Arrêt Société immobilière de Saint-Just
Arrêt Société immobilière de Saint-Just | ||||||||
Titre | Tribunal des conflits, 2 décembre 1902, Société immobilière de Saint-Just | |||||||
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Code | no 00543 | |||||||
Pays | ![]() |
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Tribunal | (fr) Tribunal des conflits |
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Date | ||||||||
Détails juridiques | ||||||||
Branche | Droit administratif, exécution forcée | |||||||
Importance | Un des grands arrêts du droit administratif | |||||||
Problème de droit | Conditions de l’exécution forcée par l’administration de ses propres décisions | |||||||
Solution | L’exécution forcée est possible (1) lorsqu’elle est prévue par la loi, (2) en cas d’urgence ou (3) si les quatre conditions cumulatives suivantes sont réunies : (a) il n’y a aucune autre sanction légale, (b) l’opération administrative a sa source dans un texte précis, (c) elle s’est heurtée à une résistance ou mauvaise volonté, (d) les mesures d’exécution forcée tendent uniquement à cet objet immédiat. | |||||||
Voir aussi | ||||||||
Mot clef et texte | Histoire du droit administratif, actes administratif, exécution forcée | |||||||
Actualité | Les conditions (1) et (2) de l’exécution forcée restent fréquemment citées. La condition (3) est plus rarement applicable depuis la réforme du Code pénal de 1992. | |||||||
Lire en ligne | Texte Analyse de l'arrêt sur le site du Conseil d'État |
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L'arrêt Société immobilière de Saint-Just est un arrêt rendu par le Tribunal des conflits le , et s'inscrit dans la vaste offensive anticléricale qui a marqué la politique de l'État français entre 1880 et 1920[1]. Il est remarquable par les conclusions prononcées par le Commissaire du gouvernement de l'époque, Jean Romieu, qui deviennent pour le juge la doctrine du droit administratif en matière d'exécution forcée[1].
L'administration française avait jusque-là un pouvoir autoritaire étendu, qui lui permettait de faire respecter ses décisions sur l'ensemble du territoire, et l'on acceptait qu'elle puisse dans ce but recourir à la force si besoin est[2]. Or, le Tribunal des conflits et Jean Romieu ont précisé que telle vision était fortement réductrice.
Les hypothèses permettant l’exécution forcée
[modifier | modifier le code]En droit français, la décision de recourir à l'exécution forcée n'est légale que dans trois hypothèses distinctes :
- L'exécution forcée est explicitement prévue par la loi. Cette disposition nouvelle s'inspire de l'article 21 de la loi du sur les réquisitions militaires.
- Il y a urgence[3]. À ce titre, le commissaire du gouvernement Romieu conclut : « il est de l’essence même du rôle de l’administration d’agir immédiatement et d’employer la force publique sans délai ni procédure, lorsque l’intérêt immédiat de la conservation publique l’exige ; quand la maison brûle, on ne va pas demander au juge l’autorisation d’y envoyer les pompiers ».
- Il n'existe aucune autre sanction légale. Cette disposition, qui est l’objet principal de la décision du 2 décembre 1902, a été précisée par l'arrêt Abbé Bouchon du qui utilise la formule suivante : le recours à la force est requis "à défaut de toute autre procédure pouvant être utilement employée ». Mais si l’arrêt Société immobilière de Saint-Just reconnaît cette troisième voie, qui consiste en un privilège de l’administration lorsqu’elle n’a pas d’autre solution, il lui fixe des conditions strictes.
Les conditions du privilège de l’exécution forcée
[modifier | modifier le code]Dans cette dernière situation d’exécution forcée, plusieurs conditions doivent en effet être remplies :
- Il ne doit exister aucune sanction légale (caractère subsidiaire). En particulier, lorsque la résistance à l’exécution de l’acte a le caractère d’une infraction pénale, cette condition n’est pas remplie. L’introduction dans le nouveau code pénal de 1994 d’un article faisant du non-respect des règlements de police une contravention (article R. 610-5) conduit ainsi à écarter l’exécution forcée dans de nombreux cas.
- La décision donnant lieu à exécution forcée doit trouver sa source dans un texte de lois précis.
- L'administré confronté à l'exécution forcée doit avoir manifesté une « mauvaise volonté caractérisée[4] » ou une « résistance certaine ».
- L'exécution forcée ne doit tendre qu'à l'application d'une décision légale, et l'usage de la contrainte ne doit pas excéder ce qui est strictement indispensable à cette application[5].
Les conséquences d'un recours illégal à l'exécution forcée
[modifier | modifier le code]La sanction du recours illégal à l'exécution forcée consiste en la qualification de cette décision administrative comme voie de fait[6], et ce dès lors qu'elle porte atteinte à un droit ou une liberté[7], sauf si l'exécution forcée est prévue par la loi.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Jean-Claude Ricci Mémento de la Jurisprudence administrative Ed. Hachette Supérieur p. 14
- ↑ Jean-Claude Ricci Droit administratif général Ed. Hachette supérieur
- ↑ Dans le même sens : CC, no 79-109 DC du 9 janvier 1980
- ↑ Voir conclusions de Celier sur l'arrêt Mathian, 22 novembre 1946
- ↑ Jean-Claude Ricci Droit administratif général Ed. Hachette Supérieur
- ↑ Marceau Long Les grands arrêts de la jurisprudence administrative Ed. Hachette Supérieur
- ↑ TC, 25 novembre 1963, Commune de Saint-Just-Chaleyssin