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Incunable

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La Chronique de Nuremberg, incunable de 1493
Diffusion de l'imprimerie au cours du XVe siècle.

Dans l'histoire de l'imprimerie, un incunable est un livre imprimé au cours du XVe siècle en Europe. Les incunables ont été produits avant que l'imprimerie ne se répande sur le continent et ne remplace les documents manuscrits des copistes. L'appellation est parfois étendue aux post-incunables, imprimés dans la première moitié du XVIe siècle.

Environ 30 000 incunables sont répertoriés, dont les deux tiers en latin. Le plus ancien est la Bible à quarante-deux lignes (dite « B42 »), imprimée par Johannes Gutenberg, Peter Schoffer et Johann Fust en 1454.

Origine du terme

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Imprimerie du XVe siècle.

Le mot « incunable » provient du mot latin incunabula[Note 1], qui signifie « langes » ou « berceau »[1],[2].

L'utilisation du terme pour désigner les premiers livres imprimés est généralement attribuée à Bernhard von Mallinckrodt (de) dans son livre De Ortu ac Progressu Artis Typographicae, Dissertatio Historica publié en 1640[2],[3],[4],[Note 2]. Toutefois, le terme incunabula est explicitement employé dans ce contexte dès 1569 par Hadrianus Junius dans la Batavia[2],[4].

Définition

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Un incunable est, par convention, un livre imprimé en Europe avant le [2],[5],[6]. Cette définition précisée apparaît pour la première fois dans un catalogue de vente publié en 1688[3], mais certains supposent qu'elle pourrait remonter à l'époque de Mallinckrodt[7]. On distingue les incunables xylographiques de ceux issus de presses à imprimer à caractères mobiles.

Les incunables sont répertoriés dans des bases de données internationales (Incunabula Short Title Catalogue, Gesamtkatalog der Wiegendruckeetc.), qui recensent plus de 30 000 exemplaires d'incunables[8],[9]. La bibliothèque d'incunables de la British Library possède plus de 10 000 éditions réparties en 12 500 copies, représentant 37 % des éditions connues[10].

L'appellation est parfois improprement étendue aux « post-incunables », livres d'aspect comparable mais imprimés ultérieurement, jusqu'en 1525-1530 voire 1550 pour les pays nordiques[2],[5].

Certaines autorités englobent les livres de bloc de la même époque dans les incunables, tandis que d'autres limitent le terme aux ouvrages imprimés à l'aide de caractères mobiles.[réf. souhaitée]

Histoire et diffusion des incunables

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Du manuscrit à l'incunable

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Les incunables, ces livres nés au berceau de l’imprimerie, sont d’abord et avant tout des succédanés des manuscrits. L’écriture sur deux colonnes se maintient d’ailleurs à l’époque de l’imprimerie[11]. Car Johannes Gutenberg et les premiers promoteurs de l'imprimerie ont cherché, non pas à fabriquer des objets nouveaux, mais bien à reproduire les manuscrits par un procédé mécanique, dans l’espoir de répondre à une demande de plus en plus grande de textes, que les différentes méthodes de reproduction élaborées dans les siècles antérieurs n’ont pas réussi à satisfaire complètement. Les changements qui vont mettre en place les conditions propices à l’invention de l’imprimerie sont visibles dès le XIIIe siècle par une production plus importante et une diffusion élargie de textes et par un déplacement des curiosités intellectuelles. Ces mutations se combinent à une phase d’essor économique et démographique net qui permettent à l’Europe occidentale de retrouver une certaine expansion démographique[12],[13].

La transmission du savoir dans le monde médiéval était essentiellement fondée sur les copies manuscrites et confinée aux monastères. Mais le besoin de textes va suivre la renaissance de la civilisation urbaine et l’avènement des premières universités aux XIe et XIIe siècles. Avec les universités apparaissent aussi les premières grandes bibliothèques organisées hors du monde religieux[13]. Un problème de diffusion des manuscrits se pose alors, puisque ces derniers cessent d’être confinés au monde des clercs. Or, les étudiants ont un besoin grandissant de livres[13]. Les universités sont les premières à chercher une façon de répondre à cette demande croissante de textes. C'est dans ce contexte que des ateliers de copistes se mettront en place, sur lesquels les universités vont exercer un contrôle avec l’apparition de la pecia, un système efficace de vérification et d’authentification du texte d’enseignement qui sera copié[14]. D’objet de consultation ou de prêt, le manuscrit devient alors une marchandise, et une économie du livre va pouvoir se développer[15]. Puis, le XIIIe siècle verra la multiplication des ateliers d’écriture civils (qui n’arrivent pas à satisfaire la demande toujours croissante) qui produisent « romans », récits historiques et livres d’heures pour le prince, son entourage, mais aussi pour les membres de la petite noblesse et de la bourgeoisie qui sont apparus avec l’essor des villes. Les villes combinant des fonctions de commandement dans les domaines de la politique, de la religion, de la culture et du négoce seront celles où ces changements vont le mieux s’implanter et aussi celles où le rôle de mécène va le mieux se développer[13],[16].

