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Guerre d'Afghanistan (1979-1989)

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Guerre d'Afghanistan
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Carte de l'invasion par l'armée soviétique de l'Afghanistan en 1979
Informations générales
Date au
Lieu Afghanistan
Casus belli Invasion du territoire afghan par l'URSS pour soutenir l'une des factions afghanes communistes rivales
Issue Défaite soviétique; la guerre civile afghane continue ensuite. Dissolution de l'URSS. Prise du pouvoir par les Taliban en 1996.
Belligérants
Drapeau de l'URSS Union soviétique
République démocratique d'Afghanistan
Moudjahidines d'Afghanistan
Commandants
Drapeau de l'URSS Serguei Sokolov
Drapeau de l'URSS Valentin Varennikov
Drapeau de l'URSS Boris Gromov
Babrak Karmal
Mohammed Najibullah
Abdul Rachid Dostom
Ahmed Chah Massoud
Abdul Haq
Ismail Khan
Gulbuddin Hekmatyar
Djalâlouddine Haqqani
Abdullah Azzam
Forces en présence
160 000 soldats soviétiques
env. 100 000 soldats afghans[1]
150 000 (en 1984) à 250 000 hommes (en 1986)
Pertes
env. 15 000 morts soviétiques au combat, env. 75 000 blessés. env. 2,500,000 morts (combattants et civils)

Fichier:Evstafiev-afghan-apc-passes-russian.jpg
Soldats soviétiques en Afghanistan. 1988.

La première guerre d'Afghanistan de l'histoire contemporaine a opposé, du 27 décembre 1979 au 15 février 1989, l'armée de l'Union des républiques socialistes soviétiques (URSS), aux moudjahidines (« guerriers saints »). Durant dix ans, cette guerre a ravagé l'Afghanistan. Du fait de l'implication des États-Unis et de l'URSS, cette guerre est considérée comme une des dernières crises de la guerre froide.

Contexte et déroulement

Prémices[2]

L'invasion soviétique s’inscrit dans le contexte de la guerre froide : puisque les États-Unis soutiennent le Pakistan face à une Inde qui se voulait le fer de lance des pays non-alignés, l’URSS soutient l’Afghanistan qui avait, depuis 1919, des revendications territoriales sur les régions à majorité pachtoune du Pakistan dont l'acquisition aurait permis à l’Afghanistan de se désenclaver en possédant un accès à la mer d’Arabie.

Le 27 avril 1978 en Afghanistan a commencé la révolution, avec pour résultat l'arrivée au pouvoir, le Parti démocratique populaire d'Afghanistan (PDPA), qui a proclamé le pays « République démocratique d'Afghanistan » (DRA).

Les tentatives faites par les dirigeants du pays à de nouvelles réformes, qui permettraient de surmonter le retard de l'Afghanistan, a rencontré la résistance de l'opposition islamique. En 1978, avant l'introduction des troupes soviétiques en Afghanistan, la guerre civile a éclaté.

À la suite d'un coup d’État fomenté en 1973 par le prince Mohammed Daoud Khan, l’État afghan s’éloigne de plus en plus de Moscou. Pour éviter sa perte d’influence dans la région, l'URSS décide d’intervenir en Afghanistan, dès 1978, pour y placer un régime à ses ordres. Celui-ci entretient des relations privilégiées avec l’URSS et met en place une série de réformes collectivistes et sociales (imposition d'un athéisme d'État[3], alphabétisation, droit des femmes, réformes agraires…) qui contrarient les coutumes conservatrices afghanes, ainsi qu'une politique répressive envers les élites et classes moyennes du pays[4]. L’opposition grandissante menace le régime communiste de Kaboul, ce qui pousse Brejnev à intervenir en Afghanistan en décembre 1979.

En mars 1979, lors de la rébellion dans la ville de Herat, suivie par la première demande de la direction afghane sur une intervention directe de l'armée soviétique (toutes ces demandes ont été d'environ 20). Mais la commission du Comité central sur l'Afghanistan, créé en 1978, a rapporté au Politburo de la preuve des effets néfastes de l'intervention soviétique directe, et la demande a été refusée.

Toutefois, le soulèvement Herat conduit au renforcement des troupes soviétiques de la frontière soviéto-afghane (une centaine d'unité fourniront des cadres, 50000 réservistes seront rappelés et une brigade de soldats musulmans spécialement créée pour constituer la 40è Armée) et sur les ordres du ministre de la Défense Dmitri Ustinov a commencé les préparatifs pour un éventuel débarquement parachutiste en Afghanistan signifié à la Division des gardes 105e Airborne.

