Reginald Pole

cardinal de l'Église catholique romaine

Reginald Pole (, Staffordshire), est un ecclésiastique et auteur britannique de la Renaissance. Il fut le dernier archevêque de Cantorbéry, catholique, cardinal de l'Église catholique romaine, légat pontifical à la première session du concile de Trente.

Reginald Pole
Image illustrative de l’article Reginald Pole
Portrait du cardinal Reginald Pole, dernier archevêque catholique de Cantorbéry, par Sebastiano del Piombo
Biographie
Naissance
dans le Staffordshire (Angleterre)
Père Richard Pole
Mère Margaret Pole
Ordination sacerdotale
Décès (à 58 ans)
Londres (Angleterre)
Cardinal de l'Église catholique
Créé
cardinal
par le pape Paul III
Titre cardinalice Cardinal-diacre de Ss. Nereo e Achilleo
Cardinal-diacre de Ss. Vito et Modesto
Cardinal-diacre et cardinal-prêtre de S. Maria in Cosmedin
Évêque de l'Église catholique
Ordination épiscopale par
la reine Marie Ire d'Angleterre
Fonctions épiscopales Archevêque de Cantorbéry (Angleterre)

Blason
(en) Notice sur www.catholic-hierarchy.org

Biographie

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Origines

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Portrait de femme, la tradition le reconnaît de Margaret Pole, VIII comtesse de Salisbury, (1535), National Portrait Gallery, London

Il était le troisième fils de Sir Richard Pole et de Margaret Plantagênet, descendant d’une ancienne famille du Pays de Galles, dont la mère était comtesse de Salisbury. Le père de Reginald se distingue dans les guerres d’Écosse, devenu chambellan de la reine, puis gouverneur du Pays de Galles, il fut un grand seigneur de l’époque. Celui-ci, en 1491, avait épousé Margaret Plantagenêt, comtesse de Salisbury, fille de Georges, 1er duc de Clarence et Isabelle Neville, nièce d’Édouard IV et sœur du comte de Warwick, Édouard Plantagenêt.

Formation

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Selon Dom Reginald Biron[1], Margaret Pole, après la mort de son mari Richard Pole, en 1505, trouva un ferme appui dans le jeune roi Henry VIII qui, à cause de ce que les Tudors avaient fait subir à la famille Plantagenêt, voulait redonner une place à ses cousins dans la noblesse d'Angleterre. C'est ainsi que le roi devint officiellement le protecteur de ses jeunes cousins et Reginald put achever sa première formation dans la chartreuse de Sheen entre 1507 et 1512, et continuer ses études à l'université d'Oxford.

Une très bonne éducation humaniste à l’université d’Oxford (1512-1521)

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Thomas More par Hans Holbein le Jeune.

Interne de Magdalen College à l'université d'Oxford de 1512 à 1519, il suivit l'enseignement de William Latimer et de Thomas Linacre. Étudiant brillant, féru de grec et de latin, instruments précieux pour l'étude de la logique et de la philosophie à laquelle Reginald s'adonna avec ardeur, il soutint une thèse sur la morale et la logique et il fut fait bachelier le . En février 1518 Henri VIII le nomma doyen de la cathédrale de Wimborne, dans le Dorset.

Cependant, Pole demeura à Oxford jusqu'en 1521, où il eut l'occasion de fréquenter des gens qu'il devait plus tard retrouver dans de hautes fonctions et qui eurent sur sa vie une influence décisive. Par exemple, c'est de son séjour à l'Université que datent ses premiers rapports avec Thomas More[note 1] qui se prolongèrent jusqu'à la mort du chancelier. Initié à un humanisme anglais, une parenté spirituelle unit Pole à Colet, More, Fisher, intellectuels anglais « qui après avoir contribué pour une part à implanter l'humanisme en Angleterre furent des hommes silencieux et austères, les défenseurs les plus passionnés de l'unité de l'Église »[3].

