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Thierry Girard

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Thierry Girard
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Voir et modifier les données sur Wikidata (73 ans)
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Thierry Girard (né le (73 ans) à Nantes) est un photographe français originaire de l'ouest de la France, dont l'œuvre exigeante se développe avec constance depuis la fin des années 1970. Il a construit son travail à partir de la question de l'itinéraire et du parcours, poursuivant une réflexion sur la représentation artistique des paysages urbains et périurbains.

Thierry Girard est reconnu comme un photographe de paysages, notamment grâce à ses itinéraires, ses longs périples, ses marches photographiques ou ses dérives urbaines aux États-Unis, en Chine, au Japon, en Inde, dans de nombreux pays en Europe, et bien sûr en France. Il s’intéresse plus particulièrement à des territoires dont il va fouiller l'épaisseur et les histoires et choisit des itinéraires qui ont une histoire, une référence littéraire, artistique, culturelle. Il a ainsi travaillé sur les Ardennes de Rimbaud, effectué un tour de la Méditerranée sur les traces d'Ulysse, suivi le parcours des cinquante-trois stations du Tōkaidō d'Hiroshige au Japon ou parcouru la Chine, lors de trois voyages au pays du réel, en suivant la grande diagonale du Nord-Est au Sud-Ouest empruntée par la mission archéologique de Victor Segalen en 1913-1914.

En 1984, son travail est récompensé par l'attribution du prix Niépce, qui couronne un début de carrière prometteur et qui lui vaudra d'exposer dans l'ancien Palais de Tokyo, à l'époque où Robert Delpire y présentait les expositions du Centre national de la photographie.

Diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris en 1974, Thierry Girard quitte la voie toute tracée qui s'ouvrait devant lui après l'obtention de son diplôme pour emprunter des chemins de traverse.

Il commence à photographier, à partir de 1976, après avoir notamment découvert le travail photographique de Robert Frank. Il part alors en Angleterre se confronter avec l'East End de Londres.

Au début des années 1980, il s'efforce de mettre en place les codes esthétiques d'une photographie très influencée par les américains Walker Evans, ou Lee Friedlander, à mi-chemin entre le style documentaire et une vision plus personnelle, qui traduit sa propre interprétation du monde. Il photographie beaucoup dans le Nord de la France. Cette époque a été importante sur le plan de l'apprentissage de l'image, et lui a permis de concevoir une méthode de travail sur laquelle il va appuyer son œuvre à partir de Frontières (1984-1985). C'est aussi la période où il obtient ses premières commandes, dont l'une à Zuydcoote lui permet de publier son premier livre, Far-Westhoek en 1982.

Après avoir commencé par la photographie de reportage, en noir et blanc et au Leica, dans la grande tradition du photojournalisme et de la street photography, Thierry Girard abandonne au milieu des années 1980 cette approche « documentaire » pour s'intéresser davantage au paysage. Il abandonne progressivement le 24 x 36 mm (petit format) et son Leica pour travailler, toujours en noir et blanc, en moyen format (6 x 6 cm, 6 x 7cm).

Vers le milieu des années 1990, la couleur commence à apparaître dans son œuvre.

Il entreprend alors une exploration du paysage, parfois à pied (au cours de marches photographiques qui accentuent le côté poétique de son travail), mais le plus souvent en construisant des itinéraires, dont le fil conducteur peut être géographique, mais également faire référence à des prétextes littéraires ou artistiques : Jaillissement & Dissolution, un voyage le long du Danube de Claudio Magris, La Route du Tōkaidō, au Japon en référence à Hiroshige ou La Grande Diagonale en Chine sur les traces de Victor Segalen[1]).

Ces itinéraires sont autant de prétextes à une quête intérieure, à la recherche de « signes » qu'il va capter dans une interprétation très personnelle de l'espace. D'un projet à l'autre, il y a toujours une évolution, une remise en question, une prise de risques. Sa vision s'est peu à peu dépouillée au point de devenir, au début des années 1990, très minimaliste et de traduire une poétique de l'espace nourrie par les notions de limite, de seuil, de franchissement. Cela deviendra une constante dans son travail, constante qu'il saura renouveler dans ses projets de la fin de la décennie et des années 2000 au Japon, en Chine, et, en 2010-2011, en Inde par l'introduction de la couleur, le retour à un paysage plus urbain et contemporain, et la réintroduction de l'élément humain.

