Souleymane Cissé
Souleymane Cissé, né le à Bamako, est un réalisateur malien.
Biographie
modifierEnfance et études
modifierSouleymane Cissé est né dans une modeste famille de huit enfants[1],[2]. Il est très tôt passionné de cinéma. Dès l’âge de 7 ans, il va très régulièrement au cinéma en compagnie de ses grands frères et de leurs amis. Il fait des études secondaires à Dakar au Sénégal et revient dans son pays en 1960, lors de l’éclatement de la Fédération du Mali et de l'indépendance de celui-ci. Il adhère alors à des mouvements de jeunesse et commence à projeter à la Maison des Jeunes de Bamako des films qu'il commente ensuite au public[2].
C'est un film documentaire sur l’arrestation de Patrice Lumumba qui déclenche réellement sa volonté de faire du cinéma. En 1963, il obtient une bourse pour suivre un stage de projectionniste puis des études de cinéma à l'Institut des Hautes Études Supérieures de la Cinématographie (VGIK) de Moscou. Il en sort diplômé en 1969[3].
Carrière
modifierEn 1970, rentré au Mali, il est employé comme cameraman-reporter au Service cinématographique du Ministère de l'Information, ce qui lui offre l'occasion de parcourir le Mali de long en large caméra à l'épaule pendant trois ans et de réaliser plusieurs documentaires[2].
Souleymane Cissé tourne son premier moyen métrage, Cinq jours d’une vie, en 1971. Le film relate l’histoire d’un jeune qui abandonne l’école coranique et vagabonde dans les rues, vivant de menus larcins. L'œuvre est primée aux Journées cinématographiques de Carthage[2].
En 1975, il réalise son premier long métrage, en bambara, Den Muso (La Jeune fille) [1] à propos d’une jeune fille muette violée par un chômeur. Enceinte, elle subit le rejet de sa famille et du père de l’enfant qui refuse de le reconnaître. Souleymane Cissé a ainsi expliqué sa démarche : « J'ai voulu exposer le cas des nombreuses filles-mères rejetées de partout. J'ai voulu mon héroïne muette pour symboliser une évidence : chez nous, les femmes n'ont pas la parole. » Non seulement le film est interdit par le ministre malien de la culture[2] mais Souleymane Cissé est arrêté et emprisonné pour avoir accepté une coopération française. Le brûlot restera interdit pendant trois ans et n'obtiendra son visa d'exploitation qu'en 1978.
Fonctionnaire de l'État, Souleymane Cissé prend une disponibilité en 1977 afin de se consacrer pleinement au cinéma et crée la société de production Les Films Cissé (Sisé Filimu).
En 1978 sort le film Baara (Le Travail) qui reçoit l'Étalon de Yennenga au FESPACO (Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou) la même année. Ce film relate l'histoire d'un jeune ingénieur, révolté par l'attitude de son PDG, qui décide d'organiser une réunion avec les ouvriers pour faire valoir leurs droits. Mais son patron le fait aussitôt enlever puis assassiner.
Suit Finyè (Le Vent, 1982). Il s'agit d'une chronique sur la révolte des étudiants maliens face au pouvoir militaire. À sa sortie, le film multiplie les récompenses : Étalon de Yennenga au FESPACO de Ouagadougou en 1983, Tanit d'or aux Journées cinématographiques de Carthage. Le film est également sélectionné au Festival de Cannes 1982 (le cinéaste sera membre de son jury l'année suivante).
Sur une période de 4 ans, entre 1984 et 1987, il tourne Yeelen (La Lumière), film initiatique sur le douloureux chemin que prend l’enfant pour devenir adulte. L'histoire est inspirée de la tradition bambara[4]. Il obtient pour ce film le Prix Spécial du Jury au Festival de Cannes 1987. Il est le premier cinéaste d'Afrique noire primé à Cannes pour un long métrage[2].
Souleymane Cissé tourne ensuite Waati (Le Temps, 1995). Ce film retrace l'histoire de Nandi, une enfant noire d'Afrique du Sud au moment de l'Apartheid, qui fuit son pays pour partir en Côte d'Ivoire, au Mali et en Namibie, avant de revenir dans son pays d'origine après la fin du régime.
En 2009, Souleymane Cissé sort le film Min yé, qui aborde le thème de la polygamie. Ce film, dans lequel jouent Assane Kouyaté et Sokona Gakou, animatrice à Africable, est présenté au Festival de Cannes 2009[5],[6], en 2023, il reçoit le Carrosse d'or décerné par la Quinzaine des cinéastes.
