Kang Kek Ieu
Kang Kek Ieu (ou Kaing Kek Iev ou Kaing Guek Eav), alias Douch ou Duch, en khmer កាំង ហ្គេកអ៊ាវ est né le [1]. Il était le directeur de la prison de Tuol Sleng sous la dictature communiste des khmers rouges au Cambodge.
Implication dans la dictature des khmers rouges
Il a dirigé sous la dictature de Pol Pot (1975-1979) la prison Tuol Sleng, aussi connue sous le nom de S-21, située dans le centre-ville de Phnom Penh. Le bâtiment, qui abritait un lycée à l'origine, a servi de centre de torture. Plus de 15 000 « opposants » au régime (hommes, femmes et enfants) y ont été torturés et exécutés dans des « Killing Fields » voisins, aboutissement de vastes purges organisées par la garde rapprochée de Pol Pot.
Précédemment, il a tenu entre 1971 et 1973 un camp de rééducation dans la jungle, M-13, dans lequel a été enfermé l'anthropologue français François Bizot. Un livre de celui-ci, Le Portail, relate de longs dialogues entre l'auteur et Douch, très éclairants sur le parcours idéologique du futur bourreau, qui n'était alors encore qu'un jeune fonctionnaire angoissé de bien remplir ses missions. En montrant le côté humain du jeune cadre Khmer Rouge, il rend paradoxalement encore plus effarant le rôle tenu ensuite par le futur bourreau de S-21.
Justice internationale
Démasqué par le photographe irlandais Nic Dunlop alors qu'il vivait paisiblement dans un village cambodgien, Douch est détenu depuis 1999. Il a été écroué et inculpé le de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et meurtres avec préméditation par le tribunal du génocide cambodgien, un tribunal cambodgien parrainé par les Nations unies. Il s'agit du premier responsable khmer rouge à être poursuivi par cette instance judiciaire. Quatre hauts dirigeants (dont Nuon Chea, Ieng Sary et Meas Muth) sont visés par ce tribunal.
Le procès de Douch s'est ouvert le . Lors de son procès, Douch a demandé pardon pour les crimes commis à la prison de Tuol Sleng qu'il dirigeait[2]. Il a ensuite fait part de sa conversion en 1996 au christianisme[3].
Le , ouverture des débats de fond du procès international contre Kaing Guek Eav (66 ans). L'accusé, ex-professeur de mathématiques, trois ans avant son arrestation, il est poursuivi pour crimes de guerre, crimes contre l'humanité, torture et meurtre avec préméditation[4].
Le , Douch a admis sa responsabilité dans des crimes et a demandé pardon aux victimes de la dictature communiste de Pol Pot : « Je voudrais exprimer mon regret et mon chagrin sincère pour les pertes et tous les crimes » commis sous les Khmers rouges il y a plus de trois décennies. Auparavant, les procureurs avaient fourni des détails horribles sur les actes de torture à Tuol Sleng (S-21), centre qui jouait un rôle central dans la politique d'écrasement des « traîtres » à la Révolution communiste : « La politique était que personne ne pouvait sortir vivant de S-21 [...] Sous les ordres directs de l'accusé et parfois de ses propres mains, des personnes détenues à S-21 ont été soumises de manière intentionnelle à des souffrances physiques et mentales intenses dans le but de leur soutirer des aveux et parfois d'infliger une punition [...] Les victimes étaient battues avec des cannes en rotin et des fouets, électrocutées ou étouffées avec des sacs en plastique attachés autour de leur tête, déshabillées et leurs parties génitales soumises à des décharges électriques [...] l'accusé a admis que les coups de canne étaient le plus souvent utilisés parce que d'autres formes de torture prenaient trop de temps ».
Le , Kaing Guek Eav demande son acquittement au tribunal alors qu'il a plaidé coupable durant toute la procédure. Il reconnaît les crimes qui lui sont imputés mais n'estime pas avoir été un haut dignitaire du régime de Pol Pot. Ce volte-face contredit aussi la plaidoire qu'avait tenue son avocat français, Me François Roux[5]. Cet avocat est révoqué par l'accusé début juillet 2010, deux semaines avant le verdict[6]. Douch conserve son avocat cambodgien Kar Savuth qui estime qu'il ne doit pas être condamné.
40 ans de prison sont requis à l'encontre de l'accusé. Le verdict, rendu le 26 juillet 2010, le condamne à 35 ans de réclusion. Cette peine est immédiatement revue à la baisse, à 30 ans, en raison de cinq années déjà purgées[7].
Références
- Jean-Louis Tremblais, « Khmers rouges : l'heure des comptes », Le Figaro, (lire en ligne)
- Khmers rouges: Douch demande pardon, L'Express], 31 mars 2009
- L'ex-tortionnaire en chef des Khmers rouges demande pardon, Le Salon Beige, 22 avril 2009
- Le Figaro.fr, Ouverture des débats au procès Douch, 30 mars 2009
- Le Monde.fr, Douch, tortionnaire des Khmers rouges, demande l'acquittement, le 27 novembre 2009
- www.cambodgesoir.info 9 juillet 2010
- (en) « Duch sentenced to 30 years », sur phnompenpost.com, (consulté le ).
Liens externes
- Page consacrée à Nic Dunlop, le photographe irlandais qui a démasqué Douch en 1999.
- L'ouverture du procès de Douch, RFI, février 2009
- [vidéo] [1] Interview de François Bizot évoquant la personnalité de Douch.
- [vidéo] [2] Interview de Françoise Sironi sur l'expertise psychologique de Duch
Articles
- « Un ancien Khmer Rouge inculpé de crimes contre l'humanité », Le Figaro, 31 juillet 2007.
- « Un haut dirigeant khmer rouge inculpé de crimes contre l'humanité », Le Monde, 31 juillet 2007.
- « Douch, le grand inquisiteur », Le Nouvel Observateur, 25 octobre 2007.
- « Le procès du Khmer Douch s'ouvrira le 17 février », Libération, 19 janvier 2009.
- « Le juge, la victime et l'accusé Khmer rouge », par François Bizot,Le Monde, 16 février 2009.
Livres
- Nic Dunlop, The Lost Executioner: A Story of the Khmer Rouge, Bloomsbury Publishing, 19 juin 2006 (ISBN 0747566712)
- François Bizot, Le Portail, 2000.
Film
- Derrière le portail , Un film documentaire de Jean Baronnet 2004
- Reportage "La prison S21 à Phnom Penh" proposé par TV5
- S21, la machine de mort Khmère rouge, documentaire de Rithy Panh, 2002.