaft peut se traduire par « science de la religion ». Ce domaine universitaire rassemble les études menées selon les méthodes des sciences sociales : sociologie, histoire, anthropologie, sciences politiques, psychanalyse, philosophie, ect[97]. L'objet de ces sciences est la religion ou les religions. Cet objet est aussi désigné comme « le religieux », « le fait religieux » ou « la religiosité ».

    Les sciences humaines telles que la sociologie, la psychologie ou l'anthropologie ont établi leur objet et leurs méthodes au XIXe siècle en héritant des conceptions alors disponibles. La sociologie s'est donné pour tâche de rendre compte de la transcendance en pratiquant ce qu'il est possible d'appeler un « athéisme méthodologique », c'est-à-dire sans considération pour l'hypothèse selon laquelle quelque chose transcende réellement le monde[98]. Selon le sociologue Schmuel Trigano « La sociologie de la religion [...] se donnant pour tâche de rendre compte du phénomène de la transcendance - le trait le plus fort de la religion - dans le cadre d'une explication reposant sur le principe de l'immanence absolue de tout phénomène social, ce projet même la conduisait à supposer que l'expérience religieuse était trompeuse, en tout cas illusoire, et que derrière elle se tramait une réalité dont le croyant n'était pas conscient[99]. » La mission des sciences des religions est dès lors d'expliquer les causes et les effets de ces croyances.

    Recherche des causes immanentes de la religion

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    Le statut de la croyance religieuse comme un phénomène sans mystère et explicable par la raison avait été formulé par Karl Marx. Ce dernier réagissait contre ce qu'il envisageait comme idéalisme hégélien. Il s'agit pour Marx, non pas de rejeter la philosophie de Hegel, mais de la remettre sur ses pieds : lorsque Hegel parle de Dieu, il parle du monde et de rien d'autre. Marx pousse ainsi une idée déjà énoncée par Feuerbach dans L'essence du christianisme : « ce que l'homme affirme de Dieu, il l'affirme en vérité de lui-même »[100]. Il est possible de considérer que cette idée était déjà présente chez Voltaire lorsqu'il déclarait « Si Dieu nous a faits à son image, nous le lui avons bien rendu[101]. » Ainsi Marx considère que toutes les projections de la religion « dans les nuages » se prennent de réalités terrestres. Une formule qu'il emploie dans les Thèses sur Feuerbach est que « La famille terrestre est le secret de la sainte famille[102] ». Cette position reflète ou comprend le principe du christianisme selon lequel la création permet une connaissance du Créateur. Sans considération pour Dieu, ce principe devient de lui-même une explication naturelle et cohérente de l'origine mondaine du christianisme ainsi que de toute théologie rationnelle. Avec cette observation, plus la théologie cherche à être rationnelle, plus elle paraît mondaine et donc, mieux elle semble pouvoir être expliquée dans une démarche procédant d'un « athéisme méthodologique » [98].

    Au delà de Karl Marx, le XIXe siècle siècle a fournit de nombreuses théories qui visent a expliquer que les croyances religieuses selon leur logique propre. Le marxisme en rend compte par ses théories sur les rapports de dominations sociaux. Avec Freud elles ont des causes psychologiques telles que la peur de la mort ou la nécessité de gérer de ses névroses. Il est aussi possible de penser à des raisons physiologiques ou culturelles. Selon Luc Ferry, « chez Marx, Nietzsche et Freud, la religion serait a comprendre comme opium du peuple, comme nihilisme, comme névrose obsessionnelle de l'humanité avec toujours la même structure, celle du « fétichisme » : un activité intellectuelle, mi-imaginaire, mi-rationnelle, qui fabrique un produit, en l'occurrence l'idée de Dieu, puis s'empresse d'oublier que c'est elle qui en est de part en part l'auteur.[103] » Au XXe siècle des travaux ont continué d'être produits, ils sont souvent l'occasion pour leur auteur ou leurs éditeurs d'annonces des découvertes « qui révolutionnent les sciences des religions ». Parmi ces découvertes, celle liées aux neurosciences[104] ou à la génétique telle que la théorie du gène égoïste. Les nouvelles thèses sur le sujet ne changent pas l'argument de fond qui reste celui selon lequel l'humanité a une disposition naturelle ou acquise à croire en ce qui pourrait n'être qu'une illusion[103]. Il s'agit d'un argument infiniment réversible et qui au fond n'est ni favorable ni défavorable à la religion car expliquer qu'il existe des raisons pour lesquelles l'humanité croit ceci ou cela, ne permet pas de décider si on a raison ou tord d'y croire.

    Bertrand Russell a remarqué que, dans un perspective hostile aux religions, les aborder en cherchant à expliquer de manière rationnelle le besoin de croire en ce qui ne pourrait être qu'illusion ou erreur revient à déplacer le problème, car il est beaucoup plus facile d'affirmer que les croyances sont des mythes quand au contenu de leurs propositions, que de juger de ce que le fait d'avoir de telles croyances soit bon, et donc que l'on ait finalement des raisons d'y croire[105]. A propos de l'adhésion à la foi catholique, il estime que la situation est la suivante : « Cela, nous pouvons en convenir, suscite une certaine quantité de bonheur au prix d'une certaine quantité de stupidité et de domination par les prêtres. Une telle conception est discutable et discutée, mais nous allons la laisser passer. A présent cependant, arrive la question de savoir si, en admettant que les effets soient ce que je viens de dire, ils doivent être classés comme bons au total ou mauvais au total ; et c'est une question qui est si difficile que notre test de vérité devient pratiquement inutile[105]. » De la même façon Russel écrit : « Il est beaucoup plus facile de découvrir par l'examen direct que le contrat social est un mythe que de décider si la croyance en lui fait au total du bien ou du mal[105] . »

    Approches sociologiques

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    Émile Durkheim

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    Emile Durkheim.

    La sociologie s'est constituée comme une discipline universitaire au moment où elle affirmait sa neutralité par rapport aux croyances religieuses. Cette neutralité est le principe selon lequel la sociologie ne se prononce pas sur la vérité de ce qui est objet de croyance dans les religions. Emile Durkheim parle de cette neutralité en faisant directement écho aux théories de Karl Marx sur la religion et à sa définition de l'idéologie :

    « Nous n'avons pas à rechercher ici s'il s'est réellement rencontré des savants qui [...] ont fait de l'histoire et de l'ethnographie religieuse une machine de guerre contre la religion. En tout cas, tel ne saurait être le point de vue d'un sociologue. C'est en effet un postulat essentiel de la sociologie qu'une institution humaine ne saurait reposer sur l'erreur et le mensonge : sans quoi elle n'aurait pu durer. Si elle n'était pas fondée dans la nature des choses, elle aurait rencontré dans les choses des résistances dont elle n'aurait pu triompher. »

    — Emile Durkheim, Les formes élémentaires de la vie religieuse

    Quelques lignes après avoir écarté l'idée qu'il fasse la guerre contre la religion Emile Benveniste indique cependant que :

