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« Monarchie de Juillet » : différence entre les versions

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[[Fichier:Louis-Philippe-France.png|thumb|upright|La société française est divisée sous la monarchie de Juillet ; les partisans de [[Louis-Philippe Ier|Louis-Philippe]] sont appelés les ''philippards''.]]
Proclamée le {{date|9|août|1830}} après les émeutes dites des « [[Trois Glorieuses]] », la '''monarchie de Juillet''' ([[1830]]-[[1848]]) succède en [[France]] à la [[Restauration (histoire de France)|Restauration]]. La branche cadette des [[Maison capétienne de Bourbon|Bourbons]], la [[Quatrième maison d'Orléans|maison d’Orléans]], accède alors au pouvoir. [[Louis-Philippe Ier|Louis-Philippe {{Ier}}]] n’est pas [[Sacre des rois de France|sacré ''roi de France'']] mais intronisé ''[[roi des Français]]''. Son règne, commencé avec les [[Trois Glorieuses|barricades de la révolution]] de [[1830]], s’achève en [[1848]] par [[Révolution française de 1848|d’autres barricades]], qui le chassent pour instaurer la [[Deuxième République (France)|Deuxième République]]. La monarchie de Juillet, qui a été celle d’un seul roi, marque en France la fin de la royauté.

L’idéal du nouveau régime est défini par Louis-Philippe répondant fin janvier [[1831]] à l’adresse que lui envoie la ville de [[Gaillac]] : {{Citation|Nous chercherons à nous tenir dans un ''[[juste milieu]]'', également éloigné des excès du pouvoir populaire et des abus du pouvoir royal<ref>La ville de Gaillac a présenté le {{date|29|janvier|1831}} une adresse martiale, déclarant s'en remettre au gouvernement du roi {{Citation|du soin d’assurer le développement des conquêtes de juillet}}. Louis-Philippe répond qu’il faut {{Citation|éviter tout ce qui pourrait provoquer la guerre}} et qu’ainsi {{Citation|la France pourra jouir en paix des avantages qu’elle a si glorieusement conquis}}, mais il ajoute : {{Citation|Toutefois, il faut s’entendre sur ces avantages. Il ne faut pas croire qu’ils consistent dans une extension de toutes les libertés, au-delà des bornes que l'ordre public et l’esprit de nos institutions ont posées. Sans doute la révolution doit porter ses fruits, mais cette expression n’est que trop souvent employée dans un sens qui ne répond ni à l’esprit national, ni aux besoins du siècle, ni au maintien de l’ordre public. C’est pourtant cela qui doit tracer notre marche. Nous chercherons à nous tenir dans un ''[[juste milieu]]'', également éloigné des excès du pouvoir populaire et des abus du pouvoir royal.}} La formule enchanta les caricaturistes et les humoristes et finit par s’identifier complètement au régime. Cet idéal du ''juste milieu'' est précisé par Louis-Philippe en septembre [[1833]], en réponse à un discours du président du [[tribunal de commerce (France)|tribunal de commerce]] de [[Bernay (Eure)|Bernay]] ; après avoir condamné aussi bien {{Citation|un passé contraire à la dignité de l’homme et à l’esprit éclairé du siècle}} (la monarchie absolue) que {{Citation|les théories politiques peu compatibles avec nos mœurs et dont nos souvenirs se rappellent encore la malheureuse application}} (la république révolutionnaire), le roi indique : {{Citation|Notre révolution de 1830 a eu pour but la défense de l’ordre légal, et de même qu’elle a triomphé de la violation des lois, de même elle a réduit à l’impuissance ceux qui voulaient nous attirer dans les voies de l’anarchie et du désordre.}} {{harv|Antonetti|2002|p=713}}</ref>.}}

== Des débuts agités ==
Le {{date|7|août|1830}}, la [[Charte de 1814]] est révisée. Le préambule rappelant l'[[Ancien Régime]] est supprimé. La charte devient un pacte entre la nation et le roi, et cesse d'être une concession de ce dernier. Elle s'inscrit comme un compromis entre les constitutionnels et les républicains. La religion catholique n'est plus religion d'État, la censure de la presse est abolie, le drapeau tricolore rétabli.

{{Article détaillé|Lieutenance générale de Louis-Philippe d'Orléans (1830)|Charte de 1830}}

Le {{date|9|août|1830}}, Louis-Philippe prête serment à la [[Charte de 1830|Charte]] et est intronisé. C'est le commencement officiel de la monarchie de Juillet. Le [[11 août]], un [[gouvernement]] est formé, rassemblant des ténors de l'opposition constitutionnelle à [[Charles X de France|Charles X]], dont [[Casimir Pierre Perier|Casimir Perier]], [[Jacques Laffitte|Laffitte]], [[Mathieu Molé|Molé]], le [[Victor de Broglie (1785-1870)|duc de Broglie]], [[François Guizot|Guizot]]… Le ministère doit répondre à un double objectif : prendre fermement en main la machine administrative et rétablir l'ordre dans la rue, tout en feignant l'enthousiasme pour la cause de la révolution qui vient de triompher.

=== Le désordre permanent ===
Pendant trois mois, l'agitation, entretenue par la presse républicaine et libérale, est permanente. Le gouvernement ne dispose pas des moyens de sévir, d'autant que la [[garde nationale (1831)|garde nationale]] a à sa tête, à partir du [[16 août]], le [[Gilbert du Motier de La Fayette|marquis de La Fayette]], chef de file des républicains. Louis-Philippe doit donc souffrir les familiarités des « héros de Juillet » qui réclament, selon la formule de La Fayette, « un trône populaire entouré d'institutions républicaines ».

[[Fichier:Louis-Philippe de Bourbon.jpg|thumb|left|upright|''Louis-Philippe {{Ier}}, roi des Français''. (Le roi est représenté à l'entrée de la [[Galerie des batailles]] qu'il a fait aménager au [[Château de Versailles]]).]]
Sous les ricanements des [[Légitimisme|légitimistes]]<ref>Les salons du [[faubourg Saint-Germain]] s'amusent de pochades où Fipp {{Ier}}, roi des épiciers, explique à son fils Grand Poulot que la politique consiste à serrer la main du premier venu. [[Alfred de Vigny]] rapporte comment, de service de garde au [[Palais-Royal]] au début de [[1831]], il a vu au milieu de la foule « un homme au chapeau gris, à l'habit brun, au large parapluie sous le bras, qui donnait de tous côtés des poignées de main hasardées » et qui dut « nager pendant un quart d'heure à travers les chapeaux pour traverser la cour du palais », arrivant enfin « en mauvais état, son gilet déboutonné, ses manches arrachées et son chapeau défoncé » {{harv|Antonetti|2002|p=625}}.</ref>, le « roi-citoyen » distribue force poignées de main à la foule ; devant le [[Palais-Royal]], ce sont en permanence des attroupements qui réclament à tout bout de champ Louis-Philippe pour lui faire chanter ''[[La Marseillaise]]'' ou ''[[La Parisienne (chanson de Casimir Delavigne)|La Parisienne]]''. Mais, comme l'a bien compris le chansonnier [[Pierre-Jean de Béranger|Béranger]]<ref>Pour l'attirer au Palais-Royal, on lui explique qu'on peut s'y rendre sans façon et qu'on peut même y porter des bottes : « Bien, bien, répond-il, des bottes aujourd'hui, et des bas de soie dans quinze jours ! » {{harv|Antonetti|2002|p=625}}</ref>, le roi joue un rôle de composition et ne tardera pas à jeter le masque.

Les révolutionnaires se retrouvent au sein de clubs populaires, se réclamant des clubs de la [[révolution de 1789]], dont plusieurs prolongent des sociétés secrètes républicaines<ref>Il y a par exemple la [[Société des amis du peuple]], installée au manège Pellier, rue Montmartre.</ref>. On y réclame des réformes politiques ou sociales, et l'on y demande la condamnation à mort des quatre ministres de [[Charles X de France|Charles X]] qui ont été arrêtés alors qu'ils cherchaient à quitter la France (V. l'article [[Procès des ministres de Charles X]]). Les grèves, les manifestations se multiplient et aggravent le marasme économique.

Pour relancer l'activité, le gouvernement fait voter, à l'automne 1830, un crédit de 5 millions pour financer des travaux publics, prioritairement des routes<ref>« Les routes sont la mort-aux-rats de la guerre civile », dit Louis-Philippe à Guizot, qui a les travaux publics dans son portefeuille {{harv|Antonetti|2002|p=628}}.</ref>. Puis, face à la multiplication des faillites et à la montée du chômage, surtout à Paris, le gouvernement propose d'accorder une garantie de l'État aux prêts aux entreprises en difficulté dans une enveloppe de 60 millions ; en définitive, la Chambre vote au début octobre un crédit de 30 millions destiné à des subventions<ref>Celles-ci profiteront surtout à de gros entrepreneurs dévoués au nouveau régime, comme l'imprimeur [[Firmin Didot]].</ref>.

Le [[27 août]], la monarchie de Juillet doit affronter son [[Liste de scandales sous la monarchie de Juillet|premier scandale]] avec la mort du dernier [[Louis VI Henri de Bourbon-Condé|prince de Condé]], retrouvé pendu à l'espagnolette de la fenêtre de sa chambre au [[château de Saint-Leu]]. Louis-Philippe et la reine [[Marie-Amélie de Bourbon-Siciles (1782-1866)|Marie-Amélie]] sont accusés sans preuve par les légitimistes de l'avoir fait assassiner pour permettre à leur fils, le [[Henri d'Orléans (1822-1897)|duc d'Aumale]], institué son légataire universel, de mettre la main sur son immense fortune<ref>L'explication la plus communément admise aujourd'hui est que le prince aurait été victime de jeux sexuels un peu poussés avec sa maîtresse, la [[Sophie Dawes|baronne de Feuchères]]. Voir les articles : [[Louis VI Henri de Bourbon-Condé]] et [[Sophie Dawes]].</ref>.

=== Le renouvellement du personnel politique et administratif ===
Dans le même temps, le gouvernement épure l'administration de tous les sympathisants légitimistes qui refusent de prêter serment au nouveau régime et à son souverain et les remplace par un personnel nouveau issu de la révolution de Juillet, donnant le signal d'une vaste « course aux places »<ref>''La Foire aux places'', comédie-vaudeville en un acte de [[Jean-François Bayard]], jouée au [[théâtre du Vaudeville]] le {{date|25|septembre|1830}}, montre le chœur des solliciteurs, réuni dans l'antichambre d'un ministre : « Qu'on nous place / Et que justice se fasse. / Qu'on nous place / Tous en masse. / Que les placés / Soient chassés ! » {{harv|Antonetti|2002|p=625}} « Savez-vous ce que c'est qu'un carliste ? interroge un humoriste. Un carliste, c'est un homme qui occupe un poste dont un autre homme a envie ! » ({{ibid.}})</ref>. Au ministère de l'Intérieur, [[François Guizot|Guizot]] renouvelle toute l'administration préfectorale et les maires des grandes villes. Au ministère de la Justice, [[Jacques Charles Dupont de l'Eure|Dupont de l'Eure]], assisté par son secrétaire général, [[Joseph Mérilhou|Mérilhou]], change la plupart des procureurs généraux. Dans l'armée, [[Louis Auguste Victor de Ghaisne de Bourmont|Bourmont]], resté fidèle à [[Charles X de France|Charles X]], est remplacé à [[Alger]] par [[Bertrand Clauzel|Clauzel]]. On remplace les généraux commandant les régions militaires, les [[ambassadeur]]s, les [[ministre plénipotentiaire|ministres plénipotentiaires]], la moitié des membres du [[Conseil d'État (France)|Conseil d'État]]. À la [[Chambre des députés (Monarchie de Juillet)|Chambre des députés]], un quart environ des sièges (119) sont soumis à réélection en octobre, après démission, refus de serment ou nomination à une fonction publique entraînant, pour l'intéressé, l'obligation de se représenter devant les électeurs. Ces élections partielles sont un succès pour le nouveau régime et une déroute pour les légitimistes.

L'élément le plus notable dans ce renouvellement du personnel politique et administratif est le retour aux affaires de la partie du personnel du [[Premier Empire]] qui en avait été écartée sous la [[Seconde Restauration]]. Sociologiquement, en dépit de l'élargissement modéré du pouvoir de suffrage, les élites ne sont guère renouvelées : « Après la révolution, souligne l'historien américain David H. Pinkney, les propriétaires terriens, la classe des fonctionnaires et les gens des professions libérales continuèrent à prédominer dans les postes clefs de l'État comme ils l'avaient fait sous l'Empire et sous la Restauration. En cela, on peut considérer que la révolution n'avait pas inauguré un quelconque régime nouveau de « grande bourgeoisie ». »<ref>{{en}} David H. Pinkney, ''The French Revolution of 1830'', 1972 ; trad. française : ''La Révolution de 1830 en France'', Paris, Presses universitaires de France, 1988 – {{ISBN|2-13-040275-5}}</ref> « La grande différence entre la Restauration et la monarchie de Juillet, avance Guy Antonetti, n'a pas tant résidé dans la substitution d'un groupe social à un autre que dans la substitution, à l'intérieur du même groupe social, des tenants d'une mentalité favorable à l'esprit de 89 aux tenants d'une mentalité qui lui était hostile : socialement semblables, idéologiquement différents. 1830 n'a été qu'un changement d'équipe dans le même camp et non un changement de camp. »<ref>{{harvsp|Antonetti|2002|p=627}}</ref>

Les archives de la Maison du Roi et de l'intendance générale de la Liste civile sous la monarchie de Juillet, qui matérialisent directement le renouvellement du personnel au service de Louis-Philippe, roi des Français, sont conservées aux Archives nationales dans la sous-série O/4<ref>Voir la salle des inventaires virtuelle des Archives nationales https://www.archives-nationales.culture.gouv.fr/siv/rechercheconsultation/consultation/pog/consultationPogN3.action?nopId=c614wvei239--u45etm7e5au0&pogId=FRAN_POG_03&search=</ref>.

=== L’installation symbolique du nouveau régime ===
Le [[29 août]], Louis-Philippe passe en revue la garde nationale de Paris qui l'acclame. « Cela vaut mieux pour moi que le [[sacre (France)|sacre]] de [[Reims]] ! », s'écrie-t-il en embrassant [[Gilbert du Motier de La Fayette|La Fayette]]. Le [[11 octobre]], le nouveau régime décide que des récompenses seront accordées à tous les blessés des « [[Trois Glorieuses]] » et crée une médaille commémorative pour les combattants de la révolution de Juillet. En octobre, le gouvernement présente un projet de loi destiné à indemniser à concurrence de 7 millions les victimes des journées de Juillet<ref>500 orphelins, 500 veuves, {{formatnum:3850}} blessés.</ref>.

Le [[13 août]], le roi a décidé que les armes de la maison d'Orléans (''de France au lambel d'argent'') orneront désormais le sceau de l'État. Les ministres perdent les appellations de ''Monseigneur'' et le prédicat d’''Excellence'' pour devenir ''Monsieur le ministre''. Le [[Ferdinand-Philippe d'Orléans|fils aîné du roi]] est titré duc d'Orléans et ''prince royal'' ; les filles et la [[Adélaïde d'Orléans (1777-1847)|sœur du roi]] sont ''princesses d'Orléans''<ref>et non ''princesses de France'', puisqu'il n'y a plus de ''roi de France'' ni de ''maison de France''</ref>.

Sont adoptées et promulguées des lois revenant sur des mesures impopulaires prises sous la [[Restauration française|Restauration]]. La loi d'amnistie de [[1816]], qui avait condamné à la proscription les anciens [[régicide]]s, est abrogée, à l'exception de son article 4, qui condamne au bannissement les membres de la famille Bonaparte. L'église Sainte-Geneviève est de nouveau retirée au culte catholique le [[15 août]] et retrouve, sous le nom de [[Panthéon de Paris|Panthéon]], sa vocation de temple laïc dédié aux gloires de la France. Une série de restrictions budgétaires frappent l’Église catholique<ref>Suppression des {{formatnum:8000}} demi-bourses de 150 francs qui avaient été accordées aux écoles secondaires catholiques ([[30 septembre]]), suppression des indemnités versées aux prêtres auxiliaires ([[13 octobre]]), suppression des traitements des cardinaux résidentiels ([[Maximilien de Croÿ|Croÿ]], [[Liste des archevêques de Rouen|archevêque de Rouen]] ; [[Jean-Baptiste de Latil|Latil]], [[Liste des archevêques de Reims|archevêque de Reims]] ; [[Joachim Jean Xavier d'Isoard|d'Isoard]], [[Liste des archevêques d'Auch|archevêque d'Auch]] ; [[Louis François Auguste de Rohan-Chabot (1788-1833)|Rohan-Chabot]], [[Liste des archevêques de Besançon|archevêque de Besançon]]), considérés comme dignitaires d'un État étranger ([[21 octobre]]), suppression du secours annuel de {{formatnum:5000}} francs accordé depuis [[1817]] à la Congrégation des pères du Saint-Esprit ([[27 octobre]]).</ref>, cependant qu'est abrogée, le [[11 octobre]], la « [[loi du sacrilège]] » de [[1825]], qui punissait de mort les profanateurs d'hosties consacrées<ref>Ce texte hautement symbolique n'avait toutefois jamais été appliqué.</ref>.

=== La ''résistance'' et le ''mouvement'' ===
{{Article détaillé|Partis politiques sous la monarchie de Juillet}}
[[File:Illustrirte Zeitung (1843) 08 116 1 Der Sitzungssaal der Deputirtenkammer in Paris.PNG|thumb|upright=1.2|Salle de séances de [[Chambre des députés (Monarchie de Juillet)|Chambre des députés]]]]
Dans l'opinion<ref>Le [[25 août]], des habitants du quartier commerçant de la rue Montmartre envahissent la salle de la Société des amis du peuple et en dispersent de force les membres.</ref> et à la Chambre des députés, des voix s'élèvent pour demander la fermeture des clubs républicains, foyers d'agitation qui contreviennent à l'article 291 du [[Code pénal français|code pénal]], interdisant toute réunion de plus de 20 personnes. Mais le garde des sceaux, [[Jacques Charles Dupont de l'Eure|Dupont de l'Eure]], et le procureur général de Paris, Bernard, tous deux républicains, refusent de poursuivre les associations révolutionnaires.

Le [[25 septembre]], répondant à une interpellation à la Chambre sur ce sujet, le ministre de l'Intérieur, [[François Guizot|Guizot]], exprime en revanche la volonté de mettre un terme à l'agitation<ref>« Messieurs, dit Guizot, nous avons fait une révolution, une heureuse, une glorieuse révolution ; mais nous n'avons pas prétendu mettre la France en état révolutionnaire, la maintenir dans le trouble qui accompagne une telle situation. » Il définit l’« état révolutionnaire » : « Toutes les choses sont mises en question ; toutes les prétentions sont indéfinies ; des appels continuels sont faits à la force, à la violence. […] Eh bien ! Messieurs, nous aimons le progrès, nous désirons le mouvement progressif, […] mais le désordre n'est pas le mouvement, le trouble n'est pas le progrès, l'état révolutionnaire n'est pas l'état ascendant de la société. » {{harv|Antonetti|2002|p=632}}</ref>. Le discours, appuyé par celui de [[Casimir Perier]], est bien accueilli à la Chambre, mais celle-ci ne parvient pas à conclure. C'est l'apparition d'un clivage entre deux tendances politiques antagonistes, qui vont structurer la vie politique sous la monarchie de Juillet :
* le parti du ''mouvement'' (soutenu par le journal ''[[Le National]]''), réformiste et favorable à une politique d'aide aux nationalités ;
* le parti de la ''résistance'' (soutenu par le ''[[Journal des débats]]''), conservateur et favorable à la paix avec l'Europe.