L’apparition du papier en Occident joue aussi un rôle important dans la multiplication des manuscrits, mais aussi dans leur vulgarisation. Issu de Chine, il est transmis par le biais des civilisations d’Asie centrale, de l’Inde et du monde arabe. Il apparaît à la fin du XIIIe siècle à la chancellerie normande de Sicile et sa fabrication se répand en Europe au cours du XIVe siècle[17]. Comparé au parchemin, il présentait l’avantage d’un prix inférieur et de plus larges possibilités de fabrication. Tandis que le parchemin s’orientait vers les manuscrits de luxe, le papier servait aux manuscrits plus ordinaires et d’usage courant, tels ceux destinés aux étudiants et à un public plus large, mais qui reste toutefois minoritaire et privilégié[18].

Cette littérature ne s'adressait pas à des ecclésiastiques, quoiqu'elle fût souvent produite par eux[19]. En effet, le processus de laïcisation de l’écrit, conjointement avec l’élargissement de sa production, va déboucher sur une montée de la langue vernaculaire dans les textes. Les premiers textes conservés en vernaculaire datent du XIe siècle, mais il s’agit de textes brefs[17]. Le XIe siècle va aussi voir la minuscule caroline évoluer vers l’écriture gothique, sous l’influence de la laïcisation, de la banalisation de l’écrit, mais aussi du développement de la pratique notariale et des administrations et enfin d’une tendance de plus en plus forte à la cursivité dans l'écrit[13]. La généralisation de l’écriture gothique à travers l’Europe aux XIIe – XIIIe siècles explique qu’une typologie adaptée selon les régions et les usages puisse exister. D’ailleurs, c’est la textura, surtout employée pour les livres d’Église, qui sera prise comme modèle par Johannes Gutenberg pour les caractères de sa Bible à quarante-deux lignes[13].

C’est dans ces conditions que dans les premières décennies du XVe siècle, de petits groupes d’inventeurs et d’entrepreneurs travaillent à la recherche d’une nouvelle méthode pour multiplier les textes[12]. Il aura fallu la conjonction d’un besoin économique, du capitalisme et de l’assemblage de plusieurs techniques pour permettent de passer de la multiplication manuscrite d'un texte à une reproduction mécanique, qui va permettre la reproduction d'un même texte à quelques dizaines d’exemplaires[20].

Premiers incunables typographiques

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Bible de Gutenberg (exemplaire appartenant à la Bibliothèque du Congrès des États-Unis)

Les incunables créés dans les premières années de l'imprimerie sont essentiellement de nouvelles éditions de manuscrits religieux et académiques du Moyen Âge. Quelques éditions de textes latins de Cicéron et Virgile sont aussi répertoriées, de même que des éditions en langue vernaculaire de Dante et Pétrarque[21].

Bible dite « B42 »

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Le premier incunable typographique répertorié est la Bible à quarante-deux lignes, dite « B42 », imprimée sur les presses de Mayence par Johannes Gutenberg, Peter Schöffer et Johann Fust à la fin de l'année 1454. Elle se compose de 1 282 pages réparties en deux volumes. La plupart des pages comprennent deux colonnes de quarante-deux lignes, d'où son nom. La Bible à quarante-deux lignes est élaborée graduellement grâce à un processus d'essais et d'erreurs[22]. Les onze premières pages comprennent 40 ou 41 lignes, puis les 42 lignes deviennent standards par la suite. Cela représentait une économie d'environ cinq cents sur le papier et le vélin[22]. Le texte en lettres gothiques est noir et a nécessité la gravure de 290 signes typographiques et l'emploi de 100 000 caractères. Les ornementations du rubricateur sont de couleur rouge, nécessitant un deuxième passage en machine. Il était coutume de payer 20 florins pour une copie papier de la Bible « B42 » et 50 florins pour une copie en vélin[23]. En comparaison, une maison de l'époque coûtait entre 80 et 100 florins. Sur un tirage estimé de cent quatre-vingts exemplaires, seuls quarante-huit nous sont parvenus. Le premier chercheur à avoir décrit cet ouvrage est Guillaume-François Debure, au XVIIIe siècle[24].