    « ces croyances et ces pratiques religieuses paraissent parfois déconcertantes, et l'on peut être tenté de leur attribuer toutes sortes d’aberrations foncières. Mais sous le symbole il faut savoir atteindre la réalité qu'il figure [...]. Les raisons que le fidèle se donne à lui-même pour les justifier peuvent être, et sont même le plus souvent erronées ; les raisons vraies ne laissent pas d'exister ; c'est affaire de science que de les découvrir. »

    La neutralité affichée par la sociologie vis-à-vis des religions est ambiguë et pose toujours question aux sein des sciences des religions. Elle se tient entre l'idée d'une rationalité de la religion que le scientifique est capable de découvrir et une opposition sans cesse réaffirmée aux « raisons que le fidèle se donne à lui-même ». Ainsi, en 1987 Danièle Hervieux Léger, revenant sur l'histoire de la sociologie des religion et ses principes fondateurs se demandait si le sociologue pouvait « échapper à l'impératif de devoir détruire son objet, dans le temps même où il le soumet aux procédures d'analyse et d'étude qui sont celle de sa discipline. »[106] Néanmoins la « neutralité critique » des sciences des religions vis-à-vis des croyances a permis de distinguer la sociologie du militantisme pur et simple et de lui trouver une place dans l'université. En 2010 le dictionnaire des faits religieux s'inscrit dans cette tradition universitaire à la fois critique et distanciée en déclarant proposer « une approche délibérément critique et distanciée, c'est-à-dire libre de toute emprise confessionnelle, usant des méthodes et des outils de pensée des sciences sociales : sociologie, histoire, anthropologie, sciences politiques, psychanalyse, philosophie... »[97]

    Parmi les pères fondateurs des sciences sociales, Émile Durkheim est celui qui a le plus investit sur la recherche d'une définition de la religion. Il donne en 1912 ce qui deviendra la version de référence de la définition moderne de la religion. Pour lui la religion est « un système solidaire de croyances et de pratiques relatives à des choses sacrées, c’est-à-dire séparées, interdites, croyances et pratiques qui unissent en une même communauté morale, appelée Église, tous ceux qui y adhèrent »[107]. Dans cette définition, l’idée de sacré, ne revient pas à reconnaître que le sacré est intrinsèquement sacré, ni que les croyances puissent revendiquées d’être crues de manière absolue car Durkheim entend montrer que ce qui était cru ou tenu pour sacré dans un groupe social particulier, qu’il appelle Église, ne l’était pas dans un autre[108]. D'autre part, selon Durkheim, le sacré se reconstitue toujours car c’est au nom de ce qu’une communauté tient pour sacré, qu’elle repousse un autre sacré.[109].

    Émile Durkheim, cherche à comprendre Les formes élémentaires de la vie religieuse à partir d'études sur la religion des aborigènes d'Australie, qui est selon Durkheim la religion « la plus simple et la plus primitive actuellement connue ». (p.1) « Si nous l'avons prise comme objet de notre recherche, c'est qu'elle nous a paru plus apte que toute autre à faire comprendre la nature religieuse de l'homme, c'est-à-dire a nous révéler un aspect essentiel et permanent de l'humanité. »[110]

    Max Weber.

    L’autre façon d'aborder la religion faisant autorité dans les sciences humaines est celle de Max Weber (1864-1920) qui envisageait, à la même époque que Durkheim, la religion comme une réglementation de la vie dans un monde où l’élément irrationnel est toujours présent, sans être propre aux religions.[109]. Ce qui intéresse Weber dans les religions est la manière dont elles incitent à agir en récompensant ou en blâmant tel ou tel type de comportement. Weber ne pose pas vraiment de définition générale de la religion, mais il s'intéresse a quelques uns de ses traits. Il identifie à partir du protestantisme deux caractéristiques de la religiosité : la mystique et l'ascèse. L'une est l'autre sont comme complémentaires et opposées. La mystique est de l'ordre de la passivité, de la contemplation et du sentiment. L'ascèse est de l'ordre de la rationalité et de l'agir. Max Weber voit dans l’ascétisme protestant l'un des facteurs centraux du développement du capitalisme moderne. L'éthique la plus rigoureuse du protestantisme correspondrait à une manière systématique d'organiser sa vie de sorte que la façon dont les individus mènent leurs activités sociales, y compris celles économiques, procède d'un plan d'ensemble rationnel. La religiosité mystique est foncièrement passive ou contemplative. Elle conduit plutôt à des sentiments d'amour hors monde, qu'à une volonté de changer le monde. Et si ces sentiments semblent devoir déboucher sur un agir, ils s'apaisent dans un agir social toujours soumis à la discipline méthodique et rationnelle de l'ascèse.

    Weber envisage que les religions jouent un rôle positif dans la rationalisation des sociétés notamment en permettant le « désenchantement du monde ». Ce désenchantement n'a rien d'une désillusion ou d'un désappointement, il s'agit d'un « processus de refoulement et d'élimination de la magie »[111]. Ce processus de rationalisation est intra-religieux. Weber le décrit d'abord dans le le judaïsme et le christianisme puis envisage le calvinisme comme la religion qui est allé le plus loin dans ce processus, au point que, selon certain aspect de sa doctrine, le calvinisme paraisse à Weber forme de religion qui aboutit à la disparition de la religion. Weber décrit ainsi une sorte de drame de la religion qui est celui de sa disparition en raison même du procès de rationalisation qu'elle permet. Weber envisage cependant aussi qu'à terme, la rationalisation des sociétés par la religion les conduise à laisser refouler des religions dans le domaine de l’irrationnel.

    Approches anthropologiques

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    Les approches sociologiques des religions se sont d'abord développées en Allemagne et en France. Dans le même temps, en Ecosse, en Angleterre et aux Etats-Unis l'anthropologie et une autre façon d'envisager la psychologie ont connues leur premiers développements.

    En anthropologie, les religions sont étudiées dans le cadre d'une théorie générale de la culture. Avec Herbert Spencer ou Edward Burnett Tylor, l'anthropologie des religions s'est d'abord constituée comme une histoire des religions envisagée selon sur une échelle de l'évolution culturelle. Leur approches sont marquées par l'influences de théories qui relèvent directement de la biologie ou de la physique. Ainsi, la théorie de l'évolution des espèces qui donne lieu à des théories de l'évolution culturelle, tandis que la théorie de la relativité d'Albert Einstein a eut des implications dans le développement de l'étude comparée des religions. Dans le même temps il est possible d'identifier dans les travaux des sciences humaines naissantes certaines options théologiques selon la part que font ces théoriciens à l'idée de création et à la valeur de l'humanité.