L'invasion[2]

Moscou envoie l'Armée rouge en Afghanistan. Dans la nuit du 24 au 25 décembre 1979 à 3 h du matin, deux divisions de l'armée de l'air soviétique atterrissent à Kaboul et à Shinband, dans l'ouest de l'Afghanistan. Au même moment des unités motorisées stationnées en Ouzbékistan franchissent la frontière. Deux jours plus tard, le président du conseil révolutionnaire, Hafizullah Amin, est exécuté par les Spetsnaz et remplacé par son rival au sein du Parti Communiste afghan, Babrak Karmal[5].

L'URSS justifie son intervention par la volonté de préserver le régime en place et de maintenir le calme en Asie centrale. Par rapport au principe du respect du droit international, elle invoque de très nombreuses demandes d'intervention du gouvernement communiste afghan auprès d'elle dans toute l'année 1979.

Le plan « Chtorm 333 » (baptisé également « Opération Prague ») prévoit l'entrée en force de la 40e armée soviétique commandé par le général Borissov. Un pont aérien est établi entre Tachkent, en Ouzbékistan et les principaux aéroports d’Afghanistan. Les troupes d’élites s’emparent des lieux stratégiques, à commencer par la capitale, (près de 10 000 paras se retrouvent rapidement sur place) tandis que le reste des forces emprunte la « route des invasions » à partir des deux villes frontalières de Kuska (à l’ouest) et Termez (à l’est).

La force d'invasion déploie 3 divisions d'infanterie équipées de nombreux blindés, une division aéroportée (105e division aéroportée de la Garde, renforcée d'un régiment de la 103e division et d'un de la 104e, et formant un groupe spécial sous les ordres du général Yevanov pour prendre la capitale) et différentes unités autonomes, soit un total de 55 000 hommes.

En décembre 1979, les hommes du général Serguei Sokolov prennent plusieurs villes afghanes après que les renseignement soviétiques (GRU) ont commandité la mort de Hafizullah Amin. Dans le même temps, des troupes aéroportées soviétiques occupent des villes du centre.

La colonne pénétrant à l'ouest (par Kuska) prend les villes d'Harat et Chin Dand puis continue sur Kandahar.

La 105e division aéroportée de la Garde sécurise la capitale puis aide la seconde colonne (qui vient par Termez avec les 201e et 360e divisions d'infanterie) à s'emparer du tunnel stratégique de Salang qui tombe le 20 février 1980. L'avance se poursuit sur Ghazni, pour rejoindre l'autre colonne, et Jalalabad pour prendre la passe stratégique de Khyber, lieu de passage entre l'Asie centrale et le sous-continent indien.

Au début de 1980, près de 100 000 soldats soviétiques sont en Afghanistan mais ils ne contrôlent que les grandes villes et principales régions économiques (20% du pays). Deplus, les chars et véhicules blindés se montrent inadaptés au relief montagneux.

Les combats sont peu nombreux jusqu'en février 1980, les soviétiques installant des bases. Ils ne peuvent compter sur l'armée afghane sous-entrainée et peu sûre.

Cette intervention est condamnée par l'ONU le 14 janvier 1980. La condamnation est renouvellée tous les ans. Elle marque la fin de la détente entre l'est et l'ouest dont les pays sont inquiets de la proximité de l'armée soviétique du pétrole arabe. Seule la Roumanie, dans le camp des démocraties socialistes, condamnera l'invasion. 34 Etats musulmans protestèrent.

Une vive résistance nationale se met en place face à un occupant soviétique qui ne s’attendait pas à une telle réaction. De plus cette agression soulève une grande émotion dans l’ensemble de la résistance afghane moudjahidine, soutenue et financée entre autres par la CIA et autre services secrets occidentaux.

Une partie de l'armée afghane se laissa désarmer tandis que d'autres résistèrent farouchement avant de gagner les montagnes. En quelques jours, la moitié de ses 80 000 hommes désertèrent avec leur armement.

Des réseaux se mettent en place pour acheminer armes et volontaires venant du Maghreb, de la péninsule arabique, d'Egypte, du Levant voire d'Europe. Le Pakistan devenant une base arrière. Le 27 janvier 1980, une "Alliance Islamique" regroupe une partie des résistants.