Psalmorum Codex

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Du Psalterium Benedictinum, 1459 : avec une lettrine peinte

Il faut attendre 1457 pour que Peter Schöffer et Johann Fust[Note 3] impriment le premier livre en couleurs : le Psalmorum Codex, connu en France sous le nom de psautier de Mayence. Il contient calendrier, litanies, cantiques et prières en latin.

Cet ouvrage est considéré, avec les quatre livres imprimés par Gutenberg, comme l’un des livres les plus précieux de tous les temps pour plusieurs raisons :

  • l'impression à partir d'encres de couleurs noire, rouge et bleue ;
  • sa qualité d’impression, malgré l’utilisation d’un caractère dit « de forme » ;
  • la régularité de la fonte des caractères ;
  • les illustrations, par la précision de la gravure sur bois ;
  • les lettrines ornées filigranées ;
  • un colophon en fin d'ouvrage.

Peter Schöffer a de grandes difficultés pour imprimer son livre, et aurait dépensé plus de 4 000 florins pour l’impression de 12 feuillets.[réf. nécessaire]

Le psautier était, à cette époque, le livre le plus recherché pour la dévotion privée : le « Psautier de Mayence » fut réimprimé par Fust et Schöffer en 1459.

La Chronique de Nuremberg

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Gravure de La Chronique de Nuremberg.

La Chronique de Nuremberg de Hartmann Schedel, livre profane imprimé par Anton Koberger en 1493, est un autre incunable célèbre qui comporte de nombreuses illustrations rehaussées à la main.

Premières impressions en France

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L'atelier de la Sorbonne

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En 1470, trois compagnons typographes allemands issus de l’imprimerie typographique de Mayence, Ulrich Gering, Martin Grantz et Michel Friburger, installent la première imprimerie typographique française à caractères mobiles dans des locaux appartenant à la Sorbonne, à Paris. Durant l'automne ou l'hiver de cette année-là, ils réalisent les Espitolae de Gasparino Barziza, considérées comme le premier livre imprimé sur le territoire du royaume de France. Cet ouvrage est conservé à la Réserve des livres rares et précieux de la Bibliothèque nationale de France.

En 1476, sort à Lyon — « l'une des capitales négociantes et artistiques de la Renaissance à partir de 1460 » selon l'expression de l'historien Frédéric Barbier — l'un des premiers livres imprimés en français : La Légende dorée de Jacques de Voragine[25]. En 1503 Guillaume Balsarin y imprime « Le romant de la rose — moralisé cler et net, translaté de rime en prose par vostre humble Molinet ».

Autres imprimeurs

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Les imprimeurs d'incunables qui nous sont connus : Albrecht Pfister (Bamberg) ; Niccolò di Lorenzo (Florence) ; Erhard Ratdolt, Alde Manuce, Wendelin de Spire, Nicolas Jenson, Zacharie Kalliergis (Venise) ; Arnold Pannartz et Konrad Sweynheim (Subiaco puis Rome) ; Jean Neumeister[26] (Albi), Guy Marchant (Paris), Johannes Mentelin (Strasbourg), Günther Zainer (de) (Augsbourg), Colard Mansion (Bruges), William Caxton (Bruges et Londres), Michael Furter (Bâle), Henri Mayer[27] (Toulouse)…

Présentation des incunables

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L'incunable est vendu la plupart du temps en cahiers, non relié, comme le livre de l'époque moderne. Certains imprimeurs-libraires peuvent faire faire des reliures à la demande de clients plus fortunés.

La mise en page

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Page d'un incunable avec une lettrine peinte

La mise en page d’un incunable reprend celle des livres manuscrits de type codex.