Le procès des quatre ex-ministres de [[Charles X de France|Charles X]] arrêtés en août 1830 alors qu'ils tentaient de fuir à l'étranger – [[Jules de Polignac (1780-1847)|Polignac]], [[Jean de Chantelauze|Chantelauze]], [[Charles Ignace, comte de Peyronnet|Peyronnet]] et [[Martial de Guernon-Ranville|Guernon-Ranville]] – est la grande affaire politique de l'heure. La gauche exige la tête des ministres, mais Louis-Philippe, veut éviter une exécution dont il craint qu'elle ne donne le signal d'une vague de Terreur révolutionnaire qui, emportant la monarchie de Juillet dans une spirale de violence, la conduirait à la guerre avec les puissances européennes. Aussi la Chambre des députés, tout en votant le [[27 septembre]] une résolution de mise en accusation des anciens ministres, adopte le [[8 octobre]] une adresse invitant le roi à présenter un projet abolissant la peine de mort, au moins en matière politique. Cet épisode déclenche une émeute les [[17 octobre|17]] et [[18 octobre]] : les manifestants marchent sur le [[fort de Vincennes]], où sont détenus les ministres.

{{Article détaillé|Procès des ministres de Charles X}}

Après ces émeutes, Guizot demande la révocation du [[Préfet de Paris|préfet de la Seine]], [[Odilon Barrot]], qui, dans une proclamation aux Parisiens, a qualifié d’« inopportune démarche » l'adresse demandant l'abolition de la peine de mort. Guizot, appuyé par le [[Victor de Broglie (1785-1870)|duc de Broglie]], estime qu'un haut fonctionnaire ne saurait critiquer un acte de la Chambre des députés, surtout que celui-ci a été approuvé par le roi et par son gouvernement. Dupont de l'Eure prend le parti de Barrot et menace de démissionner s'il est désavoué. [[Jacques Laffitte]], principale figure du ''mouvement'', s'offre alors pour coordonner les ministres avec le titre de « [[Président du Conseil (France)|président du Conseil]] ». Aussitôt, Broglie et Guizot, refusant de passer sous la coupe de Laffitte, démissionnent, suivis par Perier, [[André Dupin|Dupin]], [[Louis-Mathieu Molé|Molé]] et [[Joseph-Dominique Louis|Louis]].

Pour lever l'hypothèque de gauche, Louis-Philippe va alors prendre Laffitte au mot et l'appelle à former un nouveau gouvernement le {{date|2|novembre|1830}}, en espérant que l'exercice du pouvoir le discréditera.

=== Le ministère Laffitte ===
[[Fichier:Jacques Laffitte.jpg|thumb|upright=0.9|[[Jacques Laffitte]]]]
« Si le chef doit être [[Jacques Laffitte|M. Laffitte]], confie Louis-Philippe au duc de Broglie, j'y consens pourvu qu'il soit lui-même chargé de choisir ses collègues, et je préviens d'avance que, ne partageant pas son opinion, je ne saurais lui promettre de lui prêter secours. »<ref>{{harvsp|Antonetti|2002|p=633-634}}</ref> On ne saurait être plus clair ; pourtant, la formation du cabinet donne lieu à de longues tractations et Laffitte, trompé par les marques d'amitié que lui prodigue le roi, croit que ce dernier lui accorde une véritable confiance.

{{Article détaillé|Gouvernement de Jacques Laffitte}}

Le procès des ex-ministres de Charles X se déroule du [[15 décembre|15]] au [[21 décembre]] devant la Chambre des pairs, cernée par l'émeute qui réclame leur mort. Condamnés à la détention perpétuelle, assortie de la [[mort civile]] pour Polignac, les ministres échappent au [[lynchage]] grâce à la présence d'esprit du ministre de l'Intérieur, [[Camille de Montalivet|Montalivet]], qui parvient à les mettre en sécurité au [[château de Vincennes|fort de Vincennes]]. La [[garde nationale (1831)|garde nationale]] maintient le calme dans Paris, affirmant son rôle essentiel de milice bourgeoise du nouveau régime.

==== La mise en œuvre de réformes promises par la Charte révisée ====
En manifestant l'importance de la [[garde nationale (1831)|garde nationale]], seule force sur laquelle le gouvernement puisse alors compter pour assurer l'ordre public, cet épisode démontre également le risque qu'il y a à la laisser aux mains du peu fiable [[Gilbert du Motier de La Fayette|La Fayette]]. Celui-ci est rapidement poussé à la démission à la faveur d'une réorganisation, ce qui entraîne le départ du gouvernement du [[Garde des Sceaux en France|garde des sceaux]], [[Jacques Charles Dupont de l'Eure|Dupont de l'Eure]]. D'autre part, pour éviter de dépendre d'une seule force, Louis-Philippe charge le [[Nicolas Soult|maréchal Soult]], nommé ministre de la Guerre depuis le [[17 novembre]], de réorganiser sans tarder l'armée de ligne. Celui-ci présente à la Chambre, dès le mois de février [[1831]], son plan visant à accroître les effectifs de l'armée, à résorber le surencadrement et à assurer l'approvisionnement en armes et en munitions, et fait adopter la loi du {{date|9|mars|1831}} créant la [[Légion étrangère]], première d'un important train de réformes militaires<ref>Suivent les lois du {{date|11|avril|1831}} sur les pensions militaires, des [[21 mars]] et {{date|14|avril|1832}} sur le recrutement de l'armée et sur l'avancement, et du {{date|19|mai|1834}} sur l'état des officiers.</ref>.

[[File:20 francs or Louis-Philippe,1847.jpg|thumb|20 francs or Louis-Philippe,1847]]

Dans le même temps, le gouvernement met en œuvre un certain nombre de réformes correspondant à des revendications du parti du mouvement qui avaient été inscrites à l'article 69 de la Charte révisée : la loi du {{date|21|mars|1831}} sur les conseils municipaux rétablit le principe de l'élection et élargit sensiblement la base électorale, avec 2 à 3 millions d'électeurs sur 32,6 millions d'habitants, soit dix fois plus que pour les élections législatives (V. [[Grandes lois sous la monarchie de Juillet]]) ; la loi du {{date|22|mars|1831}} organise la [[garde nationale (1831)|garde nationale]] ; la loi du {{date|19|avril|1831}}, votée après deux mois de débats au parlement<ref>Si la loi a été promulguée après la chute de Laffitte, c'est lui qui a mené l'essentiel de la discussion parlementaire, engagée le [[22 février]].</ref>, abaisse le cens d'électorat de 300 à 200 francs de contributions directes et le cens d'éligibilité de {{formatnum:1000}} à 500 francs. Le nombre d'électeurs passe de moins de {{formatnum:100000}} à {{formatnum:166000}}. Un Français sur 170 participe à la vie politique par le biais des élections.

==== Les émeutes des 14 et 15 février 1831 ====
Les émeutes qui ont lieu à Paris les [[14 février|14]] et {{date|15|février|1831}} vont provoquer la chute du ministère. Elles trouvent leur origine dans la célébration, le 14, d'un service funèbre organisé à [[Église Saint-Germain-l'Auxerrois (Paris)|Saint-Germain-l'Auxerrois]] par les légitimistes en mémoire du [[Charles Ferdinand d'Artois|duc de Berry]]. La cérémonie religieuse prend en réalité un tour nettement plus politique, celui d'une manifestation en faveur du [[Henri d'Artois|comte de Chambord]]. Les révolutionnaires y voient une provocation intolérable, envahissent l'église et la mettent à sac. Le lendemain, la foule saccage une nouvelle fois l'archevêché, déjà dévasté lors des « [[Trois Glorieuses]] », avant de piller plusieurs églises. Le mouvement s'étend à la province où des séminaires et des palais épiscopaux sont pillés dans plusieurs villes.

Le gouvernement s'abstient de réagir énergiquement. Le [[Préfet de Paris|préfet de la Seine]], [[Odilon Barrot]], le [[Préfecture de police|préfet de police]], [[Jean-Jacques Baude]], le commandant de la [[Garde nationale (1831)|Garde nationale]] de Paris, le [[Georges Mouton|général Mouton]], restent passifs<ref>Cette passivité indigne [[François Guizot|Guizot]], mais aussi des républicains comme [[Armand Carrel]] qui écrit dans ''[[Le National]]'' du [[16 février]] : « C'est au peuple qu'on rend compte des arrestations carlistes. Pour calmer l'émeute, on s'humilie devant elle ; on lui jure qu'on est gouverné par elle, qu'on obéit à ses inspirations. » {{harv|Antonetti|2002|p=649}}</ref>. Et quand le gouvernement prend enfin des mesures, c'est pour faire arrêter l'archevêque de Paris, [[Hyacinthe-Louis de Quélen|{{Mgr}} de Quélen]], le curé de Saint-Germain-l'Auxerrois, et d'autres prêtres accusés, avec quelques notables royalistes, de s'être livrés à des provocations{{référence nécessaire}}.

Pour calmer les esprits, Laffitte, appuyé par le [[Ferdinand-Philippe d'Orléans|prince royal]], propose au roi une étrange parade : supprimer les [[fleur de lys|fleurs de lys]] sur le sceau de l'État. Louis-Philippe tente de se dérober, mais il finit par signer l'ordonnance du {{date|16|février|1831}} qui substitue aux armes de la maison d'Orléans un écu portant un livre ouvert avec les mots ''[[Charte de 1830]]''. Il faut ensuite faire gratter les fleurs de lys sur les carrosses du roi, sur les bâtiments officiels, etc. Louis-Philippe s'est fait violence, mais pour Laffitte, c'est une [[victoire à la Pyrrhus]] : de ce jour, le roi est résolu à se débarrasser de lui sans plus attendre.

[[Fichier:Guizot, François - 2.jpg|thumb|upright|François Guizot]]
La montée de l'agitation condamne au demeurant d'elle-même la politique de laissez-faire du parti du mouvement. À la Chambre, le [[19 février]], [[François Guizot|Guizot]] s'indigne<ref>« On a vu des gouvernements despotiques populaires, quand ils sont habiles, forts, quand ils savent rallier la majorité des intérêts nationaux et se placer dans le mouvement national. Dans les pays libres, le meilleur gouvernement n'est jamais populaire ; il a toujours contre lui des espérances, des mécomptes, des illusions déçues. Il trouve toujours dans la portion de la société la plus remuante […] de quoi le faire paraître impopulaire, même au moment où il est le plus utile. […] Je crois fermement que nous sommes dans la mauvaise direction ; que l'ordre et la liberté chez nous sont en péril et non en progrès. […] J'en étais convaincu il y a trois mois, lorsque, avec mes honorables amis, nous sortîmes du ministère. D'autres hommes, honorables comme nous, sincères comme nous, comme nous dévoués au prince et au pays, en ont jugé autrement. […] Je ne leur demande pas ce qu'il en pensent aujourd'hui. […] Pour mon compte, je ne crois pas qu'il soit possible de rester dans cette position. » {{harv|Antonetti|2002|p=650}}</ref> et, vivement approuvé par tous les députés du centre, met Laffitte au défi de dissoudre la Chambre et de se présenter devant les électeurs. Le président du Conseil relève le gant, mais le roi, à qui appartient seul la prérogative de dissolution, préfère temporiser encore quelques jours. En attendant, à la demande de [[Camille de Montalivet|Montalivet]], [[Odilon Barrot|Barrot]] est remplacé par [[Pierre-Marie Taillepied de Bondy|Taillepied de Bondy]] à la [[Préfet de Paris|préfecture de la Seine]], tandis que [[Alexandre-François Vivien|Vivien de Goubert]] succède à [[Jean-Jacques Baude|Baude]] à la [[préfecture de police]]. Le désordre est permanent dans les rues de Paris. Tout est prétexte à incidents et manifestations. Qui plus est, la situation économique est morose<ref>La rente française 5 %, qui était au-dessus du pair avant les [[Trois Glorieuses]], est tombée à 94 le {{date|28|janvier|1831}}, puis à 82 le [[12 mars]] {{harv|Antonetti|2002|p=650}}. Le projet de budget pour 1831 présenté par Laffitte présente un déficit réel de 200 millions sur un total de {{unité|1160|millions}} (le budget « ordinaire » est en équilibre à 960 millions mais s'y ajoutent 200 millions de dépenses extraordinaires non financées).</ref>.

Enfin décidé à pousser Laffitte à la démission, Louis-Philippe use d'un stratagème. Il se fait remettre par le ministre des Affaires étrangères, [[Horace Sébastiani|Sébastiani]], une note du [[Nicolas Joseph Maison|maréchal Maison]], ambassadeur de France à [[Vienne (Autriche)|Vienne]], arrivée à Paris le [[4 mars]], qui annonce l'imminence d'une [[Politique extérieure de la France sous la monarchie de Juillet#Les troubles en Italie|intervention militaire autrichienne en Italie]]). Laffitte apprend l'existence de cette note dans ''[[Le Moniteur]]'' du [[8 mars]]. Il demande aussitôt des explications à Sébastiani qui doit lui avouer qu'il a agi sur ordre du roi. Laffitte se précipite auprès de Louis-Philippe, qui le reçoit aimablement. Cherchant à amener le roi à se découvrir, Laffitte lui rappelle le programme belliqueux qu'il a développé à la Chambre. Louis-Philippe l'invite à soumettre la question au Conseil des ministres qui, réuni le lendemain, désavoue unanimement Laffitte<ref>La plupart des ministres ont déjà négocié leur maintien dans la nouvelle équipe. Rencontrant [[Gilbert du Motier de La Fayette|La Fayette]] peu après sa chute, Laffitte se serait entendu dire par celui-ci : « Convenez que vous avez été un grand niais ! – J'en conviens : moi Niais Premier, vous Niais Second, et par ce moyen justice est rendue à tout le monde ! » {{harv|Antonetti|2002|p=652}}</ref>. Celui-ci n'a plus qu'à démissionner.

== Le rétablissement de l'ordre ==
Après avoir ainsi levé l'hypothèque du ''mouvement'', le roi va appeler au pouvoir la ''résistance''. Pour Louis-Philippe, qui est fondamentalement centriste, cette nouvelle option politique n'est guère plus confortable que la précédente, d'autant qu'il n'éprouve aucune sympathie pour le charismatique chef du mouvement, le banquier [[Casimir Perier]] : d'emblée, elle n'est pour lui qu'une autre hypothèque à lever, en essayant d'en profiter pour rétablir l'ordre dans le pays en laissant assumer aux tenants de la résistance l'impopularité afférente.

=== Le ministère Casimir Perier ===
Le {{date|13|mars|1831}}, Laffitte est donc remplacé par la principale figure du ''parti de l'ordre'', [[Casimir Perier]]. La formation du nouveau ministère a donné lieu à de délicates tractations avec Louis-Philippe, peu soucieux d'affaiblir son pouvoir et qui se méfie de Perier. Mais Perier a fini par imposer ses conditions, qui tournent autour de la prééminence du président du Conseil sur les autres ministres et la possibilité pour lui de réunir, en l'absence du roi, des conseils de cabinet<ref>Sous l'[[Ancien Régime]], le [[Conseil du roi de France]] se réunissait hors de la présence du roi dans diverses formations, judiciaires ou administratives. Les secondes étaient destinées en principe à préparer le travail avec le roi. Mais, dans un gouvernement parlementaire, le conseil de cabinet, réuni par le président du Conseil en dehors de la présence du roi, tend à affirmer l'unité du ministère vis-à-vis des Chambres. Le conseil des ministres, tenu en présence du roi, tend alors à devenir une chambre d'enregistrement du travail du gouvernement, préparé dans le conseil de cabinet.</ref>. Perier a en outre exigé que le [[Ferdinand-Philippe d'Orléans|prince royal]], qui professe des idées libérales avancées, cesse de participer au Conseil des ministres. Pour autant, Perier ne veut pas l'abaissement de la couronne, dont il souhaite au contraire rehausser le prestige, contraignant par exemple Louis-Philippe à quitter sa demeure familiale, le [[Palais-Royal]], pour s'installer dans le palais des rois, les [[palais des Tuileries|Tuileries]] ({{date|21|septembre|1831}}).
[[Fichier:Perier, Casimir.jpg|thumb|upright|[[Casimir Perier]]]]

{{Article détaillé|Gouvernement Casimir Perier}}

Le {{date|18|mars|1831}}, Perier prend la parole devant la Chambre des députés pour présenter une sorte de déclaration de politique générale : « Il importe, dit-il, que le cabinet nouvellement constitué vous fasse connaître les principes qui ont présidé à sa formation, et qui dirigent sa conduite. Il faut que vous votiez en connaissance de cause, et que vous sachiez à quel système de politique vous prêtez appui. »<ref name="Antonetti656">{{harvsp|Antonetti|2002|p=656}}</ref> Les principes qui ont présidé à la formation du gouvernement sont ceux de la solidarité ministérielle et de l'autorité du gouvernement sur l'administration. Les principes que le gouvernement entend mettre en œuvre sont, sur le plan intérieur, « les principes mêmes de notre révolution » : « le principe de la révolution de Juillet […] ce n'est pas l'insurrection, […] c'est la résistance<ref>de là vient la formule ''parti de la résistance''</ref> à l'agression du pouvoir »<ref name="Antonetti656"/>, et, sur le plan extérieur, « une attitude pacifique et le respect du principe de non-intervention »<ref name="Antonetti656"/>. L'orateur résume en définitive sa politique dans une formule appelée à rester célèbre :

{{Citation bloc|Au-dedans, nous voulons l'ordre, sans sacrifice pour la liberté ; au-dehors, nous voulons la paix, sans qu'il en coûte rien à l'honneur<ref name="Antonetti656"/>.}}

Le discours est très applaudi au centre. La Chambre des députés adopte, en l'absence de budget régulièrement voté, quatre douzièmes provisoires, et ce scrutin, considéré par Perier comme un vote de confiance, est acquis le [[8 avril]] par 227 boules blanches contre seulement 32 boules noires.

==== La répression des fauteurs de troubles ====
Conforté par la confiance que lui a marquée la Chambre, le gouvernement entreprend de faire montre de fermeté et de sévir contre les fauteurs de troubles. La première occasion ne tarde pas à se présenter.