Son premier séjour à Padoue et ses nouvelles amitiés parmi les intellectuels italiens (1521-1526)

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Reginald Pole demanda au roi, à l’exemple de ses maitres d’Oxford, de compléter sa formation humaniste à Padoue. Henry VIII ne s’y opposa pas et, au contraire, il est même probable qu’il se trouva fier des talents de son jeune cousin[4]. À cette période, l’université de Padoue était un carrefour où se retrouvaient les esprits les plus brillants de toute l’Europe au point qu’Érasme la désigna l’Athènes de l’Europe[5]. À Oxford Reginald Pole eut d’excellents tuteurs, car la Seigneurie de Venise, en honneur de son rang, lui donna pour professeur de philosophie l’un des plus savants de l’époque, Niccolò Leonico Tomeo (it) ainsi que Romolo Quirino Amaseo qui devint par la suite secrétaire du pape Jules III. Or, deux autres professeurs de l'Université, Flaminio et Lazzaro Bonamico devinrent les amis intimes du jeune Anglais et firent partie de sa « famille », c'est-à-dire qu'ils vivaient sous son toit et mangeaient à sa table, ainsi qu’un jeune étudiant, Christophe de Longueil, dont la mort prématurée fit écrire au jeune étudiant anglais, la Vita Longili « une de ses œuvres les plus belles et achevées »[3].

Mais Réginald Pole ne fréquentait pas uniquement à Padoue les cercles des maitres et des étudiants. Sa situation sociale lui permettait de pénétrer dans les milieux les plus choisis où il fut longtemps connu sous le nom de Monseigneur d'Angleterre. Ce fut vraisemblablement un de ses maîtres qui l'introduisit auprès de l'illustre Pietro Bembo. Le célèbre poète vénitien, le prince des humanistes, installé à Padoue depuis la mort de son patron Léon X pour y soigner sa santé, fut bientôt gagné par le charme qui se dégageait de la personne du jeune anglais, qui lui faisait écrire de Pole : « Monseigneur d'Angleterre, outre qu'il est de très noble extraction, est le plus vertueux, le plus instruit, le plus sérieux jeune homme, qui se puisse voir aujourd'hui dans toute l'Italie. »[6]

À Padoue, Pole rencontra aussi d'autres personnalités comme Gianmatteo Giberti (anciennement membre de la Curie romaine de Léon X), Jacopo Sadoleto, Gianpietro Carafa (le futur pape Paul IV), Rodolfo Pio, Otto Truchsess, Stanislaus Hosius, Cristoforo Madruzzo, Giovanni Morone, Pier Paolo Vergerio le jeune, Pietro Martire Vermigli (Pierre Martyr), et Vettor Soranzo, ces trois derniers ayant d'ailleurs été condamnés pour hérésie.

Son élection au collège de Corpus Christi College d'Oxford, le , lui fournit l'argent nécessaire pour poursuivre des études à l'étranger encore quelques années.

Après ses années de formation à Padoue, Reginald Pole part pour un bref pèlerinage à Rome avant de débarquer dans sa patrie en 1526.

Difficultés avec Henry VIII

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Henri VIII par Hans Holbein le Jeune.

Le retour en Angleterre et le schisme (1526-1532)

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Pole retourna en Angleterre en juillet 1526, traversant la France en compagnie de Thomas Lupset.

Dès son retour en Angleterre, Pole, par son rang et ses capacités, aurait pu avoir une place politique importante ; cependant il s’écarte très vite de l’entourage du roi en demandant de loger à la chartreuse de Sheen pour une vie plus paisible et s’adonner ainsi aux études de théologie que jusqu’à alors il n’avait pas entamées. Pour prendre encore plus de distance avec la cour et ses mesquineries, il sollicite du roi, peu de temps après, la permission d’aller faire ses études de théologie à l’Université de Paris.

Toutefois, à la fin de 1529, Henry VIII envoie des agents dans les diverses facultés d’Europe pour recueillir les opinions des théologiens et des canonistes en faveur de son divorce avec Catherine d'Aragon et faire pression sur le verdict de Rome : Reginald Pole, se trouvant déjà en France, fut sollicité pour s’occuper lui-même de ce dossier auprès des maitres de la Sorbonne. Cependant, très vite, il demanda de laisser sa fonction au profit d’Edward Foxe. En effet, Pole était contre ce divorce ; Henri VIII lui refuse le siège de York, laissé vacant par la mort de Thomas Wolsey et le diocèse de Winchester.

Malgré cela, le 1531, le roi Henry VIII fait signer aux deux chambres ecclésiastiques les 5 articles de reconnaissance de l’acte de la suprématie royale : c’est le premier pas de la rupture avec Rome. Dans ce contexte de tension politique, dangereux pour ses idées, Pole demanda au roi de pouvoir partir en Italie pour perfectionner ses études. Malgré les convictions de son cousin, Henry VIII le laissa quitter le royaume en confirmant une pension annuelle de 400 ducats avec l’espoir que son protégé, avec le temps, consentirait à sa cause.

