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Communication politique

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Mark Rutte avec Henk Kamp (à sa droite) et Rita Verdonk (à sa gauche) lors d'un meeting pendant la campagne des élections législatives néerlandaises de 2006.

La communication politique est une forme de communication spécifique aux affaires politiques. Dans les démocraties pluralistes, elle a généralement pour vocation d'aider à l'élection de la personne qu'elle sert avant ou pendant une campagne électorale et à favoriser le soutien de l'opinion publique lors de l'exercice d'un mandat.

« Communication politique » est un euphémisme pour parler de la propagande, terme devenu extrêmement négatif à la fin des années 1970, car lié à la notion de totalitarisme[1],[2],[3],[4].

Depuis la généralisation de l'Internet et des réseaux sociaux, et dans le contexte d'une mondialisation de l'information, la communication politique a intégré de nouveaux genres médiatiques, dont les « fausses nouvelles », la « désinformation », la « mésinformation », la « manipulation des médias », les « comportements inauthentiques coordonnés » et la diffusion d'« information problématiques »[5],[6]. Ces moyens nouveaux ont permis l'apparition de nouvelles formes de « propagande » et de manipulation des votes et de la démocratie, notamment via la délivrance de messages biaisés ou mensongers, et surtout très ciblés. Comme l'a révélé le scandale Facebook-Cambridge Analytica et celui, plus discret d'Aggregate IQ, depuis le milieu des années 2010, ces messages sont parfois mis au point avec des algorithmes perfectionnés et l'intelligence artificielle, et basés sur nos profils psychologiques, secrètement créés sur la base de données personnelles parfois illégalement acquises.

La propagande et la manipulation de l'information ne sont pas nouvelles, mais elles sont devenues plus saillantes et omniprésentes avec l'avènement de l'ère du numérique a bouleversé la manière de créer, illustrer, personnaliser, diffuser et interpréter les messages politiques, ainsi que leurs impacts sur les individus, la société et la démocratie.

Définition du concept

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Pour Steve Chaffee (1975), spécialiste de la communication[7], la communication politique est la « part prise par la communication dans le processus politique ».

Dans l'introduction de leur Encyclopedia of Political Communication, Lyna Lee Kaid et Christina Holtz-Bacha précisent que la communication politique concerne également « les activités du gouvernement qui visent à influencer le fonctionnement des organes exécutifs, législatifs et judiciaires, les partis politiques, les groupes d’intérêt, les comités d'actions politiques et les autres parties prenantes du processus politique »[8].

Éléments historiques

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Alors que le discours politique a longtemps bénéficié d'une aura grâce à l'ascendant, le prestige et l'autorité des personnalités politiques, il a en grande partie perdu de son crédit depuis le XXe siècle qui voit le modèle dialogiste être remplacé par le modèle propagandiste (symbolisé par le communisme et le nazisme) puis par le marketing politique et sa rhétorique particulière[9].

Le discrédit de la communication politique dans les démocraties occidentales est renforcé à la fin du XXe siècle par la peopolisation de la sphère et du débat politique sous l'influence de l'égalitarisme[10] et de la multiplication des médias qui ont paradoxalement un contenu informationnel uniforme privilégiant le fond à la forme[11]. Dans le contexte de déclin des institutions politiques et des corps intermédiaires[12], le style de communication politique abandonne la rhétorique de la mobilisation au profit de l'esthétique de la séduction[13]. Cette démonétisation de la parole politique est également stigmatisée par son recours important aux alentours des années 1990, au coaching de communicants et au storytelling qui « s’inscrit logiquement dans une tradition de manipulation des esprits dont les fondements ont été établis au début du XXe siècle par les théoriciens américains du marketing et de la propagande »[14] : si les citoyens restent sensibles aux effets langagiers du discours politique et aux mécanismes rhétoriques, ils n'en sont pas dupes et n'ont souvent pas le temps comme les journalistes de décrypter tous ces mécanismes. L'idéal habermassien d'une sphère publique avec une communauté de citoyens éclairés par des médias de masse qui garantiraient les conditions de possibilité d'une organisation sociale pleinement démocratique (modèle de démocratie délibérative) apparaît difficilement atteignable dans ce contexte de défiance des politiques et de leur rhétorique manipulatoire[15],[16].