Le {{date|14|mars|1831}}, les journaux d'opposition ont lancé une campagne de souscription en faveur d'une association nationale censée combattre le retour des Bourbons et les risques d'invasion étrangère<ref>L'initiative est inspirée par une société patriotique qui avait été constituée par le maire de [[Metz]], [[Jean-Baptiste Bouchotte|Bouchotte]].</ref>, que patronnent toutes les notabilités de gauche comme [[Gilbert du Motier de La Fayette|La Fayette]], [[Jacques Charles Dupont de l'Eure|Dupont de l'Eure]], [[Jean Maximilien Lamarque|Lamarque]], [[Odilon Barrot|Barrot]] et qui ne tarde pas à créer en province un réseau de comités locaux. Perier envoie une circulaire aux préfets interdisant l'affiliation des agents de l'État – fonctionnaires, militaires, magistrats – à une association qui, en prétendant défendre la révolution et le territoire national, s'érige en rivale de l'État et l'accuse implicitement de ne pas remplir ses devoirs. Au début du mois d'avril, le gouvernement procède à quelques destitutions spectaculaires de personnalités en vue : Odilon Barrot est révoqué du [[Conseil d'État (France)|Conseil d'État]], le commandement militaire du général Lamarque est supprimé, le maire de [[Metz]], [[Jean-Baptiste Bouchotte]], est destitué, tout comme le [[Alexandre de Laborde|marquis de Laborde]], [[aide de camp]] du roi. L'opposition persifle : au lieu d'« un trône populaire entouré d'institutions républicaines »<ref>formule attribuée à La Fayette</ref>, on parle désormais d'« un trône doctrinaire entouré de destitutions républicaines »<ref>{{harvsp|Antonetti|2002|p=657}}</ref>.

Le [[15 avril]], l'acquittement par la [[Cour d'assises (France)|cour d'assises]] de quelques jeunes républicains<ref>[[Godefroi Cavaignac|Godefroy Cavaignac]], [[Joseph Guinard (homme politique, 1799-1874)|Joseph Guinard]], le fils d'[[Pierre-François Audry de Puyraveau|Audry de Puyraveau]]</ref>, pour la plupart officiers d'artillerie de la garde nationale, arrêtés en décembre 1830 à l'occasion des troubles qui ont marqué le [[procès des ministres de Charles X]], donne le signal de nouvelles émeutes les 15 et [[16 avril]]. Mais Perier réagit fermement et, s'appuyant sur une loi renforçant les mesures contre les attroupements qu'il vient de faire voter le [[10 avril]], engage la garnison de Paris aux côtés de la garde nationale pour disperser les manifestants.

En mai, le gouvernement emploie une [[pompe à incendie]] contre les manifestants, ancêtre des modernes [[canon à eau|canons à eau]]. L'utilisation de cette nouvelle arme de répression fait les délices des caricaturistes : aux côtés du parapluie, la seringue à [[clystère]] devient l'un des attributs de Louis-Philippe dans les [[Dessin humoristique|dessins satiriques]] du temps.

[[Fichier:Revolte des Canuts - Lyon 1831 - 1.jpg|thumb|upright=1.3|La révolte des Canuts à Lyon]]
Le [[14 juin]], à la suite d'une altercation entre un bijoutier de la [[rue Saint-Denis (Paris)|rue Saint-Denis]] et un colporteur de chansons napoléoniennes, une nouvelle émeute éclate et dégénère, dans la nuit, en bataille rangée contre la garde nationale, renforcée de [[Dragon (militaire)|dragons]] et de [[fantassin]]s. Les combats se poursuivent durant toutes les journées des [[15 juin|15]] et [[16 juin|16]].

Surtout, le gouvernement doit faire face à la révolte des ouvriers tisserands de [[Lyon]], les [[canut]]s, qui se soulèvent le {{date|21|novembre|1831}}, ralliant à leur cause une partie de la garde nationale. En deux jours, les ouvriers se rendent maîtres de la ville, qu'évacuent le [[François Roguet|général Roguet]], commandant la division, et le maire, [[Victor Prunelle|Prunelle]].

{{Article détaillé|Révolte des Canuts}}

Dès le [[25 novembre]], Casimir Perier annonce à la Chambre des députés une réaction énergique : le [[Nicolas Soult|maréchal Soult]], accompagné du [[Ferdinand-Philippe d'Orléans|duc d'Orléans]], partent aussitôt reconquérir Lyon à la tête d'une armée de {{formatnum:20000}} hommes, qui pénètre sans coup férir dans la capitale des Gaules le [[3 décembre]], et rétablit l'ordre sans effusion de sang.

Le {{date|11|mars|1832}}, éclate la sédition de [[Grenoble]] : à l'occasion du [[Carnaval]], un masque représente Louis-Philippe d'une manière particulièrement grossière. Le préfet annule le bal où, dans la soirée, le masque devait paraître. La population, mécontente, manifeste devant la préfecture. Le préfet demande à la garde nationale de disperser les manifestants, mais la garde nationale s'abstient de se présenter de sorte que le haut fonctionnaire requiert l'armée. Le [[35e régiment d'infanterie de ligne|{{35e}} régiment de ligne]] s'acquitte de la mission impartie mais la population, furieuse, exige qu'il soit chassé de la ville. Pour ramener le calme, les autorités capitulent et, le [[15 mars]], le {{35e}} de ligne sort de Grenoble où il est remplacé par le [[6e régiment d'infanterie de ligne|{{6e}} de ligne]], venu de [[Lyon]] pour le relever. Lorsqu'il apprend la nouvelle, Casimir Perier réagit vigoureusement : il dissout la garde nationale de Grenoble et rappelle immédiatement le {{35e}} de ligne qui rentre dans la ville au pas de marche et musique en tête.

Pourtant, la fermeté du gouvernement semble impuissante à enrayer la succession des complots<ref>complot dit « des Tours de Notre-Dame » en janvier [[1832]], complot de la rue des Prouvaires au début de février, etc. Voir l'article : [[Attentats contre Louis-Philippe Ier|Attentats contre Louis-Philippe {{Ier}}]].</ref> et des procès politiques qui sont autant de tribunes pour insulter le roi et le ministère<ref>Au procès de la [[Société des amis du peuple]] en janvier [[1832]], [[François-Vincent Raspail|Raspail]] insulte le roi tandis que [[Auguste Blanqui|Blanqui]] développe abondamment ses théories socialistes. Tous les accusés dénoncent la tyrannie du gouvernement, l'énormité de la [[Liste civile de Louis-Philippe Ier|liste civile]], les persécutions policières, la révolution escamotée, etc.</ref>. L'agitation est permanente, dans toutes les provinces, en [[Dauphiné]], en [[Picardie]], à [[Carcassonne]], en [[Alsace]]… Ces excès ont pour effet de ramener le duc d'Orléans à des sentiments politiques plus modérés<ref>[[Alfred-Auguste Cuvillier-Fleury|Cuvillier-Fleury]] note dans son journal le {{date|8|janvier|1832}} que le duc d'Orléans est irrité « par l'insolence des ennemis de son père » : « Il fait profession d'aimer le mouvement, mais il est dégoûté des choses par les hommes. […] C'est ainsi que les violences du parti extralégal gâtent de plus en plus la plus belle des causes. »</ref>.

==== Les élections anticipées de juillet 1831 ====
Dans la deuxième quinzaine de mai 1831<ref>Le roi est de retour au [[château de Saint-Cloud]] le [[28 mai]].</ref>, Louis-Philippe, accompagné du [[Nicolas Soult|maréchal Soult]], effectue un voyage officiel en [[Normandie]] et en [[Picardie]], où il est chaleureusement accueilli. Du [[6 juin]] au {{1er juillet}}, avec ses deux fils aînés, le [[Ferdinand-Philippe d'Orléans|prince royal]] et le [[Louis d'Orléans (1814-1896)|duc de Nemours]], ainsi que le [[Antoine Maurice Apollinaire d'Argout|comte d'Argout]], il effectue une tournée dans l'Est de la France, où les républicains et les bonapartistes sont nombreux et actifs. Le roi s'arrête successivement à [[Meaux]], [[Château-Thierry]], [[Châlons-en-Champagne|Châlons]], [[Valmy]], [[Verdun (Meuse)|Verdun]], [[Metz]]<ref>À Metz, le maire, comme prévu, fait au nom du conseil municipal un discours très politique dans lequel il exprime le vœu que soit abolie l'hérédité de la pairie et que la France intervienne en [[Pologne]]. Louis-Philippe répond : « Vous me parlez de ce que tous les conseils municipaux de France ont proclamé : ils n'ont rien proclamé ; il n'est pas dans leurs attributions de le faire, ni de prendre des délibérations sur des sujets de haute politique. Ce droit est réservé aux chambres. Ainsi je n'ai pas à répondre à cette partie de votre discours. Ceci s'applique également à ce que vous me dites des relations diplomatiques de la France avec les puissances étrangères, sur lesquelles les conseils municipaux n'ont pas davantage le droit de délibérer. » Le capitaine de la garde nationale Voishaye, ancien [[Avocat général (France)|avocat général]] qui a été destitué pour s'être affilié à l'Association nationale, évoque lui aussi l'hérédité de la pairie. Le roi l'interrompt, lui arrache les feuillets de son discours et s'écrie : « C'est assez ! La garde nationale ne doit pas s'occuper de questions politiques. Cela ne la regarde pas : elle n'a point d'avis à donner. – Sire, ce n'est pas un avis qu'elle donne, c'est un vœu qu'elle exprime. – La garde nationale n'a point de vœu à former. La force armée ne délibère pas : les délibérations lui sont interdites. Je ne veux pas en entendre davantage. » Dans une lettre à la reine Marie-Amélie, Louis-Philippe se montre très satisfait de son coup d'autorité : « Toi qui me connais, tu me vois levant mon bras droit tendu, et le baissant lentement, en disant d'un ton solennel : La force armée ne délibère pas ! » {{harv|Antonetti|2002|p=658-659}}</ref>, [[Nancy]]<ref>À Nancy, Louis-Philippe rapporte que : « La pluie commençait comme je montais à cheval dans la cour de la préfecture, et je demandai mon manteau. Il n'y était pas. Je partis, voyant la foule, et la garde nationale, et les troupes sous les armes bordant la haie, ce qui eut un grand succès. Mais lorsque plus loin, la pluie étant devenue très forte, le piqueur me rejoignit avec mon manteau sur une place où, malgré cela, il y avait un monde énorme, je lui dis de le remporter, et je fis un geste qui marquait de l'emporter parce que les soldats n'ayant pas de manteaux, je n'en voulais non plus. L'intelligence française saisit ma pensée comme l'éclair, et alors les cris de ''Bravo le roi, Vive le roi'' partirent dans les rangs et dans la foule avec des transports inouis. » {{harv|Antonetti|2002|p=659}}</ref>, [[Lunéville]], [[Strasbourg]], [[Colmar]], [[Mulhouse]], [[Besançon]] et [[Troyes]]. Le voyage est un succès et donne à Louis-Philippe l'occasion d'affirmer son autorité<ref>« Mon voyage développe et raffermit tellement l'esprit des populations et celui des troupes que je conçois mal que les anarchistes ou républicains mettent tout en œuvre pour l'entraver, mais j'espère que […] je pourrai l'achever, et ce sera un grand pas de fait pour la compression de leur mauvais esprit. ''Inde ira''. » (Louis-Philippe à Casimir Perier, [[Phalsbourg]], {{date|17|juin|1831}}, cité par {{harv|Antonetti|2002|p=660}} « Tout ce que les ''émeutistes'', ''anarchistes'' et surtout ''républicains'' avaient préparé et organisé ici est tombé à plat, et ce succès, bien apprécié par tous spectateurs de l'autre côté du Rhin, y retentit déjà. […] Les ministres de Prusse et d'Autriche à Carlsruhe sont venus me complimenter par ordre de leurs cours. Je voudrais que tu eusses entendu le grand-duc [de Bade] quand nous avons traversé les rues de Strasbourg pleines de monde. […] Il disait : Vous êtes le pacificateur de l'Europe. » (Louis-Philippe à Marie-Amélie, [[Strasbourg]], {{date|20|juin|1831}}, cité par {{harvsp|Antonetti|2002|p=660}})</ref>.

Le {{date|31|mai|1831}}, à [[Saint-Cloud]], Louis-Philippe a signé une ordonnance qui dissout la Chambre des députés, fixe la date des élections au [[5 juillet]] et convoque les chambres pour le [[9 août]]. Le [[23 juin]], à [[Colmar]], une nouvelle ordonnance a avancé cette date au [[23 juillet]]<ref>On a craint qu'un coup de force ne soit tenté par l'opposition à la date anniversaire de l'installation de la monarchie de Juillet, et l'on a préféré que, dans une telle hypothèse, les chambres soient en session.</ref>.

Les élections générales ont lieu sans incident, selon la nouvelle loi électorale du {{date|19|avril|1831}}. Le résultat déçoit Louis-Philippe et Casimir Perier : près de la moitié des députés sont de nouveaux élus, dont on ignore comment ils voteront. Le [[23 juillet]], le roi ouvre la [[session parlementaire]] ; le discours du trône développe le programme du [[gouvernement Casimir Perier]] : stricte application de la Charte au dedans, stricte défense des intérêts et de l'indépendance de la France au dehors. Les deux chambres tiennent leur première séance le [[25 juillet]]<ref>La réunion de la Chambre des pairs est l'occasion d'une scène dont la signification et les ressorts demeurent mal élucidés. Lorsque le prince royal entre dans la salle des séances, il la trouve décorée de quarante drapeaux pris aux Autrichiens en [[1805]] et envoyés par {{Napoléon Ier}} au Sénat de l'Empire. Le grand référendaire, le [[Charles-Louis Huguet de Sémonville|marquis de Sémonville]], place les trophées sous la garde du prince et l'invite à « en conquérir de nouveaux si l'honneur national l'y convie ». Le duc d'Orléans prononce alors un discours patriote et belliqueux, bien différent de celui que le roi a prononcé devant la Chambre des députés.</ref>. Le {{1er}} août, [[Amédée Girod de l'Ain|Girod de l'Ain]], candidat du gouvernement, est porté à la présidence de la Chambre des députés contre [[Jacques Laffitte|Laffitte]]<ref>Au premier tour de scrutin, sur 355 votants, Girod de l'Ain obtient 171 voix soit 7 de moins que la majorité absolue et Laffitte 168. Au second tour, sur 358 votants, Girod de l'Ain recueille 181 voix, une de plus que la majorité absolue, contre 176 à Laffitte. [[Jacques Charles Dupont de l'Eure|Dupont de l'Eure]] obtient la première vice-présidence avec 182 voix sur 344 votants tandis que [[André Dupin|Dupin]], candidat du gouvernement, n'en obtient que 153.</ref>, mais Casimir Perier, estimant n'avoir pas obtenu une majorité suffisamment nette, présente aussitôt sa démission.

Louis-Philippe, très embarrassé, sonde [[Odilon Barrot]], qui se dérobe en faisant observer qu'il ne dispose que d'une centaine de voix à la Chambre. Les [[2 août|2]] et [[3 août]], lors de l'élection des questeurs et secrétaires, la Chambre élit en revanche des candidats ministériels comme [[André Dupin]] et [[Benjamin Delessert]]<ref>qui obtient une forte majorité contre un concurrent d'extrême gauche, [[Eusèbe de Salverte]].</ref>. En définitive, l'invasion de la [[Belgique]] par le roi des [[Pays-Bas]], le [[2 août]], contraint Casimir Perier à reprendre sa démission pour répondre à la demande des Belges d'une intervention militaire française<ref>Le [[4 août]] à 14 heures, Casimir Perier fait publier un supplément au ''Moniteur'', qui est affiché à la Bourse, dans lequel il annonce l'agression hollandaise, la demande des Belges et l'intervention militaire de la France : « Dans de telles circonstances, conclut-il, le ministère reste : il attendra la réponse des chambres au discours de la couronne. » {{harv|Antonetti|2002|p=662}}</ref>.

{{Article détaillé|Politique extérieure de la France sous la monarchie de Juillet#La question de la Belgique}}

La discussion de l'adresse en réponse au discours du trône donne lieu à des débats enflammés au sujet de la [[Pologne]], où quelques députés, emmenés par le [[Louis Pierre Édouard Bignon|baron Bignon]], voudraient voir la France intervenir comme elle s'apprête à intervenir en [[Belgique]]. Casimir Perier résiste vigoureusement et obtient gain de cause : l'adresse se bornera à de vagues formules sur la question polonaise<ref>Au § 17 du projet d'adresse, Bignon voulait introduire un amendement ainsi libellé : « Dans les paroles touchantes de V.M., la Chambre des députés aime à trouver une certitude qui lui est chère : la nationalité de la Pologne ne périra pas. » Le gouvernement présente un sous-amendement remplaçant ''certitude'' par ''espérance''. En définitive, les députés votent le terme ''assurance'', qui ne veut pas dire grand'chose.</ref>. C'est, pour le gouvernement, une nette victoire<ref>L'adresse est adoptée le [[16 août]] par 282 voix contre 73.</ref> qui remet en selle le ''parti de la résistance''.

Cédant à l'opinion dominante, Casimir Perier fait adopter un projet de loi abolissant l'[[hérédité de la pairie]], vieille revendication de la gauche. Après de belles empoignades parlementaires, il parvient également à faire voter la loi du {{date|2|mars|1832}} relative à la [[Liste civile de Louis-Philippe Ier|liste civile]], qui en arrête le montant à 12 millions par an plus un million pour le [[Ferdinand-Philippe d'Orléans|prince royal]]. Le [[Garde des Sceaux en France|garde des sceaux]], [[Félix Barthe|Barthe]], attache enfin son nom à l'un des monuments législatifs du règne : la loi du {{date|28|avril|1832}} modifiant le [[Code pénal de 1810|Code pénal]] et le [[Code d'instruction criminelle (France)|Code d'instruction criminelle]].

==== L'épidémie de choléra de 1832 ====
La [[pandémie]] de [[choléra]], partie d'[[Inde]] en [[1815]], atteint Paris autour du {{date|20|mars|1832}}. Elle tue {{formatnum:13000}} personnes rien qu'en avril, et continuera de ravager la capitale jusqu'en septembre, y faisant au total {{formatnum:18000}} morts. La maladie, dont on ignore encore la cause, jette la panique dans les esprits, le peuple n'hésitant pas à soupçonner des empoisonneurs, tandis que les chiffonniers se révoltent contre les mesures d'hygiène ordonnées par les autorités{{référence nécessaire}}.

Le choléra frappe également la famille royale – [[Adélaïde d'Orléans (1777-1847)|Madame Adélaïde]] est atteinte – et la classe politique – [[Antoine Maurice Apollinaire d'Argout|d'Argout]] et [[François Guizot|Guizot]] contractent la maladie. [[Casimir Perier]], qui est allé le {{1er avril}} avec le [[Ferdinand-Philippe d'Orléans|duc d'Orléans]] visiter les malades à l'[[Hôtel-Dieu de Paris|Hôtel-Dieu]], est atteint. Il doit s'aliter puis, son état empirant, cesser d'exercer ses fonctions de ministre de l'Intérieur. Au terme d'une longue agonie, il meurt le {{date|16|mai|1832}}.

