Sukhothaï

ville thaïlandaise

Sukhothaï ou Sukothaï (thaï : สุโขทัย, API : [sùʔkʰǒːtʰaj]) est la capitale du premier royaume thaï qui s'est affranchi de l'Empire khmer d'Angkor Vat. Elle a été fondée en 1238[1].

Ville historique de Sukhothaï et villes historiques associées *
Image illustrative de l’article Sukhothaï
Bouddha géant assis de l'Ubosot (Bot) de Wat Mahathat
Coordonnées 17° 00′ 26″ nord, 99° 47′ 23″ est
Pays Drapeau de la Thaïlande Thaïlande
Type Culturel
Critères (i) (iii)
Numéro
d’identification
574
Région Asie et Pacifique **
Année d’inscription 1991 (15e session)
Image illustrative de l’article Sukhothaï
Plan du site de Sukhothaï
* Descriptif officiel UNESCO
** Classification UNESCO

Au XIVe siècle, à son apogée sous le règne de Ramkhamhaeng, Sukothaï aurait abrité au moins 180 temples et peut-être, par déduction, jusqu'à 300 000 habitants[2]. Elle tomba peu à peu à l'abandon à la fin du XVe siècle ou au début du XVIe siècle.

Sukhothaï est plus célèbre pour son art[3] que pour ses réalisations politiques.

Les ruines de la vieille ville de Sukhothaï conjointement avec les vestiges des deux autres villes "associées" Sri Satchanalai[4] et Kamphaeng Phet (français : Parc historique de Sukothaï, thai : อุทยานประวัติศาสตร์ สุโขทัย, API : [ʔùttʰáʔjaːn pràʔwàttìʔsàːt sùʔkʰǒːtʰaj]) sont inscrits au patrimoine mondial de l'humanité de L'Unesco[5],[6],[7].

Sukhothaï se trouve à environ 450 kilomètres au nord de Bangkok

Étymologie

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Le nom Sukhothaï signifie « Aube de la félicité » en pali.

Géographie

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Tout au nord de la plaine centrale de la Thaïlande et au bord de la rivière Yom, l'immense cité de Sukhothaï au plan rectangulaire régulier de 1800 m sur 1400 m dispose d'une triple ceinture de murs de latérite et de terre percée de quatre portes en chicane et elle abrite des réservoirs, des étangs et des canaux creusés par les hommes[8],[9].

Histoire

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Sukhothaï fut la capitale du premier royaume thaïlandais suzerain sur le bassin du fleuve Chao Phraya, à l'ouest sur la baie du Bengale et sur la péninsule entière. Ce royaume, après s'être affranchi de l'empire khmer, parvint à préserver son indépendance de 1250 jusqu'au XVe siècle. En 1378, Sukhothaï devint tributaire de l'État d'Ayutthaya.

À la fin du XIIIe siècle, dans les contrées voisines, les Mongols attaquent le Viêt Nam et l'Empire Khmer et saccagent la magnifique cité birmane de Pagan (1287). Sukhotaï se déclare leur vassale et profite de la situation. Ramkhamhaeng, dit « Rama le Fort », monarque respecté pour son équité et sa sagesse, la porte à son apogée entre 1275 et 1317. L'original de sa stèle, portant les plus anciennes inscriptions en alphabet thaï, se trouve au musée national de Bangkok.

Patrimoine de Sukhothaï

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Parc historique de Sukhothaï.

Musées

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  • Monument à la gloire de Ramkhamhaeng
  • Musée National de Ramkhamhaeng : c'est un des plus riches musées de Thaïlande. On y voit des cauri (porcelaine-monnaie), des statues de divinités hindoues et de Bouddha, des statuettes de mères à l'enfant, une copie de la « stèle de Ramkhamhaeng » (célèbre pour ses inscriptions), des bijoux, des porcelaines chinoise Yuan, Ming et Quing, de la porcelaine céladon d'usage domestique et de la céramique Sangkhalok etc. À noter cependant qu'une grande partie des objets retrouvés à Sukhothaï se trouve actuellement au Musée national de Bangkok.
 