Différents vecteurs de la communication politique

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Réunions et meetings politiques

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En France, les réunions politiques évoluent depuis les dernières années du Second Empire jusqu’à la fin de la Troisième République : les premières sont des réunions qui se développent grâce à la loi du (liberté de réunion sous condition d'autorisation préalable, excepté la réunion électorale), la loi du (liberté de réunion sous condition de déclaration préalable en période électorale)[19] et grâce au discours républicain qui les conçoit comme de possibles assemblées délibératives où le citoyen fait l’apprentissage du débat contradictoire et forme son jugement politique. Elles se veulent un encadrement des masses privilégiant la raison aux émotions[20] par peur des foules et de leur violence lors de rassemblements spontanés sur la voie publique[21].

La période du boulangisme et de l'affaire Dreyfus voient apparaître des réunions, en parallèle avec les manifestations de rue, qui se veulent des démonstrations unilatérales de force d'un parti, avec en corollaire des tentatives d'obstruction, ou des contre-meetings et contre-manifestations des partis adverses. La loi de 1901 et l'apparition des partis politiques renforcent cette évolution[22].

La candidate Ségolène Royal répondant aux journalistes durant sa campagne pour l'investiture socialiste à l'élection présidentielle française de 2007.

Dans les années 1920, la notion de réunion est remplacée par celle de « meeting politique », véritable vitrine du parti et « grand-messe » populaire (il arrivait alors que la moitié des électeurs assistent aux meetings lors des périodes électorales)[23].

Dans les années 1930, le meeting est menacé, concurrencé et objet de confusions avec la manifestation de rue. Il devient dès lors essentiellement composé de militants des partis organisateurs[24], n'attire plus que 3 % des électeurs dans les années 1990[23], se réduisant à des discours destinés à quelques extraits dans les médias[25].

Dans les années 2000, la diffusion télévisée en direct généralisée par les chaînes d'information en continu et sur Internet et les réseaux sociaux redonne une place importante au meeting, comme en témoignent les investissements importants qu'ils génèrent lors des campagnes présidentielles correspondantes[26]. C'est notamment cette inflation des dépenses événementielles qui est à l'origine de l'affaire Bygmalion durant la campagne de 2017.

Des innovations ont même lieu pour renouveler le genre, notamment en 2017 avec des meetings réalisés en duplex sous la forme d'un hologramme par Jean-Luc Mélenchon[27].

Enseignement

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Plusieurs écoles et universités dispensent des formations relatives à la communication politique. Citons parmi les plus connues : l'Institut d'études politiques de Paris (IEP), communément appelé « Sciences Po », l'École des hautes études en sciences de l'information et de la communication - Celsa et l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne dont le « master de communication politique et institutionnelle », ex « DESS de communication politique et sociale », ouvert en 1979[28], est le plus ancien diplôme délivré en France dans ce champ.[réf. souhaitée]

Notes et références

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  1. Aurore Gorius et Michaël Moreau, Les gourous de la com' : Trente ans de manipulations politiques et économiques, La Découverte, , 312 p. (ISBN 9782707164889)
  2. Stéphane Olivesi, Sciences de l'information et de la communication: Objets, savoirs, discipline, PUG, (ISBN 9782706121807, lire en ligne) :

    « Avec l'expression « communication politique », on évite le terme très péjorativement connoté de « propagande », plutôt réservé aux contextes caractérisés par le monolithisme des médias, le contrôle direct par les gouvernants et le culte omniprésent du chef. (…) De la sorte, on laisse penser que l'art moderne de la « communication politique » n'est pas de la vulgaire propagande. Il s'agit en fait d'un euphémisme destiné à rehausser le prestige social de la réclame et des communicants. »

  3. Caroline Faillet, L'art de la guerre digitale: Survivre et dominer à l'ère du numérique, Dunod, (ISBN 9782100751310, lire en ligne), p. 144 :