==== La consolidation du régime ====
Débarrassé de Casimir Perier<ref>« J'avais beau faire […], dit-il, tout ce qui se faisait de bon était attribué à Casimir Perier, et les incidents malheureux retombaient à ma charge ; aujourd'hui, au moins, on verra que c'est moi qui règne seul, tout seul. » (Rodolphe Apponyi, ''Journal'', 18 mai 1832, cité par {{harvsp|Antonetti|2002|p=689}})</ref>, Louis-Philippe n'est pas pressé de nommer un nouveau président du Conseil, d'autant que le parlement n'est pas en session et que la situation politique troublée exige des mesures rapides et énergiques.

Le régime est en effet attaqué de toute part : par les [[légitimisme|légitimistes]], avec la tentative avortée de la [[Caroline des Deux-Siciles|duchesse de Berry]] de soulever la [[Provence]] et la [[Vendée (département)|Vendée]] durant le printemps [[1832]] et par les [[Républicains pendant la monarchie de Juillet|républicains]], qui déclenchent à Paris, le {{date|5|juin|1832}}, une insurrection à l'occasion des funérailles d'un de leurs chefs de file, le [[Jean Maximilien Lamarque|général Lamarque]], lui aussi emporté par le choléra. Le pouvoir réagit avec fermeté, les troupes de ligne et, pour l'essentiel, la [[garde nationale (1831)|garde nationale]], lui restent fidèles et le [[Georges Mouton|général Mouton]] peut écraser l'émeute dans le sang, faisant 800 morts ou blessés dans les deux camps.

{{Article détaillé|Insurrection royaliste dans l'Ouest de la France en 1832|Insurrection républicaine à Paris en juin 1832}}

Cette double victoire, sur les carlistes et sur les républicains, contribue grandement à consolider le régime<ref>Le {{date|7|juin|1832}}, Rodolphe Apponyi note dans son ''Journal'' : « Il me semble que ce n'est que depuis hier qu'on peut dater le règne de Louis-Philippe ; il paraît être persuadé qu'on ne peut réussir dans ce pays qu'avec de la force, et, dorénavant, il n'agira plus autrement. » {{harv|Antonetti|2002|p=696}}</ref>, d'autant qu'au même moment, le bonapartisme est endeuillé par la mort du [[Napoléon II|duc de Reichstadt]], survenue le [[22 juillet]] à [[Vienne (Autriche)|Vienne]]. Louis-Philippe peut couronner ces succès sur le plan intérieur par une belle réussite sur le plan diplomatique : le mariage de sa fille aînée, la [[Louise d'Orléans (1812-1850)|princesse Louise]], au nouveau roi des Belges, [[Léopold Ier de Belgique|Léopold {{Ier}}]], célébré au [[château de Compiègne]]<ref>L'[[Liste des évêques puis archevêques de Paris|archevêque de Paris]], le légitimiste [[Hyacinthe-Louis de Quélen|{{Mgr}} de Quélen]], a argué de la mixité du mariage – le roi des Belges est de confession [[Luthéranisme|luthérienne]] – pour interdire sa célébration dans une cathédrale.</ref> le [[9 août]], date anniversaire de l'installation de la monarchie de Juillet, et qui consacre la solidité de la position de celle-ci en Europe.

=== « Illustres épées » et « talents supérieurs » ===
[[Fichier:Soult2.jpg|thumb|upright|Le [[Nicolas Jean-de-Dieu Soult|maréchal Soult]]]]
En octobre [[1832]], Louis-Philippe appelle à la présidence du Conseil un homme de confiance, le [[Nicolas Jean-de-Dieu Soult|maréchal Soult]], première incarnation de la figure politique dite de l'« illustre épée », que la monarchie de Juillet reproduira à l'envi. Soult peut s'appuyer sur un [[triumvirat]] constitué des trois principales figures politiques du moment : [[Adolphe Thiers]], le [[Victor de Broglie (1785-1870)|duc de Broglie]] et [[François Guizot]], ce que le ''[[Journal des débats]]'' appelle « la coalition de tous les talents » et que le roi des Français finira par appeler avec rancœur un « Casimir Perier en trois personnes »<ref>« Quand ces trois messieurs sont d'accord entre eux, constate Louis-Philippe, je ne peux plus faire prévaloir mon avis. C'est Casimir Perier reconstitué en trois personnes ! » {{harv|Antonetti|2002|p=701}}</ref>.

{{Article détaillé|Gouvernement Nicolas Jean-de-Dieu Soult (1)}}

Dans une circulaire adressée aux hauts fonctionnaires civils et militaires ainsi qu'aux hauts magistrats, le nouveau président du Conseil résume sa ligne de conduite en quelques mots : « Le système politique adopté par mon illustre prédécesseur sera le mien. […] L'ordre au-dedans et la paix au-dehors seront les gages les plus sûrs de sa durée. »<ref>{{harvsp|Antonetti|2002|p=701}}. La suite de la circulaire recommande de se garder des « folles espérances » du « parti du gouvernement déchu » (les carlistes) tout comme de « l'anarchie [qui] a été vaincue dans Paris les 5 et 6 juin » ({{ibid.}}).</ref>

==== Les premiers succès du ministère Soult (octobre 1832 - avril 1834) ====
Le nouveau ministre de l'Intérieur, [[Adolphe Thiers|Thiers]], s'illustre dès le {{date|7|novembre|1832}} en faisant arrêter à [[Nantes]] la [[Caroline de Bourbon (1798-1870)|duchesse de Berry]], qui est internée à la [[citadelle de Blaye]]. Elle sera expulsée vers l'[[Italie]] le {{date|8|juin|1833}}, après avoir donné naissance à une fille, qu'elle déclare née d'un mariage contracté à [[Rome]], à la fin de [[1831]], avec le [[Hector Lucchesi-Palli|comte Lucchesi-Palli]].

En [[Belgique]], le [[Étienne Maurice Gérard|maréchal Gérard]], à la tête d'une armée de {{formatnum:70000}} hommes, prête main-forte à la jeune monarchie belge pour repousser une agression hollandaise et, notamment, reprendre la citadelle d'[[Anvers]], qui capitule le [[23 décembre]].

Fort de ces succès, le gouvernement aborde en position de force l'ouverture de la session parlementaire, le {{date|19|novembre|1832}}<ref>Pour l'élection du président de la Chambre des députés, [[André Dupin]], candidat du ministère, est aisément élu au premier tour avec 234 voix sur 370, le candidat de l'opposition, [[Jacques Laffitte]], n'obtenant que 136 voix. De même, pour l'élection des vice-présidents, le candidat de l'opposition qui obtient le plus de suffrages, [[Jacques Charles Dupont de l'Eure]], n'a que 136 voix. Enfin, lors de la discussion de l'adresse en réponse au discours du trône, adoptée le [[3 décembre]] par 233 voix contre 119, [[Adolphe Thiers|Thiers]], qui soutient la discussion à la place de [[François Guizot|Guizot]], souffrant, parvient à faire repousser tous les amendements de l'opposition.</ref>, et Louis-Philippe peut aller faire l'épreuve de sa popularité en entreprenant deux tournées en province : dans le Nord, où il rend hommage à l'armée victorieuse qui rentre d'Anvers, du [[5 janvier|5]] au {{date|20|janvier|1833}}<ref>Accompagné de ses trois fils aînés – [[Ferdinand-Philippe d'Orléans|Orléans]], [[Louis d'Orléans (1814-1896)|Nemours]] et [[François d'Orléans (1818-1900)|Joinville]] – Louis-Philippe se rend à [[Compiègne]], [[Saint-Quentin]], [[Maubeuge]], [[Valenciennes]], [[Lille]], [[Douai]], [[Arras]] et [[Péronne (Somme)|Péronne]].</ref>, et en [[Normandie]] du [[26 août]] au {{date|12|septembre|1833}}<ref>Le gouvernement vient alors de lever l'[[état de siège]] qui avait été décrété en juin [[1832]] à la suite de la tentative d'insurrection royaliste, mais la région reste agitée par des troubles, que le gouvernement qualifie de « brigandages ». Le voyage est également une réponse anticipée à la célébration, le [[20 septembre]] à [[Prague]], de la majorité du [[Henri d'Artois|duc de Bordeaux]], qui agite les [[légitimisme|légitimistes]]. Louis-Philippe se rend à [[Évreux]], [[Lisieux]], [[Falaise (Calvados)|Falaise]], [[Granville]], [[Saint-Lô]], [[Cherbourg]], [[Bayeux]], [[Caen]], [[Rouen]], [[Louviers]] et [[Le Havre]] et reçoit un accueil chaleureux de la population.</ref>.

Le roi et son gouvernement prennent des mesures populaires destinées à se concilier l'opinion publique, par exemple un programme de grands travaux, qui permet notamment d'achever un certain nombre de monuments parisiens, tel l'[[arc de triomphe de l'Étoile]], et des gestes symboliques, comme la réinstallation, le {{date|21|juin|1833}}, de la statue de {{Napoléon Ier}} sur la [[colonne Vendôme]]. [[François Guizot|Guizot]], ministre de l'Instruction publique et des Cultes, met en place la célèbre [[Loi Guizot|loi sur l'instruction primaire]] de juin 1833 qui oblige à la création d'une école élémentaire dans chaque commune.

Enfin, le {{1er avril}} [[1834]], la démission du [[Victor de Broglie (1785-1870)|duc de Broglie]], mis en minorité à la Chambre des députés au sujet de la ratification d'un traité avec les [[États-Unis]] qui avait été conclu en [[1831]], entraîne un vaste remaniement ministériel dont le principal intérêt, pour le roi, est d'ôter au « Casimir Perier en trois personnes » celui de ses membres qui, par sa hauteur aristocratique et la raideur de son caractère, lui était le plus incommode.

==== Les insurrections d'avril et les élections anticipées du 21 juin 1834 ====
Le remaniement ministériel du {{date|4|avril|1834}} coïncide avec le retour d'une situation quasi-insurrectionnelle dans plusieurs villes du pays. Déjà, à la fin du mois de février, la promulgation d'une loi soumettant à autorisation l'activité des crieurs publics a suscité, pendant plusieurs jours, des escarmouches avec la police parisienne.
[[Fichier:Revolte des Canuts - Lyon 1834 - 1.jpg|thumb|left|upright=1.3|''[[Révolte des Canuts#La deuxième insurrection des canuts (avril 1834)|La seconde révolte des Canuts]] à [[Lyon]] – avril 1834'']]

Par la loi du {{date|10|avril|1834}}, le gouvernement a décidé de durcir la répression des associations non autorisées, afin de contrer la principale des associations républicaines, la [[Société des Droits de l'Homme]]. Le jour du vote définitif de ce texte par la Chambre des pairs, le [[9 avril]], éclate la [[Révolte des Canuts#La deuxième insurrection des canuts (avril 1834)|seconde insurrection des canuts lyonnais]]. [[Adolphe Thiers]], ministre de l'Intérieur, abandonne la ville aux insurgés et la reprend le [[13 avril]], faisant 100 à 200 morts de part et d'autre.

Les républicains cherchent à étendre l'insurrection à d'autres villes de province, mais leur mouvement fait long feu à [[Marseille]], [[Vienne (Isère)|Vienne]], [[Poitiers]] et [[Châlons-en-Champagne|Châlons]]. Les troubles sont plus sérieux à [[Grenoble]] et surtout à [[Saint-Étienne]] le [[11 avril]], mais partout, l'ordre est rapidement rétabli. C'est en définitive à Paris que l'agitation prend le plus d'ampleur.

[[Fichier:Rue Transnonain, le 15 Avril 1834.tif|thumb|upright=1.2|''[[Massacre de la rue Transnonain|Le massacre de la rue Transnonain (14 avril 1834)]]'', vu par [[Honoré Daumier]].]]
Thiers, qui a prévu des troubles dans la capitale, y a concentré {{formatnum:40000}} hommes, que le roi passe en revue le [[10 avril]]. À titre préventif, il a fait arrêter 150 des principaux meneurs de la [[Société des Droits de l'Homme]], et interdire son organe, le virulent quotidien ''[[La Tribune des départements]]''. Malgré tout, dans la soirée du [[13 avril|13]], des barricades commencent à se dresser. Avec le [[Thomas-Robert Bugeaud|général Bugeaud]], qui commande les troupes, Thiers dirige personnellement les opérations de maintien de l'ordre. La répression est féroce. La troupe, ayant essuyé des coups de feu tirés du {{numéro|12}} de la rue Transnonain<ref>Cette rue correspondait à la moitié nord de la [[rue Beaubourg]].</ref>, le chef de détachement fait enlever la maison d'assaut ; tous les occupants – hommes, femmes, enfants, vieillards – sont massacrés à la baïonnette, ce qu'immortalise une célèbre lithographie d'[[Honoré Daumier]].

{| class="wikitable droite" style="clear: right"
|+ '''Nouvelle composition de <br />la Chambre des députés'''
|-
!rowspan=2 colspan=2|Groupes politiques
!colspan=3|<br />Effectifs
|-
!#
!%
|-
|{{Infobox Parti politique français/couleurs|bleu}}|&nbsp;
|Majorité
|~310 sièges
|align="right"|67,4 %
|-
|{{Infobox Parti politique français/couleurs|rose}}|&nbsp;
|Opposition
|align="right"|~120 sièges
|align="right"|26,1 %
|-
|bgcolor=darkblue|&nbsp;
|Légitimistes
|align="right"|~30 sièges
|align="right"|06,5 %
|- bgcolor=white
|colspan=5|&nbsp;
|-
|bcolor-white|&nbsp;
|'''Total'''
|align="right"|460 sièges
|100,0 %
|}

Le [[14 avril|14]], alors qu'on continue de se battre dans Paris, les deux chambres viennent en corps au [[Palais des Tuileries]] pour apporter leur concours au roi dans ses efforts pour rétablir l'ordre public. Louis-Philippe décide de renoncer à la célébration officielle de sa fête, le {{1er}} mai, et fait publier que les sommes qui y auraient été employées seront consacrées à secourir les blessés, les veuves et les orphelins. Dans le même temps, il ordonne au [[Nicolas Soult|maréchal Soult]] de donner une grande publicité au récit des événements « pour éclairer le public, les chambres et toute la France et leur faire sentir combien l'augmentation de l'armée est nécessaire »<ref>Louis-Philippe à Soult, {{date|17|avril|1834}}, cité par {{harvsp|Antonetti|2002|p=723}}</ref>

Plus de {{formatnum:2000}} personnes sont arrêtées à la suite des différentes émeutes, notamment à [[Paris]] et à [[Lyon]] et sont déférées par ordonnance royale à la Cour des pairs, conformément à l'article 28 de la [[Charte de 1830]], pour attentat contre la sûreté de l'État. L'état-major républicain est décapité, à telle enseigne que les funérailles de [[Gilbert du Motier de La Fayette|La Fayette]], mort le [[20 mai]], ne donnent lieu à aucun incident. Dès le [[13 mai]], le gouvernement obtient de la Chambre des députés le vote d'un crédit de 14 millions pour pouvoir entretenir une armée de {{formatnum:360000}} hommes. Deux jours plus tard, les députés adoptent également une loi très répressive sur la détention et l'usage d'armes de guerre.

Louis-Philippe juge le moment opportun pour dissoudre la Chambre des députés et provoquer de nouvelles élections législatives qui se tiennent le {{date|21|juin|1834}}<ref>Ordonnance du {{date|25|mai|1834}}</ref>, mais ne répondent pas entièrement aux attentes du roi : si les républicains sont quasiment éliminés, l'opposition reste forte de 150 sièges, dont une trentaine de légitimistes, le reste revenant à l'opposition dynastique d'[[Odilon Barrot]], loyale au régime mais hostile à la ''résistance'' et favorable au ''mouvement'' ; dans la majorité, forte d'environ 300 députés, émerge le « Tiers-Parti », qui peut, sur certains votes, faire défection et unir une partie de ses voix à celles de la gauche.

La nouvelle Chambre, qui se réunit le [[31 juillet]]<ref>L'ordonnance du {{date|25|mai|1834}} avait initialement fixé l'ouverture de la session parlementaire au [[20 août]], mais au vu du résultat des élections, une nouvelle ordonnance a avancé celle-ci au [[31 juillet]].</ref>, renouvelle naturellement à sa présidence [[André Dupin]], chef du Tiers-Parti mais proche du roi<ref>Il recueille, sur 321 votants, 247 voix contre 33 à [[Jacques Laffitte]] et 24 à [[Pierre-Paul Royer-Collard]]. Parmi les quatre vice-présidents élus, on compte un ministériel ([[Nicolas Martin du Nord|Martin du Nord]]), deux Tiers-Parti ([[Jean-Louis Calmon]] et [[Hippolyte Passy]]) et un dernier ([[Joseph Pelet de la Lozère|Pelet de la Lozère]]) qui est revendiqué par les deux camps.</ref>. Elle adopte à une large majorité<ref>256 voix contre 39</ref> une adresse ambiguë, où la critique perce sous les formules convenues. Le [[16 août]], Louis-Philippe s'empresse de mettre les chambres en vacances jusqu'à la fin de l'année.

==== Gérard, Maret, Mortier : la valse des ministères (juillet 1834 - février 1835) ====
[[Fichier:David Etienne Maurice Gerard.jpg|thumb|upright|[[Étienne Maurice Gérard|Le maréchal Gérard]]]]
[[Adolphe Thiers|Thiers]] et [[François Guizot|Guizot]], qui dominent le ministère, décident de se débarrasser du [[Nicolas Soult|maréchal Soult]], qu'ils trouvent obtus et impoli, mais dont le roi apprécie la complaisance à le laisser mener sa politique comme il l'entend. Un incident concernant le statut – civil ou militaire – des possessions françaises en [[Algérie]] sert de prétexte. Louis-Philippe se laisse forcer la main à regret, accepte la démission de Soult le {{date|18|juillet|1834}} et le remplace par le [[Étienne Maurice Gérard|maréchal Gérard]]. Une « illustre épée » en chasse une autre, aucun remaniement n'étant par ailleurs opéré dans la composition du ministère.

{{Article détaillé|Gouvernement Étienne Maurice, comte Gérard}}

Très rapidement, le ministère va se disloquer autour d'une question factice, montée en épingle par le Tiers Parti : l'éventualité d'une amnistie pour les « accusés d'avril ». Louis-Philippe y est hostile<ref>« Je joue, dit-il, la partie de l'État contre les anarchistes : voyons les enjeux. J'y mets ma vie, ma fortune, celle de mes enfants, et, ce qui est bien plus, j'y joue le repos et le bonheur de mon pays. Et qu'y mettent-ils ? Rien qu'un peu d'audace. Le jour où ils réussissent, ils ont tout, et l'État perd tout. En attendant le succès, ils risquent la prison où ils entrent à grand renfort de fanfares populaires, ils ont l'appui des journaux, des partis, des hommes d'État de l'opposition, dont la politique consiste toujours à relancer des amnisties, pour faire peur aux ministres pourvus de portefeuilles. » {{harv|Antonetti|2002|p=727}}</ref>, tout comme les [[Doctrinaires (politique)|doctrinaires]] et le noyau dur de la majorité ministérielle, mais le Tiers Parti, faisant valoir toute la difficulté à organiser le procès de {{formatnum:2000}} prévenus devant la Chambre des pairs, alors qu'aucune procédure n'est définie, parvient à circonvenir le maréchal Gérard, qui se déclare favorable à l'amnistie. Lorsqu'il constate qu'il a contre lui le roi, Guizot et Thiers et n'a aucune chance d'imposer ses vues, il ne lui reste qu'à démissionner le [[29 octobre]].