La feuille de papier est repliée sur elle-même pour former des cahiers, ce qui détermine le format. Le format le plus utilisé est le in-folio — feuille pliée en deux —, mais il existe également des incunables aux formats in-quarto — feuille pliée en quatre — ce format plus pratique à manipuler sera utilisé par les imprimeurs de manuels, de livres de droit, ou de romans.

Les pages sont imprimées recto-verso (opisthographie) sur du papier ou sur vélin. Le papier utilisé depuis le XIIIe siècle un peu partout en Europe favorisera considérablement le développement de l’imprimerie.

La page de titre n’existe pas encore, l’impression du livre débute au recto du premier feuillet d’où une usure prématurée de cette première page.

Le texte s’étale sur deux ou trois colonnes de 30 à 70 lignes par colonne.

Les lettres sont imprimées en caractères gothiques imitation des manuscrits codex. Plus tard, apparaît le caractère romain issu des inscriptions lapidaires des monuments antiques.

Au début, les caractères étaient fondus dans l’atelier de l’imprimeur. C’est vers 1540 que Claude Garamont créa la première fonderie de caractères.

Les illustrations

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Page d'un incunable illustrée d'une gravure sur bois représentant le martyre de saint Laurent, Légende dorée en allemand, 1489

Comme le manuscrit, l'incunable peut être décoré par un rubricateur et un miniaturiste : la place leur est laissée pour ajouter des capitales enluminées dans les livres. Peu à peu, cet espace vide est remplacé par une gravure sur bois. Certains livres sont accompagnés d'illustrations, constituées de gravures sur bois insérées dans la forme avec les caractères.

À la différence du codex — chaque manuscrit est unique — le livre imprimé est produit en série.

Le texte débute par l’incipit — ce sont les premiers mots du texte — et se termine par un colophon, un terme qui désigne l’auteur, le titre de l’ouvrage, le lieu, la date de l’édition et le nom de l’imprimeur inséré en fin de document[18]. La réclame et la signature sont utilisées.

La production des incunables — en Italie et en Allemagne principalement — est essentiellement religieuse : cantiques, litanies, rituel, prières en latin, la vie de Jésus et, bien sûr, les œuvres de saint Augustin.

La production s’oriente également vers la reproduction d’herbiers, les textes médiévaux, calendriers, la littérature grecque (Homère), l’œuvre du poète écrivain Horace, les traités de médecine, imprimés dans des langues autres que latine — langues vernaculaires romanes, germaniques, anglo-saxonnes, etc.

Pour la même édition, le contenu d’un livre peut varier. Si en cours d’impression le correcteur modifie le contenu du livre, par souci d'économie, le premier tirage ne sera pas détruit. Finalement, le livre sera relié avec les pages modifiées et les pages non modifiées. Pour les imprimeurs les plus courageux les modifications du texte seront rapportées à la main.

Typographie

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Extrait de la Bible historiée de Pierre le Mangeur, Rély, Guiart des Moulins. Imprimée chez Antoine Vérard à Paris. 1495
Caractère romain de l’édition de Diogène Laërce de 1475
Caractère romain créé à Venise par Nicolas Jenson pour une édition de 1475.

Les caractères sont créés grâce à la machine à fondre (Handgießereigerät) inventée par Johannes Gutenberg ce qui facilitait le travail de l'imprimeur en créant des caractères typographiques, appelés types, normalisés en série[28]. C'est grâce à la matrice, qui était préalablement gravée des différents types, à l'envers et en creux, qu'un alliage de métal pouvait être fondu dans ce moule pour créer les caractères[29]. Un petit nombre de fontes permettait de nombreuses possibilités en termes de caractères. Or, ces caractères étaient plus nombreux que les lettres de l'alphabet en raison des majuscules, des minuscules et des différents accents présents dans les différentes langues. Néanmoins, ce procédé rendait la tâche d'impression nettement plus efficace, puisque les caractères pouvaient être produits en grande quantité et être rapidement alignés, de manière uniforme, pour l'impression[29].

Dans le nord de l'Europe, les premiers incunables, qui reproduisent la Bible, sont en écriture gothique, une police appelée Textura, qui est moins anguleuse que celle des livres d’images. Ces caractères furent appelées « lettres de somme », par opposition aux « lettres de forme », et aussi « flamandes » ou « allemandes ».