    « Après 1968, les partis renoncent à leur « Secrétariat à la propagande » et lui préfèrent le vocable de « communication politique » »

  4. Fabrice d’Almeida, « Propagande, histoire d’un mot disgracié », Mots. Les langages du politique, Chroniques, novembre 1999. [lire en ligne].
  5. (en) Fabio Giglietto et Laura Iannelli, « ‘Fake news’ is the invention of a liar: How false information circulates within the hybrid news system (Les « fake news » sont l’invention d’un menteur : comment les fausses informations circulent au sein du système d’information hybride.) », sur Current Sociology, (ISSN 0011-3921, DOI 10.1177/0011392119837536, consulté le ), p. 625-642.
  6. (en) Caroline Jack, « Lexicon of Lies: Terms for Problematic Information (Data & Society) », Routledge, (ISBN 978-1-315-73097-4, consulté le ), p. 15-29.
  7. (en) « UCSB Distinguished Professor Steven Chaffee Dies Unexpectedly », sur The UCSB Current (consulté le )
  8. Philippe Aldrin et Nicolas Hubé, Introduction à la communication politique, Louvain-la-Neuve, De Boeck supérieur, coll. « Ouvertures politiques », , 288 p. (ISBN 978-2-8073-0863-3, lire en ligne).
  9. Modèles développés par le professeur en communication Arnaud Mercier dans son ouvrage La Communication politique. « Le modèle dialogique implique la compétence (la compétence à tenir les arguments donc une capacité communicationnelle), la raison (énonciation de discours de validité universelle) et la liberté (capacité à maintenir en soi tout ce qui peut perturber la bonne marche du dialogue) (p. 119-120). Le modèle propagandiste identifie ses acteurs, son espace public et ses médias privilégiés. Ainsi, l’espace public est ici l’auditoire qui écoute la propagande ; les acteurs sont de deux natures, certains parlent et d’autres écoutent. C’est une rencontre entre élites et masse ; les médias préférés sont les médias d’image (p. 122-125). Quant au modèle marketing, il se caractérise par la prépondérance de la publicité avec un recours excessif aux techniques persuasives et un usage sans limite des nouveaux médias. Le marketing politique fait donc moins appelle à la contradiction, à la délibération, qu’à la manipulation, à la séduction, à la construction et à la subtilité (p. 130-131) ». Olivier Kouassi Kouassi, « Arnaud Mercier, dir., La Communication politique », Questions de communication, no 33,‎ , p. 387-390
  10. Jamil Dakhlia, « People et politique : un mariage contre nature ? Critères et enjeux de la peopolisation », Questions de communication, no 12,‎ , p. 259-278
  11. Arnaud Mercier, La Communication politique, CNRS Éditions, , p. 12
  12. « La crise des médiateurs entraîne une crise de la médiation qui appelle des stratégies alternatives. La plus évidente consiste à court-circuiter les corps intermédiaires pour directement interpeller les individus qui sont à la base (ou à la périphérie) du système. Cette stratégie (que d’aucuns pourront désigner sous le terme de populisme) se heurte évidemment à un obstacle empirique insurmontable : à la différence des corps intermédiaires, la base est multiple, infinie, insaisissable, elle n’est par hypothèse ni structurée ni organisée, elle échappe donc à toute appréhension ». Cf Christian Le Bart, L'ego-politique. Essai sur l’individualisation du champ politique, Armand Colin, , p. 148
  13. Dominique Wolton, La Communication politique, CNRS Éditions, , p. 85
  14. Christian Salmon, Storytelling. La machine à fabriquer des histoires et à formater les esprits, Éditions de La Découverte, , p. 175
  15. Anne-Marie Gingras, Médias et démocratie. Le grand malentendu, PUQ, , 306 p.
  16. Jean-Baptiste Jeangène Vilmer, Les manipulations de l'information. Un défi pour nos démocraties, la Documentation française, , 210 p.
  17. Margareta Kastberg Sjöblom, Alpha Barry et Andrée Chauvin-Vileno (dir.), Nouvelles voix/voies des discours politiques en Afrique francophone, Besançon, Presses universitaires de Franche-Comté, coll. « Les Cahiers de la MSHE Ledoux », (ISBN 978-2-84867-990-7, lire en ligne)
  18. Christian Le Bart, Le discours politique, Presses universitaires de France, , p. 32
  19. Texte de la loi du 30 juin 1881
  20. Yves Déloyé, Sociologie historique du politique, Paris, La Découverte, 1997, p. 103
  21. Susanna Barrow, Miroirs déformants, Réflexions sur la foule en France à la fin du XIXe siècle, Aubier, 1990, p. 10.
  22. Paula Cossart, Le meeting politique : De la délibération à la manifestation, Rennes, PUR, , 400 p. (ISBN 978-2-7535-1191-0 et 2-7535-1191-8).
  23. a et b Michel Offerlé, Un homme, une voix ? Histoire du suff rage universel, Paris, Gallimard, 1993, p. 90
  24. D. Gaxie et P. Lehingue, Enjeux municipaux, La constitution des enjeux politiques dans une élection municipale, Paris, PUF, 1984
  25. J.-J. Courtine, Les glissements du spectacle politique, revue Esprit, n° 9, 1990, p. 160.
  26. « Une campagne tout en meeting », Le Monde.fr, .
  27. « L'hologramme de Mélenchon, mode d'emploi », sur Le Parisien.fr, .
  28. « Le Master », sur Sorbonne Communication (consulté le )