S'ouvre alors une longue crise ministérielle qui dure près de quatre mois. Après des essais multiples de diverses combinaisons dont aucune ne fonctionne, Louis-Philippe constitue, ce qui est conforme à la logique politique de la situation, un ministère entièrement Tiers Parti. Mais, [[André Dupin|Dupin]] en ayant refusé la présidence, le roi commet l'erreur d'appeler, le {{date|10|novembre|1834}}, une relique de l'[[Premier Empire|Empire]], le [[Hugues-Bernard Maret|duc de Bassano]].

{{Article détaillé|Gouvernement Hugues-Bernard Maret|}}

Le nouveau président du Conseil est tellement perdu de dettes que, sitôt sa nomination annoncée, ses créanciers font saisir son traitement de ministre. La constitution du nouveau gouvernement sème à la fois l'hilarité et la consternation. La presse se déchaîne. Effarés par un tel accueil, les ministres démissionnent en bloc dès le [[13 novembre]], sans même prévenir le duc de Bassano, dont le cabinet gagne le sobriquet de « ministère des trois jours ». Le [[18 novembre]], Louis-Philippe revient à la figure de l'« illustre épée » en la personne du [[Adolphe Édouard Casimir Joseph Mortier|maréchal Mortier]], [[duc de Trévise]], à la tête d'un ministère qui est la copie conforme de celui que présidait le maréchal Gérard.

{{Article détaillé|Gouvernement Édouard Adolphe Mortier}}

De cette crise, le Tiers Parti sort ridiculisé tandis que les doctrinaires triomphent. Le ministère veut pousser l'avantage en obligeant les députés à afficher clairement leur soutien à sa politique. Lors de la réunion des chambres le {{1er décembre}}, le gouvernement présente un ordre du jour motivé qui pose clairement la question de confiance, et qui obtient une nette majorité<ref>L'ordre du jour est ainsi rédigé : « La Chambre, satisfaite des explications entendues sur la politique suivie par le gouvernement, et n'y trouvant rien que de conforme aux principes exprimés dans son adresse, passe à l'ordre du jour. » Il est adopté le {{date|6|décembre|1834}} par 184 voix pour et 117 contre sur 301 votants.</ref>. Pourtant, à peine deux mois plus tard, le ministère tombe. De premières escarmouches ont lieu à propos du vote des crédits nécessaires pour aménager les locaux où doit se tenir le procès des insurgés d'avril<ref>Le {{date|3|janvier|1835}}, ces crédits sont votés par 209 voix contre 181, ce qui révèle une nette érosion de la majorité gouvernementale</ref>. L'opposition dénonce un ministère sans chef, à la tête duquel elle accuse Louis-Philippe d'avoir placé un fantoche pour mieux exercer son pouvoir personnel. La polémique s'enflamme, et l'on ressort, pour l'opposer à Louis-Philippe, la maxime que Thiers avait brandie face à Charles X : « Le roi règne mais ne gouverne pas ». En définitive, lorsque le maréchal Mortier démissionne le {{date|20|février|1835}}, officiellement pour raisons de santé, le roi ne cherche pas un instant à le retenir.

== Une évolution contrariée vers le parlementarisme ==
Nourries par les opuscules de publicistes inspirés par les [[Palais des Tuileries|Tuileries]] comme ceux du [[Nicolas Massias|baron Massias]] (''Ce qu'est régner, gouverner, administrer, et du conseil des ministres'') et du [[Pierre-Louis Roederer|comte Roederer]] (''Adresse d'un constitutionnel aux constitutionnels''), les polémiques qui ont conduit au départ du maréchal Mortier ont tourné autour de la place de la couronne et des prérogatives du parlement. D'un côté, Louis-Philippe veut conduire sa propre politique, notamment dans les domaines qu'il considère comme « réservés », la défense et la diplomatie, et exige des ministres qu'ils se plient à ses volontés, en se passant au besoin de [[Président du Conseil (France)|président du Conseil]]. De l'autre, une partie des députés affirment que le ministère doit avoir un chef et procéder de la majorité de la Chambre, et veulent achever ainsi une évolution du régime vers un [[parlementarisme]] que la [[Charte de 1830]] n'a fait qu'esquisser<ref>La Charte ne comporte pas de mécanismes de responsabilité politique des ministres devant la Chambre des députés (vote de confiance ou motion de censure). Par ailleurs, l'existence du président du Conseil n'est pas davantage inscrite dans la Charte.</ref>.

=== La logique parlementaire à l'œuvre : le ministère du duc de Broglie (mars 1835 - février 1836) ===

Dans ce contexte, les députés estiment qu'ils doivent imposer à Louis-Philippe de choisir pour président du Conseil le [[Victor de Broglie (1785-1870)|duc de Broglie]], pour la simple raison que c'est celui que le roi cherche absolument à éviter, car il se méfie de son anglophilie, et n'aime pas son indépendance et ses manières condescendantes. Après trois semaines de crise ministérielle, au cours de laquelle Louis-Philippe sollicite successivement [[Louis-Mathieu Molé|Molé]], [[André Dupin|Dupin]], [[Nicolas Soult|Soult]], [[Horace Sébastiani|Sébastiani]] et [[Étienne Maurice Gérard|Gérard]], il doit se résoudre, le {{date|12|mars|1835}}, à appeler le duc de Broglie et à accepter ses conditions, qui sont d'ailleurs proches de celles qu'avait imposées [[Casimir Perier]].

{{Article détaillé|Gouvernement Victor de Broglie}}

Comme le premier gouvernement Soult, le nouveau ministère repose sur le triumvirat Broglie (Affaires étrangères) - Guizot (Instruction publique) - Thiers (Intérieur). D'emblée, le duc de Broglie lave l'affront que lui avait infligé la Chambre en [[1834]] en obtenant haut la main la ratification du traité du {{date|4|juillet|1831}} avec les [[États-Unis]]<ref>289 voix pour et 137 contre</ref>. Il obtient également une large majorité dans le débat sur les fonds secrets, qui tient lieu de vote de confiance avec 256 voix pour et 129 contre.

==== Le procès des insurgés d'avril ====
La grande affaire du gouvernement Broglie est le procès des insurgés d'avril qui s'ouvre le {{date|5|mai|1835}} devant la Chambre des pairs. Sur les {{formatnum:2000}} prévenus, les pairs n'en ont en définitive inculpé que 164, dont 43 seront jugés par [[contumace]]<ref>arrêt de renvoi du {{date|6|février|1835}}</ref>. 121 accusés sont présents le jour du procès. Ils multiplient les incidents de procédure et utilisent tous les moyens possibles pour transformer le procès en vaste opération de propagande républicaine. Le [[12 juillet]], une partie d'entre eux, parmi lesquels les principaux meneurs de l'insurrection parisienne, s'échappent de [[Prison Sainte-Pélagie|Sainte-Pélagie]] par un passage souterrain qui avait été préparé de longue date.

La cour des pairs rend son jugement à l'encontre des accusés lyonnais le {{date|13|août|1835}} puis, vu les résistances des prévenus, décide de juger sur pièces les autres prévenus, à l'encontre de qui les sentences sont prononcées en décembre [[1835]] et janvier [[1836]]. Les peines sont plutôt clémentes : aucune condamnation à mort, quelques condamnations à la déportation, de nombreuses condamnations à quelques années d'emprisonnement et quelques acquittements.

==== L'attentat de Fieschi (28 juillet 1835) ====
[[Fichier:Attentat de Fieschi - 28.07.1835 - 2 (Eugène Lami).jpg|thumb|upright=1.2|''Attentat de Fieschi, le 28 juillet 1835''. (Par [[Eugène Lami]], [[1845]]. [[Château de Versailles]]).]]
Contrairement à ce qu'ils espéraient, les républicains ne sortent pas grandis, aux yeux de l'opinion, du procès des insurgés d'avril : ils ont donné d'eux-mêmes une image qui a paru ressusciter tous les excès du [[jacobinisme]], et qui a surtout effrayé les bourgeois. L'attentat commis contre le roi le {{date|28|juillet|1835}} achève de les déconsidérer.

À l'occasion de l'anniversaire de la [[Trois Glorieuses|révolution de Juillet]], Louis-Philippe doit passer en revue la garde nationale sur les grands boulevards. Malgré les rumeurs d'attentat, il refuse d'annuler la revue à laquelle il se rend entouré des aînés de ses fils – [[Ferdinand-Philippe d'Orléans|d'Orléans]], [[Louis d'Orléans (1814-1896)|Nemours]], [[François d'Orléans (1818-1900)|Joinville]] –, de plusieurs ministres, parmi lesquels le [[Victor de Broglie (1785-1870)|duc de Broglie]] et [[Adolphe Thiers|Thiers]], et de nombreux maréchaux et officiers. À la hauteur du {{numéro|50}} du [[boulevard du Temple]], une « machine infernale »<ref>La "machine infernale" est visible à l'hotel de Soubise, Archives Nationales, à gauche, en haut de l'escalier.</ref> placée sur l'appui de la fenêtre d'une maison explose. Miraculeusement, le roi n'a qu'une éraflure au front, ses fils sont indemnes, tandis que le [[Adolphe Édouard Casimir Joseph Mortier|maréchal Mortier]] est tué sur le coup avec dix autres personnes. Parmi les dizaines de blessés, sept meurent dans les jours suivants.

Les auteurs de l'attentat – un aventurier paranoïaque et vaniteux, ancien soldat de [[Joachim Murat|Murat]], [[Giuseppe Fieschi]], et deux républicains exaltés, liés à la [[Société des Droits de l'Homme]], le sellier Pierre Morey et le droguiste Théodore Pépin – sont arrêtés au début du mois de septembre. Jugés devant la cour des pairs, ils sont condamnés à mort et guillotinés le {{date|19|février|1836}}.

==== Les lois de septembre 1835 et la consolidation définitive du régime ====
La brutalité du carnage a plongé la France en état de choc. Les républicains sont discrédités. L'opinion est prête pour des mesures énergiques. Aussi, dès le [[4 août]], le gouvernement a déposé à la Chambre trois projets de lois permettant de renforcer la répression contre les auteurs d'attentats contre le régime : « La [[Charte de 1830|Charte]], justifie le [[Victor de Broglie (1785-1870)|duc de Broglie]], établit la liberté politique, sous la forme de la [[monarchie constitutionnelle]]. Tous les partis sont libres dans l'enceinte de la monarchie constitutionnelle. Dès qu'ils en sortent, la liberté ne leur est pas due. Ils se mettent eux-mêmes hors de la loi politique. […] La [[liberté de la presse]] ne domine pas les autres institutions. […] C'est un principe fondamental de la monarchie constitutionnelle que le monarque est au-dessus de toute atteinte, de toute discussion. »<ref>{{harvsp|Antonetti|2002|p=744-745}}</ref>
* Le premier texte vise à renforcer les pouvoirs du président de la [[Cour d'assises (France)|cour d'assises]] et du [[procureur général]] afin de contrecarrer les manœuvres d'obstruction et les procédés dilatoires des prévenus poursuivis pour rébellion, détention d'armes prohibées ou mouvements insurrectionnels. Il est adopté le [[13 août]] par 212 voix contre 72.
* Le deuxième projet réforme la procédure devant les jurys d'assises. La loi du {{date|4|mars|1831}} a réservé la déclaration de culpabilité ou d'innocence aux seuls jurés, à l'exclusion des magistrats professionnels faisant partie de la [[Cour d'assises (France)|cour d'assises]], et exigé la majorité des deux tiers (8 voix contre 4) pour prononcer une déclaration de culpabilité. Le projet du gouvernement revient à la majorité simple (7 contre 5). Il est adopté le [[20 août]] par 224 voix contre 149.
* Le troisième projet, qui touche à la [[liberté de la presse]], suscite des débats passionnés. Il vise à empêcher les discussions sur le roi, la dynastie, la monarchie constitutionnelle, car le gouvernement considère que la presse d'opposition, par ses attaques incessantes contre la personne du roi, a préparé le terrain à l'attentat. Malgré une opposition véhémente, le projet est voté le [[29 août]] par 226 voix contre 153.
Les trois lois sont promulguées ensemble le {{date|9|septembre|1835}}. Elles marquent le succès définitif de la politique de ''résistance'' engagée depuis [[Casimir Perier]] sur le harcèlement républicain, et la consolidation de la monarchie de Juillet, débarrassée de toute contestation portant sur le fondement même du régime. Celle-ci se déplace désormais sur d'autres terrains : l'interprétation de la Charte et la nature du régime, avec la revendication des députés d'une évolution parlementaire ; puis, à partir de [[1840]], la demande grandissante en faveur d'un élargissement du suffrage, qui voit réapparaître la contestation [[Républicains pendant la monarchie de Juillet|républicaine]] sous la forme de la revendication du suffrage universel.

[[Fichier:Humann.jpg|thumb|left|upright|[[Georges Humann]], ministre des Finances]]
Après le succès de la promulgation des lois de septembre, le ministère obtient le vote à une large majorité<ref>246 voix contre 67</ref>, le {{date|13|janvier|1836}}, d'une adresse plutôt favorable, rédigée par [[Paul Jean Pierre Sauzet|Sauzet]]. Pourtant, il va tomber sur une question tout à fait inattendue.

Le [[14 janvier]], alors que la Chambre aborde la discussion du budget, le ministre des Finances, [[Georges Humann]], annonce, sans en avoir averti ses collègues, son intention de procéder à une conversion de la rente française 5 % pour alléger le poids de la dette publique. C'est une véritable bombe politique, car la rente est une composante essentielle des fortunes de la bourgeoisie, base politique du régime. Aussi le Conseil des ministres désavoue-t-il immédiatement Humann, qui est contraint à la démission le [[18 janvier]], cependant que le duc de Broglie explique à la Chambre que le gouvernement ne soutient pas sa proposition. Mais il le fait en termes jugés cassants, qui indisposent les députés : l'un d'entre eux, le banquier [[Alexandre Goüin]], dépose aussitôt une proposition de loi tendant à la conversion de la rente qui est renvoyée devant la Chambre où elle est débattue à partir du [[4 février]]. Le lendemain, les députés décident de poursuivre son examen par 194 voix contre 192. Désavoué, le gouvernement démissionne aussitôt : c'est la première fois qu'un ministère tombe après avoir été mis en minorité devant la Chambre des députés.

=== La logique parlementaire contrariée ===
La chute du [[Gouvernement Victor de Broglie|ministère Broglie]] pourrait marquer un tournant décisif dans l'évolution du régime vers le parlementarisme. Mais il n'en sera rien : Louis-Philippe, avec une habileté manœuvrière consommée, va feindre de jouer le jeu parlementaire, mais pour mieux le neutraliser.

==== Le premier ministère Thiers (février - septembre 1836) ====
[[Fichier:Thiers, Adolphe (jeune).jpg|thumb|upright|[[Adolphe Thiers]]]]
Le roi va profiter de la crise ministérielle pour se débarrasser des [[Doctrinaires (politique)|doctrinaires]], c'est-à-dire non seulement le [[Victor de Broglie (1785-1870)|duc de Broglie]], mais également [[François Guizot|Guizot]], replâtrer le ministère avec quelques créatures du Tiers Parti pour donner à celui-ci l'illusion d'une inflexion à gauche, et mettre à sa tête [[Adolphe Thiers]] dans le dessein de le détacher définitivement des doctrinaires<ref>Le roi en espère un surcroît de liberté de manœuvre : il conserve la hantise du « Casimir Perier en trois personnes », c'est-à-dire de la coalition des « talents supérieurs » ligués pour l'empêcher d'imposer ses vues. Mais c'est un jeu dangereux car, en séparant le centre droit du centre gauche, Louis-Philippe peut certes espérer briser le Tiers Parti, mais il risque aussi de disloquer sa majorité parlementaire au risque de provoquer des crise gouvernementales à répétition. Par ailleurs, comme le duc de Broglie l'en a d'ailleurs prévenu, lorsqu'il le renverra, Thiers se trouvera inévitablement rejeté encore plus à gauche, et se muera en opposant particulièrement dangereux.</ref> et de l'user jusqu'à ce que sonne l'heure du [[Louis-Mathieu Molé|comte Molé]], que le roi a résolu depuis longtemps d'appeler à la présidence du Conseil. Entortillé dans des tractations alambiquées, ce plan est mis en œuvre comme Louis-Philippe l'entend : le nouveau ministère est constitué le {{date|22|février|1836}}.

{{Article détaillé|Gouvernement Adolphe Thiers (1)}}

Le jour même, Thiers s'exprime devant la Chambre des députés : il justifie la politique de résistance menée jusqu'alors<ref>« Pour sauver une révolution, il faut la préserver de ses excès. Quand ces excès se sont produits dans la rue ou dans l'usage abusif des institutions, j'ai contribué à les réprimer par la force et par la législation. » {{harv|Antonetti|2002|p=752}}</ref>, mais il reste fort vague sur son programme, se bornant à promettre « des jours meilleurs » et à récuser les « systèmes ».

À la Chambre, qui ajourne aisément, le [[22 mars]], la proposition de conversion des rentes – preuve, s'il en était besoin, que le sujet n'avait été qu'un prétexte – le débat sur les fonds secrets, marqué par un discours remarqué de [[François Guizot|Guizot]] et une réponse fuyante du garde des sceaux, [[Paul Jean Pierre Sauzet|Sauzet]], est conclu par un vote largement favorable au gouvernement<ref>251 pour et 99 contre, vraisemblablement issus du centre droit, mécontent que le ministère, par l'organe de Sauzet, n'ait pas clairement soutenu le discours de fermeté de Guizot</ref>.

[[Fichier:Prince Ferdinand Philippe, Duke of Orléans by Ingres, 1832.jpg|thumb|left|upright|''Portrait du duc d'Orléans'', par [[Dominique Ingres]], [[1842]].]]
Si Thiers a accepté la présidence du Conseil et pris le portefeuille des Affaires étrangères, c'est parce qu'il espère pouvoir négocier le mariage du [[Ferdinand-Philippe d'Orléans|duc d'Orléans]] avec une archiduchesse d'[[Autriche]] : depuis l'attentat de [[Giuseppe Fieschi|Fieschi]], le mariage de l'héritier du trône, qui vient d'avoir vingt-cinq ans, est l'obsession de Louis-Philippe, et Thiers se verrait bien, tel un nouveau [[Étienne François de Choiseul|Choiseul]], en artisan d'un spectaculaire renversement d'alliances en Europe. Mais la tentative se solde par un échec : [[Klemens Wenzel von Metternich|Metternich]] et l'archiduchesse [[Sophie de Bavière|Sophie]], qui domine la cour de [[Vienne (Autriche)|Vienne]], rejettent une alliance avec la famille d'Orléans, qu'ils estiment bien peu assurée sur son trône.