C'est au Japon, en réalisant son projet sur La Route du Tôkaidô que Thierry Girard retrouve le fil perdu de la street photography, renouant par là-même avec ce qui avait fondé son rapport au monde à travers la photographie, trouvant un équilibre entre un travail strict sur le paysage et des « situations » (y compris les portraits) qu'il souhaitait réinstaller à part entière dans sa photographie. « Situations urbaines », c’est peut-être le terme le plus approprié pour cerner le rapport de Thierry Girard à la street photography. Ces concepts, qu'il continue d'utiliser dans sa photographie actuelle (où la question du portrait devient par ailleurs de plus en plus prégnante), le ramènent vers une photographie plus documentaire, où le regard se fait plus intellectuel, plus analytique, plus distancié. Il en résulte malgré tout des images parfois énigmatiques, qu'il relie entre elles par ce fil conducteur/prétexte de l'itinéraire.

En août 2011, il retourne au Japon, à l'invitation de l'Institut français de Tokyo, pour photographier les paysages dévastés dans le Tōhoku et réaliser des portraits des survivants six mois après la triple catastrophe (tremblement de terre, tsunami et accident nucléaire) qui a frappé le nord du Japon le [2]. Avec une approche à la fois empathique et distanciée, sans pour autant négliger un certain nombre de vues incontournables qui montrent l'extrême violence du phénomène, Thierry Girard réinscrit le paysage de la catastrophe dans une vision plus large du paysage du Japon. Une exposition de ce travail, intitulée Après le fracas et le silence est présentée dès le mois de novembre à Fukuoka et à Tokyo. Il retourne au nord du Japon en pour photographier plus précisément la ville de Kamaishi qui a été très touchée par le tsunami de 2011. Ce travail est présenté en au musée Gassendi à Digne-les-Bains, ville jumelée avec Kamaishi.

En 2011, une résidence d'artiste à Thouars (Deux-Sèvres) lui permet de renouveler son vocabulaire esthétique à travers le projet intitulé « Arcadia revisitée. » Ce travail singulier l'amène à questionner et reconsidérer certaines approches de la photographie de paysage. Son travail le plus récent, « Un Printemps à Surgères », réalisé en 2013, en est le prolongement.

Thierry Girard retourne en 2015 au Japon pour travailler sur une ligne de train dans le Kyushu et sur une ligne de métro à Tokyo, tout en terminant une résidence d’artiste dans les Ardennes à l'invitation du musée de la Chasse et de la Nature à Paris. Ce dernier travail, intitulé « Salle des fêtes », a fait l’objet, à l'automne 2016, d'une exposition au musée de l'Ardenne à Charleville-Mézières.

À l'automne 2015, il entame un travail sur les paysages traversés à l'automne 1944, après la libération de Paris, par la 2e division blindée du général Leclerc, tout au long du parcours de la campagne victorieuse de celle-ci à travers l'est de la France à la fin de la Seconde Guerre mondiale, jusqu'à la libération de Strasbourg, le . Ce travail est exposé à l'automne 2016 dans la salle Konrad Adenauer du Mémorial Charles-de-Gaulle, à Colombey-les-Deux-Églises[3] sous le titre Une campagne victorieuse.

En 2017, il commence un long projet Retour vers le Nord, qui l'amène à se retourner sur son propre parcours, trente-cinq ans après les photographies qu'il avait prises entre 1977 et 1985 dans le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais. Une première étape de ce nouveau travail est exposée en 2018 au Centre historique minier de Lewarde[4]. À l'issue d'une seconde résidence d'artiste effectuée en 2018-2019, il présente la synthèse de ses deux résidences sur le bassin minier ainsi qu'une large sélection de photographies en noir et blanc prises dans les années 1980, à la Maison de l'Ingénieur de la Cité des Électriciens à Bruay-la-Buissière (Pas-de-Calais). À cette occasion est publié aux éditions Light Motiv le livre Le Monde d'après.