Bibliographie

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  • Philippe Aldrin et Nicolas Hubé, Introduction à la communication politique, Louvain-la-Neuve, De Boeck supérieur, coll. « Ouvertures politiques », 2017, 288 p.
  • Pierre-Emmanuel Guigo, Com & Politique, Les liaisons dangereuses, Éditions Arkhê, 2017.
  • Pierre-Emmanuel Guigo, Juliette Charbonneaux, Thierry Devars, Camila Moreira Cesar, Léa Pawelski, Camille Rondot, Communication politique, Pearson, 2019, 169 p.
  • Jacques Gerstlé, La communication politique, Paris, Armand Colin, 2004, 302 p. (ISBN 2-247-05884-1)
  • Arnaud Mercier, La communication politique en France : un champ de recherche qui doit encore s’imposer, L'Année sociologique, vol. 51, 2001/2, p. 355-363. [lire en ligne] [PDF]
  • Dossier « Campagnes politiques, tribunes médiatiques », Le Temps des médias, no 7, 2006/2. [lire en ligne]
  • Kees Brants, « De l’art de rendre la politique populaire… Ou "qui a peur de l’infotainment ?" », Réseaux no 118 - 2003/2, p. 135-166. [lire en ligne] [PDF]
  • Agnès Chauveau, « L’homme politique et la télévision. L’influence des conseillers en communication », Vingtième Siècle. Revue d'histoire, no 80 - 2003/4, p. 89-100. [lire en ligne] [PDF]
  • Caroline Ollivier-Yaniv, L'État communiquant, Paris, Presses Universitaires de France, 2000, 324 p.
  • Christophe Piar Comment se jouent les élections. Télévision et persuasion en campagne électorale, Paris, INA Éditions, 2012.
  • Serge Halimi, À l'américaine, faire un président, 1986 (ISBN 2-7007-2617-0).
  • Philippe Riutort, « Sociologie de la communication politique », Repères, Paris, La Découverte, 2007 (ISBN 978-2707148612)
  • Aurore Gorius, Michaël Moreau, Les gourous de la com' : trente ans de manipulation économique et politique, La Découverte, 2011 (ISBN 978-2-7071-7446-8)
  • Isabelle Veyrat-Masson (sous la direction), Médias et élections. La campagne présidentielle de 2007 et sa réception, Paris, Ina éditions, coll. « Les médias en actes », 2011
  • Jérôme Pozzi (dir.), De l'attachée de presse au conseiller en communication : pour une histoire des spins doctors, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Histoire », , 178 p. (ISBN 978-2-7535-7586-8).
  • Renaud Czarnes, Anti-manuel de communication politique, Éditions Kawa, 2019, 86 p. [présentation en ligne]

Articles connexes

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Liens externes

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