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Plutonyle

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Le plutonyle est l'oxycation PuO22+, dans lequel le plutonium est à l'état d'oxydation +6. Il est semblable à l'ion uranyle UO22+, avec cependant une liaison métaloxygène légèrement plus courte. Il est facilement réduit en plutonium(III). L'ion plutonyle forme de nombreux complexes, particulièrement avec les ligands ayant des atomes donneurs d'oxygène. Les complexes de l'ion plutonyle sont importants dans le retraitement des combustibles nucléaires ainsi que dans l'étude des contaminations de l'environnement[1],[2].

Propriétés chimiques

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La chimie de l'ion plutonyle ressemble très étroitement à celle de l'ion uranyle. Ces deux ions sont linéaires, le métal étant situé entre les deux atomes d'oxygène. De nombreux composés de ces deux ions sont isostructurels. La fréquence d'élongation νPu–O est inférieure d'environ 20 cm-1 par rapport à celle de l'ion uranyle, de l'ordre de 910 cm-1, lorsque le plutonyle est complexé avec les mêmes ligands[3]. On peut en déduire que la liaison Pu–O est légèrement plus faible que la liaison U–O. La structure électronique des deux ions et de leurs complexes est également semblable[4].

En solution aqueuse

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L'hydrolyse des composés de plutonyle en solution aqueuse présence cependant quelques différences par rapport aux composés d'uranyle, du point de vue de la nature des polymères susceptibles d'être formés ainsi que de leur constante d'hydrolyse β*[5] :

Les espèces d'hydrolyse mononucléaires et dinucléaires présentent des bandes d'absorbance à 842 nm et 845 nm de longueur d'onde. La connaissance des espèces d'hydrolyse des complexes de plutonyle est importante pour la compréhension de la pollution des eaux naturelles.

Potentiel d'oxydoréduction

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Par ailleurs, l'ion plutonyle est un oxydant bien plus fort que l'ion uranyle. Le potentiel standard du couple rédox MO22+/M4+ vaut ainsi 0,38 V pour l'uranyle et 1,04 V pour le plutonyle, tandis que celui du couple M4+/M3+ vaut −0,52 V pour l'uranium mais 1,01 V pour le plutonium. A contrario, l'ion plutonyle est plus facilement réduit que l'ion uranyle. Cette différence est mise à profit pour séparer le plutonium de l'uranium par le procédé PUREX.

L'ion plutonyle est toujours associé à d'autres ligands. L'arrangement le plus courant consiste en des ligands équatoriaux liés perpendiculairement à l'axe O–Pu–O au niveau de l'atome de plutonium. Avec quatre ligands, comme dans le [PuO2Cl4]2−, l'atome de plutonium présente une géométrie octaédrique distordue avec les quatre ligands formant un carré dans le plan équatorial. Avec six ligands, comme dans le nitrate de plutonyle hydraté PuO2(NO3)2·2H2O, il se forme un hexagone dans le plan équatorial, ici avec six atomes d'oxygène (deux provenant des molécules d'eau, et quatre provenant des deux nitrates, qui sont bidentates).

Le nitrate de plutonyle est soluble dans l'éther diéthylique, tout comme le nitrate d'uranyle ; les molécules d'éther prennent la place des molécules d'eau dans ce cas. Le complexe est électriquement neutre, ce qui permet sa solubilité dans les solvants organiques. Le fait de remplacer les molécules d'eau liées à l'ion plutonyle en solution aqueuse par un ligand hydrophobe a pour effet d'accroître la solubilité du complexe de plutonyle dans les solvants organiques ; ce phénomène est parfois appelé effet synergique[6].

Application au procédé PUREX

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La solubilité du nitrate de plutonyle dans les solvants organiques est utilisée dans le procédé PUREX. Le nitrate de plutonyle est extrait par du phosphate de tributyle (CH3CH2CH2CH2O)3PO comme ligand hydrophobe dans le kérosène comme solvant organique. Il est récupéré à l'aide de sulfamate ferreux aqueux qui réduit sélectivement le plutonium à l'état d'oxydation +3 dans la solution aqueuse, laissant l'uranium dans la solution organique.

Notes et références

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  1. (en) Jonathan L Sessler, Anne E. V Gorden, Daniel Seidel, Sharon Hannah, Vincent Lynch, Pamela L. Gordon, Robert J. Donohoe, C. Drew Tait et D. Webster Keogh, « Characterization of the interactions between neptunyl and plutonyl cations and expanded porphyrins », Inorganica Chimica Acta, vol. 341,‎ , p. 54-70 (DOI 10.1016/S0020-1693(02)01202-1, lire en ligne)
  2. (en) Seong-Yun Kim, Koichiro Takao, Yoshinori Haga, Etsuji Yamamoto, Yoshihisa Kawata, Yasuji Morita, Kenji Nishimura et Yasuhisa Ikeda, « Molecular and Crystal Structures of Plutonyl(VI) Nitrate Complexes with N-Alkylated 2-Pyrrolidone Derivatives: Cocrystallization Potentiality of UVI and PuVI », Crystal Growth Design, vol. 10, no 5,‎ , p. 2033-2036 (DOI 10.1021/cg100015t, lire en ligne)
  3. (en) P. V. Balakrishnan, S. K. Patil, H. D. Sharma et H. V. Venkatasetty, « Chemistry of the complexes of uranyl and plutonyl ions with organic ligands », Revue canadienne de chimie, vol. 43, no 7,‎ , p. 2052-2058 (DOI 10.1139/v65-275, lire en ligne)
  4. (en) J. Simon Craw, Mark A. Vincent, Ian H. Hillier et Andrew L. Wallwork, « Ab Initio Quantum Chemical Calculations on Uranyl UO22+, Plutonyl PuO22+, and Their Nitrates and Sulfates », The Journal of Physical Chemistry, vol. 99, no 25,‎ , p. 10181-10185 (DOI 10.1021/j100025a019, lire en ligne)
  5. (en) Sean D. Reilly et Mary P. Neu, « Pu(VI) Hydrolysis:  Further Evidence for a Dimeric Plutonyl Hydroxide and Contrasts with U(VI) Chemistry », Inorganic Chemistry, vol. 45, no 4,‎ , p. 1839-1846 (PMID 16472001, DOI 10.1021/ic051760j, lire en ligne)
  6. (en) H. Irving, « Synergic Effects in Solvent Extraction », Angewandte Chemie – International Edition,‎ (DOI 10.1002/anie.196500951, lire en ligne)