    Max Muller (1823-1900) fut l'un de ceux qui tentèrent de fonder l'étude de la religion comme une science tout en s’inscrivant assez clairement dans une perspective théologique. La démarche de Max Müller est en partie guidée par la volonté de faire une contre proposition à la théorie de Darwin sur l'origine et l'évolution des espèces. Ce projet est développé dans le livre Origine et développement de la religion publié en 1879 et dont le titre fait écho à L’Origine des Espèces publié vingt ans plus tôt par Charles Darwin. L'idée centrale que développe Max Müller sur les religions procède d’une théorie du langage, Müller étant aussi considéré comme l’un des fondateurs de la linguistique. Il envisageant l'existence d'un Logos ou d’une rationalité commune à toutes les langues. Celle-ci précède la diversification des langues et restent le principe rationnel de chaque langage. Son attention porte particulièrement sur les mythes, qu'il présente comme des maladies du langage dans le sens où ils cachent une rationalité dans un discours qui n’a pas l’apparence de la rationalité. La mythologie comparée que développe Max Müller a pour but de retrouver le langage sain qui se trouve derrière toutes ces expressions malades. Selon Max Müller, comparer est indispensable dans l'étude des religions. Il affirme à ce sujet : « qui ne connait qu'une seule religion n'en connaît aucune ». Max Müller a donné cette définition de la religion :

    « La religion est une faculté ou disposition mentale qui, indépendamment et voire en dépit des sens et de la raison, rend l'homme capable de saisir l'infini sous différents noms et sous des déguisements divers. Sans cette faculté, aucune religion, pas même les cultes plus grossiers s'adressant à des idoles ou à des fétiches, ne serait possible ; et avec un peu d'attention nous pourrons nous entendre dans toutes les religions une sorte de gémissement de l'esprit, un effort douloureux pour concevoir l'inconcevable, pour exprimer l'inexprimable, une nostalgie de l'infini, un cri d'Amour vers Dieu. »

    — Max Müller, 1873, cité par Daniel Dubuisson dans L'Occident et la religion, p. 92.

    Les disciplines d'étude de la religion que sont la sociologie ou l'anthropologie sont marquées par leurs ancrages respectifs dans le monde anglo-saxon ou le continent européen. Elles ont cependant fait école de part et d'autre. Il existe ainsi des anthropologues européens reconnus tels que le français Claude Lévi-Strauss ou le roumain Mircea Eliade, inversement il existe des spécialiste des religions américains tels que Jonathan Z. Smith que l'on dit néo-durkhémien.

    Approches sociologiques et anthropologique restent marquée d'une certaine tension. L'idée de croyance qui occupe une place première dans les approches sociologiques comme la psychologie freudienne n'est pas absente des approches anthropologiques. Cependant ces dernières peuvent être dites pragmatiques dans la mesure où elles ne cherchent pas tant à élucider la question de la valeur ou de l'essence des croyances, ce qui amène toujours à se poser la question de leur vérité, qu'a en tenir compte. Le pragmatisme renvoie à une forme de scepticisme exprimé depuis longtemps dans le monde anglo-saxon avec Locke et Hume. Ce scepticisme laisse peu inquiet de la diversité des expressions croyantes et l'aveu d'une option théologique identifiée comme telle dans les travaux universitaires n'est pas nécessairement considéré comme celui d'un péché mortel tel que ce peut être le cas dans l'orthodoxie des sciences humaines en Europe continentale. Il n'est d'ailleurs pas tant question de « sciences des religions » en anglais que d'« étude des religions » (study of religions) ou de disciplines universitaires (academic aproach). Cependant

