Vol Ethiopian Airlines 961
Vol Ethiopian Airlines 961 | |||
Le Boeing 767 d'Ethiopian Airlines impliqué (ET-AIZ), ici à l'aéroport de Francfort-sur-le-Main en mai 1996, six mois avant le crash. | |||
Caractéristiques de l'accident | |||
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Date | |||
Type | Amerrissage forcé | ||
Causes | Détournement d'avion, panne de carburant en vol | ||
Site | Au large de Grande Comore, dans l'archipel des Comores | ||
Coordonnées | 11° 22′ 22″ sud, 43° 18′ 25″ est | ||
Caractéristiques de l'appareil | |||
Type d'appareil | Boeing 767-260ER | ||
Compagnie | Ethiopian Airlines | ||
No d'identification | ET-AIZ | ||
Lieu d'origine | Aéroport d'Addis-Abeba Bole, Éthiopie | ||
Lieu de destination | Aéroport international Félix-Houphouët-Boigny, Abidjan, Côte d'Ivoire | ||
Phase | Approche | ||
Passagers | 163 | ||
Équipage | 12 | ||
Morts | 125 (dont les trois pirates de l'air) | ||
Blessés | 46 | ||
Survivants | 50 | ||
Géolocalisation sur la carte : Comores
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Le vol Ethiopian Airlines 961 est un vol international régulier qui assurait la liaison Addis-Abeba-Nairobi-Brazzaville-Lagos-Abidjan le . À la suite d'un détournement par trois pirates de l'air demandant l'asile en Australie, le Boeing 767 d'Ethiopian Airlines se retrouva à court de carburant et ne put atteindre l'aéroport de Moroni, aux Comores. Il s'écrasa dans l'océan Indien, à moins de 500 mètres de la côte, en tentant d'effectuer un amerrissage forcé. On dénombres 125 victimes parmi les 175 passagers et membres d'équipage présents à bord, y compris les trois pirates de l'air.
Contexte
[modifier | modifier le code]Avion
[modifier | modifier le code]L'appareil impliqué dans l'accident était un Boeing 767-260ER (ER = extended range, long rayon d'action), appelé Zulu par les pilotes d'Ethiopian Airlines d'après la dernière lettre de son numéro d'immatriculation, ET-AIZ (numéro de série 23916/187), qui a effectué son premier vol le .
Propulsé par deux moteurs Pratt & Whitney JT9D-7R4E, il a été livré neuf à Ethiopian Airlines le . À l'exception d'une courte période allant de à , où il a été loué à Air Tanzania, il a passé toute sa carrière commerciale dans la flotte d'Ethiopian Airlines. Il était âgé de neuf ans et totalisait 32 353 heures de vol et 12 623 cycles (décollage/atterrissage) au moment de l'accident.
Équipage
[modifier | modifier le code]Le commandant de bord était Leul Abate (42 ans), un pilote expérimenté comptant plus de 11 500 heures de vol à son actif, dont 4 067 heures sur Boeing 757 et Boeing 767. Le copilote du vol était Yonas Mekuria (34 ans). Il cumulait plus de 6 500 heures de vol, dont 3 042 sur Boeing 757 et 767.
Avant ce crash, le commandant Abate avait déjà été victime de deux détournements d'avion. Le premier s'est produit le , à bord d'un Boeing 727-260 assurant le vol 574. Deux pirates de l'air, armés de grenades à main, ont exigé d'être emmenés à Nairobi, puis au Canada. Après une confrontation de cinq heures à l'aéroport international Jomo-Kenyatta, les pirates de l'air se sont rendus.
Le deuxième s'est produit le , à bord d'un Boeing 737-260. Cinq pirates de l'air ont exigé d'être emmenés en Libye, et l'avion a été détourné vers El Obeid, au Soudan. Là, les pirates de l'air ont changé d'avis et ont préféré redécoller vers la Suède. Cependant, les autorités soudanaises ont refusé de ravitailler l'avion en carburant, et après plusieurs heures de confrontation, les pirates de l'air se sont rendus. Dans les deux cas, les avions n'ont pas été endommagés et personne n'a été blessé ou tué.