L'[[Attentats contre Louis-Philippe Ier#L’attentat d’Alibaud (25 juin 1836)|attentat d'Alibaud]] contre Louis-Philippe, le [[25 juin]], vient d'ailleurs justifier leurs craintes. À l'échec sur le plan international vient ainsi s'ajouter pour Thiers, un échec sur le plan intérieur, avec la résurgence de la menace républicaine, à telle enseigne que l'inauguration de l'[[arc de triomphe de l'Étoile]], le [[29 juillet]], qui aurait dû être l'occasion d'une grande cérémonie de concorde nationale, au cours de laquelle la monarchie de Juillet se serait réchauffée à la gloire de la Révolution et de l'Empire, se déroule en catimini, à sept heures du matin et hors la présence du roi.

Pour restaurer sa popularité et se venger de l'Autriche, Thiers caresse l'idée d'une intervention militaire en [[Espagne]], que réclame la reine-régente [[Marie Christine de Bourbon|Marie-Christine]], confrontée à la rébellion [[carlisme|carliste]]. Mais Louis-Philippe, conforté par [[Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord|Talleyrand]] et [[Nicolas Soult|Soult]], s'y oppose résolument, ce qui entraîne la démission de Thiers. Cette fois, le gouvernement est tombé non à la suite d'un vote hostile de la Chambre – le Parlement n'est pas en session – mais en raison d'un désaccord avec le roi sur la politique étrangère, preuve que l'évolution parlementaire du régime reste alors tout à fait incertaine.

==== Les deux ministères Molé (septembre 1836 - mars 1839) ====
[[Fichier:Mathieu-Louis Molé.JPG|thumb|upright|[[Louis-Mathieu Molé|Le comte Molé]]]]
Le nouveau ministère est constitué le {{date|6|septembre|1836}} sous la présidence du [[Louis-Mathieu Molé|comte Molé]]. Depuis longtemps, Louis-Philippe est subjugué par le charme de ce parfait homme de cour, ancien Grand juge de {{Napoléon Ier}}, issu d'une illustre [[Famille Molé|famille]] de [[Parlement de Paris|parlementaires parisiens]]. Le nouveau ministère, où rentrent les [[Doctrinaires (politique)|doctrinaires]] [[François Guizot|Guizot]], [[Tanneguy Duchâtel|Duchâtel]] et [[Adrien de Gasparin|Gasparin]], ne compte – la presse en fait aussitôt la remarque – aucune des illustrations des [[Trois Glorieuses]].

{{Article détaillé|Gouvernement Louis Mathieu Molé (1)}}

Soucieux de conforter une popularité incertaine, le ministère prend immédiatement quelques mesures d'inspiration humaniste : généralisation de l'incarcération cellulaire<ref>Il s'agit d'éviter « l'enseignement mutuel du crime ».</ref>, suppression de la chaîne des forçats, grâce royale pour 52 condamnés politiques, tant légitimistes que républicains, et notamment pour les anciens ministres de [[Charles X de France|Charles X]]<ref>[[Charles Ignace, comte de Peyronnet|Peyronnet]] et [[Jean de Chantelauze|Chantelauze]] sont libérés le [[17 octobre]] et assignés à résidence sur leurs terres. La mesure est étendue à [[Martial de Guernon-Ranville|Guernon-Ranville]] le [[23 novembre]], tandis que la peine de détention perpétuelle de [[Jules de Polignac (1780-1847)|Polignac]] est commuée en 20 ans de bannissement hors de France.</ref>. Le {{date|25|octobre|1836}}, l'érection de l'[[obélisque de Louxor]] sur la [[place de la Concorde]] donne au roi le plaisir d'une ovation publique.

===== La tentative de soulèvement de Strasbourg et la loi de disjonction =====
Le {{date|30|octobre|1836}}, la [[tentative de soulèvement de Strasbourg de Louis-Napoléon Bonaparte]] tourne rapidement court. Le [[Napoléon III|prince]] et ses complices sont arrêtés le jour même, au grand embarras du gouvernement qui ne sait que faire de cet encombrant prisonnier. En dehors de toute procédure légale, le ministère le fait transporter à [[Lorient]] où il est embarqué, le [[21 novembre]], sur ''L'Andromède'' qui le conduit aux [[États-Unis]].

Les autres conjurés sont déférés à la [[Cour d'assises (France)|cour d'assises]] de [[Strasbourg]] qui les acquitte le {{date|18|janvier|1837}}. Aussi, dès le {{date|24|janvier|1837}}, le [[Liste des ministres français de la Défense|ministre de la Guerre]], le [[Simon Bernard|général-baron Bernard]], dépose à la Chambre des députés le projet de loi dit « de disjonction » qui vise à permettre d'opérer, en cas de tentative d'insurrection, une disjonction entre les civils, justiciables de la cour d'assises, et les militaires, qui seraient traduits devant le [[conseil de guerre]], par exception au principe de l'indivisibilité de la procédure. Le projet est vivement combattu par l'opposition et, à la surprise générale, il est repoussé le [[7 mars]] par 211 voix contre 209.

===== Du premier au second ministère Molé =====
Après ce camouflet, l'on s'attend à ce que le gouvernement démissionne, ce qui serait la logique même d'un système parlementaire. Pourtant, malgré les attaques de la presse, Louis-Philippe maintient le cabinet Molé en fonctions. Mais, privé de majorité parlementaire solide, le ministère est comme paralysé. Il doit renoncer à ouvrir le débat sur les projets de loi d'apanage au profit du [[Louis d'Orléans (1814-1896)|duc de Nemours]] et d'allocation pour la dot de la [[Louise d'Orléans (1812-1850)|reine des Belges]]<ref>Le projet de loi vise à constituer, pour le duc de Nemours, une dotation foncière, comprenant principalement le [[Château de Rambouillet|domaine de Rambouillet]], d'une valeur de 10&nbsp;millions et rapportant {{formatnum:500000}} francs par an. Pour la reine des Belges, le projet de loi fixe le montant de la dot à un million de francs.</ref>. Pendant un mois et demi, du [[7 mars]] au [[15 avril]], Louis-Philippe fait mine d'essayer diverses combinaisons ministérielles avant de constituer un nouveau ministère où rentre [[Camille de Montalivet|Montalivet]], proche du roi, mais dont sort [[François Guizot|Guizot]], qui s'entendait de plus en plus mal avec Molé, confirmé dans ses fonctions de chef du gouvernement.

{{Article détaillé|Gouvernement Louis Mathieu Molé (2)}}

Vis-à-vis de la Chambre des députés, le nouveau cabinet frise la provocation : non seulement Molé est maintenu en fonctions, mais on y fait entrer le rapporteur du projet de loi de disjonction, [[Narcisse-Achille de Salvandy|Salvandy]], et celui du projet de loi concernant la dot de la reine des Belges, [[Jean Lacave-Laplagne|Lacave-Laplagne]], qui avaient l'un et l'autre défendu des textes repoussés par les députés. Tout le monde s'attend à ce que le gouvernement, aimablement qualifié par la presse d'opposition de « ministère de laquais » ou de « ministère du château », tombe rapidement.

===== Le mariage du duc d'Orléans =====
[[Fichier:Portrait of Helene of Mecklenburg-Schwerin, (Duchess of Orleans) with her son Prince Louis Philippe, Count of Paris by Winterhalter.jpg|thumb|upright|''[[Hélène de Mecklembourg-Schwerin|La duchesse d'Orléans]] tenant son fils, [[Philippe d'Orléans (1838-1894)|Philippe]], comte de Paris''. (Portrait par [[Franz Xaver Winterhalter]], [[1839]]. [[Château de Versailles]]).]]
Lorsque Molé monte à la tribune le [[18 avril]], les députés l'attendent donc de pied ferme. « Messieurs, annonce le président du Conseil, le roi nous a chargés de vous communiquer un événement également heureux pour l'État et pour sa famille… »<ref name="Antonetti780">{{harvsp|Antonetti|2002|p=780}}</ref> Il s'agit du futur mariage du [[Ferdinand-Philippe d'Orléans|prince royal]] avec la princesse [[Hélène de Mecklembourg-Schwerin]]. L'annonce de cette nouvelle coupe court à toute critique et à tout débat. Les députés ne peuvent qu'entériner l'augmentation de la dotation du duc d'Orléans<ref>La dotation annuelle est portée de 1 à 2 millions et il est en outre alloué une allocation unique d'un million pour dépenses de mariage et frais d'établissement. Ces dispositions sont adoptées le [[22 avril]] par 307 voix pour et 49 contre.</ref>, et la dot de la reine des Belges, qui leur est représentée aussitôt<ref>Elle est adoptée, à hauteur d'un million, le [[27 avril]] par 239 voix pour et 140 contre.</ref>, d'autant que Molé leur précise que « S.M. a décidé que la demande présentée pour le prince son second fils [le duc de Nemours] serait ajournée »<ref name="Antonetti780"/>.

Fort de ce début habile, le gouvernement se tire sans encombres du débat sur les fonds secrets, malgré les attaques d'[[Odilon Barrot]]<ref>Il obtient la confiance par 250 voix contre 112 au début mai.</ref>. Une ordonnance du [[8 mai]], bien accueillie par les Chambres, décrète une [[amnistie]] générale pour tous les condamnés politiques. Parallèlement, les crucifix sont rétablis dans les tribunaux et l'[[Église Saint-Germain-l'Auxerrois (Paris)|église Saint-Germain-l'Auxerrois]], fermée depuis [[1831]], est rendue au culte. Pour bien montrer que l'ordre est rétabli, le roi passe la [[Garde nationale (1831)|Garde nationale]] en revue sur la [[place de la Concorde]].

Le mariage du duc d'Orléans est célébré avec faste au [[château de Fontainebleau]] le {{date|30|mai|1837}}.

{{Article détaillé|Ferdinand-Philippe d'Orléans#Le mariage du duc d'Orléans}}

Quelques jours plus tard, le [[10 juin]], Louis-Philippe inaugure le [[château de Versailles]], qu'il a fait restaurer depuis [[1833]] pour y installer un musée d'histoire dédié « à toutes les gloires de la France », et où, dans le cadre d'une politique de réconciliation nationale, les gloires militaires de la [[Révolution française|Révolution]] et de l'[[Premier Empire|Empire]], et même celles de la [[Restauration française|Restauration]], voisinent avec celles de l'[[Ancien Régime]].

===== Les élections anticipées du 4 novembre 1837 et la coalition =====
Le régime semble désormais stabilisé, la prospérité économique est revenue. Aussi le roi et Molé jugent-ils, contre l'opinion du duc d'Orléans, le moment propice pour prononcer la dissolution de la Chambre des députés, décidée le {{date|3|octobre|1837}}. Pour peser sur les élections, Louis-Philippe décide l'[[expédition de Constantine de 1837|expédition de Constantine]] en [[Algérie]], qui aboutit à la prise de la ville par le [[Sylvain Charles Valée|général Valée]] et le [[Louis d'Orléans (1814-1896)|duc de Nemours]] le [[13 octobre]].

Les élections, qui ont lieu le {{date|4|novembre|1837}}, ne répondent pas aux espoirs de Louis-Philippe. Sur 459 députés, les ministériels ne sont que 220 environ, majorité relative, étroite, incertaine. Les extrêmes comptent une vingtaine de députés à droite ([[légitimisme|légitimistes]]) et une trentaine à gauche (républicains). Le centre droit ([[Doctrinaires (politique)|doctrinaires]]) aligne une trentaine de députés, le centre gauche une soixantaine et l'opposition dynastique 65. Le tiers parti n'a plus qu'une quinzaine de députés, tandis qu'une trentaine d'indécis sont inclassables dans les catégories précédentes.

{| class="wikitable"
|+ '''Nouvelle composition de la Chambre des députés'''
|-
!rowspan=2 colspan=2|Groupes politiques
!colspan=3|<br />Effectifs
|-
!#
!%
|-
|{{Infobox Parti politique français/couleurs|bleu}}|&nbsp;
|Conservateurs ministériels
|~220 sièges
|align="right"|47,9 %
|-
|bgcolor=yellow|&nbsp;
|Opposition dynastique
|align="right"|~65 sièges
|align="right"|14,2 %
|-
|{{Infobox Parti politique français/couleurs|rose}}|&nbsp;
|Centre Gauche
|align="right"|~60 sièges
|align="right"|13,1 %
|-
|bgcolor=lightskyblue|&nbsp;
|Doctrinaires
|align="right"|~30 sièges
|align="right"| 6,5 %
|-
|{{Infobox Parti politique français/couleurs|rouge}}|&nbsp;
|Républicains
|align="right"|~30 sièges
|align="right"| 6,5 %
|-
|bgcolor=darkblue|&nbsp;
|Légitimistes
|align="right"|~20 sièges
|align="right"| 4,4 %
|-
|bgcolor=FFCB60|&nbsp;
|Tiers Parti
|align="right"|~15 sièges
|align="right"| 3,3 %
|-
|bgcolor=white|&nbsp;
|Indécis
|align="right"|~30 sièges
|align="right"| 6,5 %
|- bgcolor=white
|colspan=5|&nbsp;
|-
|bcolor-white|&nbsp;
|'''Total'''
|align="right"|459 sièges
| -
|}

Le risque est considérable, dans une chambre ainsi composée, qu'une coalition hétéroclite se forme pour renverser le gouvernement, sans pour autant que puisse émerger une majorité cohérente : c'est exactement ce qui va se produire.

Dès janvier [[1838]], à l'occasion du débat sur l'adresse, le gouvernement est vivement pris à partie, notamment par [[Charles Gauguier]] à propos des députés fonctionnaires<ref>Le [[9 janvier]], il accuse le ministère de manipuler les élections pour faire élire des fonctionnaires à sa dévotion. Le nombre de députés fonctionnaires est passé de 178 sous la précédente législature à 191.</ref>, et surtout par [[Adolphe Thiers]] et ses amis au sujet des [[Politique extérieure de la France sous la monarchie de Juillet#La question d'une intervention militaire en Espagne|affaires d'Espagne]]. Malgré tout, grâce aux voix des [[Doctrinaires (politique)|doctrinaires]], il obtient, le [[13 janvier]], le vote d'une adresse favorable par 216 voix contre 116.

Thiers a perdu la première manche, mais il est apparu clairement que le gouvernement est l'otage des doctrinaires, au moment même où [[François Guizot|Guizot]] ne cesse de s'éloigner de Molé<ref>Dès lors, tous les efforts de Thiers vont tendre à détacher les doctrinaires de la majorité ministérielle. Dès le [[17 janvier]], à un bal aux [[Palais des Tuileries|Tuileries]], Thiers et Guizot ont une longue conversation en ce sens, qui est écoutée par des oreilles indiscrètes et rapportée au roi et à Molé.</ref>. Le [[12 mars]], lors du débat sur les fonds secrets, Guizot ne le dissimule pas : « N'est-il pas évident, interroge-t-il, qu'il y a peu d'union intime, peu d'action réciproque entre le gouvernement et les chambres ? »<ref>{{harvsp|Antonetti|2002|p=790}}. Le [[Victor de Broglie (1785-1870)|duc de Broglie]] adopte la même attitude à la Chambre des pairs : il critique sévèrement le ministère tout en déclarant qu'il votera les fonds secrets.</ref> Pourtant, le gouvernement obtient le vote de la confiance le [[15 mars]] par 249 voix contre 133 et, en dépit de quelques escarmouches<ref>Le [[10 mai]], la Chambre des députés rejette le plan de développement du réseau de chemin de fer proposé par le gouvernement (196 voix contre 69). Le [[4 mai]], elle adopte le projet de conversion des rentes (251 voix contre 145), que le gouvernement doit faire repousser par la Chambre des pairs.</ref>, il parvient à tenir jusqu'à la fin de la session parlementaire après avoir obtenu, le [[20 juin]], le vote du budget de [[1839]]<ref>248 voix contre 37</ref>.

Pendant toute l'année [[1838]], l'opposition fourbit ses armes et une coalition se forme pour renverser le ministère. La session parlementaire s'ouvre le [[17 décembre]]. Le [[19 décembre|19]], [[André Dupin|Dupin aîné]], proche des [[Palais des Tuileries|Tuileries]], n'est réélu que de justesse<ref>183 voix contre 178 à [[Hippolyte Passy]], candidat de centre gauche, adversaire véhément du « ministère du château ». Pour les quatre vice-président, après [[Jean-Louis Calmon]] (ministériel), [[Hippolyte Passy]] et [[Tanneguy Duchâtel]] (coalition), [[Laurent Cunin-Gridaine]] (ministériel), n'est réélu que de justesse devant [[Odilon Barrot]] (coalition).</ref>. Au sein de la commission chargée de rédiger le projet d'adresse, les députés de la coalition sont majoritaires<ref>6 députés de la coalition (dont [[François Guizot]], [[Adolphe Thiers]], [[Prosper Duvergier de Hauranne]], [[Hippolyte Passy]]) contre 3 députés ministériels</ref>, mais le [[19 janvier]], le ministère parvient à faire adopter, par 221 boules blanches contre 208 boules noires, un texte qui, après plusieurs amendements au projet initial, lui est plutôt favorable.

===== Les élections anticipées du 2 mars 1839 =====
[[Fichier:Carte statistique de la France électorale 1839.jpg|thumb|''Carte statistique de la France électorale (chambre de 1839)'' par [[Armand Joseph Frère de Montizon]].]]

Si la coalition est donc vaincue, Molé estime ne pas pouvoir continuer à gouverner avec une majorité aussi étroite et aussi incertaine et il remet sa démission au roi le {{date|22|janvier|1839}}. Le roi commence par la refuser puis, après avoir approché en vain le [[Nicolas Soult|maréchal Soult]] pour prendre la tête du ministère<ref>Soult rencontre le roi le [[24 janvier]] et montre la plus grande répugnance pour cette formule, mais il accepte de réfléchir pendant que le roi va à [[Dreux]] enterrer sa fille, la [[Marie d'Orléans (1813-1839)|duchesse de Wurtemberg]], morte de la turberculose. Quand le roi revient, le maréchal décline en prétextant une « fluxion dentaire », puis se laisse arracher une acceptation, mais à la condition de nouvelles élections victorieuses.</ref>, décide, le {{date|2|février|1839}}, de dissoudre la Chambre des députés et convoque les électeurs pour le [[2 mars]] et les Chambres pour le [[26 mars|26]].

La campagne électorale se déroule dans une atmosphère enfiévrée. L'opposition de gauche crie au coup de force constitutionnel, rapprochant les dissolutions de [[1837]] et [[1839]] des deux dissolutions consécutives de [[Charles X de France|Charles X]] en [[1830]]. [[Adolphe Thiers|Thiers]] compare Molé et [[Jules de Polignac (1780-1847)|Polignac]] et déplore de voir « se renouveler, après huit années seulement, des fautes si graves, si cruellement punies »<ref>{{harvsp|Antonetti|2002|p=801}}</ref>. [[François Guizot|Guizot]] reproche aux ministres d'isoler le roi de la Nation<ref>manifeste à ses électeurs du {{date|6|février|1839}}, cité par {{harvsp|Antonetti|2002|p=801}}</ref>.

