José Bové
Joseph Bové dit José Bové, né à Talence (Gironde, France) le 11 juin 1953, est un agriculteur et syndicaliste français, l'un des principaux acteurs du mouvement altermondialiste.
Biographie
José Bové est surtout connu par sa participation à des débats, manifestations, et actions contre la mondialisation libérale et la culture en milieu ouvert de plantes transgéniques, il a participé à la destruction de nombreuses cultures transgéniques.
Il possède une exploitation agricole dans le Larzac se livrant à l'élevage de brebis pour la fabrication du roquefort.
Il est père de deux filles.
Symbole du syndicat Confédération Paysanne, il est l'une des figures en vue dans la lutte contre les OGM (organismes génétiquement modifiés). Il s'est fait aussi remarquer comme luttant contre la « malbouffe », symbolisée par les repas servis dans la restauration rapide (notamment les McDonald's).
Origine
Son père Joseph Bové père, d'origine luxembourgeoise, se voit attribuer la nationalité française en devenant directeur régional de l'Institut National de la Recherche Agronomique (INRA) et est membre de l'Académie des Sciences. Sa mère Colette Dumeau est professeur de sciences naturelles, l'un de ses frères est ingénieur, l'autre informaticien. Il parle anglais couramment, ayant suivi, à l'âge de trois ans, ses parents invités en tant que chercheurs à l'Université de Berkeley. La famille passait des vacances dans une résidence secondaire à Lacanau-Plage.
Les débuts (1953 - 1973)
Inscrit dans un lycée bilingue près d'Athis-Mons tenu par des Frères, il en sera exclu pour « irréligion » en 1968 : Il avait fait, dit-on, l'apologie de la drogue dans une dissertation de français. Demeuré seul à Paris (ses parents étaient mutés à Bordeaux) il fréquente les galas libertaires. Il réussit son bac avec mention. Il envisage l'enseignement de la philosophie, et s'inscrit en classe préparatoire aux grandes écoles, et à la faculté à Toulouse où en 1971, il rencontre Alice Monier. Pendant son séjour seul à Paris, début 1970, il est pacifiste et antimilitariste. Il milite également dans des mouvements hostiles à la guerre du Vietnam. Avant les « routards », il effectue un « voyage initiatique » en Inde en 1973. Il a été marqué par la fréquentation de la Communauté de Lanza del Vasto, développant une philosophie de « non-violence active ».
L'installation dans le Larzac (1973-1981)
Réfractaire au service militaire et refusant le statut d'objecteur de conscience, José Bové, recherché par l'armée trouve refuge dans une exploitation agricole des Pyrénées. En 1973, il participe au rassemblement national contre l'extension du camp militaire dans le Larzac, où il rencontre Bernard Lambert. À l'été 1974, il y aura 50 000 participants au Larzac. Ils participent à l'opération Moisson pour le tiers monde. Il se trouve parmi les quelques militants qui évitent à François Mitterrand, candidat battu quelques semaines auparavant, d'être lynché par des groupuscules maoïstes.
Avec sa femme Alice Monier, et sa fille, il s'y installe en 1976 alors et élève des moutons mais ne lâche en rien son côté contestataire. Son opposition au militarisme le conduit tout naturellement à participer à la lutte contre l'extension du camp militaire du Larzac, qui fédère paysans et ouvriers au cours des années 1970. Il fait partie des vingt-deux personnes qui investissent en 1976 le camp militaire et s'emparent de documents attestant la vente de terrains par divers paysans. Il fait trois semaines de prison préventive, et est condamné à quatre mois avec sursis et privation de ses droits civiques pour activités antimilitaristes. Il décide avec sa femme de squatter une ferme à l'abandon depuis 1920, Le hameau de Montredon, et de mettre en valeur les terres convoitées par l'armée. En 1976, il s'installe sur cette ferme. En 1977, il est au volant de l'un des 90 tracteurs qui pénètrent au champ de tir avec, sur le garde-boue, un soldat contestataire en cagoule, délégué par les comités de soldats. En 1981, c'est la victoire du mouvement du Larzac, François Mitterrand annonçant l'annulation du projet d'extension du camp militaire. C'est l'abandon du projet pour les militaires qui décident finalement de louer les terrains, autrefois réquisitionnés.
Le syndicalisme agricole (1981-1993)
En 1978, Alice Monier et José Bové fondent un Centre cantonal des Jeunes agriculteurs, (CCJA), dont Alice devient vice-présidente. Dès septembre 1981, il fonde le Syndicat des Paysans-Travailleurs de l'Aveyron, où se retrouvent les membres du CCJA. Se revendiquant des situationnistes, et notamment de son ami René Riesel, il prône une agriculture autre.