Son deuxième séjour à Padoue et les réseaux d’amitiés autour de Bembo et Contarini (1532-1536)

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Gasparo Contarini.

Avant son arrivée en Italie, Pole séjourna dans la prestigieuse université d’Avignon, où il rencontra Sadoleto, évêque de Carpentras, avec lequel il noua une profonde amitié : plus tard leurs destins furent unis par l’œuvre commune de rénovation au sein de l’Église. Cette amitié naquit tout d’abord grâce à des relations épistolaires par l’intermédiaire de l’humaniste Bembo ; il existait un réseau européen parmi les intellectuels humanistes de l’époque avec des liens et sentiments d’estime réciproque, comme par exemple l’amitié avec l’évêque humaniste de Vérone, Gian Matteo Giberti, chez qui Pole passa un court séjour une fois qu’il eut quitté Avignon pour des problèmes de santé dus au climat, avant d’arriver définitivement à Venise, puis à Padoue.

 
Tiziano, Pietro Bembo (1539) Washington, National Gallery of Art

Dans ces deux villes vénitiennes, Pole renoua très vite avec ses vieilles amitiés[7] et sut facilement s'en créer de nouvelles au point que sa maison devint le centre d'un cercle d’intellectuels amoureux des belles-lettres, tout en partageant le souci du bien de l'Église, car, parmi eux, il y avait plusieurs membres de l'Oratoire du Divin amour[8]. Dans le contexte vénitien, parmi les nouveaux amis de Reginald Pole : Gian Pietro Carafa, Contarini, Cortese, Marcantonio Flaminio, Ludovico Beccadelli, Alvise Priuli (it).

Sans doute, les événements d’Allemagne et les nouvelles qui leur parvenaient d’Angleterre étaient des sujets de conversations courantes dans ce cercle, avec le souci de réfléchir à des solutions de réforme au sein de l’Église ainsi que la nécessité d’être au clair sur la doctrine de l’Église. Sur ce dernier aspect, en effet, Venise, grâce à ses imprimeries, ses commerces et ses libéralités, était une capitale effervescente devenue rapidement un foyer pour des idées nouvelles, et à Padoue, ville universitaire de la Sérénissime, autour de Pietro Bembo dans sa demeure de Treville, commençait à mûrir les orientations iréniques propres au groupe des Spirituels à partir des études de textes bibliques et patristiques et des écrits d’Érasme. D'ailleurs, le « magnifico messer Gasparo qn Alvise Contarini » qui par sa personnalité, son rang, sa formation, ses capacités diplomatiques, et surtout par son expérience spirituelle, sa foi et sa démarche érasmienne pour une réforme de l’Église, devient la véritable pierre d’achoppement des Spirituels, est le point de référence pour notre jeune étudiant anglais.

La rédaction de « Défense de l’unité de L’Église » avec la déclaration nette d’opposition à la politique d’Henry VIII

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Pendant ces premières années trente où les idées de réforme des Spirituels prenaient forme et aboutissaient à l’élévation inattendue à la pourpre cardinalice du laïc Contarini, les événements se précipitaient au royaume d’Angleterre : Henry VIII avait épousé secrètement Anne Boleyn en janvier 1533 ; le , Cranmer, archevêque de Cantorbéry, avait déclaré l’union valide, et en juillet le pape Clément VII, avait menacé les trois d’excommunication. Thomas Cromwell, Cuthbert Tunstall, Thomas Starkey et d'autres personnalités rédigèrent au nom du roi une série de questions qu'ils soumirent à Pole.

Reginald Pole, à cause de son rang ne pouvait plus tergiverser, et devait prendre position sur le mariage du roi, autant plus que Charles Quint l’avait indirectement sollicité à prendre la tête d’une invasion de l’Angleterre avec l’aide des armées impériales[9]. Par son tempérament et sa fidélité à son cousin, le jeune prince Plantagenêt n’aurait jamais pu être un chef rebelle.

Néanmoins, la demande insistante et insidieuse d'Henri VIII[10] de se positionner permet de voir la manière dont l’humaniste anglais cherche une solution : au printemps 1535, il trouve refuge dans la maison de campagne de son ami Priuli, non loin de Castelfranco, pour mieux méditer dans le silence et pendant tout l’été, il se consacre à l’étude en réunissant des documents et en méditant sur les écritures dans l’intention de rédiger un mémoire à adresser uniquement au roi, sans la volonté de le divulguer avec une publication, pour exposer ses idées sur la question du divorce et sur le rapport entre la suprématie pontificale et l’autorité royale avec l’espérance de ramener son cousin à la raison par des arguments solides et convaincants.