    Compléments

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    Références

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    1. a b c et d Plaute, Curculio (Charançon), v.355 « religio fuit, denegare nolui. » ; Mercator (Le Marchand), v.881, « Religionem illic obiecit, recipiam me illuc. » ; Asinaria, v.782 (« si magis religiosa fuerit, tibi dicat, tu pro illa ores, ut sit propitius. » ; Térence, Adrienne, IV,3 (« nova nunc religio in te istaec incessit ») et V,4 (« Dignus es cum tua religione, odium... ! ») ; Héautontimoruménos, I,3 (« nil esse mihi religio est dicere ») et IV,1 (« Ut stultae et misere omnes sumus religiosae »). Ces textes sont disponibles avec traduction sur L’antiquité grecque et latine.
    2. De Rerum Natura
    3. De la Nature des dieux
    4. Paul Veyne, L'Empire gréco-romain, Paris, Seuil, 2005. (ISBN 978-2020577984)
    5. José Kanty-Turpin, in Lucrèce, De Rerum natura, pp. 46-47.
    6. Lucrèce, De Rerum Natura, I, 136-139
    7. Caton, chez Pline, NH, XXIX, 14, cité dans Rome et l’hellénisme, Ellipses, Paris, 2005, p. 5.
    8. Dans l'œuvre de Virgile le terme religion est rare, il est employé onze fois dans l’Enéide et une fois dans les Géorgiques. Enéide II, 151 ; II, 188 ; II, 365 ; II, 715 ; III, 363 ; III, 409 ; VII, 172 ; VII, 608 ; VIII, 349 ; VIII, 598 et XII, 183 ; Géorgiques I,270. Par exemple, Enéide II, 151 (A propos du cheval de Troie) : « Pourquoi avoir dressé ce cheval énorme ? Qui en est l'auteur ? Que veulent-ils ? Est-ce religion ou machine de guerre ? (Quae religio, aut quae machina belli ?) » ; Enéide II, 188 « à la sortie de la ville, on trouve à l'écart un tumulus et un ancien temple dédié à Cérès, et, tout près de là, un antique cyprès que la religion de nos pères (religione patrum multos seruata per annos) a sauvegardé depuis d'innombrables années. » Enéide II, 365 : « toi qui comprends les astres, et le langage des oiseaux, et les présages qu'annonce leur vol rapide, allons, parle, la religion m'a révélé toute ma course (omnem cursum mihi prospera dixit religio), et les dieux unanimes, dans leur puissance, m'ont persuadé de tendre vers l'Italie et de tenter d'atteindre ces terres lointaines. » Enéide III, 409 : « Drapé dans un tissu de pourpre, tu te voileras la chevelure de peur que, entre les feux sacrés allumés en l'honneur des dieux, n'apparaisse une face ennemie, qui vienne troubler les présages. Que tes compagnons retiennent ces rites sacrés; et toi aussi, garde-les : que tes fils restent dans cette religion. (hac casti maneant in religione nepotes). » Enéide VII, 172 : « Demeure auguste, immense, portée vers le ciel par cent colonnes, elle occupe le sommet de la ville; c'était le palais du roi Laurent Picus, horrifiant les bois et la religion ancestrale (horrendum siluis et religione parentum). » Géorgiques I,270 : « Oui, même aux jours de fête, il est des travaux auxquels les lois divines et humaines permettent de se livrer ; jamais la religion n'a défendu de détourner le cours des ruisseaux, de border la moisson d'une haie, de tendre des pièges aux oiseaux, d'incendier les broussailles et de plonger dans une onde salutaire un troupeau de moutons bêlants. »
    9. Daniel Dubuisson, L'Occident et la religion, Bruxelles, éd. Complexes, coll. Mythes, science et idéologie, 1998, p.40. (ISBN 2-87027-696-6)
    10. Yves Lehmann, Religions de l’Antiquité, Paris, PUF, 1999, p. 226
    11. Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : aucun texte n’a été fourni pour les références nommées benveniste
    12. Grand dictionnaire de la langue latine, 1865, art. « Religio », t.3, p.71. Lecture en ligne sur Gallica.
    13. Pierre Grimal, La civilisation romaine, Champs Flammarion, Paris, 1997 (1ère éd. 1960), p. 71. (ISBN 978-2-08-122303-5)
    14. Scheid John. « Le délit religieux dans la Rome tardo-républicaine », in Le délit religieux dans la cité antique. Actes de la table ronde de Rome (6-7 avril 1978). Publications de l'École française de Rome n°48, Rome, École Française de Rome, 1981. pp. 117-171.
    15. Cicéron, De Inventione, II, 53, trad. Jean Greisch, Le buisson ardent et les lumière de la raison, t.I, Paris, Cerf, p.14.
    16. Cicéron, De Inventione II, 160-162 : « Iustitia est habitus animi communi utilitate conservata suam cuique tribuens dignitatem. Eius initium est ab natura profectum ; deinde quaedam in consuetudinem ex utilitatis ratione venerunt: postea res et ab natura profectas et ab consuetudine probatas legum metus et religio sanxit. Naturae ius est, quod non opinio genuit, sed quaedam in natura vis insevit, ut religionem, pietatem, gratiam, vindicationem, observantiam, veritatem. Religio est, quae superioris cuiusdam naturae, quam divinam vocant, curam caerimoniamque affert; pietas, per quam sanguine coniunctis patriaeque benivolum officium et diligens tribuitur cultus; gratia, in qua amicitiarum et officiorum alterius memoria et remunerandi voluntas continetur; vindicatio, per quam vis aut iniuria et omnino omne, quod obfuturum est, defendendo aut ulciscendo propulsatur; observantia, per quam homines aliqua dignitate antecedentes cultu quodam et honore dignantur; veritas, per quam inmutata ea, quae sunt [ante] aut fuerunt aut futura sunt, dicuntur. Consuetudine ius est, quod aut leviter a natura tractum aluit et maius fecit usus, ut religionem, aut si quid eorum, quae ante diximus, ab natura profectum maius factum propter consuetudinem videmus, aut quod in morem vetustas vulgi adprobatione perduxit; quod genus pactum est, par, iudicatum. »
    17. Catherine Salles, « Dieux romains », in Saint Augustin, La cité de Dieu, Gallimard, Pléiade, 2000, p. 1276. (ISBN 2-07-010694-2)
    18. John Scheid, Quand faire c'est croire,
    19. Jean Greisch, Le buisson ardent et les lumières de la raison, L'invention de la philosophie de la religion, t. I « Héritages et héritiers du XIXe siècle », Paris, Cerf, coll. « Théologie & philosophie », 2002, p. 16 (ISBN 2-204-06857-8). Jean Greisch propose cette traduction de la définition de Cicéron : « La religion est le souci d'une nature supérieure < à l'homme >, que l'on appelle divine, et le fait de lui rendre un culte. »
    20. John Scheid, Religion et piété à Rome, 1ère éd. 1978, Paris, Albin Michel, 2001, pp. 19-27. (ISBN 2-226-12134-X) ; voir aussi John Scheid, La religion des Romains, Paris, Armand Collin, 2002. (ISBN 978-2200263775)
    21. a et b Cicéron, Pro Flacus, 28, 69.
    22. Lucrèce, De Rerum Natura I,927-934 (identique à IV,2-9), trad. José Kany-Turpin, Flammarion, Paris, 1997, pp. 102-103. (ISBN 978-2-0807-0993-6). Dans ce passage le vers « Religionum animum nodis exovelere pergo » peut se traduire plus littéralement par : « Je viens libérer les âmes des nœuds de la religion ». Ce vers sera invoqué comme argument en faveur de l'idée que la religion est à cette époque de l'ordre du lien et donc en faveur de étymologie religare.
    23. José Kany-Turpin, in Lucrèce, De Rerum Natura, Flammarion, Paris, 1997, p. 492. (ISBN 978-2-0807-0993-6)
    24. Lucrèce, De Rerum Natura, I, 45-49, trad. José Kany-Turpin, Flammarion, Paris, 1997. (ISBN 978-2-0807-0993-6)
    25. Lucrèce, De Rerum Natura, I, 63-68, trad. José Kany-Turpin, Flammarion, Paris, 1997. (ISBN 978-2-0807-0993-6)
    26. José Kany-Turpin, in Lucrèce, De Rerum Natura, Flammarion, Paris, 1997, p. 491-492. (ISBN 978-2-0807-0993-6)
    27. Scaevola cité par Augustin d'Hippone, La cité de Dieu, IV, 27.
    28. Jean Pépin, Revue des études augustiniennes, n°2, « La théologie tripartite de Varron, essai de reconstitution et recherche des sources », Paris, 1956, pp. 256-294.
    29. Pierre Hadot, « Les divisions de la philosophie dans l’antiquité » dans Museum Helveticum 36, 1978, pp. 201-223.
    30. Augustin, La cité de Dieu, VI, 5-6.
    31. Joseph Ratzinger, Foi, Vérité, Tolérance, Paris, Parole et silence, 2005, p. 179. (ISBN 2-84573-299-6)
    32. Cf. Clara Auvray-Assayas, in Cicéron, La nature des dieux, Paris, Les Belles Lettres, La roue à livres, 2009. « Introduction », pp. 9-25. (ISBN 978-2-251-33942-9)
    33. Littéralement : « combattre pour les autels et pour les foyers ».
    34. Lactance, Les Institutions Divines, IV, 28, 3
    35. a et b Pierre Gisel, Qu'est-ce qu'une religion, Paris, Vrin, Chemins philosophiques, 2007, pp. 54-58. (ISBN 978-2-7116-1875-0)
    36. a et b Henri-Irénée Marrou, L’Église de l’Antiquité tardive. p. 15-16
    37. Mary Beard, John North et Simon Price, Religions de Rome, trad. Margaret et Jean-Louis Cadoux, éditions Picard, Paris, 2006, p. 9. (ISBN 978-2708407664)