Détournement
[modifier | modifier le code]Le vol 961 avait été retardé en attendant un vol de correspondance. L'avion a finalement décollé à 08h09 UTC de l'aéroport d'Addis-Abeba Bole, en Éthiopie. Quand le 767 entra dans l'espace aérien kenyan, après seulement 20 minutes de vol, trois hommes éthiopiens forcèrent l'entrée du cockpit et détournèrent l'avion, après avoir pris une hache et un extincteur dans le poste de pilotage.
Après avoir agressé et forcé le copilote Mekuria à quitter le cockpit, les trois hommes menacèrent de faire exploser l'avion en vol avec une bombe si les pilotes n'obéissaient pas à leurs ordres, et annoncèrent, sur l'interphone, qu'ils étaient des opposants au gouvernement éthiopien cherchant l'asile politique, ayant récemment été relâchés de prison, et que, si quelqu'un essayait d'interférer dans leur plan, ils feraient également exploser l'avion.
Les autorités éthiopiennes s'aperçurent par la suite que la « bombe » n'était qu'une bouteille de spiritueux camouflée, et que les trois pirates, identifiaient comme étant Alemayehu Bekeli Belayneh, Mathias Solomon Belay et Sultan Ali Hussein, semblaient n'avoir pas plus d'une vingtaine d'années. Ils ont également prétendu qu'ils étaient onze au total, alors qu'en fait ils n'étaient que trois à bord.
Les preneurs d'otages demandèrent que l'avion vole vers l'Australie. Le commandant Abate essaya de leur expliquer qu'ils avaient seulement pris le carburant nécessaire pour la liaison Addis-Abeba-Nairobi et que l'avion avait du carburant pour seulement faire le quart du trajet jusqu'en Australie, mais ils ne le crurent pas. L'un d'eux a notamment fait référence à une déclaration, dans la page dédiée à la flotte d'avion, dans le magazine de bord de la compagnie aérienne, selon laquelle la durée de vol maximale du 767 était de 11 heures.
Au lieu de voler vers l'Australie, le commandant a suivi la côte africaine vers le sud. Les pirates de l'air ont remarqué que la terre était toujours visible et ont forcé le pilote à se diriger vers l'est. Leul s'est dirigé secrètement vers les îles Comores , qui se trouvent à mi-chemin entre Madagascar et le continent africain. Pendant ce temps, deux des pirates de l'air sont retournés dans la cabine, tandis que le pirate de l'air principal est resté dans le cockpit.
Au lieu de voler vers l'Australie, le capitaine vola parallèlement à la côte africaine. Mais les pirates remarquèrent que la terre était toujours visible et forcèrent le pilote à voler vers l'est. Le pilote prit alors secrètement la direction des Comores, qui se trouvent à mi-chemin entre Madagascar et le continent africain.
Crash
[modifier | modifier le code]Le vol 961 était presque à court de kérosène quand il s'approcha de l'archipel, mais les pirates continuaient d'ignorer les avertissements du commandant de bord. Sans autres options, celui-ci commença à faire des cercles au-dessus de la zone, espérant poser son avion sur le principal aéroport des Comores.
Quand le 767 arriva à court de carburant, les deux moteurs s'arrêtèrent successivement. Le commandant déployaa alors une ram air turbine, un système de secours composé d'une hélice rétractable couplée à un générateur, pour maintenir les fonctions vitales de l'avion mais, même avec cette turbine de secours, certains systèmes hydrauliques comme les volets sont inopérants. Cela forçait le pilote à atterrir à plus de 175 nœuds, soit environ 320 km/h.
Le commandant Abate essaya de faire un atterrissage d'urgence sur l'aéroport international Prince Saïd Ibrahim, à Grande Comore, mais une bagarre éclata avec les pirates à la dernière minute, provoquant la perte du point visuel de référence par le pilote, l'empêchant de localiser l'aéroport.