Panneau d'information sur les mudra et les postures du Bouddha au Musée national de Ramkhamhaeng à Sukhothaï.

Légende du panneau d'information, ici à droite: « mudra et postures du Bouddha »

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  1. Geste de la prise de la terre à témoin (Maravijaya) ;
  2. Mudra de la méditation (samadhi) ;
  3. Méditation dans le pavillon de cristal ;
  4. Protégé par le nāga Muchalinda ;
  5. Geste de l'absence de crainte (ici, arrêtant les inondations) ;
  6. Geste de l'absence de crainte (ici, arrêtant les maladies) ;
  7. Marchant dans une attitude noble et sereine ;
  8. Révélant les Trois Mondes ;
  9. Méditant dans la posture du diamant ;
  10. Attitude royale ;
  11. Soumettant Mara et faisant le mudra de la prise de la terre à témoin (Bhûmisparsha-mudrā), tout en étant protégé par les nāga ;
  12. Enseignant le Dharma ;
  13. Couché, entrant dans le Nirvāṇa.

Anciens temples

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Carte du site de Sukhothaï pour les touristes

La vieille cité de Sukhothaï est aujourd'hui en ruine. Le grand palais en bois de ses rois a disparu[10] ainsi que les milliers de maisons en bambou, bois et palme. Toutefois, la ville possède encore de nombreux vestiges de temples construits en latérite et en brique, autrefois recouverts de stuc alors peint et parfois doré. Le stuc s'est dégradé au fil du temps et ne recouvre aujourd'hui plus qu'une infime proportion des constructions. La plupart des statues retrouvées dans les ruines ont été remplacées par des répliques de facture artisanale ; et la brique sous-jacente, de couleur rouge, est aujourd'hui à nu.

Le temple bouddhiste à l'époque de Sukhothaï, comme plus tard celui à l'époque d'Ayutthaya, est orienté sur un axe est-ouest : son cœur est un haut chedi (stupa ; reliquaire) situé à l'ouest associé à un grand wihan (vihan ; salle d'assemblée de tous les croyants, religieux et laïcs) situé à l'est. L'ubosot (bot ; hall d'ordination, salle d'assemblée réservée uniquement aux religieux, c'est-à-dire aux bonzes et aux novices) ressemble à un wihan en plus petit, caractérisé par ses bornes sacrées, et il est placé généralement en position très excentré.

La plupart des édifices qui ont été découverts, et pour partie relevés, se trouvent à l'intérieur des murs de la cité :