Le 22 février, une manifestation à Kaboul fait 1 000 tués. Loi martiale et couvre-feu sont instaurés. Le 14 mars, un accord entre afhans et soviétiques officialise la présence militaire soviétique.

De 1980 à 1983[2]

Durant les trois premières années, les Soviétiques étendent leur contrôle sur le pays et augmentent leurs effectifs sur place, passant de 85 000 hommes en mars 1980 [6] à 108 000 et 118 000 hommes selon que l'on compte les détachements KGB ou non[7].

Les soviétiques voulaient tenir les villes exes de communications laissant l'héradication des rebelles à l'armée afghane. Mais ils font face à la désertion des deux tiers de leur alliée l'armée afghane (120 000 hommes).

En mars 1980, les combats s'intensifient, l'Armée rouge utilisant sa puissance de feu. Au printemps, une offensive est lancée à l'est et sur la frontière pakistanaise qui échouent.

La brigade musulmanes est renvoyée en URSS suite à des désertions et échanges d'armes et de données avec leurs frères de religion. Des unités baltes, plus sûres, la remplaceront.

Les soviétiques prennent conseils auprès d'anciens commandants vietnamiens qui préconisent l'utilisation de forces spéciales et d'hélicoptères en se concentrant sur l'Afghanistan "utile". Ils mettent en place sept régions dirigées par un génaral russe et un afghan. Les formations de soutien et blindées sont renvoyées.

Nouveaux échecs en automne lors d'offensives dans les vallées du Panshir et du Kunar. L'armée soviétique s'enferme dans ses camps et lutte pour maintenir ses communications. La violence contre les populations renforçant les rebelles.

Les moudjahidines, soutenus et armés par les pays occidentaux, États-Unis en tête, prennent progressivement le contrôle de la majorité du territoire (80 %) à l'exception des villes principales. Les Soviétiques sont réduits à des opérations ponctuelles comme la protection de leurs convois ou le largage de millions de mines antipersonnelles. Des attaques tentent de dégager les garnisons tenant la frontière pakistanaise.

Face à la terreur et aux combats, trois millions de réfugiés fuient au Pakistan et en Iran ou remplissent les villes d'Afghanistan. Les occidentaux boycottent les jeux olympiques de Moscou en 1980.

En mars 1981, les soviétiques lancent leur troisième offensive sur le Panshir du commandant Massoud sans plus de succès.

De plus, les unités motorisées venant d'Ouzbékistan et du Turkestan ont tendance à être moins combatives contre d'autres musulmans. Intégrant 70% de réservistes mal préparés pour ce type de guerre en montagne, elles seront remplacées par des unités de baltes et d'ukrainiens. Le rappel des réservistes afghans provoque de violentes manifestations à Kaboul les 8 et 9 septmbre 1981.

En septembre 1981, quatrième offensive offensive très meurtrière au Panshir.

En avril 1982, les moudjahidines surprennent, par une puissante attaque, les soviétiques à Khost. A laquelle ils répliquent, en mai, par une cinquième offensive au Panshir, avec 12 000 soldats et 104 hélicoptères, précédée comme à chaque fois par un bombardement aérien et des posées de paras par hélioptères pour sécuriser le haut des montagnes.

Massoud perd la vallée et les soviétiques prennent une liste de 600 espions situés à Kaboul, ce qui décapitera le système de renseignement du commandant. Mais cette victoire est éphémère. Les commbattants rebelles se sont échappés et ont réoccupé la vallée. Une trentaine d'hélicoptères ont été perdus chez les sovétiques qui lancent une nouvelle offensive en août et septembre 1982. Les villages suspects sont bombardés par des Tu-16 venant directement d'URSS.

Les actes héroïques sont nombreux des deux côtés. Les pertes sont lourdes chez les soviétiques et les gouvernementaux afghans (au moral très bas et qui perdent les zones "libérées" qui leurs sont confiées) autant que chez les rebelles. Cela entraine l'ouverture de négociations en janvier 1983.

Un cessez-le-feu est signé mais les combats se poursuivent autour de la passe de Salang qui est d'une importance vitale pour la liaison entre Kaboul et l'URSS.

Massoud en profite pour étendre son influence et fortifier sa vallée du Panshir.

L'ambassade d'URSS est attaquée en décembre 1982.

De 1984 à 1985[2]

En 1984-85, les soviétiques l'emportent sur le moudjahiddines relégués dans leurs montagnes.