Vers l’automne, ses amis Priuli, Contarini, Dandolo, Lampridio lui rendent visite ; vraisemblablement il discuta avec eux de ce problème et il est certain que les conseils de Contarini en particulier furent un précieux encouragement pour prendre clairement position et commencer la rédaction de son ouvrage[11]. Une fois terminé le long manuscrit, Pole, avant de l’envoyer au roi, le donna à Contarini pour lui demander son avis, celui-ci ne se limita pas à sa lecture, mais, par souci de prudence, le corrigea en soustrayant quelques pages jugées trop polémiques vis-à-vis du roi anglais. Ainsi Pole adressa au monarque une copie de son traité Pro ecclesiasticae unitatis defensione (Pour la défense d'une Église unifiée) qui contenait, outre la réponse aux questions, un réquisitoire en règle contre la politique royale.

Réactions d'Henri VIII

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Furieux, Henri se vengea en persécutant les membres de sa famille. En novembre 1538, deux de ses frères dont l’aîné Henri, baron Montagu, et plusieurs de leurs parents furent arrêtés et accusés de trahison, incarcérés dans la tour de Londres et exécutés (sauf Geoffrey Pole) en .

La mère de Reginald Pole, Margaret, fut également arrêtée et passa plusieurs années dans des conditions de détention très dures à la tour de Londres pour finir exécutée le malgré ses protestations d’innocence. Cet épisode a toujours été considéré comme une grave erreur judiciaire, même à son époque. Margaret Pole fut béatifiée en 1886 par le pape Léon XIII.

Il est possible que l’animosité d’Henri envers la famille de Pole ait eu une autre raison. Margaret était la dernière descendante de la dynastie des Plantagenêt, ce qui faisait de ses fils des prétendants potentiels au trône d’Angleterre. En 1535, Eustache Chapuys, ambassadeur du Saint Empire auprès de la couronne anglaise, considérait Pole comme un parti possible pour la princesse Marie Tudor, qui allait devenir Marie Ire d'Angleterre.

 
Paul III, par Le Titien

Le départ de Pole pour Rome et son séjour (1536-1541)

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L’appel de Contarini à Rome et le Cardinalat

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L’histoire du manuscrit Pro ecclesiasticae unitatis defensione, qui devait être lu seulement par Henry VIII, est périlleuse[12] : il passa de mains en mains, jusqu’à arriver au Pape Paul III. Celui-ci avait le souci de réformer l’Église en rénovant tout d’abord la composition du collège cardinalice[13] : en lisant le pamphlet, il vit dans le jeune prince anglais fidèle à l’Église catholique une candidature idéale. Cependant Pole, était contre cette nomination parce ce qu’elle lui semblait une acte trop direct face à la politique de plus en plus despotique d’Henry VIII ; il refusa la pourpre jusqu’à la veille du consistoire du 23 décembre 1536 où le pape, faisant appel à la vertu d’obéissance, l’invita à se rendre à la cérémonie du lendemain[14] et le nomma cardinal au titre de Santi Vito, Modesto e Crescenzia, à son corps défendant, puis en 1537 au titre Santi Nereo e Achilleo.

Le Consiulium de emedanda Ecclesia

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Sur l’insistance de son ami Contarini, Pole se trouvait déjà à Rome à partir d'octobre 1536, où il fut accueilli directement par Paul III[15] ; sans être prêtre, il fut prié par le Pape de siéger à la Commission présidée par le cardinal vénitien pour travailler à un programme de réformes de la Curie.

Les réunions de cette Commission se tenaient presque chaque jour dans le palais de Contarini et de fortes personnalités en faisaient partie[16] « qui ne cherchaient pas à gagner ou à défendre une position politique définie, car ils étaient tous des hommes mûrs »[17]. Étant le plus jeune, Pole était l’exception de ce groupe, et cette période fut pour lui très formatrice, car, d’une part il put accueillir l’héritage de cette génération de cardinaux qui réfléchissaient pour des réformes au sein de l’Église depuis Léon X, et d’autre part il ne resta pas passif, mais prit une partie active, en étant le principal rédacteur du document récapitulatif[note 2] Consilium de emendanda Ecclesia, qui fut lu et expliqué au pape par Contarini, le . Ce rapport est important car, même s’il n’eut pas les effets directs souhaités[19],[note 3] et fut fortement critiqué par certains milieux conservateurs de la Curie[note 4], il faut voir l’influence de ses idées sur les réformes qui furent prises successivement par le Concile de Trente : la nécessité de faire cesser les abus qui s'étaient introduits dans la collation et le cumul de bénéfices, ou l'importance de la résidence pour les ecclésiastiques.

