« Revenu minimum d'insertion » : différence entre les versions
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Version du 19 février 2007 à 00:56
Le Revenu minimum d'insertion (RMI) est une allocation française gérée par les conseils généraux et versée par les caisses d'allocations familiales (CAF) ou la mutualité sociale agricole (MSA), aux personnes en âge de travailler, sans ressources ou ayant des ressources inférieures à un plafond fixé par décret. L'intéressé est appelé allocataire du RMI ou bénéficiaire du RMI.
Au Québec, l'équivalent du RMI est le Bien-être social (BS)
Historique
L'origine de l'idée est discutée au sein du Parti socialiste. Le RMI, voit le jour à Besançon en 1968 sous l'appellation "Minimum social garanti" par Henri Huot, adjoint aux affaires sociales.
Des initiatives locales testent le principe, comme à Rennes sous le nom de Complément local de ressources, expérience conduite sur plusieurs années et qui contribuera beaucoup aux dispositions légales suivantes.
Le RMI vise à insérer les personnes les plus en difficulté (« les nouveaux pauvres », d'après l'expression du rapport du père Joseph Wresinski) dans le monde du travail. Le rapporteur de la loi fut Jean-Michel Belorgey, député PS. La loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988, instituant le RMI, fut votée à une large majorité : seuls trois députés s'y opposèrent (Gilbert Gantier, Alain Griotteray, et Georges Meslin) et vingt-quatre s'abstinrent[1]. Elle fut appliqué à partir du 15 décembre 1988.
Il a été versé à 1 107 000 personnes en septembre 2005, puis 1 112 400 au 31 décembre en France métropolitaine.
La loi du 18 décembre 2003 modifie les modalités de gestion du RMI. Elle transfère notamment la responsabilité du pilotage du dispositif aux Conseils Généraux dans le cadre de l'acte II de la Décentralisation. La collectivité départementale prend toute décision en matière d'insertion (élaboration et suivi des contrats d'insertion, entrée et sortie du dispositif RMI), de modalité de gestion de la prestation, même si la loi rappelle que les Caisses d'allocations familiales et les caisses de Mutualité sociale agricole sont les organismes habilités à payer les droits. L'État s'assure quant à lui de l'application de la législation et de la réglementation qui reste nationale (les collectivités départementales ont la possibilité de créer des prestations supplémentaires et complémentaires au RMI) et procède à l'évaluation régulière du nouveau dispositif législatif.
Par loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003, le Gouvernement Jean-Pierre Raffarin (3) a décentralisé le RMI et créé le Revenu minimum d'activité (RMA) destiné à faciliter la réinsertion professionnelle des bénéficiaires du RMI. Ce nouveau dispositif, qui renforce considérablement les obligations d'insertion du bénéficiaire, est applicable depuis le 1er janvier 2004.
Conditions d’attribution
Bénéficiaires
Le bénéficiaire du RMI doit remplir les conditions suivantes :
- résider en France,
- être âgé d’au moins 25 ans ou avoir un ou plusieurs enfants à charge ou être enceinte,
- s'il est étranger, être titulaire d’une carte de résident ou d’un titre de séjour justifiant d’un séjour régulier en France d’au moins cinq ans,
- ne pas être élève, étudiant, stagiaire, sauf si la formation suivie constitue une activité d’insertion prévue par le contrat d’insertion.
Ressources
Le RMI est une allocation différentielle, c’est-à-dire égale à la différence entre, d’une part, le montant du RMI calculé selon la composition du foyer, et, d’autre part, l’ensemble des ressources de l’allocataire et des membres de sa famille comptés pour la détermination du montant du RMI.
Le montant maximum du RMI dépend du nombre d'enfants à charge (chiffres au 1 janvier 2007) : Modèle:Entête tableau charte 2 ! Nombre d'enfant !! personne seul(e) !! couple |----- |- style="background-color:var(--couleur-fond-gris-alternance, #eeeeee);color:inherit;" | 0 || 440,86 € || 661,29 € |- | 1 || 661,29 € || 793,55 € |-style="background-color:var(--couleur-fond-gris-alternance, #eeeeee);color:inherit;" | 2 || 793,55 € || 925,80 € |- | par enfant en plus || 176,33 € || 176,33 € |}
Toutes les ressources perçues au cours des trois mois précédant la demande, quelle que soit leur origine, sont retenues :
- salaires,
- retraites,
- pensions et rentes,
- indemnités journalières pour maladie ou accident de travail,
- allocations de chômage…
La possession ou mise en valeur d'un potager a été aussi prise en compte pour réduire le montant de l'allocation.