Les soviétiques lancent encore de grosses offensives en avril 1983, avril 1984 (dont la 7è sur le Panshir) et avril 1985 mais ils adaptent leur armée à ce type de conflit : ils se concentrent sur la sécurité des convois et des bases et utilisent de façon accrues l'armée afghane et surtout les troupes d'élite (paras et Spetsnaz héliportées. Ils obtiennent d'importants succès et seule la livraison de stinger permet aux rebelles de ne pas être écrasés.

Les soviétiques adaptent aussi leurs matériels (dont l'emploi des hélicoptères Mil Mi-24 Hind à partir du milieu de la guerre qui fera pencher la balance côté soviétique jusqu'à l'arrivée des FIM-92 Stinger) et s'allègent. Et adoptent une certaine autonomie au sein des unités. Les postes et bases le long des axes de communications se multiplient, gourmands en effectifs, ce qui réduit les capacités combattantes et le morale des garnisons. Ils emploient aussi la tactique de la terre brulée contre les rebelles et les techniques anti-insurrectionnelles.

D'avril à septembre, Tchernenko, lance une offensive au Panshir précédée de deux jours de bombardement aériens par des Tu-16, Tu-22 et Su-24. 200 avions et 190 hélicoptères en soutien. La vallée est abandonnée par les rouges en septembre peu avant de lancer la 8è offensive.

En juin 1985, violente contre-attaque soviétique toujours au Panshir suite à la destruction d'un poste.

Le 10 septembre 1985, une tentaive d'attaque comme la présidence afghane fait 16 morts.

Mikhaïl Gorbatchev voulant quitter l'Aghanistan sans ternir l'image de l'armée, décode d'obtenir une vistoire nette. Il fait renforcer le contingent qui comprend quatre divisions renforcées, cinq brigades, quatre régiments, six bataillons, quatre escadrons d'avions et trois régiments d'hélicoptères.

Pour la première fois, l'hiver de 1985 voit la poursuite des actions alors qu'habituellement, en cette saison, les combats s'arrêtent.

Afghans passant la ligne Durand au Pakistan en 1985.

De 1986 au retrait de l'Armée rouge[2]

80% du pays est toujours entre les mains des moudjahidines. Des millions de mines antipersonnelles sont larguées à travers le pays.

Mohammed Nadjibullah remplace Babrak Karmal à la tête de l'État afghan et veut négocier avec les rebelles en suivant un processus de réconciliation nationale sur le principe d'une perestroïka afghane. Les Soviétiques envoient des raids d'hélicoptères MI-24 Hind et des chasseurs bombardiers vers les places fortes afghanes, les Spetsnaz subissant de lourdes pertes au sol.

En 1986, les moudjahidines commencent à recevoir des missiles sol-air FIM-92 Stinger, ce qui fait perdre aux Russes le contrôle du ciel, bouleversant l'équilibre des forces.

Les soviétiques mettent en place une armée gouvernementale afghane de 302000 hommes en 1986 mais, chaque année, 32000 fuient.

Mikhaïl Gorbatchev change de stratégie et interdit les grande opérations. Il évoque publiquement un retrait.

Dès janvier 1987, les soviétiques ne participent plus aux combats, se contentant de se défendre. laissant l'effort de guerre à l'armée afghane largement modernisée et bien entrainée. Mais loin d'être fiable.

En 1987, une vaste opération de bombardement à lieu sur Kandahar. Prise de Khost en novembre par un régiment russe. Cela permet aux russes de quittaer le pays sur une victoire : l'échec de négociation avec un chef rebelle déclenche l'opération. Pour éviter des massacres préjudiciables à leur image, les soviétiques procèdent à une vaste propagande pour prévenir la population et l'inciter à partir. Les soldats afghans nettoient la région. La ville est prise en décembre et... abandonnée en janvier.

En février 1988, Mikhaïl Gorbatchev décide de retirer les troupes (suite à la grogne au sein de la population face au retour des cercueils), appuyé par la trêve négociée avec Ahmed Chah Massoud.

La trêve devient effective un an plus tard, le , date de la fin du retrait soviétique d'Afghanistan.

En avril 1988, 200 camions sont détruits près de Ghazni.

Les accords de Genève sont signés le 14 avril 1988 entre Afghanistan et Pakistan, avec Etats-Unis et URSS comme garants. Le retraits des troupes russes commence le 15 mai 1988. En octobre, les américains imterrompent les livraisons de missiles antiaériens.