    38. Cf. : Marie-Françoise. Baslez (et alii), Les premiers temps de l'Église, De saint Paul à saint Augustin, Gallimard, Folio Histoire, Paris, 2004. (ISBN 978-2070302048) ; Pierre Maraval, Les persécutions des chrétiens durant les quatre premiers siècles, Desclée, Paris, 1992 ; Simon-Claude Mimouni et Pierre Maraval, Le Christianisme des origines à Constantin, PUF, coll. « Nouvelle Clio », Paris, 2006 (ISBN 978-2130528777) ; Robin Lan Fox, Païens et chrétiens, Presses Universitaires du Mirail, Toulouse, 1997.
    39. Minucius Felix, Octavius, 2 occurrences chapitres 1 et 38. Octavius, texte latin. ; traduction en français
    40. Lactance, les institutions divines, III, 4
    41. Saint Augustin, De vera Religione, V,8.
    42. A propos de l'usage ancien qui consistait a désigner une communauté religieuse comme une religion, cf. l'article Religion sur le site du Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales ; voir aussi l'Homélie sur la perle sur le site du Monastère Saint-Benoît de Port Valais, un texte anonyme du XIIe siècle un temps attribué a Bernard de Clairvaux ; voir enfin le Code de droit canonique de 1917, en particulier les canons 487-681. Le canon 488 pose la définition suivante : « Religion : une société approuvée par l’autorité ecclésiastique légitime, dans laquelle les membres, conformément aux lois de cette société, émettent des vœux publics, soit perpétuels, soit temporaires, - lesquels doivent être renouvelés quand expire le temps pour lequel ils furent émis -, de cette façon les membres tendent à la perfection évangélique. »
    43. Jean Leclerc, « Pour l'histoire de l'expression "philosophie chrétienne" », Mélanges de science religieuse, t.9, 1952, p.221-226 ; voir aussi Pierre Hadot, Qu'est-ce que la philosophie Antique, Gallimard, coll. Folio-Essais, Paris, 2009, (1re éd. 1995) pp. 15-22 et 360 (ISBN 978-2-07-032760-7) ; et Pierre Hadot, Exercices spirituels et philosophie antique, Etudes Augustiniennes, Albin Michel, Paris, 1981 (rééd. 2002 revue et augmentée), (ISBN 978-2226134851)
    44. Gilbert Dahan, Exégèse et théologie, in Olivier Boulnois (dir.), Philosophie et théologie au Moyen Âge, Anthologie tome II, Paris, Cerf, 2009, p.75. (ISBN 978-2-204-08861-9)
    45. a et b Olivier Boulnois, « Naissance de l'université », in, Olivier Boulnois (dir.), Philosophie et théologie au Moyen Âge, Anthologie tome II, Paris, Cerf, 2009, (ISBN 978-2-204-08861-9), pp. 27-29.
    46. Alain de Libera, La philosophie médiévale, Paris, PUF, coll. Quadrige Manuels, 1993 (réed. 2004), voir en particulier le question de le réforme scolaire de Charlemagne pp. 264-268. (ISBN 978-2-13-054319-0)
    47. Cédric Giraud, « Le réseau des écoles cathédrales dans la province ecclésiastique de Reims, dans la première moitié du XIIe siècle », dans Cahiers de recherches médiévales et humanistes, n°18, 2009, pp. 39-51.
    48. Serge Lusignan, « Vérité garde le roy », La construction d'une identité universitaire en France (XIIIe-XVe siècles), Paris, Publications de la Sorbonne, 1999, (ISBN 2-85944-373-8), pp. 102 ss. « Être universitaire, un statut entre clerc et laïc »
    49. Cité dans Rémi Brague, Au moyen du Moyen Âge, Philosophies médiévales en chrétienté, judaïsme et islam, Paris, Flammarion, Champs-Essais n°856, 2008, pp.71-72. (ISBN 978-2-0812-1785-0) D'après « The Monks of Kûblai Khân Emperor of China or the History of the Life and Travels of Rabban Sâwmâ etc. », trad. Sir E. A. Wallis Budge, The Religious Tract Society, Londres, 1928, chap. VIII, p. 183-184. Pour un traduction du texte intégral en français, cf. Pier Giorgio Borgone, (éd.) Un ambassadeur du Khan Argun en Occident, Histoire de Mar Yahlallaha III et de Rabban Sauma (1281-1317), Paris, L'Harmattan, 2008, pp. 100-101. (ISBN 978-2-296-06147-7)
    50. Olivier Boulnois, « Le conflit entre foi et raison, pour une autre histoire de la crise », in, Olivier Boulnois (dir.), Philosophie et théologie au Moyen Âge, Anthologie tome II, Paris, Cerf, 2009, (ISBN 978-2-204-08861-9), pp. 30-41 ; voir aussi et en rapport Alain de Libera, Raison et foi. Archéologie d'une crise d'Albert le Grand à Jean-Paul II, Paris, Seuil, 2002.
    51. a et b Jean Grondin, La philosophie de la religion, Paris, PUF, Que sais-je, 2009, pp. 88-92. (ISBN 978-2-13-056860-2[à vérifier : ISBN invalide])
    52. Thomas d'Aquin, Somme de théologie, IIa IIae, qq. 80-100.
    53. Pour un commentaire des articles sur la religion dans la Somme théologique, cf, Pierre Gisel, Qu'est-ce qu'une religion ?, pp. 98-110.
    54. Rémi Brague, Au moyen du Moyen Âge, pp. 20-21.
    55. a b c d et e Rémi Brague, « Y-a-t-il eut au Moyen Âge un dialogue entre les religions », dans Au moyen du Moyen Âge, Philosophies médiévales en chrétienté, judaïsme et islam, Paris, Flammarion, Champs-Essais n°856, 2008, pp. 343-362. (ISBN 978-2-0812-1785-0).
    56. a b et c Mohammad Ali Amir-Moezzi (dir.), Dictionnaire du Coran, Paris, Robert Laffond, coll. Bouquins, 2007, art. « religion », pp.740-741. (ISBN 978-2-221-09956-8)
    57. Yvonne Yazbeck Haddad, « The conception of the term dîn in the Qur'an », in The Muslim World, n°64, 1974, pp. 114-123.
    58. Rémi Brague, « Y-a-t-il eut au Moyen Âge un dialogue entre les religions », dans Au moyen du Moyen Âge, Philosophies médiévales en chrétienté, judaïsme et islam, Paris, Flammarion, Champs-Essais n°856, 2008, pp. 343-362. (ISBN 978-2-0812-1785-0)
    59. a b et c Marie-Thérèse Urvoy, « religion », in Mohammad Ali Amir-Moezzi (dir.), Dictionnaire du Coran, Paris, Robert Laffond, coll. Bouquins, 2007. p 178. (ISBN 978-2-221-09956-8)
    60. Marie-Thérèse Urvoy, « Communauté »in Mohammad Ali Amir-Moezzi (dir.), Dictionnaire du Coran, Paris, Robert Laffond, coll. Bouquins, 2007, (ISBN 978-2-221-09956-8), p. 178.
    61. Jean Flori, La première croisade. l'Occident chrétien contre l'Islam, Bruxelles, Editions complexes, 1997. « La caricature du l'islam » pp. 189-202 et « De la caricature à la calomnie » pp. 203-218. (ISBN 2-87027-867-5)
    62. Pierre le Vénérable, cité par Jacques le Goff, Les Intellectuels au Moyen Age, Paris, Seuil, 1957, pp. 20-21 ; réed. 1985 (ISBN 978-2020086912)
    63. Victor Segesvary, L’Islam et la Réforme., éd. University Press of America, 2002, p.26 texte en ligne
    64. Rémi Brague, « La philosophie islamique contre le kalâm », in Olivier Boulnois (dir.), Philosophie et théologie au Moyen Âge, Anthologie tome II, Paris, Cerf, 2009, p. 63. (ISBN 978-2-204-08861-9) ; Rémi Brague, Au moyen du Moyen Âge, Philosophies médiévales en chrétienté, judaïsme et islam, Paris, Flammarion, Champs-Essais n°856, 2008, pp. 17-18, (ISBN 978-2-0812-1785-0). Voir aussi, Alain de Libera, La philosophie médiévale, Paris, PUF, coll. Quadrige Manuels, 1993 (réed. 2004), « Philosophie (falsafa) et théologie (kalâm) en terre d'Islam », pp. 91-95. (ISBN 978-2-13-054319-0)
    65. a et b Rémi Brague, « La philosophie islamique contre le kalâm », in Olivier Boulnois (dir.), Philosophie et théologie au Moyen Âge, Anthologie tome II, Paris, Cerf, 2009, pp. 63-67. (ISBN 978-2-204-08861-9)
    66. Moïse Maïmonide, Le guide des égarés, I, 71, trad. S. Munk, Paris 1866, réed. Verdier, 1983, p. 175-177, (ISBN 978-2864320043). Cité plus largement dans Alain de Libera, La philosophie médiévale, Paris, PUF, coll. Quadrige Manuels, 1993 (réed. 2004), pp. 94-95. (ISBN 978-2-13-054319-0)
    67. a et b Dominique Uvroy, Averroès. Les ambitions d'un intellectuel musulman, Paris, Flammarion, Champs biographies 845, 2008. « L'effort de conciliation théorique entre Loi religieuse et Sagesse », pp. 137-139. (ISBN 978-2-0812-1799-1[à vérifier : ISBN invalide])
    68. a b et c Marcel Despland, La religion en Occident. Évolution des idées et du vécu, Paris, Cerf, coll. Cogitatio Fidei, 1979, pp. 228-239. (ISBN 2-204-01447-8)
    69. Michel de Montaigne, Journal de voyage en Italie, 1580-1581, « Bâle ». De passage à Bâle avec son secrétaire, ce dernier écrit « M. de Montaigne jugea qu’ils étaient mal d’accord de leur religion pour les réponses qu’il en reçut : les uns se disant zwingliens, les autres calvinistes, et les autres martinistes ; et il fut averti que plusieurs couvaient encore la religion romaine dans leur cœur. » ; « Toutes les villes impériales ont liberté de deux religions, catholique ou luthérienne, selon la volonté des habitants. » Texte en vieux français sur Wikisource : Michel de Montaigne, Journal du voyage en Italie par la Suisse et l'Allemagne.
    70. Montaigne se base pour cela sur un livre de Du Choul publié en 1556 : Discours de la religion des anciens Romains. cf Marcel Despland, La religion en Occident. Évolution des idées et du vécu, Paris, Cerf, coll. Cogitatio Fidei, 1979, p. 237. (ISBN 2-204-01447-8).