En Italie, les imprimeurs choisissent une typographie nettement plus aérée et arrondie, grâce aux travaux de l'imprimeur franco-vénitien Nicolas Jenson (1420-1480) qui dessine une police de lettre dite « romaine ». Celle-ci est « faite d'équilibre et de rondeur, véritable emblème humaniste, jusque-là réservée aux textes poétiques[30] ». Alde Manuce (1449-1515) est également réputé pour le soin apporté à une typographie lisible, dont on peut voir un exemple dans l'article qui lui est consacré. Alde inventa aussi les caractères italiques.

Ce choix d'une typographie aérée et arrondie se répandra en France tandis que l'Allemagne s'en tiendra à la Textura, qui évoluera pour donner la Fraktur, mise au point pour l'impression d'un ensemble de livres destiné à l'empereur Maximilien (1459-1519). La Fraktur restera en vigueur en Allemagne jusqu'à la Seconde Guerre mondiale.

En ponctuation, le point a la figure d’une étoile et la virgule est marquée par une ligne oblique.

Les alinéas sont souvent alignés, c’est-à-dire au niveau des autres lignes ; ils sont quelquefois saillants, ou en dehors des autres lignes de quelques lettres, d’autres fois rentrants comme dans les éditions actuelles.

Les livres sont tardivement foliotés, et plus rarement encore paginés. La pagination à l'aide de chiffres arabes sur les deux côtés de la page apparaîtra pour la première fois en 1513 dans une édition de Cornucopiae de Nicolo Perotti[31].

La page de titre apparaît elle-même tardivement, vers 1475-1480[32] à Venise, mais ce n'est qu'au siècle suivant qu'elle ressemblera à la page de titre actuelle.

Imprimeurs, libraires, éditeurs, financiers

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La « marque rouge » des imprimeurs-libraires Johann Fust et Peter Schoeffer.

Les libraires sont les marchands de livres, depuis le XIIe siècle. À partir de l'invention de l'impression en caractères mobiles, il existe des imprimeurs-libraires mais ce n'est pas le modèle économique le plus répandu. Très souvent, l'artisan imprimeur travaille avec une ou plusieurs personnes qui le financent. C'est le cas pour Johannes Gutenberg. Le premier privilège de libraire connu est délivré par le Sénat de Venise en 1469 : il s'agit d'un privilège attribué pour 10 ans pour une nouvelle invention qui arrivait à peine à Venise, l'imprimerie[33].

Méthodes de datation

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L’auteur travaillant à son livre (fr. Danse macabre publié par Guy Marchant).

Les ouvrages imprimés au cours de l'année 1500 ne diffèrent pas de ceux imprimés en 1501. D'une manière générale, la mise en page des livres évolue de façon continue entre 1480 et 1520. Pour qualifier les livres publiés à partir de 1501, on emploie parfois l'expression post-incunable.

Environ un tiers des ouvrages imprimés avant 1501 le sont sans date (noté « [s.d.] ») et à cette époque de nombreux ouvrages produits sont manuscrits : le métier de copiste n'a pas disparu du jour au lendemain en Europe, loin de là. Conséquemment, les livres entièrement manuscrits fabriqués durant cette période ne sont pas considérés comme des incunables.

Pour évaluer la date d'impression d'un incunable, les experts se servent du nom de l'imprimeur, du style des gravures et des fontes de caractères utilisées (la marque typographique), de la qualité du papier et de son fabricant, du matériel décoratif, du type d'ornementation[34].

L'usage de la datation mentionnée d'abord de façon manuscrite dans la rubrication évolue et devient imprimée en page de titre à côté du privilège, système qui se généralise vers 1480. Par ailleurs, deux styles de datation vont cohabiter, du moins en France, celui de Pâques et celui de janvier. En 1564, tous les ouvrages commencent l'année au mais ce style s'est en réalité généralisé bien avant.

Un incunable peut donc comporter des annotations manuscrites (marginalia) et des enluminures, sans pour autant être exclu de cette catégorie. Il peut comporter également des pages imprimées à partir de blocs xylographiques dans lesquels on taille directement le texte mais surtout l'image : un ouvrage composé principalement à partir de tels blocs est appelé incunable xylographique. Trois techniques peuvent donc coexister au sein d'un même ouvrage.

Dans le monde

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C’est en France qu’est entrepris pour la première fois un catalogue national collectif des incunables. L’initiative est due à Marie Pellechet en 1895, poursuivie par Marie-Louis Polain[37]. L’entreprise s’arrête cependant à l’article Gregorius Magnus et est abandonnée[38].

