Broquelet
Le Broquelet était une grande fête populaire des ouvriers du textile lillois se déroulant chaque année le 9 mai, jour de la translation de Saint-Nicolas. Cette fête qui tirait son nom du broquelet, fuseau des dentellières lilloises, était à l’origine celle des dentellières et devint ensuite également celle des filtiers puis de l’ensemble des ouvriers du textile. Cette fête datant du XVIe siècle resta peu importante jusqu’au XVIIe siècle, se développa au XVIIIe siècle, atteint son apogée dans les première décennies du XIXe siècle, déclina au milieu du siècle et disparut en 1861.
Histoire de la fête
[modifier | modifier le code]L’historien Alain Lottin remarque qu’Ignace Chavatte, ouvrier sayetteur à Saint-Sauveur, qui évoque d'autres fêtes (Procession de Lille, fête de la Saint-Jean) ne la mentionne pas dans sa chronique des années 1660 à 1690. Alain Lottin considère le développement de cette fête au cours du XVIIIe siècle lié à la croissance du nombre de dentellières[1].
La sayetterie et la bourgetterie, activités artisanes masculines de tissage d’étoffes, prospères au XVIe siècle et première moitié du XVIIe siècle, ont décliné au XVIIIe siècle à la suite de la fermeture de marchés. La suppression en 1777 du monopole de fabrication de ces étoffes à Lille acquis en 1524 (arrêt donnant le droit aux campagnes de fabriquer ces tissus) leur porta un coup fatal. Ce déclin a été compensé par le développement de la dentellerie qui aurait employé près de la moitié de la population féminine de Lille en 1789 et celle de la filterie, activité masculine de transformation du lin en fil à coudre[2]. Les métiers de filtiers et de dentellières se sont réunis au cours du XVIIIe siècle sous le patronage de saint Nicolas.
À partir de la deuxième moitié du XVIIIe siècle, la fête du Broquelet se déroulait à Wazemmes, faubourg à l’extérieur des remparts de Lille jusqu’à l’annexion de 1858, à la guinguette de la Nouvelle Aventure située à l’emplacement actuel de la place du Marché. Ce vaste établissement pouvait accueillir plusieurs milliers de personnes[3].
La fête durait plusieurs jours, huit jours puis trois jours. La fin du troisième jour était marqué par la translation de Saint-Nicolas consistant à noyer symboliquement le saint dans la Deûle au pont tournant du pont de la Barre[4]
La fête déclina vers 1850 et disparut avec la fermeture de la guinguette de la Nouvelle Aventure démolie pour aménager la place du Marché. La dernière fête eut lieu du 9 au 13 mai 1861.
Le Broquelet par Alexandre Desrousseaux
[modifier | modifier le code]Le chansonnier Alexandre Desrousseaux évoque la fête d’autrefois par la voix d’une vieille dentellière.
Original en patois (typographie de l'édition respectée) et traduction en français.
Texte en patois | Traduction en français |
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Le Broquelet d’autrefois |
Le Broquelet d’autrefois |
Deux autres textes de Desrousseaux évoquent cette fête (extraits traduits en français).
Le Broquelet d’aujourd’hui datant vraisemblablement des années précédant la fermeture de la Nouvelle Aventure, la fête semblant avoir quelque peu perdu son éclat.
« Chaque jour on entend dire qu’il n’y a plus de belle fête à Lille, et même on prétend Que le Broquelet ne donne plus d’amusement/…/ Non, non, tel qu’il est, le Broquelet, N’est point déjà si laid »
Avant le Broquelet écrit 30 ans plus tard « Non, non, tel qu’il est, le Broquelet, N’est point déjà si laid. Mais voilà trente ans. Maintenant cette fête n’a presque plus rien de beau ni de laid. Elle est quasiment au tombeau. »
Il semble donc que le Broquelet se soit perpétué modestement après 1861 avant de s’éteindre [Note 1].
La fête du 140ème anniversaire
[modifier | modifier le code]Une fête fut organisée à Wazemmes du 9 au 13 mai 2001 pour fêter le 140ème anniversaire de ce dernier Broquelet comprenant des conférences, des causeries, un bal folk, des jeux[5].
Notes et références
[modifier | modifier le code]Notes
[modifier | modifier le code]- Alfred Salembier signale l'existence de cette fête dans son histoire de Wazemmes publiée en 1912. Cependant le Broquelet ne semble pas avoir laissé de traces après la fête de 1861 incontestablement la dernière importante
Références
[modifier | modifier le code]- Alain Lottin, Chavatte ouvrier lillois. Un contemporain de Louis XIV, Paris, Flammarion, , 445 p. (ISBN 2-08-210655-1), p. 321
- Philippe Guignet, Vivre à Lille sous l'Ancien Régime, Paris, Perrin, , 471 p. (ISBN 2-262-01130-3), p. 147 à 150
- Alfred Salembier, Histoire de Wazemmes, , Société d'études de la Province de Cambrai (lire en ligne), p. 119
- Pierre Pierrard, Enfants et jeunes ouvriers en France : XIXe – XXe siècle, Paris, Les éditions ouvrières, , 225 p. (ISBN 2-7082-2541-3, lire en ligne), p. 145
- « Fête du broquelet » (consulté le )