    71. Nicole Lemaitre, L'Europe et les Réformes au XVIe siècle, Paris, Ellipse, 2008, p.100. (ISBN 978-2-7298-3811-9)
    72. a b et c Henrich Fries, « Catholicité/catholicisme », dans Nouveau dictionnaire de théologie, Paris, Cerf, 1996 (2e éd.), p. 116. (ISBN 2-204-05171-3). Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : le nom « Fries 116 » est défini plusieurs fois avec des contenus différents.
    73. Yves Bruley, Histoire du catholicisme, Paris, PUF, Que sais-je ?
    74. a et b Henrich Fries, « Confessions », dans Nouveau dictionnaire de théologie, Paris, Cerf, 1996 (2e éd.), pp. 138-139. (ISBN 2-204-05171-3)
    75. Nicole Lemaire, L'Europe et les Réformes au XVIe siècle, Paris, Ellipes, coll. mondes modernes, p.
    76. Pierre Charron, Réplique sur la Réponse faite la sa troisième Vérité., 1595, p. 231. Lecture sur Google Book. Le Dictionnaire historique de la langue française et les ouvrages qui le cite signalent que le premier emploi du terme « catholicisme » remonte à 1598, dans le Recueil des choses mémorables des choses mémorables avenues en France sous le règne de Henri II.
    77. a et b Yves Bruley, Histoire du catholicisme, Que sais-je, PUF, 2010, pp. 43-44. (ISBN 978-2-13-058596-1)
    78. Le concept de « confessionnalisation » a été développé depuis les années 1980, surtout par des chercheurs allemands (Heinz Schilling et Wolfgang Reinhard), pour décrire la façon dont se sont construites les « confessions » telles que le calvinisme, le Luthéranisme ou le catholicisme suite à la Réforme. Cf, Jean-Claude Monot, Sécularisation et laïcité, Paris, PUF, Philosophies n°193, 2007, « La diversification des voies nationales, sécularisation, confessionnalisation, laïcité, religion civile... » pp.75-112, (ISBN 978-2-13-054180-6) ; voir aussi Wolfgang Reinhard, Papauté, confessions, modernité, trad. Florence Chaix, Paris, Éditions de l'École des Hautes Études en Sciences Sociales, coll. Recherches d'histoire et de sciences sociales n°81, 1998. (ISBN 2-7132-1256-1) ; explication du problème sur le site du CNRS ; présentation du concept sur le site de l'IESR
    79. Marcel Despland, p. 178
    80. Marcel Despland, p. 179.
    81. Articles « religion » dans les dictionnaires et encyclopédies d'autrefois sur le site ARTFL Project, Université de Chicago - CNRS.
    82. Jean Grondin, La philosophie de la religion, Paris, PUF, Que sais-je, 2009, p. 8. (ISBN 978-2-13-056860-2[à vérifier : ISBN invalide]). Michel Malherbe considère que la question de savoir combien il y a de religions aujourd'hui dans le monde ne peut pas trouver de réponse sérieuse. Dans Les religions de l'humainité, il en présente une centaine, notant toutefois que « la quasi totalité » de ceux que l'on dit avoir une religion se rapportent à quatre « grandes religions » : le christianisme, l'islam, l'hindouisme et le bouddhisme. Michel Malherbes, Les religions de l'humanité, Paris, Criterion, 2004, p. 45 et 69. (ISBN 2-7413-0191-3)
    83. a et b Nicole Lemaitre, L'Europe et les réformes au XVIe siècle, Paris, Ellipse, 2008, p. 48. (ISBN 978-2-7298-3811-9), voir aussi Bernard Bourdin, La génèse théologico-politique de l'État moderne : la controverse de Jacques Ier d'Angleterre avec le cardinal Bellarmin, Paris, PUF, coll. Fondements de la politique, 2004, pp. 21-22. (ISBN 2-13-052937-2)
    84. Nicole Lemaitre, L'Europe et les réformes au XVIe siècle, Paris, Ellipses, 2008, p. 179. (ISBN 978-2-7298-3811-9)
    85. Nicole Lemaitre, L'Europe et les réformes au XVIe siècle, Paris, Ellipes, 2008, p. 147. (ISBN 978-2-7298-3811-9)
    86. Olivier Christin, « Confessionnalisation », in Dictionnaire des faits religieux, Paris, PUF, 2010, pp.
    87. Claude Geffré, De Babel à la Pentecôte, Essais de théologie interreligieuse, Paris, Cerf, coll. Cogitatio Fidei n°247, 2006. pp. 354-355. (ISBN 2-204-08027-6)
    88. Jean Grondin, La philosophie de la religion, Paris, PUF, Que sais-je, 2009, « L'essence de la religion : un culte croyant. », pp. 23-37. (ISBN 978-2-13-056860-2[à vérifier : ISBN invalide])
    89. a et b Jean-Marc Tétaz, « image de l'Inconditionné », Eléments pour une théorie pos-métaphysique de la religion à partir de Habermas et Wittgenstein. in Pierre Gisel et Jean Marc Tétatz (dir.), Théories de la religion, Genève, Labor et Fides, 2002, pp. 41-42. (ISBN 2-8309-1015-6[à vérifier : ISBN invalide])
    90. Ulrich Bart, « Qu'est-ce que la religion », in Pierre Gisel et Jean Marc Tétatz (dir.), Théories de la religion, Genève, Labor et Fides, 2002, p. 82. (ISBN 2-8309-1015-6[à vérifier : ISBN invalide])
    91. Rita Hermon-Belot, « Intolérance/tolérance », in pp.575-576.
    92. p. 1039
    93. encyclopédie de Diderot et d'Alembert, « Religion », vol. XIV, p. 74, lecture sur le site ARTFL Encyclopédie Project, Université de Chicago - CNRS.
    94. Emmanuel Kant, La religion dans les limites de la simple raison, trad. Monique NAAR, Paris, Vrin, 2004, VI, 105.
    95. Hegel, La positivité de la religion chrétienne,
    96. Jean-Louis Vieillard Baron, Hegel, système et structures théologiques, Paris, Cerf, Philosophie & théologiqe,
    97. a et b Régine Azria, Dictionnaire des faits religieux, Paris, PUF, 2010, p. VII. (ISBN 978-2-13-054576-7)
    98. a et b Sur la notion d'athéisme méthodologique dans les sciences sociales, cf. Albert Piette, La religion de près. L'activité religieuse en train de se faire, Paris, Métailié, 1999, p. 54. (ISBN 2-86424-321-0). Voir aussi Albert Piette, « Entre la sociologie et le Dieu chrétien: résultats d'une enquête ethnographique dans des paroisses catholiques en France », Information sur les Sciences Sociales, 2002, 41(3), pp. 359-383
    99. Schmuel Trigano, Qu'est-ce que la religion ?, Paris, Champs Flammarion, 556, 2001, p. 8. (ISBN 2-08-080088-4)
    100. Ludwig Feuerbarch, L'essence du christianisme, IV, 36, cité dans Alexis Philoneko, La jeunesse de Feuerbach, 1828-1841, Introduction a ses positions fondamentales, t.2, Paris, Vrin, 1990, p. 468.
    101. Voltaire, Le sottisier, XXXII.
    102. Karl Marx, thèse sur Feuerbarch 4. « Feuerbach part du fait de l'aliénation religieuse de soi, du dédoublement du monde en un monde représenté et un monde réel. Son travail consiste à résoudre le monde religieux en sa base profane. Mais le fait que la base profane se détache d'elle-même pour aller se constituer dans les nuages en royaume autonome ne peut s'expliquer que par le déchirement intime et la contradiction interne de cette base profane. Il faut donc tout à la fois comprendre celle-ci dans sa contradiction et la révolutionner pratiquement. Ainsi, une fois qu'on a découvert par exemple que la famille terrestre est le secret de la sainte famille, c'est la première elle-même qu'il faut alors réduire théoriquement et pratiquement à néant. »
    103. a et b Luc Ferry et Marcel Gauchet, Le Religieux après la religion, Paris, Grasset, Le livre de poche 4404, 2007, (a) p. 21, (b) p.29. (ISBN 978-2-253-08376-4)
    104. Pour une thèse sur la permanence de la religion a partir des neurosciences, cf, Adrew Newberg et alii, Pourquoi Dieu ne disparaîtra pas, Quand la science explique la religion, Paris Sully, 2003. (ISBN 978-2702889633)
    105. a b et c Jacques Bouveresse, Peut-on ne pas croire ?, sur la vérité, la croyance et la foi, Paris, Agone, Banc d'Essais, 2007, p.163 ss. (ISBN 978-2-7489-0068-2), les citations de Russel sont tirée par Jacques Bouveresse de Bertrand Russell, Essais philosophiques, Paris, PUF, 1997, pp. 172-173. (ISBN 978-2130482505)
    106. Danièle Hervieu-Leger, Faut-il définir la religion ?, Questions préalables à la construction d'une sociologie de la modernité religieuse, in Archives des sciences sociales des religions. N. 63, Janvier-Mars 1987, pp. 11-30.
    107. Émile Durkheim, Les formes élémentaires de la vie religieuse, 1912.
    108. (en) Hillary Rodrigues and John S. Harding, Introduction to the Study of Religion, Routledge, New York, 2009, p.66. (ISBN 978-0-415-40888-2)
    109. a et b Pierre Gisel, Qu’est-ce qu’une religion ?, Paris, Vrin, Chemins Philosophiques, 2007, p.13-17 (ISBN 978-2-7116-1875-0)
    110. Emile Durkheim, Les formes élémentaires de la vie religieuse, pp. 1-2.
    111. Jean-Pierre Grossein, in Max Weber, Sociologie des religions, Paris, Gallimard, tel 340, 2006, p. 120, (ISBN 2-07-077982-3). Voir aussi, Marcel Gauchet, Le désenchantement du monde, Une histoire politique de la religion, Paris, Gallimard, 2005, p.10. (ISBN 978-2-07-032943-4)