En 1987, il participe à la création de la Confédération paysanne, syndicat agricole prônant une politique respectueuse des personnes et de l'environnement, jugée incompatible avec le modèle de l'industrie agro-alimentaire moderne. Ce syndicat est la fusion des Paysans Travailleurs de Lambert et de dissidents de la FNSEA, regroupés dans la Fédération nationale des paysans. Il devient l'un des cinq secrétaires nationaux du tout jeune syndicat.
Outre de multiples manifestations et actions, notamment contre le GATT et la PAC, il développe en local un syndicalisme revendicatif, s'appuyant sur les petits producteurs de lait de brebis, indispensable aux Caves de Roquefort. Cogérant de la Société civile des terres du Larzac, il fonde et dirige le Comité Roquefort, devenu en 1987, le Syndicat des producteurs de lait de brebis, affilié à la Confédération Roquefort. Il ne sera reconnu par l'interprofession qu'après des luttes, occupations et divers saccages, en mai 1993.
Engagement (1995-1999)
L'engagement de José Bové ne se limite pas au syndicalisme agricole. En 1995, il participe dans l'Océan Pacifique à l'opération menée par Greenpeace contre la reprise des essais nucléaires décidée par le président Chirac, fraîchement élu. Il intervient également pour soutenir les mouvements des Tahitiens et des Kanaks (l'avocat de José Bové, François Roux, est aussi le défenseur des Kanaks, notamment lors de l'assassinat de Jean-Marie Tjibaou).
L'affaire du McDonald's de Millau (1999)
Le fait qui le rend célèbre est le « démontage » (d'autres emploient le mot de « saccage ») collectif du restaurant McDonald's en construction de Millau le 12 août 1999 pour protester contre la décision de l'Organisation mondiale du commerce de pénaliser certaines importations européennes, dont le fromage de Roquefort, en raison du refus de l'Union Européenne d'importer du bœuf aux hormones des États-Unis. Il gagne la célébrité quand il est présenté menottes au poignet, pour ces faits qui contribueront à lui valoir une peine de prison.
Après l'affaire
Il participe en 1999 à des manifestations à Seattle contre le sommet de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC). En janvier 2001 en marge du Forum Social Mondial, il mène une action anti-OGM au Brésil contre une unité de la société Monsanto qui produit, de manière illégale, des semences de soja transgénique.
En mars 2002, il participe à une délégation de Via Campesina composée de Paul Nicholson (paysan basque) et Joao Pedro Stedile (responsable brésilien du MST), invitée par les paysans palestiniens pour commémorer le Jour de la Terre. Cette visite s'inscrit dans le cadre plus large de la Campagne civile internationale pour la protection du peuple palestinien (CCIPPP). L'offensive lancée par l'armée israélienne le lendemain de leur arrivée dans les Territoires occupés bouleverse le programme originel. L'ensemble de la mission décide alors de rejoindre la ville assiégée de Ramallah puis de se rendre au Palais présidentiel pour éviter qu'il ne soit pris d'assaut. José Bové est arrêté par l'armée israélienne alors qu'il sort à la tête d'une délégation pour entamer des négociations. Il est expulsé, sans jugement, après deux jours d'emprisonnement. Il est violemment pris à parti à son arrivée à Orly par des membres du Betar, un groupe sioniste d'extrême droite.
Dans son action syndicale ou politique, José Bové, assisté d'autres militants, a parfois recours à des méthodes de désobéissance civile, ce qui le place hors-la-loi comme par exemple lors du « démontage » (terme qu'il emploie et qui devient célèbre) du McDonald's de Millau. On peut aussi citer l'arrachage de champs d'essai d'organismes génétiquement modifiés (OGM) ou de plants de riz transgénique dans un laboratoire du CIRAD avec l'aide de militants indiens qui pratiquent régulièrement ce genre d'action dans leur pays, se positionnant dans la lignée des actions de Gandhi (voir aussi à ce sujet Coca-Cola et Bophal).
À ce titre, José Bové est condamné à de nombreuses reprises (voir liste ci-dessous). On retient surtout sa condamnation à dix mois ferme en 2003, après un appel et un pourvoi en cassation. La Confédération paysanne dénonce alors « la dureté sans précédent de cette condamnation, aucun responsable syndical de niveau national n'ayant été incarcéré depuis le régime fasciste de Vichy », condamnation qui « montre la dégradation des libertés syndicales [en France] ». Peu après son incarcération en juin 2003, son avocat demande pour José Bové le statut de prisonnier politique. Cette demande fait suite à une arrestation assez musclée à l'origine de multiples protestations.