L’inspecteur général Louis Desgraves relance l’idée dans les années 1970 en créant les Catalogues régionaux des incunables (CRI), financés par la nouvelle Direction du livre et de la lecture au ministère de la Culture. Le premier volume (Champagne-Ardennes) paraît en 1979 ; 16 ont paru en 2012, ce qui représente environ la moitié des volumes prévus. D’abord publiés par la Société des bibliophiles de Guyenne (1979-1989), ils sont ensuite confiés aux Amateurs de livres (1989-2005) puis à Klincksieck (1995-2005) puis enfin à Droz (depuis 2005). La coordination scientifique est assurée par Pierre Aquilon depuis 1992[38]. Le volume correspondant à la région Nord-Pas-de-Calais est annoncé pour 2014.

En 2009, le service du livre et de la lecture engage l’informatisation des catalogues déjà publiés. À terme, cela permettra de proposer en ligne un catalogue général des incunables de France avec des notices chapeau pour les éditions mais également toutes les données d’exemplaires (reliure, mentions manuscrites, etc.). Cette solution a été préférée à un simple ajout des exemplaires dans les catalogues collectifs existants (dont elle n’est toutefois pas exclusive) afin de gagner en précision sur ces données d’exemplaires[38].

La BnF commence, elle, un catalogage scientifique de ses incunables à partir des années 1970. Il paraît sous forme de fascicules formant quatre volumes : le deuxième, comprenant les lettres H à Z et les hebraica, est publié de 1981 à 1985 ; le premier (lettres A-G et les livrets xylographiques) est presque achevé en 2012 ; le troisième comprend les tables et le quatrième consacré à la bibliothèque de l'Arsenal est prévu pour parution en 2016[38].

Répartition géographique et linguistique

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Notes et références

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  1. Au singulier : incunabulum.
  2. L'encyclopédie Britannica donne la date de 1639.
  3. La coopération technique de ce dernier n'est pas clairement prouvée

Références

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  1. « Définition du mot "Incunable" », sur academie.atilf.fr, Académie française, ATILF, CNRS, Université de Lorraine (consulté le ).
  2. a b c d et e Nicolas Petit, « Les Incunables : livres imprimés au XVe siècle » [html], sur classes.bnf.fr, site pédagogique de la Bibliothèque nationale de France (consulté le ).
  3. a et b (en) Encyclopædia Britannica, « Incunabula » (consulté le )
  4. a et b Yann Sordet, « Le baptême inconscient de l'incunable : non pas 1640 mais 1569 au plus tard » in Gutenberg Jahrbuch, no 84 (2009), p. 102-105 (lire en ligne).
  5. a et b Entrée « incunable » [html], sur TERMIUM Plus, la banque de données terminologiques et linguistiques du gouvernement du Canada (consulté le ).
  6. Définition d'autorité dans « Incunable » par Denise Hillard in Dictionnaire encyclopédique du livre, tome II, Paris, Cercle de la librairie, 2005, p. 547-549.
  7. (en) Jacqueline Glomski, « Incunabula Typographiae: Seventeenth-Century Views on Early Printing » in The Library, vol. 2, no 4 (2001), p. 336-348.
  8. « Incunabula short title catalogue », sur bl.uk.
  9. « Gesamtkatalog der Wiegendrucke », sur gesamtkatalogderwiegendrucke.de.
  10. (en) Bettina Wagner, « The Present and Future of Incunable Cataloguing, I », The Library, vol. 9, no 2,‎ , p. 197–209 (ISSN 1744-8581 et 0024-2160, DOI 10.1093/library/9.2.197, lire en ligne, consulté le )
  11. Adalbert-Gauthier Hamman, L'éopée du livre : la transmission des textes anciens, du scribe à l'imprimerie, Perrin u.a, , 238 p. (ISBN 978-2-89111-234-5), par. 142
  12. a et b Frédéric Barbier, Histoire du livre en Occident, Malakoff/42-Saint-Just-la-Pendue, Armand Colin, coll. « Mnémosya », , 415 p. (ISBN 978-2-200-62288-6), « Chapitre 2 - Gutenberg et l’invention de l’imprimerie »
  13. a b c d e et f Frédéric Barbier, Histoire du livre en Occident, Armand Colin, coll. « Mnémosya », (ISBN 978-2-200-62288-6), « Chapitre 3 - L’ouverture au livre (Xe - début du XVe siècle) »
  14. Barbier 2006, p. 73-74.
  15. Barbier 2006, p. 71.
  16. Albert Labarre, Histoire du livre, Presses Univ. de France, coll. « Que sais-je ? », , 132 p. (ISBN 978-2-13-051992-8), « Le livre au Moyen Âge », par. 25-41
  17. a et b Frédéric Barbier, Histoire du livre en Occident, Malakoff/42-Saint-Just-la-Pendue, Armand Colin, coll. « Mnémosya », , 415 p. (ISBN 978-2-200-62288-6), « Chapitre 1. Gutenberg avant Gutenberg », par. 3-21
  18. a et b Albert Labarre, Histoire du livre, Presses universitaires de France, (ISBN 978-2-13-059839-8 et 2-13-059839-0, OCLC 833056537), « Le livre au Moyen Âge », par. 30
  19. Febvre & Martin 1958, p. 53.
  20. Barbier 2006, p. 71-73.
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  22. a et b Pettegree 2010, p. 28.
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  25. Barbier 2006, p. 200-201.
  26. http://d-nb.info/978563867/04
  27. « Henri Mayer (14..-1499?) - Auteur - Ressources de la Bibliothèque nationale de France », sur data.bnf.fr (consulté le ).
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  29. a et b Albert Labarre, Histoire du livre, Presses universitaires de France, (ISBN 978-2-13-059839-8 et 2-13-059839-0, OCLC 833056537), « L'avènement de l'imprimerie », par.3
  30. Blasselle 1998.
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Bibliographie