Dans le cas où l’allocataire perçoit une aide au logement ou bien s’il n’a pas de charge de logement (propriétaire sans charge d’emprunt, hébergement à titre gratuit…), le RMI est diminué de 51,05 € pour une personne seule, 102,10 € pour deux personnes et 126,34 € pour trois personnes et plus (chiffres au 31 décembre 2005) : c'est l'application de ce que l'on appelle le forfait logement.
En revanche, le RMI peut être cumulé avec la totalité des revenus issus d’une activité professionnelle ou d’une formation rémunérée jusqu’à la première révision trimestrielle, puis affecté d’un abattement au-delà de ces trois mois. Cet abattement est de 140,38 € pour un contrat emploi solidarité (CES) et de 50 % de la rémunération de tout autre contrat ou stage de formation pendant les neuf mois suivants (chiffres au 31 décembre 2005). Il s'agit d'un dispositif d'intéressement qui vise à encourager les bénéficiaires du RMI à reprendre une activité salariée et éviter ce que les économistes appellent la « trappe à pauvreté » (il est plus intéressant dans certaines conditions de continuer à bénéficier de prestations sociales que de reprendre une activité professionnelle rémunérée).
Droits et obligations
Droits
Outre le versement de l’allocation, le RMI ouvre un certain nombre de droits sociaux tels que[2] :
- la suspension de ses dettes fiscales ;
- la couverture maladie universelle qui peut donner droit à une réduction sur le prix de l'électricité ;
- des bons d'électricité et de chauffage, dans certaines communes ;
- l'allocation de logement à caractère social et à taux plein ;
- l'exonération de la taxe d'habitation et de la redevance télévisuelle ;
- la réduction sociale téléphonique ;
- des réductions dans les transports ;
- un mois au lieu de trois de préavis pour le départ d'une location d'un appartement non meublé ;
- la prime de Noël ;
- la gratuité dans les musées.
Depuis plusieurs années, est versée une « prime » de Noël pour les bénéficiaires du RMI, au mois de décembre de chaque année. Cette prime est ponctuelle, versée aux allocataires bénéficiaires du RMI sur le mois de novembre et d'un montant fixé à un peu plus de 150 € (hors retenue CRDS).
Outre ces droits sociaux liés à la présence d'un droit au RMI, l'allocatation bénéficie d'avantages en matière de recouvrement de créances : la prestation est en effet incessible et insaisissable sauf en cas de trop perçu (indu) RMI. Dans ce dernier cas, le recouvrement s'opère par retenue de 20 % sur les prestations à échoir.
Enfin, dernier avantage du RMI : il dispense son bénéficiaire du droit d'aliment au profit de ses ascendants, descendants et beaux-parents.
Obligations
L’attribution du RMI est en revanche soumise à des obligations :
- conclure et respecter un contrat d’insertion, adapté aux besoins et aspirations du bénéficiaire, proposé par les collectivités publiques dans les trois mois qui suivent le début du versement de l’allocation,
- remplir chaque trimestre une « déclaration trimestrielle de ressources » permettant de connaître les revenus du bénéficiaire afin de recalculer le montant de l’allocation.
- signaler tout changement de situation (professionnelle, familiale, etc.) à l'organisme débiteur de la prestation qui a un impact sur le calcul du droit.
Dépôt de la demande de RMI
Trois lieux permettent le dépôt de la demande du RMI :
- le Centre communal ou intercommunal d'action sociale (CCAS ou CIAS)
- les antennes locales du service départemental d'action sociale,
- les associations ou organismes à but non lucratif agréés à cet effet par le président du conseil général.
