En particulier, la fonction L de Dirichlet du caractère trivial (N = 1) est la fonction zêta de Riemann, dont le résidu au point 1 est, comme celui de toutes les fonctions zêta de Hurwitz, égal à 1.
Pour tout caractère non principal, le point 1 n'est pas un zéro de la fonction.
Démonstration historique
N désigne encore le modulo des caractères étudiés.
Il existe au plus un caractère dont la fonction L a 1 pour racine. Soit r le nombre de caractères dont la fonction L a 1 pour racine. Les autres fonctions L sont holomorphes, sauf celle du caractère principal χ0, dont 1 est pôle d'ordre 1. Le produit ψ de toutes ces fonctions L vérifie donc, sur un disque épointé D de centre 1 du plan complexe, une majoration de la forme suivante, pour un certain réel M :
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Or un calcul (cf. § « Produit eulérien » de l'article « Caractère de Dirichlet ») montre que si U désigne le groupe des unités de ℤ/Nℤ, Û son groupe dual de caractères, P l'ensemble des nombres premiers et s un nombre complexe de partie réelle strictement supérieure à 1 :
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En choisissant pour u l'élément neutre du groupe on obtient, pour tout réel s > 1 :
ce qui, compte tenu de (2), prouve que r est inférieur ou égal à 1.
La fonction L d'un caractère non réel n'admet pas 1 comme racine. Si un caractère χ est non réel et si sa fonction L admet 1 comme racine alors son caractère conjugué est différent de lui-même et sa fonction L admet aussi 1 comme racine. Le lemme précédent montre que cette configuration est impossible.
La fonction L d'un caractère réel non principal n'admet pas 1 comme racine. Cette démonstration est plus délicate. Elle a retenu Dirichlet pendant un an. Celle présentée ici est l'œuvre d'Aleksandr Gelfond et Atle Selberg. C'est un raisonnement par l'absurde. On suppose donc que χ est un caractère réel non principal et que L(1, χ) est nul. Soit (an(t)) où n est un entier strictement positif, la suite de fonctions sur ]0, 1[ définie par :
La suite (an(t)) est décroissante. Calculons an– an + 1 :
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La minoration (3) montre que :
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En multipliant l'inégalité (5) par la bonne fraction, on obtient :
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L'inégalité (6) prouve bien que la différence (4) est positive.
La série de terme général an(t) χ(n) est absolument majorée par le modulo N du caractère. On effectue sur la série une transformation d'Abel :
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Comme la suite (an(t)) est positive et décroissante, la valeur an(t) – an + 1(t) est positive et majorée par a1(t) = 1. La fonction χ est périodique de période N et (cf. équation (1) de la boîte déroulante précédente) la somme de ses valeurs sur N entiers consécutifs est nulle. Les χ(m) sont de module 0 ou 1, ce qui montre que leur somme ne dépasse jamais N en module. On a donc bien :
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La série de terme général an(t) χ(n) vérifie l'égalité suivante :
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En effet, par définition de la série :
or L(1, χ) est supposé nul.
La série de terme général an(t) χ(n) vérifie l'égalité suivante :
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En effet, l'égalité (8) montre que :
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La fonction A(m) est à valeurs entières, elle est positive et strictement positive si m est un carré parfait. χ est un caractère réel, il prend donc ses valeurs dans l'ensemble {–1, 0, 1}, en conséquence A(m) prend ses valeurs dans les entiers. Soit p un nombre premier et k un entier positif. Si p divise N alors toute puissance de p autre que p0 est d'image nulle par χ et A(pk) = 1. Si χ(p) est égal à 1, alors toute puissance de p a la même image par χ car un caractère est une fonction complètement multiplicative et A(pk) est égal à k + 1. Enfin si χ(p) est égal à –1, alors toute puissance de p a pour image par χ : 1 si l'exposant est pair et –1 dans le cas contraire. En conséquence A(pk) est égal à 1 si k est pair et 0 dans le cas contraire. Toute puissance d'un nombre premier possède donc une image positive ou nulle par A. Il suffit alors de remarquer que A est une fonction multiplicative pour conclure que les images de A sont toujours positives. Enfin si m est un carré parfait alors A(m) est strictement positif, comme produit de termes de la forme A(p2k), tous strictement positifs.
Conclusion Il existe une infinité de carrés parfaits. L'égalité (9) montre que l'expression, en module, peut être choisie aussi grande que l'on veut, si t est suffisamment proche de 1. Ce résultat est en contradiction avec la majoration (7), ce qui termine la démonstration.
Pour tout p premier ne divisant pas N, notons d(p) et h(p) = φ(N)/d(p) les ordres respectifs de l'image et du noyau du morphisme χ ↦ χ(p), de Û dans ℂ*. Alors, l'image de ce morphisme est le groupe des racines d(p)-ièmes de l'unité et chacune de ces racines a h(p) antécédents, donc
diverge puisqu'une infinité des entiers naturels an sont non nuls (par exemple parce que le coefficient de p–d(p)s est h(p) et qu'il y a une infinité de nombres premiers).
Par conséquent, l'abscisse d'holomorphie de ψ est différente de –∞, donc ψ n'est pas prolongeable en une fonction entière. Il n'existe donc, parmi les caractères modulo N, aucun χ dont la fonction L puisse admettre 1 pour racine et venir ainsi compenser le pôle simple de la fonction L du caractère principal.
Si χ est un caractère primitif avec χ(–1) = 1, alors les seuls zéros de L(s, χ) avec Re(s) < 0 sont les entiers pairs négatifs.
Si χ est un caractère primitif avec χ(–1) = –1, alors les seuls zéros de L(s, χ) avec Re(s) < 0 sont les entiers impairs négatifs.
Hormis l'existence possible d'un zéro de Siegel, beaucoup de résultats similaires à la fonction zêta de Riemann sont connus sur les régions sans zéro de toutes les fonctions L de Dirichlet, à gauche de la droite Re(s) = 1.
↑Autrement dit, pour les caractères non principaux : la fonction L associée est une fonction entière. Voir aussi Pierre Colmez, Éléments d'analyse et d'algèbre (et de théorie des nombres), Palaiseau, Éditions de l'École polytechnique, , 469 p. (ISBN978-2-7302-1563-3, lire en ligne), p. 291, théorème VII.4.4. On peut montrer de plus – mais ce n'est pas utile ici – que la série converge vers son prolongement holomorphe sur le demi-plan Re(s) > 0, comme toute série de Dirichlet ∑an/ns dont l'ensemble des sommes a1 + … + anest borné.