Une ultime offensive à lieu en janvier 1989 contre Massoud au Panshir pour amoindrir la menace. L'opération consiste principalement en de violent bombardements d'artillerie et de missiles.

Le 15 février 1989, le général Boris Gromov passe à peid le pont de "l'Amitié" sur l'amou Daria, dernier soldats soviétique de la 40è armée à quitter le pays derrière une colonne de 450 véhicules et 1400 hommes.

Rapidement, la guerre civile s'installe entre les différents groupes armés moudjahidines et l'armée du gouvernement communiste fidèle au président Mohammed Nadjibullah.

Conséquences

Dans les années 1990, la guerre civile fait suite à la lutte contre l’URSS. Dès la chute du régime prosoviétique, des dissensions ont commencé à apparaître entre moudjahidines afghans et volontaires islamistes étrangers (des arabophones le plus souvent) qui entendent désormais faire de l’Afghanistan une base pour l’entraînement à la guerre sainte (jihad) contre l’Occident et un État respectant la charia. En 1996, les talibans, soutenus par le Pakistan (matériels) et l'Arabie Saoudite (financement), prennent le pouvoir et contrôlent, avec l’aide des islamistes étrangers, la majeure partie du pays en repoussant progressivement les moudjahidines du commandant Massoud dans les confins du nord-est du pays. Durant cette période de trouble, le Mollah Omar, chef militaire et religieux des talibans, impose la loi islamique à l'ensemble du pays. L'Afghanistan deviendra effectivement un camp d'entraînement pour les terroristes islamistes.

Aide extérieure et Résistances

L'aide américaine et saoudienne

Au cours de la guerre froide, les États-Unis, via entre autre l'Opération Cyclone de la CIA, ont dépensé 3,3 milliards de dollars américains et l'Arabie saoudite presque autant[8] durant les dix ans de la guerre d'Afghanistan, pour alimenter la résistance antisoviétique et anticommuniste incarnée par, entre autres, les moudjahidines de Hekmatyar et de Oussama Ben Laden.

Zbigniew Brzezinski, ancien conseiller pour la sécurité de Jimmy Carter, a déclaré en janvier 1998, que c'est suite au coup d'état communiste à Kaboul d'avril 1978, « le 3 juillet 1979 que le président Carter a signé la première directive sur l'assistance clandestine aux opposants du régime prosoviétique de Kaboul », six mois avant l'intervention des Soviétiques[9] avec pour objectif d'entrainer l'Armée rouge dans le « piège afghan ».

Mais le Président Zia, nouvellement arrivé au pouvoir, s'il est prêt à faire de l'Afghanistan, le "Viet-Nam" des soviétiques, voulait avoir la responsabilité du combat sur le terrain et avait posé une condition à la CIA, celle de laisser à l'ISI, le pilotage de l'aide à la résistance afghane et la ventilation des fonds versée à celle-ci[10].

L'aide, discrète les premières années, s'amplifie lorsque le Sénat triple, malgré l'hostilité de la CIA qui ne voulait pas provoquer une escalade avec l'URSS, le budget passant de 40 millions de dollars pour l'année fiscale 1983, à 120 millions de dollars pour 1984, 250 millions de dollars en 1985, 470 millions de dollars en 1986, 630 millions en 1987 et 584 millions en 1988[11]. Mais pour Hamid Gul, ancien directeur de l'ISI pakistanaise, les américains n'auraient financé qu'un quart du Djihad afghan, les 3/4 restant, auraient été financés par l'Arabie Saoudite et les États du Golfe persique[12].

Les mouvements de résistance afghans

Sept mouvements de résistance afghans seront reconnus par le Pakistan[13] :