- Les caisses d'allocations famliales (caf)
Depuis l'acte II de la décentralisation, un certain nombre d'organismes gestionnaires de la prestation (CAF, CMSA) se sont également vu confier par le Département l'instruction administrative du droit au RMI.
La loi du 18 décembre 2003 a contribué à diversifier les intervenants dans l'instruction administrative du dossier.
Analyse sociologique
Évolution du nombre d'allocataires du RMI
Année | Nombre de RMIstes |
---|---|
Décembre 1989 | 396 160 |
Décembre 1990 | 496 285 |
Décembre 1991 | 567 556 |
Décembre 1992 | 654 642 |
Décembre 1993 | 774 803 |
Décembre 1994 | 888 468 |
Décembre 1995 | 925 286 |
Décembre 1996 | 988 715 |
Décembre 1997 | 1 045 303 |
Décembre 1998 | 1 087 861 |
Décembre 1999 | 1 120 251 |
Décembre 2000 | 1 072 258 |
Décembre 2001 | 1 051 725 |
Décembre 2002 | 1 068 923 |
Décembre 2003 | 1 120 844 |
Décembre 2004 | 1 215 300 |
Décembre 2005 | 1 266 400 |
Activité des RMIstes
D'après une étude de l'INSEE de 2001 [3], un quart des bénéficiaires du RMI ont un emploi ou un stage rémunéré. Durant les 21 mois de l'étude précédente, la moitié des allocataires sont passés par une période d'emploi. Ces emplois sont généralement à temps partiel, et le quart seulement sont à durée indéterminée. Le salaire moyen de ces actifs est de 610 euros net.
Catégorie de personnes plus souvent allocataires
Des sociologues cités par l'INSEE [4] ont identifiés cinq groupes formant la majeure partie des allocataires :
- de jeunes diplômés qui dépassent les 25 ans sans avoir trouvé un travail correspondant à leurs compétences. Le RMI se substitue alors aux allocations chômage,
- des jeunes qui, après un échec scolaire, accumulent les emplois de courte durée, le RMI servant à assurer le minimum,
- de jeunes mères de familles isolées suite à un divorce,
- des mères de famille plus âgées confrontées au licenciement de leur mari,
- des intérimaires âgés confrontés à leur mise à l'écart progressive.
Débat sur l'utilité du RMI
Mise en questions du dispositif
- Quelle utilité sociale ?
La difficulté de rendre effective l'insertion prévue par le dispositif met en cause son intérêt. Au premier rang, les travailleurs sociaux peuvent considérer qu'il s'agit plus d'un bénéfice politique qu'un remède à l'exclusion : « Nous posons seulement un cataplasme pour que les gens n'explosent pas. »[5].
- Un nouveau statut social
A côté des chômeurs et autres catégories d'inactifs, le RMI fournit un statut, certes médiocre, mais un statut tout de même à celui qui étant sur la pente descendante de l'exclusion sociale semble ne plus en avoir, ne plus être un citoyen à part entière (« Les services sociaux apparaissent comme les derniers endroits où ils sont encore considérés comme des citoyens... »)[5].
Cet effet de statut n'émergerait pas chez les bénéficiaires, alors qu'il n'a pas été prévu par le dispositif, s'il n'apportait pas un véritable soulagement complémentaire de l'apport financier.
Le problème est que cet effet contribue au maintien du bénéficiaire dans cette situation, avec un statut à long terme.
- Une situation préférable
Vu de l'extérieur, l'obtention du RMI peut être vue, notamment par les jeunes qui en sont légalement exclus, comme enviable : ils « revendiquent le statut d'allocataire comme projet à long terme [...] comme si c'était une profession. »[5]
Dans la même logique de comparaison des avantages et des inconvénients, « les RMistes sont devenus des nantis de l'exclusion »[5] pour ceux qui connaissent des difficultés au moins aussi graves : personnes surendettées, demandeurs d'emploi auxquels rien n'est proposé, jeunes dans la galère.
De même, un calcul rapide des avantages relatifs dissuadent les bénéficiaires, en particulier les moins qualifiés, de voir véritablement leur intérêt dans un retour à l'emploi payé au SMIC. Depuis 2000, des réflexions et mesures tendent à favoriser la transition entre ces deux états, une partie du dispositif du RMI étant maintenu dans les premiers mois de l'emploi. Cette difficulté est intégrée au programme de candidats à la présidence de la République en 2007.