Le diète de Ratisbonne et l'absence de Pole au Consistoire du 27 mai 1541

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Pendant ses premières années de pontificat (1535-1541), Paul III travaillait sur deux fronts : d’une part, la mise en place d’une réforme intérieure de l’Église catholique, et d’autre part la convocation d’un concile général[21]. Cependant, si les intentions étaient bonnes, les résultats sur l’un et l’autre front n’étaient pas évidents, notamment avec les tentatives avortées de tenir un concile à Mantoue et à Vicence[22].

Dans ce contexte d’échec, Charles Quint, promoteur infatigable de l’unité de la foi pour sauvegarder l’unité de son Empire, chercha une voie de sortie en promouvant des entretiens entre catholiques et protestants à Worms, puis à Ratisbonne. Ces colloques prirent de l’importance par la présence de personnages éminents, notamment, du côté catholique avec Contarini en qualité de légat pontifical[23], et du côté protestant avec Melanchthon, disciple de Luther. La bonne volonté des participants permit d’arriver le à une formule unitaire sur la justification par la foi, avec la théorie de la double justice[24], comme une sorte de compromis.

Ce résultat qui devait être le sommet et l’aboutissement de l’œuvre diplomatique de Contarini et de la démarche irénique des Spirituels signa, au contraire, leur fin. Ceci, parce que, du côté protestant, Luther, sans hésiter, qualifia cette solution comme « un nouveau morceau d’étoffe cousu dans un vieux vêtement »[25], et du côté catholique, la formule trouva en Italie un accueil ambigu.

Peu de jours après, le , le cardinal anglais, d’une part, exprima un avis favorable en congratulant son ami pour le succès obtenu[note 5], mais d’autre part, son absence pour raison de santé au consistoire de Rome du fut déterminante dans les équilibres politiques en faveur du refus de la formule contarienne. Pole envoya à sa place le seul Priuli pour convaincre les forces intransigeantes[note 6], mais « on peut imaginer quel poids politique pouvait avoir un Priuli devant un Carafa ou un Aleandro ! »[27], et il n’y eut que Fregoso pour défendre « avec animation et doctement » la formule de Ratisbonne, mais inutilement[28].

Il y a plusieurs hypothèses faites par les historiens sur la véritable raison de l’absence de Pole au consistoire : premièrement, les récentes études de Fenlon[29] dénoncent la progressive distance doctrinale des deux cardinaux dès les années 1540-41, en considérant la position de Pole plus proche des réformés que celle de Contarini. Deuxièmement, au niveau politique, il est vraisemblable aussi, comme le fait remarquer Simoncelli, que les forces intransigeantes prenaient de l’ampleur dans le collège cardinalice[30] et Pole, par son tempérament, ne voulait pas s’exposer davantage à une cause perdue d’avance.

Toutefois, rien n’empêche de souligner que cette absence de Pole provoqua une mésestime et une prise de distance des Spirituels du collège cardinalice à son égard ainsi que par des sympathisants de ce parti comme Paolo Manuzio[note 7] ; ce consistoire signa symboliquement la fin politique de ce premier cercle des Spirituels autour du cardinal Gasparo Contarini.

Une nouvelle orientation de l’Église : la mise à l’écart de Pole et des Spirituels

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Après la diète de Ratisbonne, Paul III, contraint d’évoluer sous la pression des faits et de ses cardinaux, met un terme à sa première politique et s’engage sur la voie d’une double rupture : d’une part, en mettant fin à une certaine indulgence envers les hommes et les doctrines évangéliques qui dorénavant vont être l’objet de sérieuses enquêtes inquisitoriales[32], et, d’autre part, en relançant l’idée d’un concile général conçu non plus comme un effort pour maintenir l’unité de l’Église, mais comme un « choc frontal avec les hérésies ultramontaines »[33]. Le premier signe de l’évolution de sa position est l’éloignement de Rome de ses anciens collaborateurs les plus éminents partisans de l’unité : Gasparo Contarini est promu à la légation de Bologne et Reginald Pole reçoit le le gouvernement de Viterbe.