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Ouvrages de référence

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Bibliographies et catalogues d’incunables

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  • le « Hain » et ses compléments :
    • Ludwig Hain, Repertorium bibliographicum, in quo libri omnes ab arte typographica inventa usque ad annum MD typis expressi ordine alphabetico vel simpliciter enumerantur vel adcuratius recensentur, Paris / Stuttgart, 1826-1838. Voir sur Gallica, une édition de 1925 : vol. 1-1, vol. 2-1, vol. 2-2
    • Walter Arthur Copinger, Supplement to Hains’s Repertorium bibliographicum, Londres, 1895-1902
    • Dietrich Reichling, Appendices ad Hainii-Copingeri Repertorium bibliographicum : additiones et emendationes, 6 fasc., Munich, 1905-1914.
  • Catalogues d’incunables conservés dans les bibliothèques
    • Catalogue des incunables de la bibliothèque de Toulouse rédigé par le Dr Desbarreaux-Bernard, Toulouse, Privat, 1878.
    • Catalogue of Books printed in the XVth century, now in the British Museum, Londres, 1908.
    • Catalogue des incunables de la Bibliothèque nationale [puis de la Bibliothèque nationale de France], BnF, Paris, 1981.
    • Catalogues régionaux des incunables de bibliothèques publiques de France, Société des bibliophiles de Guyenne, Bordeaux, puis Bibliothèque nationale [de France], Paris, 1979.
    • G. Sajo et E. Soltesz, Catalogus incunabulorum quae in bibliothecis publicis Hungariae asservantur, Budapest, 1970.
    • M. Bohonos, A. Kawecka-Gryczowa et E. Szandorowska, Catalogus incunabulorum quae in bibliothecis Poloniae asservantur, Wratislava, Varsovie, Cracovie, 1970.
    • Incunabula in Dutch libraries : a census of fifteenth-century printed books in Dutch public collections, Nieuwkoop, 1983, vol.
    • F. R. Goff, Incunabula in American libraries : A third census of the XVth century books recorded in North American collections, New York, 1973.
    • Indice generale degli incunaboli delle biblioteche d’Italia a cura del Centro nazionale d’informazioni bibliografiche, Rome, 1943-1981, vol.
    • Bibliothecae Apostolicae Vaticanae Incunabula, Bibliotheca Apostolica Vaticana, Cité du Vatican, 1997, vol. (ISBN 88-210-0676-X)

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Articles connexes

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Liens externes

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(Marie Léontine Catherine Pellechet, 1840-1900; France. Ministère de l'éducation nationale; Polain, M.-Louis, 1866-1933). Tome 1 (sur Archives.org).