Les adversaires
Ce sont surtout chez les salariés du secteur privé et les petits patrons qu'on rencontre le plus d'opposition au maintien du RMI.
Mais l'opportunité et la forme des revenus sociaux est aussi contestée par certaines familles politiques.
Le point de vue libéral est que les revenus sociaux sont immoraux, car ils rémunèrent l'oisiveté sans contrepartie travaillée et nécessitent de lever un nouvel impôt sur le fruit du travail des personnes actives.
Les libéraux, ainsi qu'un certain nombre de conservateurs, soutiennent que les revenus sociaux constituent une « trappe à pauvreté », c'est-à-dire qu'ils n'incitent pas ceux qui en bénéficient à obtenir un travail qui leur permettrait de gagner moins d'argent du fait de la suppression d'avantages liés au RMI.
Les partisans
Les sociaux-démocrates, argumentent de la façon suivante :
- les minima sociaux ont pour but d'éviter de couper totalement les personnes en difficulté (par exemple sans emploi suite à une récession) de la société et de pouvoir les réinsérer (notamment en période de croissance économique) ;
- ils font également valoir qu'une redistribution des revenus est efficace pour soutenir la consommation. Ils s'appuient en particulier sur les travaux de l'économiste John Maynard Keynes qui, en une période où la liberté de circulation des personnes, des fonds et des biens restait très contrôlée, partaient du principe que le revenu supplémentaire des classes aisées est essentiellement thésaurisé alors que les pauvres consacrent nécessairement la quasi-totalité de leurs ressources à la seule consommation.
Les groupes politiques situés plus à gauche (notamment à l'extrême gauche et chez les communistes) considèrent que les mesures restreignant l'accès aux revenus sociaux — par exemple en imposant l'acceptation d'emplois faiblement payés — n'ont pour but que de contrôler la population des précaires et de fournir aux employeurs une main d'œuvre bon marché.
Voir aussi
- Chomiste-land [Chomiste-land]
- Réduction pour rmiste[Reduction rmiste]
Le RMI à l'étranger
- La République d'Irlande et le Royaume Uni : L'équivalent du RMI dans ces deux pays s'appelle le jobseeker's allowance, littéralement "l'allocation pour les chercheurs d'emploi". Il est souvent appelé par le terme familier "the dole" dans ces deux pays.
Bibliographie
- Chômage et RMI en pleine croissance, Libération n° 7275, 1er octobre 2004
- D. Gréco, Les demandeurs d'emploi bénéficiaires du RMI : Portrait statistique, L'Observatoire de l'ANPE, Noisy-le-Grand, Les Essentiels, juin 2002
- Le RMI treize ans après, Économie et Statistique, INSEE, 346-347, 2001
- Une ‘réduction’ de la rationalité de l’acteur. Pourquoi sortir du RMI ? François Dubet, Antoine Veretout,Revue française de sociologie, 42, 3, 2001, p. 407-436.
Articles connexes
- Revenu minimum d'activité
- Impôt négatif sur le revenu
- Couverture maladie universelle
- Prestation sociale
- Revenu d'inactivité
- Qualité de vie
- Minimum social
Liens externes
- Le Revenu minimum d'insertion sur le site Service Public.fr
- Le Revenu minimum d'insertion sur le site de la Caisse d'allocations familiales
Notes
- ↑ Ibid.
- ↑ Sur les droits des RMIstes, lire Christophe Ono-Dit-Biot, « 24 ans de chômage », dans Le Point du 28/09/2006, n°1776, p.84, [lire en ligne]
- ↑ [http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/es346z.pdf Le RMI treize ans après : entre redistribution et incitations]
- ↑ [http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/es346z.pdf Le RMI treize ans après : entre redistribution et incitations]
- « Des travailleurs sociaux amers et réduits à bricoler. » Article du Monde du 9 avril 1995, suite au colloque « L'action sociale et la prévention » de Saint-Claude.