Alors que la bagarre continuait avec les pirates, il tenta alors d'effectuer un amerrissage dans des eaux peu profondes, à 500 mètres de la plage face au Galawa Beach Hotel, près de Mitsamiouli, au nord de l'ile de Grande Comore. Le commandant Abate a tenté d'amerrir parallèlement aux vagues, dans le but de faciliter l'amerrissage.
Quelques secondes avant de toucher l'eau, le 767 s'est incliné vers la gauche d'une dizaine de degrés ; le moteur gauche et le bout d'aile ont heurté l'eau en premier. Le moteur a ensuite heurté un récif corallien, ralentissant rapidement ce côté de l'avion et provoquant l'inclinaison soudaine du 767 vers la gauche. Le reste de l'avion est ensuite entré dans l'eau à grande vitesse, provoquant le retournement et la dislocation de l'avion.
À l'exception de la section arrière de l'appareil, les parties brisées du fuselage ont coulé rapidement. De nombreux passagers sont morts noyés parce qu'ils avaient gonflé prématurément leurs gilets de sauvetage dans la cabine, les amenant à se retrouver piégés à l'intérieur de l'avion en train de couler.
Des habitants de l'île et des touristes, dont un groupe de plongeurs et quelques médecins français et indiens en vacances sur place, portèrent tout de suite secours aux survivants du crash.
Les survivants ont été transportés dans un premier temps à l'hôpital de Mitsamiouli ; le lieu du crash se trouvait alors à moins de deux kilomètres de cet hôpital. Les passagers ont été transférés au Centre Hospitalier National El Maarouf de Moroni le même jour. Les deux ressortissants français qui ont survécu, ainsi que 19 autres blessés, ont été transportés à La Réunion, où l'un des blessés à succombé à ses blessures, ce qui porte le nombre de morts à 125. Hormis les personnes transportées à la Réunion, les survivants ont été transportés au Kenya et en Afrique du Sud.
A l'époque, il n'y avait pas de morgue à Moroni, donc des chambres froides ont été utilisées pour stocker 124 des 125 corps des victimes.
Bilan
[modifier | modifier le code]Le rapport final de l'accident du vol 961 comprend une liste des passagers et membres d'équipage survivants et morts lors du crash. Les 12 membres d'équipage étaient tous des ressortissants éthiopiens ; six d'entre eux ont survécu, dont les deux pilotes. Les passagers venaient de 36 pays différents.
La liste des passagers (y compris les pirates de l'air, mais pas les membres d'équipage) est la suivante :
Nationalité | Nombre à bord | Survivants |
---|---|---|
Nigeria | 23 | 4 |
Inde | 20 | 6 |
Éthiopie | 19 | 3 |
Kenya | 14 | 6 |
Mali | 12 | 3 |
Sri Lanka | 9 | 0 |
Israël | 8 | 1 |
Royaume-Uni | 7 | 2 |
États-Unis | 5 | 3 |
République du Congo | 5 | 2 |
Italie | 4 | 4 |
Ukraine | 4 | 3 |
France | 4 | 2 |
Djibouti | 2 | 2 |
Japon | 2 | 1 |
Bénin | 2 | 0 |
Cameroun | 2 | 0 |
Liberia | 2 | 0 |
Suède | 2 | 0 |
Lesotho | 1 | 1 |
Ouganda | 1 | 1 |
Autriche | 1 | 0 |
Belgique | 1 | 0 |
Canada | 1 | 0 |
Tchad | 1 | 0 |
Côte d'Ivoire | 1 | 0 |
Égypte | 1 | 0 |
Allemagne | 1 | 0 |
Hongrie | 1 | 0 |
Corée du Sud | 1 | 0 |
Pakistan | 1 | 0 |
Sierra Leone | 1 | 0 |
Somalie | 1 | 0 |
Suisse | 1 | 0 |
Yémen | 1 | 0 |
Zaïre | 1 | 0 |
Total | 163 | 44 |
Selon le rapport d'accident, les six membres d'équipage survivants et 38 passagers ont été grièvement blessés, deux passagers ont été légèrement blessés et quatre passagers n'ont subit aucunes blessures.