  • Le Hezb-e-Islami Gulbuddin (Parti islamique), parti fondamentaliste, dirigé par Gulbuddin Hekmatyar, qui s'était opposé, déjà, en 1975, au régime de Mohammed Daoud Khan. Il est composé de pachtounes du nord-est. Il sera soutenu activement par l'ISI.
  • Le Hezb-e-Islami de Younos Khales, né d'une scission en 1979. Il est plus traditionaliste que le précédent et proche de l'école de Deoband.
  • Le Jamaat-e-Islami (Société islamique) de Burhanuddin Rabbani, parti islamiste modéré, surtout connu pour l'aura de deux de ses commandants : Ahmed Chah Massoud, du Panshir, et Ismail Khan d'Herat. Il s'était aussi opposé au régime de Mohammed Daoud Khan, en 1975. Persanophone et surtout constitué de tadjiks, il sera souvent ignoré par l'ISI pakistanaise.
  • Le Ettehad-e-Islami (Alliance islamique), d'Abdul Rasul Sayyaf, d'obédience wahhabite, c'est un mouvement salafiste soutenu par l'Arabie Saoudite et les États du Golfe persique. Il est composé de pachtounes.
  • Le Harakat-e enqetab-e Islami (Mouvement de la révolution islamique) de Nabi Mohammedi, un parti traditionnaliste qui va s'affaiblir au profit du Jamaat de Rabbani.
  • Le Jebh-e-Nejat-e Melli (Front de libération nationale) de Sebghatoullah Modjadeddi, parti issu de la confrérie des soufis. Il est composé de pachtounes du sud du pays.
  • Le Mahaz-e-Melli-e-Islami (Front national islamique) de Pir Sayyed Ahmad Gailani, parti pachtoune royaliste, constitué de pachtounes du nord et du sud.

À ces sept mouvements de résistance sunnites, s'ajoute deux mouvements de résistance chiites :

  • Le Choura-e-ettefaq (Conseil de l'unité islamique) de Sayyed Ali Behechti, constitué de Hazaras.
  • Le Harakat-e-Isami (Mouvement islamique) de l'Ayatollah Mosseni, constitué de Hazaras.

À partir de 1988, les mouvements de résistance chiites, sous l'influence de l'Iran, se réuniront sous le nom de Wahdat[14].

Le rôle de Ben Laden et des volontaires arabes

L'Arabie Saoudite étant un bailleur de fond majeur du djihad afghan, puisqu'ayant financé les 3/4 de la guerre contre les soviétiques[12], avec les états du Golfe persique, Oussama Ben Laden, à l'origine, n'est qu'un représentant du Prince Turki al-Fayçal, alors chef des services de renseignements saoudiens, chargé de ventiler les sommes allouées à la résistance afghane[15]. Le principal leader des volontaires arabes était un certain Abdullah Azzam, un cheik palestinien, qui avait enseigné à l'université de Djedda, en Arabie Saoudite. Au début des années 80, il s'installa au Pakistan pour enseigner à l'Université Islamique Internationale, à Islamabad, construite avec des fonds saoudiens[16]. En 1984, il partit vers Peshawar, près de la frontière afghane, pour fonder le Maktab al-Khadamat (MAK), ou Bureau de Recrutement, chargé de recevoir et d'organiser le flux des volontaires arabes voulant participer à la guerre contre les soviétiques[16]. Aux yeux d'Azzam, le djihad afghan était une obligation morale pour tous les musulmans, le sixième pilier de l'islam. Mais, déjà, Abdullah Azzam dépassait le cadre de l'Afghanistan, puisque dans son livre "Défendre la terre des musulmans est le plus important devoir de chacun", il écrivait que l'Afghanistan n'était qu'un début:

Ce devoir ne prendra pas fin avec la victoire en Afghanistan; le Jihad restera une obligation individuelle jusqu'à ce que toutes les autres terres jadis musulmanes nous reviennent afin que l'islam règne de nouveau: nous attendent ainsi, la Palestine, Boukhara, le Liban, le Tchad, l'Érythrée, la Somalie, les Philippines, la Birmanie, le Sud-Yémen, Tachkent et l'Andalousie[17].

L'internationalisme d'Azzam était donc une évolution capitale qui influença fortement Ben Laden[18].

En plus du recrutement, Azzam s'efforçait d'inculquer aux volontaires, le goût du martyre, mettant en avant les récompenses promises en citant le seul hadith dans lequel le Prophète, garantit au Chahid, l'absolution de tous ses pêchés, 72 vierges et la permission d'emmener au Paradis 70 membres de sa famille[18].

Des branches du MAK s'ouvrirent dans beaucoup de pays de musulmans, et il y eut même une antenne à Brooklyn, à New-York[19]. Ils s'appuyaient sur le vaste réseau des Frères Musulmans, qui pourvoyaient le djihad afghan en volontaires pour le martyr.

Milton Bearden, le chef de l'antenne locale de la CIA au Pakistan, de 1986 à 1989, évalue le flux des volontaires arabes pour toute la guerre à environ 25 000, dont la moitié de combattants[15].