    Bibliographie

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    Généralités

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    • Philippe Borgereau, Aux origines de l'histoire des religions, Paris, seuil, coll. Librairie du XXIe siècle, 2004. (ISBN 978-2020613194)
    • Marcel Despland, La religion en Occident. Évolution des idées et du vécu, Paris, Cerf, Coditatio Fidei, 1979, 579 p. (ISBN 2-204-01447-8) Document utilisé pour la rédaction de l’article
    • Pierre Gisel et Jean-Marc Tétaz (éd.), Théories de la religion, Genève, Labor et Fides, coll. Religions en perspective, 2002, 414 p. (ISBN 2-8309-1051-6) Document utilisé pour la rédaction de l’article
    • Pierre Gisel, Qu’est-ce qu’une religion ?, Paris, Vrin, Chemins Philosophiques, 2007. (ISBN 978-2-7116-1875-0) Document utilisé pour la rédaction de l’article
    • Jean Greisch, Le buisson ardent et les lumières de la raison, L’invention de la philosophie de la religion, t. 1, Paris, Cerf, Philosophie & théologie, 2002.
    • Jean Grondin, La philosophie de la religion, PUF, Que sais-je ? no 3839, 2009. (ISBN 978-2-13-056960-2) Document utilisé pour la rédaction de l’article
    • Danièle Hervieu-Léger et Régine Azria (dir.), Dictionnaire des faits religieux, PUF, Paris, 2010 (ISBN 978-2-13-054576-7) Document utilisé pour la rédaction de l’article
    • (en) Hillary Rodrigues and John S. Harding, Introduction to the Study of Religion, Routledge, New York, 2009, (ISBN 978-0-415-40888-2).