  • Wat Mahathat (วัดมหาธาตุ ; temple de la grande relique), le plus célèbre et le plus remarque temple bouddhiste de cette époque. Il a été fondé pendant le règne d'Indradit, le premier roi de Sukhothaï, entre 1238 et 1270 puis restauré en 1345 par le futur roi Li Thai. Il se loge dans un carré de 200 m sur 200 m protégé par un mur de brique et entouré de douves. Cet ensemble montre l'extrême variété de l'architecture de Sukhothaï. Il est dominé par le grand chedi central coiffé d'une flamme en forme de fleur de lotus en bouton. Ce grand chedi repose sur une vieille tour khmère ornée à sa base d'une frise en stuc représentant une procession de disciples du Bouddha. Il est flanqué de quatre tours-reliquaires et cantonné de quatre chedi secondaires, auquel s'adosse à l'est le principal wihan avec un Bouddha géant assis, le tout encadré par deux Bouddha géants nichés debout dans leur mondop. On y dénombre en plus près de 185 chedi en forme de cloche, caractéristique de l'art cinghalais, ou en forme de bouton de lotus, caractéristique de l'art de Sukhothaï ; et on y trouve une dizaine de wihan secondaires et un ubosot (bot) excentré dans le secteur nord et isolé entre deux bassins ;
  • Wat Si Sawai (วัดศรีสวาย), un sanctuaire brahmanique khmer du XIIe siècle dédié au dieu hindou Shiva transformé ensuite en temple-monastère bouddhiste par les thaïs. Ses trois prang en latérite caractéristiques ont été complété avec des briques et stuqués au XVe siècle et ils ont gardé certaines de leurs décorations en stuc d'origine ;
  • Wat Sa Si (วัดสระศรี ; temple de l'étang sacré), un temple-monastère bouddhiste construit sur un îlot au milieu d'un étang. Le chedi principal de type cinghalais en forme de cloche et le wihan principal sont bien sûr orienté sur l'axe est-ouest ; l'ubosot est lui aussi aligné sur l'axe du levant au ponant de l'édifice mais il est nettement séparé du cœur du wat car il est isolé sur un autre petit îlot[11];
  • Wat Traphang Thong (วัดตระพังทอง ; temple de l'étang doré), un temple-monastère bouddhiste du XIIIe siècle construit sur un îlot au milieu d'un étang avec son chedi de type cinghalais en forme de cloche. Son mondop abrite une empreinte de Bouddha taillée dans un bloc de schiste gris foncé qui aurait été découverte en 1359 par le roi Li Thai. Son usobot (bot) a été construit en 1940 et des bonzes y résident encore de nos jours ;
  • Wat Traphang Ngoen (วัดตระพังเงิน ; temple de l'étang argenté), un temple-monastère bouddhiste du XIIIe siècle construit sur un îlot au milieu d'un étang avec son chedi de type de Sukothaï en forme de bouton de lotus dont les niches aux quatre points cardinaux abritent des Bouddhas debout...

Quelques édifices hors les murs ont aussi été pour partie relevés.

  • Wat Si Chum (วัดศรีชุม) : c'est l'un des plus impressionnant sanctuaire bouddhiste de la région avec son grand mondop (tour reliquaire de 32 m de côté et 15 m de hauteur) qui abrite un Bouddha assis en stuc de 14,7 m de haut et de 11,3 m d'un genou à l'autre. Ce temple a été construit à la fin du XIVe siècle[12] par le roi Mahadharmaraja II. Son mondop a été restauré par les Beaux-Arts en 1956. Un escalier secret aménagé dans l'épaisseur du mur sud du mondop permet d'atteindre le sommet de l'édifice, dans un espace situé derrière la tête du Bouddha. Selon la légende, le roi parlait à ses fidèles et haranguait ses troupes caché au sommet du mondop, sa voix semblant par un phénomène d'écho provenir directement de la bouche du Bouddha assis ; la voûte de la cage d'escalier était revêtue de plus de 50 plaques de schiste gravées illustrant des épisodes du Jataka (on peut voir certaines de ces plaques actuellement au musée national de Ramkhamhaeng à Sukothaï) ;
  • Wat Phra Phai Luang (วัดพระพายหลวง) : ce sanctuaire brahmanique a été érigé à la fin du XIIe siècle par le roi khmer Jayavarman II et il se trouvait au centre de la ville de Sukhothai avant la prise de pouvoir des thaïs. Il ne subsistait qu'un seul des trois prang khmer originels (celui du nord qui a conservé une partie de ses stucs d'origine) lorsque les thaïs transformèrent ce sanctuaire en un temple-monastère bouddhiste. La plupart des Bouddhas en stuc du XIIIe qui décoraient cet édifice ont été volés ;
  • Wat Chang Lom (ดช้างล้อม) : ce temple doit son nom aux 32 statues de demi-corps d'éléphants qui entourent la base de la terrasse sur laquelle repose le chedi principal de type cinghalais en forme de cloche (A noter que l'on trouve un autre Wat Chang Lom à Sri Satchanalaï) ;
  • et bien d'autres encore...

... et de nombreux autres bâtiments, disséminés dans les rizières environnantes, attendent d'être dégagés de l'enveloppe de terre qui les recouvre.

 
Statue de Wat Si Chum dans le parc historique. Septembre 2012.