Oussama Ben Laden, passait son temps entre le Pakistan et l'Arabie Saoudite, pour collecter des fonds et les redistribuer. À Peshawar, il louait une villa au 61, rue Sayyid Jamal al-Din Afghani, qu'il appelait beit al-ansar1, la maison des partisans[20]. Pour Jason Burke, journaliste britannique, correspondant pour The Guardian en Asie du Sud, Ben Laden ne fut jamais financé par la CIA, puisque les accords entre les américains et le général Zia, président du Pakistan, prévoyait que les fonds américains finançaient uniquement les organisations de résistance afghanes, par le biais de l'ISI, et non les volontaires arabes[10].

Ben Laden, d'ailleurs, n'était pas spécialement un combattant, mais plutôt un riche mécène saoudien qui créait des hôpitaux, aidait les familles des martyrs[10].

Les volontaires arabes s'entraînaient surtout dans le camp d'Abdul Rasul Sayyaf, le seul leader de la résistance afghane qui était wahhabite, à l'Université du Da'wa et du Djihad, construite à Pabbi, près de Peshawar, et à Khaldan[21].

Ben Laden, lui, avait fait construire une base pour son propre usage, baptisée la "Tanière du Lion", près de Jaji[22]. Et c'est ici qu'il participa, pour la première fois, à des combats contre les soviétiques, durant l'été 1986, à la tête de quelques centaines de volontaires arabes[22].

Les relations entre les volontaires arabes et les populations locale furent souvent tendues. L'islam rigoriste pratiqué par ces volontaires s'accordait mal avec les pratiques plus souples des afghans. En 1988, Ben Laden refusa d'aider un chef moudjahidin local, Mohammed Saïd Pahlwan, parce qu'il fumait et ne portait pas la barbe[23]. Durant les dernières années de la guerre, les affrontements entre arabes et afghans devinrent plus fréquents, surtout dans le nord-est du pays, dans la province de Kounar, où les wahhabites avaient déclaré leur indépendance[23].

Contestation

Les commandants Massoud et Amin Wardak[24] et d'autres témoignent dans leurs livres de la situation très difficile des résistants afghans qui ont dû se battre quasiment toujours avec des armes dépassées ou dérobées aux Soviétiques lors de leurs victoires. Ceci laisse à penser que plusieurs groupes Afghans n'ont bénéficié que peu de l'aide américaine et saoudienne, l'essentiel de l'argent étant détourné par l'État pakistanais pour ses propres besoins.

Bilan

Retrait des troupes d'Afghanistan, le 15 octobre 1986.

Au total, durant leurs 110 mois de présence militaire, plus de 900 000 Soviétiques servirent en Afghanistan. 800 hélicoptères et avions, 1 500 blindés et plusieurs milliers de véhicules ont été détruits. Le coût financier pour l’URSS est estimé entre 2 et 3 milliards de dollars américains par an.

Les pertes humaines Soviétiques selon Grigoriy Krivosheyev dans son ouvrage Russia and USSR In The Wars Of The 20es Century. Losses in Armed Forces, Statistical paru en 2001 sont les suivantes :

  • 11 897 morts au combat ou de blessures au combat
  • 2 556 morts de maladie ou par accident
  • 53 753 blessés au combat ou par accident dont :
    • 44 056 retournés au combat
    • 7 311 déchargés
    • 2 386 morts de leurs blessures (déjà comptés dans les morts)
  • 415 932 malades :
    • 411 015 retournés au combat
    • 4 343 déchargés
    • 571 morts (comptés ci-dessus)

La moyenne de "pertes" par mois était de 4 366 en comptant les malades dont 126 morts.

Les pertes afghanes (tous bords confondus) sont estimées à 1 242 000 morts dont 80 % de civils[25]. La guerre (1979-1989) aura provoqué l'exil de 4 millions d'Afghans pour une population de 15 millions[26]. On estime que 30 % de la population avait quitté le pays ou s’était déplacée à l’intérieur des frontières[25]. Depuis 1992, sur les 6 millions d’expatriés afghans, environ 3 millions étaient revenus en 1998[25].

Répercussions internationales

L'invasion de l'Afghanistan par l'URSS a provoqué un vaste mouvement de protestation parmi les gouvernements pro-occidentaux. L'une des conséquences fut le boycott des Jeux olympiques d'été de 1980 à Moscou par de nombreux pays pro-occidentaux et le gel de la ratification des accords de limitation des armements SALT II.