José Bové reste porte-parole national de la Confédération paysanne jusqu'à son congrès des 7 et 8 avril 2004 qui se tient à Strasbourg dans l'hémicycle du parlement européen. Il annonce son retrait à la fin du grand rassemblement du Larzac en août 2003, refusant ainsi de devenir « porte-parole » à vie. Il est remplacé dans cette fonction par Brigitte Allain, paysanne en Dordogne et Jean-Emile Sanchez, un de ses compagnons de lutte, également éleveur de brebis sur le plateau du Larzac. Il fait également partie des membres fondateurs de l'association ATTAC.
José Bové poursuit néanmoins son activité syndicale internationale. Lors de la quatrième conférence internationale de Via campesina, se tenant au Brésil en juin 2004, il se voit confier le soin d’animer la campagne internationale visant à faire reconnaître la souveraineté alimentaire comme un nouveau droit de l’Homme. Il représente Via campesina à la conférence de la CNUCED de Sao Paulo où il présente cette proposition à Kofi Annan, Secrétaire général des Nations Unies.
En juin 2004, il se rend en Bolivie où il participe à une mission de solidarité à Franscisco Cortes, militant colombien emprisonné dans ce pays depuis alors plus d’un an. Il est reçu par Evo Morales, député bolivien, président du Movimiento Al Socialismo, première force politique du pays et par Carlos Mesa, président de la République.
Au mois de septembre 2004, José Bové se rend en Corée du sud à l’invitation du Korean Paesants League, syndicat agricole coréen affilié à Via campesina, pour participer aux manifestations en mémoire du syndicaliste paysan coréen Lee Kyang Hae qui s’est suicidé le 10 septembre 2003 à Cancun pour protester contre l’OMC.
Au cours de l’été 2004, José Bové et d’autres membres du réseau des « faucheurs volontaires » relancent la campagne de destruction d’essais d’OGM en plein champ.
En 2005, il pense à se présenter aux élections présidentielles du 2007.
Points de vue sur José Bové
Les soutiens de José Bové le présentent comme le défenseur des petits agriculteurs en France et dans le monde. C'est ainsi que le « démontage » du McDonald's en construction à Millau (en réaction aux mesures douanières des États-Unis sur divers produits dont le roquefort à cause du dossier du bœuf aux hormones) est considéré comme le symbole de la lutte contre la « mondialisation libérale » et de son plus grand représentant, les États-Unis. De façon similaire, la destruction de plants de riz transgénique dans un laboratoire du CIRAD, quelques jours avant qu'ils ne soient replantés dans l'espace naturel protégé de la Camargue, est considérée par ses sympathisants comme le symbole de la lutte contre l'imposition d'un modèle d'agriculture potentiellement dangereux, rappelant les veaux aux hormones américains et la maladie de la vache folle. Cela constitue donc, d'après eux, un acte de désobéissance civile.
Parmi les détracteurs de José Bové, certains n'acceptent pas les actions illégales, notamment lorsqu'elles s'accompagnent de la violation des droits de propriété et de la destruction des biens d'autrui. Concernant les OGM, on lui reproche souvent de faire obstacle aux avancées de la science et aux progrès de l'agriculture pouvant lutter contre la faim dans le monde. D'autres enfin, y compris dans son propre syndicat, supportent difficilement sa grande médiatisation.
Parcours judiciaire de José Bové
Au cours de son parcours judiciaire tumultueux, José Bové a été accompagné par François Roux, avocat à la Cour de Montpellier
- 18 février 1998 : condamnation à huit mois de prison avec sursis par le Tribunal correctionnel d'Agen pour la destruction d'un stock de semences transgéniques sur un site de Novartis à Nérac dans le Lot-et-Garonne.
- 20 octobre 1998 : le Tribunal de Tahiti le reconnaît coupable d'entrave volontaire à la navigation ou à la circulation d'aéronef. Néanmoins, il est dispensé de peine.
- 27 octobre 1999 : le Tribunal correctionnel de Rodez (Aveyron) le reconnaît coupable, avec 8 membres de la Confédération paysanne, de « violence en réunion ». En mars 1999, ils avaient séquestré trois fonctionnaires de la préfecture. Néanmoins, il est dispensé de peine.
- 13 septembre 2000 : trois mois de prison fermes par le Tribunal correctionnel de Millau pour la destruction du chantier de McDonald's le 12 août 1999. Le 22 mars 2001, la Cour d'appel de Montpellier confirme la peine, et le condamne à 6 000 francs d'amende (915 euros) pour la brève séquestration des fonctionnaires de la Direction départementale de l'Agriculture de Rodez en mars 1999.