De nombreux passagers ont survécu à l'impact initial, mais ils n'ont pas tenu compte, n'ont pas compris ou n'ont pas entendu l'avertissement du commandant de bord, indiquant de ne pas gonfler leurs gilets de sauvetage à l'intérieur de l'avion ; lorsque l'eau a envahi l'avion, les gilets de sauvetage gonflés par certains des passagers les ont plaqués contre le plafond de la cabine. Incapables de s'échapper de l'appareil, ils se sont finalement noyés. On estime que 60 à 80 passagers, attachés à leurs sièges, se sont probablement noyés de cette manière.
Passagers notables
[modifier | modifier le code]Parmi les victimes se trouvait notamment Mohamed Amin, un célèbre photo-reporter de guerre et éditeur de Selamta, le magazine de bord d'Ethiopian Airlines. Il se tenait probablement près de l'entrée du cockpit, en train de discuter ou de négocier avec le pirate de l'air qui gardait le cockpit pendant les derniers instants du vol.
Franklin Huddle (en) , alors consul général des États-Unis à Bombay (en), et sa femme ont tous deux survécu à l'accident. Il a déclaré qu'il avait choisi de voler sur Ethiopian Airlines, alors qu'il préparait un safari au Kenya, en raison de la réputation de la compagnie aérienne ; c'était alors l'une des rares compagnies aériennes en Afrique à avoir une certification de la Federal Aviation Administration (FAA). Il attribue sa survie et celle de sa femme à un surclassement de dernière minute en classe affaires.
Conséquences
[modifier | modifier le code]Une cérémonie commémorative a eu lieu à Galawa le .
Il s'agit sans doute l'un des détournements d'avions commerciaux les plus connus, car un couple en vacances filma le crash avec une caméra vidéo[2], ce qui en fait le premier cas enregistré d'amerrissage forcé impliquant un avion gros-porteur. C'est également le premier cas connu d'amerrissage dû à un détournement d'avion.
Le commandant Abate et le copilote Mekuria, qui ont tous deux survécu au crash, ont reçu plusieurs prix d'aviation. Pour ses actions, le commandant a notamment reçu le prix du professionnalisme en sécurité aérienne de la Flight Safety Foundation (en)[3], et les deux pilotes continuèrent par la suite de piloter pour Ethiopian Airlines.
Médias
[modifier | modifier le code]L'accident a fait l'objet d'un épisode dans la série télé Air Crash nommé « Prise d'otage au-dessus de l'océan » (saison 3 - épisode 13).
Un chapitre y est consacré dans le livre "Catastrophes aériennes, les passagers ont le droit de savoir" de Jean-Pierre Otelli aux éditions Altipresse.
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Notes et références
[modifier | modifier le code]- « Ethiopian Airlines B767(ET-AIZ) Aircraft Accident in the Federal Islamic Republic of the Comoros, in the Indian Ocean on November 23, 1996 » [archive du ], Ethiopian Civil Aviation Authority, , Appendix E (Pages 2-6 of 6).
- Vidéo sur youtube
- (en) « Award Citation : Professionalism Award in Flight Safety »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) (consulté le ) by Flight Safety Foundation, presented to Capt. Leul Abate ; Ethiopian Airlines.
Liens externes
[modifier | modifier le code]- (en) Rapport final (Archive) - Ethiopian Civil Aviation Authority
- (en) The Hijacking of Ethiopian Airlines Flight 961 (Criminal Acts Against Civil Aviation - 1996, FAA) (Archive)
- (en) Description de l'accident description sur Aviation Safety Network
- (en) « Rapport sur AirDisaster.com. »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) (consulté le )
- Accident ou incident aérien aux Comores
- Accident ou incident aérien impliquant un Boeing 767
- Accident ou incident aérien en 1996
- Accident ou incident aérien d'Ethiopian Airlines
- Ethiopian Airlines
- Épave de l'océan Indien
- 1996 en Afrique
- 1996 aux Comores
- Novembre 1996
- Détournement d'avion
- Amerrissage d'urgence
- Accident ou incident aérien