Notes et références

  1. J. Bruce Amstutz.(1994); Afghanistan; The First Five Years of Soviet Occupation; ISBN 0 788111-11-6 [1], p.155
  2. a b c d et e Raphaël Schneider, « La guerre soviéto-afghane », Champs de bataille Thématique n°27 août 2012 p. 26-71
  3. http://www.vfw.org/resources/levelxmagazine/0203_Soviet-Afghan%20War.pdf The Soviet-Afghan War: Breaking the Hammer & Sickle
  4. The April 1978 Coup d'etat and the Democratic Republic of Afghanistan
  5. Laurent Rucker, « 1979 : les Soviétiques à Kaboul », L'Histoire n° 238 décembre 1999 p. 26.
  6. (fr) [PDF] Les Soviétiques en Afghanistan, Cahier de la Recherche Doctrinale, 17 novembre 2008
  7. (en) Colonel-General G.F. Krivosheev, Soviet casualties and combat losses in the twentieth century, Greenhill Books, London 1997, p 286-288
  8. Noam Chomsky, Israël, Palestine, États-Unis : Le triangle fatidique, édition remise à jour (mars 1999), p. 10.
  9. Le Nouvel Observateur, 15-21 janvier 1998, p.76
  10. a b et c Jason Burke, Al-Qaida, la véritable histoire de l'islam radical, La Découverte, 2005, page 76.
  11. (fr)[PDF] Les États-Unis et première guerre d'Afghanistan (1978-1989) : Un Viet-Nam Soviétique ? Pierre Melandri
  12. a et b Jason Burke, Al-Qaida, la véritable histoire de l'islam radical, La Découverte, 2005, page 77.
  13. Bernard Dupaigne et Gilles Rossignol, Le Carrefour afghan, Gallimard 2002, Folio "Monde Actuels" pour la présente édition. Pages 207 à 210.
  14. Bernard Dupaigne et Gilles Rossignol, Le Carrefour afghan, Gallimard 2002, Folio "Monde Actuels" pour la présente édition. Page 209.
  15. a et b Jason Burke, Al-Qaida, la véritable histoire de l'islam radical, La Découverte, 2005, page 78.
  16. a et b Jason Burke, Al-Qaida, la véritable histoire de l'islam radical, La Découverte, 2005, page 90.
  17. Jason Burke, Al-Qaida, la véritable histoire de l'islam radical, La Découverte, 2005, pages 90 et 91.
  18. a et b Jason Burke, Al-Qaida, la véritable histoire de l'islam radical, La Découverte, 2005, page 91.
  19. Jason Burke, Al-Qaida, la véritable histoire de l'islam radical, La Découverte, 2005, page 92.
  20. Jason Burke, Al-Qaida, la véritable histoire de l'islam radical, La Découverte, 2005, page 75.
  21. Jason Burke, Al-Qaida, la véritable histoire de l'islam radical, La Découverte, 2005, page 95.
  22. a et b Jason Burke, Al-Qaida, la véritable histoire de l'islam radical, La Découverte, 2005, page 96.
  23. a et b Jason Burke, Al-Qaida, la véritable histoire de l'islam radical, La Découverte, 2005, page 97.
  24. Voir sur ce sujet le livre : Commandant Amin Wardak, mémoires de guerre, Editions Arthus[réf. incomplète]
  25. a b et c FAO/SMIAR - Rapport Spécial, Afghanistan, 2 juillet 1998
  26. Rucker p.27

Annexes

Articles connexes

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Liens externes

Bibliographie

  • Gilles Dorronsoro, 'Kabul at War (1992-1996) : State, Ethnicity and Social Classes', South Asia Multidisciplinary Academic Journal, 2007 [URL : http://samaj.revues.org/index212.html]
  • George Crile, La guerre de Charlie Wilson : L'extraordinaire histoire de la plus grande opération secrète de l'histoire, 2003.
  • Steve Coll, Ghost Wars : The Secret History of the CIA, Afghanistan and Bin Laden, from the Soviet Invasion to September 10, 2004, (ISBN 1-59420-007-6).
  • Laurent Rucker, "1979 : les Soviétiques à Kaboul", L'Histoire n°238 décembre 1999 p.26-27.

Au cinéma et à la télévision

Films
Documentaire

A la radio

France Inter, Patrick Pesnot, Rendez-vous avec X, émission du 23 avril 2011 : "Décembre 1979, l'invasion soviétique en Afghanistan"

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