Le [[2 mars]], les élections déçoivent les espoirs de Louis-Philippe. Les 221 députés qui avaient soutenu le ministère ne sont plus que 199 tandis que la coalition rassemble 240 membres. Lors du conseil du [[8 mars|8]], Molé présente sa démission que le roi est contraint d'accepter.

<center>
{| class="wikitable"
|+ '''Nouvelle compositions de la Chambre des députés'''
|-
!rowspan=2 colspan=2|Groupes politiques
!colspan=3|<br />Effectifs
|-
!#
!%
|-
|{{Infobox Parti politique français/couleurs|rouge}}|&nbsp;
|Tiers parti & républicains
|240 sièges
|align="right"|52,3 %
|-
|{{Infobox Parti politique français/couleurs|bleu}}|&nbsp;
|Conservateurs ministériels
|199 sièges
|align="right"|43,4 %
|-
|bgcolor=darkblue|&nbsp;
|Légitimistes
|align="right"|20 sièges
|align="right"| 4,4 %
|- bgcolor=white
|colspan=5|&nbsp;
|-
|bcolor-white|&nbsp;
|'''Total'''
|align="right"|459 sièges
|100,0 %
|}
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=== Les poisons du parlementarisme et le retour de l'instabilité ministérielle ===
La coalition qui s'est opposée au gouvernement Molé est hétéroclite et a les plus grandes peines à faire émerger en son sein une majorité stable. Les années [[1839]]-[[1840]] sont largement marquées par des jeux parlementaires compliqués, qui entraînent un retour de l'instabilité ministérielle, jugulée pendant les deux années et demi où le [[Louis-Philippe Ier|roi]] avait maintenu [[Mathieu Louis Molé|Molé]] en place.

==== Le deuxième ministère Soult (mai 1839 - février 1840) ====
Après la chute de [[Mathieu Louis Molé|Molé]], [[Louis-Philippe Ier|Louis-Philippe]] fait tout de suite appel au [[Nicolas Soult|maréchal Soult]], « manche brillant auquel on peut au besoin adapter des lames de toute forme et de toute trempe »<ref>[[Paul Thureau-Dangin]], ''Histoire de la monarchie de Juillet'', p. ?</ref>, qui essaie en vain de mettre sur pied un ministère réunissant les trois principales têtes de la coalition – [[François Guizot|Guizot]], [[Adolphe Thiers|Thiers]] et [[Odilon Barrot]] – puis, devant le refus persistant des [[Doctrinaires (politique)|doctrinaires]], un cabinet de centre gauche, qui butte sur l'intransigeance de Thiers sur les affaires d'[[Espagne]]<ref>Voir : [[Politique extérieure de la France sous la monarchie de Juillet#La question d'une intervention militaire en Espagne]]</ref>.

[[Fichier:Barbès, Armand.jpg|thumb|upright|[[Armand Barbès]], l'un des meneurs de l'insurrection républicaine du 12 mai 1839 (Lithographie de Jeannin).]]
[[Fichier:Blanqui, Auguste.jpg|thumb|upright|[[Auguste Blanqui]], l'un des meneurs de l'insurrection républicaine du 12 mai 1839.]]
Devant l'impossibilité de former un gouvernement, le roi doit reporter au [[4 avril]] l'ouverture de la session parlementaire, prévue initialement le [[26 mars]]. Thiers fait échouer un essai de combinaison l'associant au [[Victor de Broglie (1785-1870)|duc de Broglie]] et à Guizot. Louis-Philippe cherche alors à l'éloigner en lui offrant une grande ambassade, ce qui fait aussitôt pousser des hauts cris à ses amis. En définitive, le roi doit se résoudre à constituer, le [[31 mars]], un ministère de transition, formé de personnages relativement incolores politiquement, pour pouvoir ouvrir la session parlementaire et laisser la situation se décanter. Les nouveaux ministres n'ont accepté leurs portefeuilles que « sous la condition expresse de cesser leurs fonctions aussitôt qu'un ministère définitif serait formé »<ref>{{harvsp|Antonetti|2002|p=805}}</ref>.

{{Article détaillé|Gouvernement de transition de 1839}}

La session parlementaire s'ouvre le [[4 avril]] dans une atmosphère quasi-insurrectionnelle<ref>Une foule houleuse s'est massée autour du [[Palais Bourbon]], chantant ''La Marseillaise'' et brisant des réverbères. Des boutiques d'armuriers sont dévalisées. La presse de gauche met ces troubles sur le dos des provocations gouvernementales.</ref>. Pour l'élection du président de la Chambre, Thiers fait campagne pour Odilon Barrot, mais la mani��re dont, pendant la crise gouvernementale, le petit homme a fait échouer toutes les combinaisons ministérielles a déplu à certains de ses amis. Une partie du centre gauche fait dissidence et présente [[Hippolyte Passy]] contre Barrot. Les députés ministériels et les doctrinaires votent en masse pour Passy qui l'emporte par 227 voix contre 193. Ce vote démontre que la coalition a éclaté et qu'il existe une majorité pour empêcher toute solution de gauche.

Pour autant, les tractations pour former un nouveau gouvernement se poursuivent sans succès du fait de l'intransigeance de Thiers qui fait promettre à ses amis de n'entrer dans aucune combinaison sans son aval. La situation paraît complètement bloquée quand, le [[12 mai]], la [[Société des saisons]], société secrète républicaine, dont les meneurs sont [[Martin Bernard]], [[Armand Barbès]] et [[Auguste Blanqui]], déclenche une opération insurrectionnelle à Paris, [[rue Saint-Denis (Paris)|rue Saint-Denis]] et [[Rue Saint-Martin (Paris)|rue Saint-Martin]].

L’opération échoue et les conjurés sont arrêtés. Mais cet événement renverse la situation politique : le soir même, Louis-Philippe est en mesure de former un nouveau gouvernement sous la présidence du [[Nicolas Soult|maréchal Soult]], accouru l'un des premiers aux [[Palais des Tuileries|Tuileries]] pour témoigner de son soutien au roi et à la monarchie de Juillet, et personnalité à qui Louis-Philippe songeait depuis le début de la crise ministérielle. Le roi a donc gagné la partie et fait émerger une combinaison qui lui convient.

{{Article détaillé|Gouvernement Nicolas Jean-de-Dieu Soult (2)}}

Aussitôt, la situation politique semble se calmer. Le vote sur les fonds secrets, à la fin mai, donne une très forte majorité<ref>262 voix contre 71</ref> au nouveau gouvernement, qui obtient aussi le vote du budget de 1840, à la fin juillet, avec une majorité encore plus large<ref>270 voix contre 37</ref>. La session s'achève sans encombres le [[6 août]]. Après la reprise des travaux parlementaires le [[23 décembre]], la Chambre vote une adresse plutôt favorable au ministère le {{date|15|janvier|1840}} par 212 voix contre 43. Pourtant, le ministère tombe le [[20 février]] sur le rejet par la Chambre, par 226 voix contre 200, du projet de loi de dotation pour le [[Louis d'Orléans (1814-1896)|duc de Nemours]] à l'occasion de son prochain mariage avec la princesse [[Victoire de Saxe-Cobourg-Gotha (1822-1857)|Victoire de Saxe-Cobourg-Kohary]]<ref>Dans une lettre à un ami, [[Pierre Joseph Proudhon|Proudhon]], pourtant républicain, note le {{date|27|février|1840}} l'inconséquence des députés de la bourgeoisie : « Qui veut le roi, veut une famille royale, veut une cour, veut des princes du sang, veut tout ce qui s'ensuit. ''Le Journal des débats'' dit vrai : les bourgeois conservateurs et dynastiques démembrent et démolissent la royauté, dont ils sont envieux comme des crapauds. » {{harv|Antonetti|2002|p=809}}</ref>.

==== Le deuxième ministère Thiers (mars - octobre 1840) ====
La chute du ministère Soult impose au roi de faire appel à la principale figure de la gauche, [[Adolphe Thiers]], pour former le nouveau gouvernement. Il y a d'autant moins d'alternative à droite que [[François Guizot|Guizot]], nommé ambassadeur à [[Londres]] en remplacement de [[Horace Sébastiani|Sébastiani]], vient de partir pour le [[Royaume-Uni]].

[[Fichier:Thiers, Adolphe - 2.gif|thumb|upright|Thiers, vu par Honoré Daumier]]
Pour Thiers, c'est l'heure de la revanche : il compte profiter de ce retour aux affaires pour laver l'affront de [[1836]] et engager définitivement le régime dans la voie du [[parlementarisme]], avec un roi qui « règne mais ne gouverne pas », selon sa célèbre formule, et un ministère émanant de la majorité de la Chambre des députés et responsable devant elle. Ce n'est évidemment pas la conception de [[Louis-Philippe Ier|Louis-Philippe]]. Se noue ainsi la dernière manche d'une partie décisive entre les deux conceptions de la [[monarchie constitutionnelle]] et les deux lectures de la [[Charte de 1830|Charte]] qui se sont affrontées depuis [[1830]].

Le ministère est formé le {{1er mars}} [[1840]]. Thiers a feint d'offrir la présidence du Conseil au [[Victor de Broglie (1785-1870)|duc de Broglie]], puis au [[Nicolas Soult|maréchal Soult]], avant de « se dévouer » et de la prendre lui-même, conjointement avec les Affaires étrangères. L'équipe est jeune, 47 ans en moyenne, et son chef n'a lui-même que 42 ans, ce qui lui fait dire en riant qu'il a constitué un cabinet de « jeunes gens ».

{{Article détaillé|Gouvernement Adolphe Thiers (2)}}

D'emblée, les relations sont difficiles avec le roi, qui prend (ou feint de prendre) le retour de Thiers comme une véritable « humiliation ». Louis-Philippe met Thiers dans l'embarras en suggérant qu'on donne le bâton de [[maréchal de France|maréchal]] à Sébastiani, qui rentre de son ambassade de Londres : le chef du gouvernement est partagé entre son désir de faire plaisir à l'un de ses amis politiques et sa crainte que cette première mesure ne paraisse guidée par le même favoritisme qu'il avait reproché naguère aux « ministères du château ». Il décide donc d'attendre et le roi, selon [[Charles de Rémusat]], « n'insiste pas et prend la chose sèchement, comme un homme qui s'y attend et qui n'est pas fâché de constater dès le premier pas la résistance de ses ministres à ses vœux les plus naturels »<ref>{{harvsp|Antonetti|2002|p=811}}</ref>.

Au Parlement, en revanche, Thiers marque des points dans le débat sur les fonds secrets commencé le [[24 mars]], où il obtient la confiance par 246 voix contre 160.

===== Une politique conservatrice au service des intérêts de la bourgeoisie =====
Bien que classé au centre gauche, Thiers s'affirme, au cours de son second ministère, comme un conservateur étroit, tout dévoué à la protection des grands intérêts de la bourgeoisie. S'il fait voter la conversion des rentes, mesure chère à la gauche, par les députés, c'est avec la certitude qu'elle sera rejetée par la Chambre des pairs, qui y est résolument hostile<ref>Votée par 208 voix contre 163 par les députés, la conversion est repoussée par les pairs le {{date|30|mai|1840}} par 101 voix contre 46.</ref>.
* Le [[16 mai]], il fait passer à l'ordre du jour alors que la Chambre des députés examine les pétitions en faveur de la réforme électorale qui, à l'initiative des républicains, ont afflué sur son bureau depuis le début de l'année [[1840]]. Dans sa réponse au radical [[François Arago|Arago]], qui prononce un discours liant réforme électorale et réforme sociale<ref>Arago veut rassembler la gauche en liant la revendication du suffrage universel et les revendications [[socialisme|socialistes]], apparues dans le courant des années 1830, en faveur de « l'organisation du travail » et du « droit au travail » (ces deux thèmes donneront lieu à de vifs débats sous la [[Deuxième République (France)|Deuxième République]]). Aussi affirme-t-il que la réforme électorale, visant à établir le suffrage universel, doit précéder la réforme sociale, qu'il juge indispensable et urgente.</ref>, Thiers récuse aussi bien le [[suffrage universel]] « le principe le plus dangereux et le plus funeste qu'on puisse alléguer en présence d'une société »<ref>« On vous a parlé de souveraineté nationale, entendue comme souveraineté du nombre. C'est le principe le plus dangereux et le plus funeste qu'on puisse alléguer en présence d'une société. En langage constitutionnel, quand vous dites souveraineté nationale, vous dites la souveraineté du roi et des deux chambres, exprimant la souveraineté de la nation par des votes réguliers, par l'exercice de leurs droits constitutionnels. […] Quiconque, à la porte de cette assemblée, dit : « J'ai un droit », ment. Il n'y a de droits que ceux que la loi a reconnus. » {{harv|Antonetti|2002|p=813}}</ref>, que la démagogie de la réforme sociale<ref>« Je tiens pour dangereux, pour très dangereux, les hommes qui persuaderaient à ce peuple que ce n'est pas en travaillant, mais que c'est en se donnant certaines institutions qu'ils seront meilleurs, qu'ils seront plus heureux. […] Dites au peuple qu'en changeant les institutions politiques il aura le bien-être, vous le rendrez anarchiste et pas autre chose. » {{harv|Antonetti|2002|p=813}}</ref>.
* Le [[15 juin]], il obtient l'ajournement de la proposition du député conservateur de [[Versailles]], [[Ovide de Rémilly]] qui, reprenant une vieille revendication de la gauche, vise à interdire la nomination des députés à des fonctions publiques salariées pendant la durée de leur mandat<ref>Thiers doit maneuvrer habilement pour ne pas contredire de manière trop flagrante le soutien qu'il a naguère apporté à cette idée. Il laisse donc le [[Liste des ministres français des Travaux publics|ministre des Travaux publics]], [[Hippolyte François Jaubert|Jaubert]], jeune doctrinaire très hostile à la réforme, écrire à plusieurs députés conservateurs pour qu'ils se concertent pour enterrer la proposition. Une de ces lettres est publiée dans la presse, ce qui suscite un véritable tollé à gauche et vaut au cabinet, accusé de double jeu, de vives interpellations à la Chambre.</ref>.
* En septembre, alors que les problèmes sociaux liés à la crise économique qui sévit depuis [[1839]] provoquent depuis la fin août des grèves et des émeutes dans les secteurs du textile, de l'habillement et du bâtiment, auxquelles se joignent le [[7 septembre]] les ébénistes du [[faubourg Saint-Antoine]], qui commencent à dresser des barricades, Thiers envoie la [[Garde nationale (1831)|Garde nationale]] disperser sans ménagements les manifestants et applique dans toute leur rigueur les lois réprimant le délit de coalition.
* Thiers fait renouveler le privilège de la [[Banque de France]] jusqu'en [[1867]], à des conditions si avantageuses pour la Banque qu'elle fait frapper une médaille d'or commémorative.
* Plusieurs lois établissent des lignes transatlantiques de paquebots à vapeur dont l'exploitation est concédée à des compagnies subventionnées par l'État, ou accordent des prêts et des garanties à des compagnies de chemins de fer en difficulté.

===== Une quête hasardeuse de gloire =====
[[Fichier:Repatriación de las cenizas de Napoleón a bordo de la Belle Poule, por Eugène Isabey.jpg|thumb|upright=1.2|''Le transfert des cendres de Napoléon à bord de La Belle Poule, le 15 octobre 1840'' (Tableau par [[Eugène Isabey]]).]]
En même temps qu'il flatte la bourgeoisie conservatrice, Thiers caresse le désir de gloire d'une grande partie de la gauche. Le {{date|12|mai|1840}}, le ministre de l'Intérieur, [[Charles de Rémusat|Rémusat]], annonce à la Chambre des députés que le roi a décidé que les restes mortels de {{Napoléon Ier}} seront inhumés aux [[Hôtel des Invalides|Invalides]]. Avec l'accord du gouvernement britannique, le [[François d'Orléans (1818-1900)|prince de Joinville]] ira les chercher à [[Sainte-Hélène (île)|Sainte-Hélène]] sur un navire de guerre, la [[frégate (navire)|frégate]] ''la Belle-Poule'', et les ramènera en France.

{{Article détaillé|Honneurs rendus à la mémoire de Napoléon}}

L'annonce suscite un effet immense dans l'opinion, qui s'enflamme aussitôt de ferveur patriotique. Thiers y voit l'achèvement de l'entreprise de réhabilitation de la Révolution et de l'Empire qu'il a conduite avec son ''Histoire de la Révolution française'' et son ''Histoire du Consulat et de l'Empire'', tandis que Louis-Philippe – qui ne s'est laissé que difficilement convaincre de tenter une opération dont il mesure les risques – cherche à capter à son profit un peu de la gloire impériale en s'appropriant l'héritage symbolique de Napoléon comme il s'est approprié celui de la monarchie légitime à [[Château de Versailles|Versailles]].

Voulant profiter du mouvement de ferveur bonapartiste, le [[Napoléon III|prince Louis-Napoléon]] débarque à [[Boulogne-sur-Mer]], le {{date|6|août|1840}}, en compagnie de quelques comparses parmi lesquels un compagnon de {{Napoléon Ier}} à [[Sainte-Hélène (île)|Sainte-Hélène]], le [[Charles-Tristan de Montholon|général de Montholon]]<ref>Personnage pour le moins douteux, fils adoptif du non moins douteux [[Charles-Louis Huguet de Sémonville|marquis de Sémonville]], [[Charles-Tristan de Montholon]] est un agent double que le gouvernement français a employé, à [[Londres]], pour surveiller le prince Louis-Napoléon. Mais Montholon a trompé Thiers en lui faisant croire que l'opération aurait lieu à [[Metz]].</ref>, avec l'espoir de rallier le [[42e régiment d'infanterie de ligne|{{42e}} régiment de ligne]]. L'opération est un échec total : Louis-Napoléon et ses complices sont arrêtés et incarcérés au [[fort de Ham]]. Leur procès se tient devant la Chambre des pairs du [[28 septembre]] au [[6 octobre]], dans une indifférence générale<ref>L'opinion publique se passionne bien davantage pour le procès, devant la [[Cour d'assises (France)|cour d'assises]] de [[Tulle]], de [[Marie Lafarge|{{Mme}} Lafarge]], accusée d'avoir empoisonné son mari, et condamnée aux travaux forcés à perpétuité le [[19 septembre]].</ref>. Le prince, défendu par le célèbre avocat légitimiste [[Pierre-Antoine Berryer|Berryer]], est condamné à l'emprisonnement perpétuel<ref>Sur 312 pairs, 160 s'abstiennent et 152 votent l'emprisonnement perpétuel. « On ne tue pas les fous, soit ! mais on les enferme », affirme ''[[Le Journal des débats]]'' {{harv|Antonetti|2002|p=818}}</ref>.