Filmographie sélective
modifierCourts et moyens métrages
modifier- 1968 : L’Aspirant
- 1968 : Source d’inspiration
- 1970 : Dégal à Dialloubé
- 1971 : Fête du Sanké
- 1972 : Cinq Jours d’une vie
- 1975 : L’Homme et ses idoles
- 1978 : Chanteurs traditionnels des Iles Seychelles
Longs métrages
modifierDistinctions
modifierNominations
modifier- Souleymane Cissé est, depuis 1997, président de l'Union des créateurs et entrepreneurs du cinéma et de l'audiovisuel de l'Afrique de l'Ouest (UCECAO).
- Souleymane Cissé a été élevé par le président de la République, Amadou Toumani Touré, au rang de Commandeur de l’Ordre national du Mali le 1er janvier 2006[7].
Récompenses
modifier- 1979 : Étalon de Yennenga au FESPACO (Festival panafricain du cinéma et de la télévision) de Ouagadougou et Montgolfière d'or au Festival des trois continents pour Baara[8].
- 1983 : Étalon de Yennenga au FESPACO et Tanit d'or aux Journées cinématographiques de Carthage pour Finyè (Le Vent).
- 1987 : Prix Spécial du Jury au Festival de Cannes pour Yeelen (La Lumière).
- 1988 : Prix d'Aide à la distribution au Festival international de films de Fribourg pour Yeelen.
- 2007 : lauréat du Prix Henri-Langlois de Vincennes.
- 2009 : lauréat du BFI Fellowships de Londres[9].
- 2010 : lauréat du Dubai International Film Festival de Dubaï[10].
- 2011 : lauréat du Grand Prix Hommage au 7e Festival International du Film Black de Montréal[11].
Notes et références
modifier- Siegfried Forster, « Souleymane Cissé, le doyen du cinéma africain à Cannes », sur RFI.fr, (consulté le ).
- Siegfried Forster, « Souleymane Cissé, le doyen du cinéma africain à Cannes », sur RFI.fr, (consulté le ).
- Olivier Barlet, « La masterclass de Souleymane Cissé à Dakar (entretien - Article n° 2 du zoom Festival Dakar court 2020) », sur Africultures, (consulté le ).
- Jean-François Senga, « Interview de Souleymane Cissé », Présence africaine (nouvelle série), no 144, , p. 133-138 (lire en ligne).
- « Festival de Cannes en 2009. "Min Ye" de Souleymane Cissé représentera l'Afrique », sur afribone.com,
- Olivier Barlet, « Cannes 2009 : la mauvaise conscience », sur africultures.com, (consulté le )
- Souleymane Cissé, premier cinéaste Commandeur de l’Ordre National, Alou B Haidara, Afribone, 2005 (Consulté le 27/12/2020)
- Festival des 3 continents, DRAC Pays de la Loire, 39ème édition du Festival des 3 continents (Consulté le 27/12/2020)
- BFI Fellows, site BFI.org (Consulté le 26/12/2020)
- Veteran African director Souleymane Cissé to receive DIFF 2010 Lifetime Achievement Award, Al Bawaba, 3 Novembre 2010 (Consulté le 26 décembre 2020)
- Le légendaire Souleymane Cissé recevra le Grand Prix Hommage au 7e Festival International du Film Black de Montréal (2011), Festival International du Film black de Montréal, 2011 (Consulté le 26/12/2020)
Voir aussi
modifierLiens connexes
modifierBibliographie
modifier- 62e Rencontre Internationale de Cinéma de Pontarlier, Souleymane Cissé présente son œuvre, 2005, 48 pages. Nombreuses illustrations en quadrichromie. Ed. Cercle d'Études et de Recherches Filmographiques (25300 Pontarlier)
- Samuel Lelièvre, Enjeux interprétatifs de la féminité dans l’écriture de Souleymane Cissé, Cinémas vol. 11, no 1, Université de Montréal, 2000, p. 61–76.
- Samuel Lelièvre, La Lumière de Souleymane Cissé. Cinéma et Culture, Préface de J-M. Frodon, Paris, L'Harmattan, 2013, 214 pages (ISBN 978-2-343-00201-9)
- Samuel Lelièvre, Le cinéma paradoxal de Souleymane Cisse. Une approche de l'altérité du film africain, Thèse de doctorat en Art et archéologie, 1999 (Strasbourg 2).
Liens externes
modifier
- Ressources relatives à l'audiovisuel :
- Ressource relative à plusieurs domaines :
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- La seconde vie de Touki Bouki - Entretien avec Souleymane Cissé par Gabrielle Lorne, dans Le Courrier de l'UNESCO, janvier-, p. 53-54.
- Cissé Souleymane, « Le 7e art et la francophonie », Revue internationale et stratégique, 2008/3 (n° 71), p. 81-82. DOI : 10.3917/ris.071.0081.
- De Saint-Cloud à Bamako..., France Inter, (entretien de 13 min, à partir de 27min30).