En janvier 2019, il publie aux Éditions Loco, sous le titre Paysage Temps - 20 ans d'observation d'une ruralité française, la synthèse de 20 ans d'observatoire photographique du paysage[5] sur le territoire du parc naturel régional des Vosges du Nord[6], un travail de commande entrepris en (avec une interruption de trois années entre 2006 et 2009), qui regroupe des photographies choisies — au-delà de leur caractère documentaire — pour leur valeur esthétique, l'ensemble, comme le souligne Raphaële Bertho, dans le texte Entre l'attestation du paraître et la possibilité de l'être publié dans le livre, faisant œuvre au même titre que les autres projets personnels du photographe[7].

En mai 2019, dans le cadre de la commémoration officielle du centenaire de la disparition de Victor Segalen, Thierry Girard présente le travail qu'il a effectué en Chine en suivant La Grande Diagonale sur les traces de Segalen[8], au musée des Beaux-Arts de Brest et au festival Photos en Poésie de Landivisiau.

En , il présente à Iași en Roumanie un travail intitulé « Iași, dérives urbaines » qu'il a réalisé dans le cadre de la saison franco-roumaine organisée par l'Institut français.

En novembre-décembre 2021, Thierry Girard effectue une résidence d’artiste à Campeche [9], capitale de l'État de Campeche, dans la péninsule du Yucatan, au sud du Mexique. Cette commande passée dans le cadre d'une coopération entre la communauté d'agglomération de La Rochelle et l'État de Campeche sur la thématique de la ville durable, l'a amené à s'intéresser aux enjeux de la protection du centre historique de Campeche, dont les trésors architecturaux ont été classés au patrimoine mondial de l'UNESCO.

À propos de son travail

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À propos de son travail, il écrit, dans la présentation qu'il fait de lui sur son blog :

« Mon travail photographique peut se définir ainsi : une expérience de la traversée du monde qui s’articule en une sorte de tension dialectique entre le déplacement géographique et le voyage intérieur. »

Thierry Girard est représenté en France par la galerie Agathe Gaillard. Sa galeriste, Agathe Gaillard avait dit à propos de ses photos :

«  Il photographie le paysage tel qu'il se présente, tel que nous le faisons en y vivant, sans fard, sans conventions de pittoresque. Et paradoxalement, grâce à son talent magique, la France est telle que nous l'aimons le plus. Nous avons dans nos souvenirs, notre inconscient même, liés à ces photos, des sensations de bonheur. Ces images froides deviennent très affectives et une vraie grande beauté apparaît. »

En , dans un petit texte de présentation de son travail à l'occasion de l'exposition Histoire de limites à la galerie Agathe Gaillard, Thierry Girard a exprimé son approche photographique : « Dans la grande tradition documentaire à laquelle je me réfère (d’Eugène Atget à Thomas Struth, en passant par Walker Evans, Lee Friedlander ou Robert Adams, sans écarter non plus les citations picturales et les « tableaux documentaires » d’un Jeff Wall), mon principe est de photographier la simple réalité des choses avec une certaine distance et une certaine neutralité. »

À propos d'un travail récent regroupant des portraits et des paysages, Guy Tortosa écrit :

«  Les photographies de Thierry Girard sont des bulletins de cette météorologie du corps et de l’âme de notre société. Profondément humanistes, elles hésitent entre empathie et constat, proximité et inventaire. Le plus souvent, les habitants sont absents des lieux (villages, prés, bois, chemins, etc.) qu’il photographie. L’abandon en constitue le principal sujet. Ici c’est sensiblement différent. Des rencontres ont eu lieu. On pense au réalisme de Courbet, de Zola, d’August Sander, de Bernanos, de Straub et Huillet, ou de Raymond Depardon. La marche habituelle de l’artiste s’est simplement muée en entrevue. Y eut-il rencontre ? On ne sait. Seule chose certaine, ce que disent ces portraits est ce que disaient déjà les paysages : le pays est comme l’homme, présent à son absence.  »