Sri Satchanalai

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Ruines du Wat Chedi Chet Taeo avec son stupa principal, une tour dotée d'une couverture en bouton de lotus.

Bâtie sur les rives de la Yom, à une soixantaine de kilomètres au nord de Sukhothaï, Sri Satchanalai (thaï : ศรีสัชนาลัย) était la principale ville satellite du royaume. Les rois de Sukhothaï y envoyaient gouverner les princes de sang appelés à leur succéder un jour, fort de cette expérience d'administration. Cette cité était un centre de potiers et les fouilles ont permis de dégager les fours souterrains. Dans les faubourgs de la ville, on produisait la célèbre céramique dite Sangkhalok, du nom que portait la région au début de la période des rois d'Ayutthaya. Abandonnés à la fin du XVIIIe siècle, bon nombre de ses monuments ont été dégagés et restaurés dans le cadre des programmes dirigés par Khun Nikom.

Kamphaeng Phet

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L'ancienne cité de Kamphaeng Phet (thaï : กำแพงเพชร, API : [kampʰɛːŋ pʰét], litt . « muraille de diamant ») située à quelque 80 km au sud de Sukhothaï conserve de nombreux vestiges de son passé militaire : forteresses, portes, murailles, tours de guet; mais aussi que des dizaines de temples datant du XIIIe au XVe siècle[14] : Wat Phra Kaeo, Wat Phra That, Wat Phra Si Iriyabot, Wat Phra Chang Rop, etc.

 
Statue d'éléphant (copie) supportant la base du chedi de Wat Chang Rop.

Faune et flore de Sukothaï

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Notes et références

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  1. Xavier Galland, « Naissance d'un royaume », sur gavroche-thailande.com, Gavroche Thaïlande,
  2. Jean-Claude Pomonti, « Sukhothaï, la rescapée magnifique », sur lemonde.fr, Le Monde,
  3. Jean Boisselier, Encyclopédia Universalis, Thésaurus PLANN-ZYRIA, (lire en ligne), Sukhothaï (art de) page 1849
  4. (en) Pongpet Mekloy, « A royal visit, and ruins restored », sur bangkokpost.com, Bangkok Post,
  5. UNESCO, « Ville historique de Sukhothaï et villes historiques associées », sur whc.unesco.org (consulté le )
  6. (en) Ministry of Culture (Thailand), « Historic town of Sukhothai and associated historic town », sur 164.115.22.96 (consulté le )
  7. Xavier Galland, « Que reste-t-il de Sukhothaï ? : Un joli parc, il faut qu'on y aille... », Gavroche Thaïlande, no 184,‎ , p. 31 (16) (lire en ligne [PDF])
  8. Encyclopédia Universalis, 15, , Sukhothaï (art de) pages 1036 à 1040
  9. Jean-Claude Pomonti, « Ils veulent sauver les trésors de l'Histoire », Géo, no 187,‎ , p. 126-132 (ISSN 0220-8245)
  10. « Les plus belles destinations de la planète (14/24) : Sukhothaï », sur lemonde.fr, Le Monde,
  11. Pierre Pichard, « Le hall d'ordination dans le monastère thaï », Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient (BEFEO), nos 87-1,‎ , p. 125-149 (lire en ligne)
  12. (en + fr + de + es + it + nl) Heidi Fröhlisch, Katja Sassmanshausen et Thilo Scheu, Thaïlande, Éditions Place des victoires, , 524 p. (ISBN 978-2-8099-1646-1), Wat Si Chum pages 120 et 121
  13. Pierre Pichard, « Le hall d'ordination dans le monastère thaï », bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient (BEFEO), nos 87-1,‎ , p. 128 (Fig. 3) (lire en ligne)
  14. Heidi Fröhlisch, Katja Sassmanshausen et Thilo Scheu, Thaïlande, Éditions Place des victoires, , 524 p. (ISBN 978-2-809-91646-1), p. 130-131 (Parc historique de Kamphaeng Phet)

Voir aussi

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Articles connexes

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