    Antiquité grecque et romaine

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    • Philippe Borgereau et Francesca Prescendi (éd.), Religions Antiques, une introduction comparée, Labor et Fides, Paris, 2008.
    • Jérôme Alexandre, Philosophie et théologie dans la période Antique, Anthologie tome I, Paris, Cerf, coll. Philosophie & théologie (dir. Philippe Capelle-Dumont), 2009, 397 p. (ISBN 978-2-204-08176-4) Document utilisé pour la rédaction de l’article
    • John Scheid, Religion et piété à Rome, 1ère éd. 1978, Albin Michel, Paris, 2001 ; Quand faire c’est croire, les rites sacrificiels des Romains, Aubier, Paris, 2005. Document utilisé pour la rédaction de l’article
    • Paul Veyne, Les Grecs ont-ils cru en leurs mythes ?, Paris, Seuil, Points-Essais, 1992 ; Quand notre monde est devenu chrétien, 312-394, Albin Michel, Paris, 2006. Document utilisé pour la rédaction de l’article

    Moyen Âge et islam

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    • Olivier Boulnois, Philosophie et théologie au Moyen Âge, Anthologie tome II, Paris, Cerf, coll. Philosophie & théologie (dir. Philippe Capelle-Dumont), 2009, 468 p. (ISBN 978-2-204-08861-9) Document utilisé pour la rédaction de l’article
    • Rémi Brague, Au moyen du Moyen Âge. Philosophies médiévales en chrétienté, judaïsme et islam. Paris, Flammarion, Champs-Essais n°856, 2008. (ISBN 978-2-0812-1785-0)
    • Henry Corbin, Histoire de la philosophie islamique, (1964 et 1974), Paris, Gallimard, folio essais 39, 2002. (ISBN 2-07-032353-6)
    • Alfred-Louis de Prémare, Les fondations de l'islam. Entre écriture et histoire. Paris, Seuil, Points Histoire H407, 2009, 523 p. (ISBN 978-2-7578-1220-4)

    Epoque moderne

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    • Nicole Lemaitre, L'Europe et les Réformes au XVIe siècle, Paris, Ellipses, coll. « Le monde : une histoire », 2008, 264 p. (ISBN 978-2-7298-3811-9)
    • Pierre-Jean Luizard (dir.), Le choc colonial et l'islam, les politiques religieuses de puissances coloniales en terre d'islam, Paris, La découverte, 2006, 546 p. (ISBN 2-7071-4696-X)
    • Arnaud Brotons, Yannick Bruneton et Nathalie Kouamé (dir.), État, religion et répression en Asie. Chine, Corée, Japon, Vietnam (XIIIe-XXIe siècles), Collectif ERA, Paris, Karthala, coll. Hommes et sociétés, 2011, 354 p. (ISBN 978-2-8111-0444-3)
    • Vincent Gossaert, Dans les temples de la Chine. Histoire des cultes, vie des communautés, éd. Albin Michel, Paris 2000, 230 p. (illustré). (ISBN 978-2226114440)
    • Vincent Goossaert, « L’invention des religions en Chine », in Anne Cheng (dir.), La pensée en Chine aujourd'hui, Seuil, Folio-Essais, Paris, 2007. (ISBN 978-2-07-033650-0) Document utilisé pour la rédaction de l’article
    • Patrick Levy Sâdhus, un voyage initiatique chez les ascètes de l'Inde, édition du Relié, 2009 (ISBN 978-2-35490-033-5)

    Sources primaires

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    Antiquité latine

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    L'intention du poète est de « défaire les nœuds dont la religion nous enserre ». Il évoque une victoire contre une religion « soumise et piétinée » grâce à Épicure, « victoire qui nous élève vers le ciel ». Editions : Lucrèce, De Rerum Natura, bilingue, traduction, introduction et notes de José Kany-Turpin, Flammarion, Paris, 1997. (ISBN 978-2-0807-0993-6). Document utilisé pour la rédaction de l’article

    • Cicéron, La nature des dieux, trois livres, 44 av. J.-C..

    Ce dialogue est à la fois une introduction générale à la philosophie grecque pour les latins et un aperçu des théories antiques de la religion. Editions : Cicéron, La nature des dieux, traduction, introduction et notes de Clara Auvray-Assayas, Paris, Les Belles Lettres, coll. La roue à livres, 2002 (ISBN 978-2251339429). Document utilisé pour la rédaction de l’article

    Rédigé après sa conversion en 193 et avant qu'il ne rompe avec l'Eglise en 213, Tertullien y tient un discours d'« apologie », c'est-à-dire de défense ou de justification, face aux accusations adressées aux chrétiens, notamment celle d'irreligion, de crime contre la religion ou d'impiété. Il soutient que non seulement les chrétiens sont « de bons citoyens » et donc qu'ils n’enfreignent pas la religion, mais aussi que la « vraie religion » est celle qu'ils pratiquent. Editions : Tertullien, Apologétique, traduction de Jean-Pierre Waltzing, introduction et notes Pierre-Emmanuel Dauzat, Paris, Belles Lettres, coll. CUF latine, 1970, (ISBN 978-2251012780), réed. 2002, coll. Classique Poche, (ISBN 978-2251799384). Traduction de 1914 par Jean-Pierre Waltzing sur Tertullian.org.

    L'un des premiers textes où il est question de « religio vera » (date incertaine entre 200 et 245). L'auteur qui ne dit pas explicitement qu'il est chrétien mais son argumentation sur la religion s'apparente à celle des apologistes chrétiens. Editions : Minucius Felix, Octavius, traduction introduction et notes de Jean Beaujeu, (1re éd. 1964), rééd. Paris, Belles Lettres, CUF, 2003. (ISBN 978-2251011165) ; une édition de 1911 est consultable sur le site Gallica de la BNF.

    • Lactance, Les Institions Divines, sept livres, début IVe siècle

    Dans le quatrième livre, l'auteur défend que sans religion ceux qui cherchent la Sagesse ne peuvent l'atteindre, et sans la Sagesse la religion n'est pas vraie religion. Editions : Lactance, Les Institutions Divines IV, trad. Pierre Monat, Paris, Cerf, Sources Chrétiennes 377, 1992. Réédition 2010 d'une traduction de 1837 : Jean Alexandre C. Buchon, Choix De Monumens Primitifs De L'Eglise Chrétienne, 1837. Kessinger Publishing, 2010, 796 p. (ISBN 978-1162416656)

    Comporte la thèse suivante : « Nous croyons et nous enseignons, ceci est le principe de l'humanité, que la philosophie, c'est-à-dire l'amour de la Sagesse, n'est autre que la vraie religion. ». Editions : Saint Augustin, La vraie religion, précédé de La vie de saint Augustin par son disciple et ami Possidonius, Via Romana, Coll. L'absolu n° 1, 2010. (ISBN 978-2-916727-82-0) ; Lecture dans une traduction de 1864 sur le site de l'Abbaye de Saint-Benoît, texte latin sur Augustinus.it

    Les livres VI à X de La Cité de Dieu exposent et discutent des théories antiques de la religion. C'est une source importante pour connaître les traités disparus de Varron. Editions : Sources chrétiennes (bilingue) ; Saint Augustin La Cité de Dieu, trad. Lucien Jerphagnon (dir.), Paris, Gallimard, Pléiade, 2000. (ISBN 2-07-010694-3[à vérifier : ISBN invalide]).

    La plupart de ces textes sont disponibles en lecture bilingue avec traductions du XIXe siècle sur Itinera Electronica, un site de l'UCL, et sur L'antiquité grecque et latine

    Philosophie de la religion XVIIIe-XXe siècles

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    Linguistique, sociologie

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    Articles connexes

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    Religion Étymologie de religion Philosophie de la religion Sciences des religions Sociologie des religions