En [[Algérie]], face aux raids meurtriers lancés par [[Abd el-Kader]] en représailles à la suite de la chevauchée des [[Portes de Fer (Algérie)|Portes de Fer]] réalisée par le [[Sylvain Charles Valée|maréchal Valée]] et le [[Ferdinand-Philippe d'Orléans|duc d'Orléans]] à l'automne [[1839]], Thiers pousse en faveur d'une colonisation de l'intérieur du territoire jusqu'aux limites du désert. Il convainc le roi, qui voit dans l'Algérie un théâtre idéal pour permettre à ses fils de couvrir sa dynastie de gloire, du bien-fondé de cette orientation et le persuade d'envoyer sur place, comme [[Liste des gouverneurs d'Algérie|gouverneur général]], le [[Thomas-Robert Bugeaud|général Bugeaud]]<ref>Bugeaud ne sera effectivement nommé que le {{date|29|décembre|1840}}, quelques mois après la chute de Thiers.</ref>.
{{Article détaillé|Bataille de San Juan de Ulúa}}

===== Les affaires d'Orient, prétexte de la chute =====
En [[Proche-Orient|Orient]], Thiers soutient le pacha d'Égypte, [[Méhémet-Ali]], dans son ambition de constituer un vaste Empire arabe de l'[[Égypte]] à la [[Syrie]], et cherche à l'amener à conclure un accord avec l'Empire ottoman, sous l'égide de la France, et à l'insu des quatre autres puissances européennes ([[Royaume-Uni]], [[Autriche]], [[Prusse]] et [[Russie]]). Mais le ministre des Affaires étrangères britanniques, [[Henry John Temple|Palmerston]], informé de cette négociation, s'empresse de négocier entre les quatre puissances un traité qui règle la question d'Orient en mettant la France devant le fait accompli : conclu le {{date|15|juillet|1840}}, le traité confirme à Méhémet-Ali le pachalik héréditaire d'Égypte et celui d'[[Acre (Israël)|Acre]], mais seulement à titre viager ; encore ces concessions sont-elles subordonnées à une acceptation expresse, faute de quoi le pacha se voit menacé de perdre jusqu'à l'Égypte.

Lorsqu'elle est révélée en France, cette convention provoque une explosion de colère patriotique : la France se retrouve écartée du règlement du sort d'une zone où elle exerce traditionnellement son influence, alors même que la Prusse, qui n'y a aucun intérêt, y est associée. Louis-Philippe fait mine de se joindre à la protestation générale, mais il sait qu'il tient, avec cette affaire, l'occasion de se débarrasser de Thiers<ref>« Pour votre gouverne particulière, dit-il au [[Louis de Sainte-Aulaire|comte de Sainte-Aulaire]], qui part rejoindre son ambassade à [[Vienne (Autriche)|Vienne]], il faut que vous sachiez que je ne me laisserai pas entraîner trop loin par mon petit ministre [Thiers]. Au fond, il veut la guerre et moi je ne la veux pas ; et quand il ne me laissera plus d'autre ressource, je le briserai plutôt que de rompre avec toute l'Europe. » {{harv|Antonetti|2002|p=823}}</ref>.

Ce dernier flatte les sentiments patriotiques de l'opinion en décrétant, le [[29 juillet]], la mobilisation des soldats des classes [[1836]] à [[1839]] et en faisant commencer, le [[13 septembre]], les travaux des [[Enceintes de Paris|fortifications de Paris]]. Mais la France reste inerte et doit ravaler son humiliation lorsque, le [[2 octobre]], la flotte britannique bombarde et prend Beyrouth, victoire aussitôt suivie de la destitution de Méhémet-Ali par le sultan.

Au terme de longues tractations entre le roi et Thiers, un compromis est trouvé le [[7 octobre]] : la France renonce à soutenir les prétentions de Méhémet-Ali sur la Syrie mais déclare aux puissances européennes qu'elle ne permettrait pas qu'il soit touché à l'Égypte. Ces principes sont consignés dans une note datée du [[8 octobre]] adressée aux quatre puissances signataires du traité du [[15 juillet]]. Celle-ci s'avère un succès diplomatique : le Royaume-Uni doit en définitive reconnaître la souveraineté héréditaire de Méhémet-Ali sur l'Égypte et renoncer à la déchéance organisée par ce traité. La France a obtenu le retour à la situation de [[1832]].

Néanmoins, après cet épisode, la fracture est irrémédiable entre le roi et son ministre. Le [[29 octobre]], lorsque [[Charles de Rémusat]] présente au Conseil des ministres le projet de discours du trône, préparé par [[Hippolyte Passy]], Louis-Philippe le trouve trop belliqueux. Après une brève discussion, Thiers et ses collègues remettent leur démission que le roi accepte aussitôt. Dès le lendemain, Louis-Philippe fait mander [[Nicolas Soult|Soult]] et [[François Guizot|Guizot]] pour qu'ils regagnent Paris au plus vite.

== Le système Guizot ==
En appelant au pouvoir [[François Guizot|Guizot]] et les [[Doctrinaires (politique)|doctrinaires]], c'est-à-dire le centre droit après le centre gauche de [[Adolphe Thiers|Thiers]], [[Louis-Philippe Ier|Louis-Philippe]] est sans doute loin de penser que cette combinaison va durer jusqu'à la fin de son règne. Sans doute imagine-t-il plutôt qu'au bout de quelques mois, il pourra revenir à [[Louis Mathieu Molé|Molé]]. Or, l'équipe ainsi constituée va se révéler soudée autour de la forte personnalité de Guizot et celui-ci ne va pas tarder à gagner la confiance du roi jusqu'à devenir son Premier ministre préféré, lui faisant oublier Molé.

[[Fichier:Ministère Soult.jpg|thumb|upright=1.2|''Conseil des ministres au palais des Tuileries : le maréchal Soult présente à Louis-Philippe la loi de Régence, le {{date|15|août|1842}}. Guizot se tient à gauche.''(Tableau de Claude Jacquand (1803-1878), dit [[Claudius Jacquand]], 1844).]]
Guizot, qui a quitté [[Londres]]<ref>où il avait été envoyé comme ambassadeur de France</ref> le [[25 octobre]], est arrivé le lendemain à Paris. Il a subordonné son retour aux affaires à la possibilité de composer le ministère comme il l'entend. Avec habileté, il se borne à prendre pour lui-même le portefeuille des Affaires étrangères et laisse la présidence nominale du ministère au [[Nicolas Soult|maréchal Soult]] : ceci satisfait le roi et la famille royale sans gêner en rien Guizot sur l'essentiel, car le maréchal vieillissant est prêt, pour peu qu'on lui donne quelques satisfactions de détail, à le laisser gouverner comme il l'entend. Le centre gauche ayant refusé de rester au gouvernement, celui-ci ne comprend que des conservateurs, du centre ministériel au centre droit doctrinaire.

{{Article détaillé|Gouvernement Nicolas Jean-de-Dieu Soult (3)}}

La [[colonne de Juillet]] est érigée en mémoire des [[Trois Glorieuses]]. La question d'Orient est réglée par la [[Convention des Détroits]] en 1841, ce qui permet un premier rapprochement franco-britannique. Cela favorise la colonisation de l'[[Algérie]] conquise par [[Charles X de France|Charles X]].

Le gouvernement est orléaniste, ainsi que la Chambre. Celle-ci est divisée entre :
* La gauche dynastique d'[[Odilon Barrot]], qui réclame l'élargissement du cens à la petite bourgeoisie, tendance du journal ''Le Siècle''
* Le centre gauche d'[[Adolphe Thiers]], qui veut limiter le pouvoir du Roi, dirige le journal ''Le Constitutionnel''
* Les Conservateurs, dirigés par [[François Guizot|Guizot]] et [[Mathieu Molé]], veulent préserver le régime, et défendent leurs idées dans ''Le Journal Des Débats'' et ''La Presse''

Guizot s'appuie sur le parti conservateur et une opposition divisée, situation accentuée par la dissolution de la Chambre qui renforce les partisans du roi. Ainsi, il considère que toute réforme s'avère être un danger et est inutile. Aussi refuse-t-il toute réforme qui abaisserait le cens, et accepte encore moins l'idée du [[suffrage universel]] direct. Selon lui, la monarchie doit favoriser la « classe moyenne », les notables. Ceux-ci sont réunis par la propriété foncière, une « morale » liée à l'argent, le travail et l'épargne. « Enrichissez vous par le travail et par l'épargne et ainsi vous serez électeur ! »{{citation nécessaire}}. Guizot s'acharne à favoriser les propriétaires et à conserver le régime. Il est aidé par le décollage économique du pays de 1840 à 1846. Avec un rythme de croissance de 3,5 % par an, les revenus agricoles augmentent, ainsi que le pouvoir d'achat, qui entraîne une hausse de la production industrielle. Le réseau des transports connaît une croissance spectaculaire. En 1842, une loi organise le réseau ferré national, qui passe de 600 à {{formatnum:1850}} km.

== La paupérisation ouvrière menace le régime ==

L'époque est caractérisée par l'éclosion d'un nouveau phénomène social baptisé [[paupérisme]]. Lié à l'industrialisation et à la concentration ouvrière, il s'agit de la pauvreté durable et massive des ouvriers, qui ne peuvent améliorer leur niveau de vie. De plus, les anciennes solidarités de congrégations caractéristiques de l'Ancien Régime ont disparu. La situation ouvrière est catastrophique. Journée de 14 heures, salaires à 0,20 franc par jour, travail incessant, sans jour de congé dans la semaine ni même dans l'année, et ce uniquement pour subvenir à leurs besoins vitaux, les ouvriers sont à la merci des patrons. Les {{formatnum:250000}} mendiants et les 3 millions de Français inscrits aux bureaux de bienfaisance constituent un réservoir d'insatisfaits, face à une assistance publique inexistante. Les bourgeois en sont conscients et [[Karl Marx]] entame à cette époque sa théorisation du « [[capitalisme]] ». Cette situation aboutit en 1841 à la seule loi sociale du régime, qui interdit le travail aux enfants de moins de 8 ans et le travail de nuit pour ceux de moins de 13 ans, loi rarement appliquée. Les chrétiens imaginent une « économie charitable »{{référence nécessaire}}. Les libéraux entrevoient une solution dans le libre-échange et la fin des monopoles d'alors. [[Alexis de Tocqueville]] publie ''[[De la démocratie en Amérique]]''. Les socialistes utopiques imaginent des organisations sociales originales, inspirées de [[Claude Henri de Rouvroy de Saint-Simon|Claude-Henri de Saint-Simon]] et de [[Charles Fourier]]. [[Auguste Blanqui|Blanqui]] prône quant à lui la révolution puis la dictature socialiste. L'opposition trouve à s'exprimer lors de la crise sociale de [[1846]].

== La crise de la monarchie ==
En [[1846]], la récolte est très mauvaise. L'augmentation des prix du blé, qui atteindra un record durant l'été [[1847]], base de l'alimentation, provoque la disette et ce dernier ne peut être remplacé par la pomme de terre car il y a à l'époque beaucoup de maladies liée à la pomme de terre. Pour pallier les disettes, le gouvernement fait importer du blé de la [[Russie impériale]]. Le pouvoir d'achat baisse. Le marché de consommation intérieur ne progresse plus, entraînant une crise industrielle de surproduction. Immédiatement les patrons s'adaptent en renvoyant leurs ouvriers. Aussitôt, on assiste à un retrait massif de l'épargne populaire, le système bancaire est en crise. Les faillites se multiplient, les cours de la [[Bourse (économie)|Bourse]] chutent. L'État réagit en important du blé russe, ce qui rend la [[balance commerciale]] négative. Les grands travaux stoppent. La spéculation trop grande sur le marché des chemins de fers provoque un éclatement de la "bulle financière" et ruine des épargnants.

A cette crise économique s'ajoute une crise politique. En 1847, le roi, qui a 75 ans, devient de plus en plus autoritaire et oublie qu'il n'est là que pour représenter la continuité de l'Etat et, selon une fameuse formule de [[Adolphe Thiers|Thiers]], qu'il n'est que là pour régner et non pas pour gouverner. [[François Guizot|Guizot]], lui, est en totale confiance et n'entend pas les protestations qui viennent pourtant parfois de son propre camp. Quelques députés du parti de la résistance proposent à Guizot de légères réformes dont le gouvernement pourrait se contenter et qui contenteraient la gauche orléaniste, exclue du pouvoir depuis 1840, mais Guizot reste inflexible et refuse de changer de ligne politique. Il se met ainsi à dos une partie de l'oligarchie bourgeoise, pourtant base fondatrice du régime, et mène le régime vers sa chute désormais inévitable.

Pour ne rien arranger, la France est également dans une situation internationale assez épineuse en particulier avec le [[Royaume-Uni]]. À la suite de l'affaire Pritchard où les Français violèrent l'aire d'influence britannique, Guizot, pacifiste convaincu, multiplie les discussions pour éviter une guerre. L'[[Entente cordiale|Entente Cordiale]] est signée entre les deux pays. Ce traité d'amitié lui est fortement reproché, en effet, la majeure partie de la population est alors anti-britannique et trouve en Guizot un anglophile convaincu, l'image de l'homme d'Etat est écorchée.

Les manifestations ouvrières se développent. Un phénomène se développe, les ouvriers cassent des machines car ils les tiennent pour responsable de leur perte de travail: c'est le [[luddisme]]. En 1847, émeutes du [[Buzançais]]. À Roubaix, 60 % des ouvriers sont au chômage. Les affaires de corruption ([[Houillères et saline de Gouhenans#Scandale Teste-Cubières|affaire Teste-Cubières]]) et les scandales ([[affaire Choiseul-Praslin]]) entachent le régime.

{{Article détaillé|Scandales sous la monarchie de Juillet}}

Les associations étant encadrées et les rassemblements publics interdits à partir de 1835, l'opposition est bloquée. Pour contourner cette loi, les opposants suivent les enterrements civils de certains d'entre eux, qui se transforment en manifestations publiques. Les fêtes de famille et les banquets servent également de prétexte aux rassemblements. La [[campagne des banquets]], à la fin du régime, se déroule dans toutes les grandes villes de France. Louis-Philippe durcit son discours et interdit le banquet de clôture le 14 janvier 1848. Le banquet, repoussé au 22 février, va provoquer la [[Révolution française de 1848|révolution de 1848]].

== La chute du régime ==
[[File:Claudet, Antoine (1797-1867) - Maria Amelia di Borbone-Napoli (1782-1866) Regina dei francesi.jpg|thumb|la reine Marie-Amélie en exil à la fin de sa vie.]]

{{Article détaillé|Révolution française de 1848}}
Après une agitation, le roi remplace le ministre [[François Guizot]] par [[Adolphe Thiers]] qui propose la répression. Reçu avec hostilité par la troupe stationnée au [[Place du Carrousel|Carrousel]], devant le [[palais des Tuileries]], le roi se résout à abdiquer en faveur de son petit-fils, [[Philippe d'Orléans (1838-1894)]], en confiant la régence à sa bru, [[Hélène de Mecklembourg-Schwerin]], mais en vain. La [[Deuxième République (France)|II{{e}} République]] est proclamée le 24 février devant la [[colonne de la Bastille]].

Louis-Philippe, qui se voulait être le roi citoyen à l'écoute du pays réel, appelé au trône et lié au pays par un contrat dont il tirait sa légitimité, n'a pas su — ou voulu — comprendre que le peuple français désirait élargir le corps électoral, pour les plus frileux politiquement en baissant le cens, pour les plus progressistes en établissant le suffrage universel.
{{Clr}}

== Notes et références ==
{{Références|colonnes=2}}

== Voir aussi ==
=== Bibliographie ===
* {{en}} Edward Berenson, ''Populist Religion and Left-wing Politics in France, 1830-1852'', Princeton University Press, 1984, 308 p.
* [[Adèle d'Osmond]], comtesse [[Benoît de Boigne|de Boigne]], ''Mémoires de la comtesse de Boigne née d'Osmond'', publiés pour la première fois en [[1907]] : chronique irremplaçable de la vie publique sous la [[Restauration française|Restauration]] et la monarchie de Juillet.
* {{en}} Hugh Collongham, ''The July Monarchy : a Political History of France (1830-1848)'', London, Longman, 468 p.
* [[Patrick Harismendy]], ''La France des années 1830 et l'esprit de réforme'', Presses Universitaires de Rennes, 2006.
* {{Ouvrage|langue=fr|prénom1=|nom1=de Broglie|lien auteur1=Gabriel de Broglie|titre=La monarchie de Juillet|éditeur=Fayard|année=2011|pages totales=464|isbn=9782213662503}}
* [[Louis Blanc]], ''Histoire de dix ans 1830-1840'', 5 tomes, Paris, Pagnerre 1842 [http://gallica.bnf.fr/Search?adva=1&adv=1&tri=&t_relation=%22cb372562806%22&lang=fr Gallica]

=== Sources ===
* {{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Guy|nom1=Antonetti|lien auteur1=Guy Antonetti|titre=Louis-Philippe|sous-titre=|lien titre=|numéro d'édition=|éditeur=Librairie Arthème Fayard,|lien éditeur=|lieu=Paris|année=2002|volume=|tome=|pages totales=|passage=|isbn=2-213-59222-5|lire en ligne=|consulté le=|plume=oui}}
* Arnaud Coutant, ''Tocqueville et la Constitution democratique'', Mare et Martin, 2009, 680 p.
* Lucien Jaume, ''L'Individu effacé'', Fayard, 1995
* Hervé Robert, ''La monarchie de Juillet'', Collection Que sais-je ?, Presses Universitaires de France (PUF), 2000 {{ISBN|213046517X}}
* Olivier Serres, ''Étude d'une mise en œuvre de l'article 45 de la Charte de 1830 : les pétitions pour la réforme électorale sous la monarchie de Juillet'', thèse, Paris, 2003, 479 p.
* Paul Thureau-Dangin, ''Histoire de la monarchie de Juillet'', Paris, Plon, 1904-1914, 7 volumes in-8

=== Articles connexes ===
* [[Trois Glorieuses]]
* [[Hésitation de 1830]]
* [[Lieutenance générale de Louis-Philippe d'Orléans (1830)]]
* [[Grandes lois sous la monarchie de Juillet]]
* [[Républicains pendant la monarchie de Juillet]]
* [[Politique extérieure de la France sous la monarchie de Juillet]]
* [[Algérie française]]
* [[Campagne des Banquets]]
* [[Révolution française de 1848|Révolution de février 1848]]
* [[Liste des émissions de franc français sous la monarchie de Juillet]]

=== Liens externes ===
# [http://hypo.ge-dip.etat-ge.ch/www/cliotexte/html/france.1830.1848.html Textes sur la monarchie de Juillet, de 1830 à 1848, en France]

{{Succession/Début
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}}
{{Succession/Ligne
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Version du 12 avril 2016 à 15:52

Royaume de France
Monarchie de Juillet

1830 – 1848
17 ans, 6 mois et 15 jours

Drapeau
Drapeau du royaume de France
Blason
Armoiries du royaume France
Hymne La Parisienne
Description de cette image, également commentée ci-après
La France en 1839.
Informations générales
Statut Monarchie constitutionnelle
Capitale Paris
Langue(s) Français
Religion Catholicisme
Monnaie Franc français
Histoire et événements
Proclamation de la monarchie de Juillet, fondée sur la Charte de 1830. Louis-Philippe Ier n’est pas sacré roi de France mais intronisé roi des Français
22-25 février 1848 Révolution

Abdication de Louis-Philippe Ier. Proclamation de la

IIe République
roi des Français
1830-1848 Louis-Philippe d’Orléans

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