Dans un entretien avec Jean Desmaison, publié en , Thierry Girard déclare : « Quant à l'esprit de mon travail, ce qui est somme toute le plus important, je me sens d'abord l'héritier d'une tradition photographique qui est celle de la photographie documentaire américaine[10] »

Récompenses et distinctions

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Outre le Prix Niépce, qu'il a obtenu en 1984, Thierry Girard a été lauréat de la Villa Médicis hors les murs en 1985, de la Bourse Léonard de Vinci en 1989 et de la Villa Kujoyama au Japon en 1997, où il a séjourné quatre mois, pour réaliser son projet La Route du Tôkaidô.

Il a reçu des aides à la création du ministère de la Culture en 1983, 1990 et 1998, a bénéficié d'une commande publique du Fonds national d'art contemporain en 2002, ainsi qu'une aide à l'écriture du Centre national du livre en 2000 pour son projet D'une mer, l'autre.

Expositions

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Le travail de Thierry Girard est régulièrement exposé en France et à l'étranger et ses photographies sont présentes dans les grandes collections publiques et privées.

En 2005, ses photographies de Guadeloupe, du Mont Saint-Michel et de Dunkerque, réalisées spécialement pour l'occasion, sont exposées à l'entrée du Pavillon français de l' Exposition universelle d'Aichi au Japon.

En 2006, il est l'un des photographes exposés dans le cadre de l'exposition Les Peintres de la vie moderne au Centre Georges Pompidou, à Paris.

En avril 2011, son travail Women in Shanghai est exposé pour la première fois dans le cadre du Caochangdi Photospring Festival à Pékin.

Expositions personnelles (sélection)

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Expositions collectives (sélection)

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Ouvrages personnels

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Ouvrages collectifs

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Bibliographie

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Liens externes

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Notes et références

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  1. « Thierry Girard — Voyage au pays du réel / Chine (2003-2006) », sur fr.forumviesmobiles.org,
  2. Au sujet de ce travail, voir Yannick Le Marec, Thierry Girard, Après le fracas et le silence, in Phothistory, 27 septembre 2015
  3. Voir la présentation de l'exposition sur le site du Mémorial Charles-de-Gaulle
  4. Présentation de l'exposition sur le site officiel du Centre historique minier de Lewarde
  5. Il s'agit de l'un des 19 observatoires de l'Observatoire photographique national du paysage (OPNP)
  6. Yannick Le Marec, Paysage Temps, de Thierry Girard, aux éditions Loco, in Par mots et par images, 22 janvier 2019
  7. Raphaële Bertho, Entre l’attestation du paraître et la possibilité de l’être - Une œuvre documentaire, texte publié dans l'ouvrage de Thierry Girard, Paysage Temps (Loco, 2019), reproduit dans Territoire des images - Carnet de recherches visuelles, 17 janvier 2019
  8. L'instant T, émission de Tébéo du vendredi 24 mai 2019
  9. Voir San Francisco de Campeche / Mexique, le compte rendu de la résidence, illustré par 25 photos, in Des images et des mots, le blog de Thierry Girard
  10. Thierry Girard : Vers le grand format en photographie, entretien entre Thierry Gérard et Jean Desmaison, galerie-photo.com, avril 2018
  11. Présentation de l'exposition par Thierry Girard
  12. Présentation de l'exposition sur le site officiel de la mairie de Belfort
  13. Agnès Lanoëlle, La Rochelle : le quotidien des Mexicains vu par le photographe Thierry Girard, in Sud Ouest, 13 mars 2024
  14. Thierry Girard — San Francisco de Campeche, in Contemporanéités de l'art, 9 mars 2024
  15. Voir la recension du livre par Lucie Cauwe dans LU Cie & co, 18 juin 2019
  16. Anne-Marie Siméon, Le Périgord, terre d’inspiration des plus grands écrivains, in Sud-Ouest, 13 mai 2024