- 20 décembre 2001 : la Cour d'appel de Montpellier condamne José Bové à six mois d'emprisonnement pour destruction de plants de riz transgénique en juin 1999 dans une serre du CIRAD à Montpellier. En première instance, le 15 mars de la même année, le tribunal correctionnel de Montpellier avait infligé dix mois d'emprisonnement avec sursis et deux ans de mise à l'épreuve à José Bové.
- 6 février 2002 : la Cour de cassation rejette son pourvoi formé au sujet de sa condamnation à trois mois d'emprisonnement ferme pour les dégradations du McDonald's de Millau. Elle fait de même à l'encontre de sa condamnation à 915 euros d'amende dans l'affaire de Rodez.
- Du 19 juin au 1er août 2002: José Bové purge le reliquat de sa peine de trois mois d'emprisonnement pour la destruction du McDonald's de Millau, à la maison d'arrêt de Villeneuve-lès-Maguelone (Hérault) (trois semaines de détention provisoire avaient déjà été effectuées en 1999).
- 22 octobre 2002 : le Tribunal correctionnel de Foix le condamne à 100 jours-amende d'un montant de 30 euros par jour, pour le fauchage, en avril 2000 d'un champ expérimental de colza transgénique cultivé par le Centre technique interprofessionnel des oléagineux métropolitain (Cetiom) à Gaudiès (Ariège). José Bové ne fait pas appel.
- 19 novembre 2002 : la Cour de cassation rejette le pourvoi formé contre sa condamnation par la Cour d'appel de Montpellier le 20 décembre 2001 à six mois d'emprisonnement ferme pour la destruction de plants de riz transgénique en juin 1999.
- 26 février 2003 : condamnation à dix mois de prison ferme. Rejet du pourvoir par la Cour de cassation à l'encontre de la peine de six mois de prison prononcée par la Cour d'appel de Montpellier fin 2001 et révocation de la moitié du sursis des huit mois prononcée par le Tribunal correctionnel agenais. Les condamnations en question sanctionnent la destruction de plants de riz transgénique au centre CIRAD de Montpellier et de semences de maïs transgénique dans les locaux de la société Novartis à Nérac.
- 22 juin 2003 : incarcération à la prison de Villeneuve-lès-Maguelone.
- 2 août 2003 : libéré avec une assignation à résidence.
- 8 novembre 2004 : cité à comparaître devant le tribunal de Toulouse pour répondre de sa participation à une action de destruction de parcelle de maïs transgénique le 25 juillet 2004 à Menville dans le département de la Haute-Garonne avec huit autres personnes inculpées. La Présidente de la cour a accepté de juger les 224 autres personnes qui avaient participé à cette manifestation et qui revendiquaient leur geste.
- 17 mars 2005 : Audience à la Cour d'Appel pour plaider le renvoi collectif des 222 faucheurs volontaires, qui ont tous fauché du maïs transgénique à Menville le 25 juillet 2004, et demandent à être poursuivis comme les neuf prévenus à ce jour - le député (Verts) Noël Mamère, le député européen (Verts) Gérard Onesta, José Bové, les élus municipaux toulousains François Simon (ex-PS) et Pierre Labeyrie (Verts), l'ancien secrétaire national des (Verts), Gilles Lemaire, et le conseiller régional d'Aquitaine (Verts), Michel Daverat, Jean-Baptiste Libouban, de la communauté de l'arche, fondateur du mouvement des Faucheurs volontaires et un agriculteur Jean-Aimé Gravas. Cet appel, relevé par le Ministère public, faisait suite à la décision du tribunal de Toulouse du 8 novembre 2004 de faire comparaître, avec les neuf premiers prévenus, les 222 personnes qui s'étaient dénoncées au nom de « l'action collective de désobéissance civique ».
Ouvrages
- Nous, Paysans (2000) avec Gilles Luneau
- Le monde n'est pas une marchandise ; des paysans contre la malbouffe (2001) avec François Dufour et Gilles Luneau
- Rural - Chronique d'une collision politique (2001) avec Étienne Davodeau
- Retour de Palestine (2002)
- Paysan du Monde (2002) avec Gilles Luneau
- La confédération paysanne (2003) avec Yves Manguy
- Pour la désobéissance civique (2004) avec Gilles Luneau
Bibliographie
- La longue marche de José Bové, par Denis Pingaud
- José Bové - La révolte d'un paysan, par Paul Ariès et Christian Terras
- Il faut tuer José Bové, BD satirique par Jul
Articles connexes