Stèles de La Ghorfa
Les stèles de La Ghorfa sont une série de stèles réparties entre divers musées. Retrouvées à partir de la fin du XIXe siècle, leur provenance précise, à savoir Maghrawa, n'a été éclaircie que récemment, grâce aux travaux d'Ahmed M'Charek. Les pièces archéologiques sont importantes car elles témoignent des liens interculturels entre substrat phénico-punique et civilisation romaine.
Histoire
[modifier | modifier le code]Les stèles, datées de la fin du Ier et du début du IIe[1] ont été découvertes en 1842 par un architecte allemand, d'autres ont été mises au jour en 1860 puis en 1873[2] ; ces découvertes ont été publiées en 1896. Les quatre dernières stèles ont été trouvées en 1967.
La série connue à ce jour comporte une quarantaine de pièces : 22 stèles sont exposées au British Museum de Londres, deux au musée du Louvre, dans le département des antiquités orientales[3] et trois au Kunsthistorisches Museum de Vienne. La Tunisie en a conservé pour sa part 17, soit douze au musée national du Bardo, quatre au musée de Makthar et la dernière à l'antiquarium de Dougga[4].
Les exemplaires du Bardo proviennent d'une collection privée[5], celle réunie dans les années 1870 à La Manouba par Mohamed Khaznadar, fils du ministre Mustapha Khaznadar.
Description
[modifier | modifier le code]Les stèles complètes mesurent environ 1,75 mètre de haut et contiennent parfois des dédicaces en latin[1]. Leur forme est stéréotypée ; elles sont dotées d'un sommet de forme triangulaire et divisées en trois registres superposés, « représentation hiérarchisée du cosmos »[6].
Registre supérieur
[modifier | modifier le code]Le registre supérieur représente le monde divin sous forme humaine. Des symboles astraux représentent la lune et le soleil, qui est parfois figuré avec un visage. Le signe de Tanit est parfois figuré, avec un cortège de divinités romaines dont Hermès, Éros ou Vénus représentés sur les deux côtés du fronton de la chapelle figurant le dédicant.
Registre médian
[modifier | modifier le code]Le dédicant est situé au milieu : il est debout dans ce qui semble être une chapelle, avec colonnes et fronton. Les dédicants peuvent être des hommes ou des femmes.
Registre inférieur
[modifier | modifier le code]Le dernier registre figure parfois des Atlantes portant l'étage supérieur, accompagnés parfois d'une scène de sacrifice, auquel est destiné un bœuf. Le sacrificateur est parfois figuré[7].
Interprétation
[modifier | modifier le code]Les stèles témoignent du syncrétisme à l'œuvre en Afrique romaine[8]. Gilbert Charles-Picard les considérait comme des « œuvres d'art d'une puissante originalité et comme le seul témoignage de la pensée théologique punique, en Afrique, pendant l'Empire romain »[9].
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Stèles situées au musée de Makthar.
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Stèles au musée national du Bardo.
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Autre vue de la même série.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Edward Lipinski [sous la dir. de], Dictionnaire de la civilisation phénicienne et punique, éd. Brepols, Turnhout, 1992, p. 189 (ISBN 2503500331).
- René Dussaud, « C. Gilbert Picard. - Catalogue du musée Alaoui », Syria, vol. 34, n°34-1-2, 1957, p. 181-182.
- M'hamed Hassine Fantar, De Carthage à Kairouan : 2 000 ans d'art et d'histoire en Tunisie, éd. Association française d'action artistique, Paris, 1982, p. 108.
- Nayla Ouertani, « La sculpture romaine », La Tunisie : carrefour du monde antique, éd. Faton, Dijon, 1995, p. 97.
- Mohamed Yacoub, Le musée du Bardo : départements antiques, éd. Agence nationale du patrimoine, Tunis, 1993, p. 34.
- Hédi Slim, Ammar Mahjoubi, Khaled Belhodja et Abdelmajid Ennabli, Histoire générale de la Tunisie, tome I « L'Antiquité », éd. Maisonneuve et Larose, Paris, 2003, p. 139 (ISBN 9782706816956).
- M'hamed Hassine Fantar, op. cit., p. 109.
- Aïcha Ben Abed-Ben Khedher, Le musée du Bardo, éd. Cérès, Tunis, 1992, p. 19.
- [RTF] Gilbert Charles-Picard, « La recherche archéologique en Tunisie des origines à l'Indépendance », Cahiers des études anciennes, vol. XVI, 1983, p. 11-20.
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- (it) Anna Maria Bisi, « A proposito di alcune stele del tipo della Ghorfa al British Museum », Antiquités africaines, vol. 12, 1978, p. 21-88 (lire en ligne)
- (it) Elena Francesca Ghedini, « Ancora sulle stele della Ghorfa : qualche precisazione », L'Africa romana, vol. VII, éd. Gallizzi, Sassari, 1990, p. 233-244
- Ahmed M'Charek, « Maghrawa, antique Macota (Tunisie) », Antiquités africaines, 1996
- (en) Jennifer P. Moore, « Cultural elasticity in the inscriptions of the so-called « La Ghorfa » stelae », Antiquités africaines, vol. 35, 1999, p. 31-37 (lire en ligne)
Liens internes
[modifier | modifier le code]Liens externes
[modifier | modifier le code]- Ahmed M'Charek, « Maghrawa, lieu de provenance des stèles punico-numides dites de la Ghorfa », Mélanges de l'École française de Rome, vol. 100, n°2, 1988, p. 731-760
- André Piganiol, « Sur la source du Songe de Scipion », CRAI, 1957, vol. 101, n°1, p. 88-94
- [doc] Le paganisme en Afrique proconsulaire sous l'Empire romain. Bilan d'un demi-siècle de recherche par Louis Foucher