Reginald Pole et les Spirituels après 1541

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Reginald Pole, presque malgré lui, puisqu’il ne cesse de rechercher des moments de solitude et de silence pour la méditation et la prière selon un idéal monastique, se voit chargé du fait de son rang et sa carrure intellectuelle et spirituelle de fonctions ecclésiales décisives dans les années quarante notamment les légations pontificales aux deux convocations au Concile de Trente : il devient aussi le point de référence parmi les prélats qui s’opposent au sein de l’Église à la nouvelle politique intransigeante de Rome depuis la réorganisation de l’Inquisition.

L’ecclesia Viterbensis : un groupe hétéroclite autour du Cardinal

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Déjà à partir de Septembre 1541, Pole avait assumé la charge de la légation de Viterbe et un groupe des amis se regroupa autour de lui, avec notamment la fameuse et noble poétesse Vittoria Colonna avec laquelle il eut une correspondance assidue durant sa vie[34]. Parmi le cercle autour de Pole à Viterbe : « ...la princesse Giulia Gonzaga, Donato Rullo, Vittore Soranzo, Mario Galeota, Pietro Carnesecchi et Marcantonio Flaminio qui ont perdu leur guide spirituel depuis la mort de Juan de Valdés en juillet 1541, le chapelain Apollonio Merenda, Alvise Priuli, le cardinal Morone ; l’évêque d’Otrante Pietro Antonio Di Capua et le général augustin Girolamo Seripando. »[35] Ce nouveau cercle est connu sous le nom d’« Ecclesia Viterbensis », nom utilisé déjà dans une lettre de Beccadelli de 1542[36].

La découverte de Pole des doctrines valdésiennes par Marcantonio Flaminio

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Dans ses études, Firpo fait remarquer que la naissance de Ecclesia Viterbiensis coïncide d’une part, avec la progressive distance idéologique entre les deux cardinaux Spirituels, en particulier depuis les événements politiques de l’après-Ratisbonne[note 8], et d’autre part, avec le transfert de Marcantonio Flaminio de Naples à Viterbe, ainsi que d’autres personnages qui comme celui-ci, ont été fortement marqués par les doctrines de l’espagnol Juan de Valdés, exilé en Italie et décédé en à Naples.

Pole, légat pontifical au concile de Trente et le Benificio di Cristo

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Le concile de Trente dans l'église de Sainte Marie Majeure à Trente.

Après les échecs de Vicence et de Mantoue, Paul III convoqua le concile à Trente, comme pour une sorte de compromis et, malgré sa prise de distance par rapport à l’action diplomatique de Contarini et de son entourage[note 9], pour l'ouverture du concile fixée au [37],[note 10], nomma légats pour le représenter à Trente trois cardinaux dont Réginald Pole.

Cependant, à cause de la guerre franco-impériale, le Pape dut renvoyer le concile et c’est seulement grâce à la paix de Crépy qu’il le convoqua de nouveau pour le [note 11] où il confirma le cardinal anglais comme son Légat[39]. Cette nomination montrait la confiance que le pape Farnèse avait encore pour Pole car les fonctions d’un Légat pontifical au concile étaient très importantes car il s’agissait de diriger les débats conciliaires et de « prendre en tout l’initiative »[40].

Dans cette première session conciliaire, le thème qui était au cœur des débats conciliaires jusqu’à la sixième session du était la question de la justification du chrétien devant Dieu sur laquelle les pères devaient se positionner par rapport à la doctrine luthérienne. Ces débats produisirent un long décret dogmatique « sans doute le plus soigné de toute l’histoire conciliaire, avec seize chapitres et trente-trois canons »[41]. Cependant Pole était en désaccord sur la manière de mener les discussions sur la justification car il jugeait que l’imputation de la justice du Christ était reléguée à un deuxième plan[42] et il essaya vainement de faire pression sur les Pères conciliaires, leur demandant de lire aussi les livres luthériens en n’ayant pas « la typique fermeture mentale qui les amenaient à conclure que "si l’a dit Luther, c’est faux" »[43].

En effet, au-delà de la partie active que les Spirituels prenaient au cours des débats conciliaires, Pole et ses amis du cercle, entre les années 1542-46, jouèrent un rôle important dans la publication du Beneficio di Cristo[44], œuvre avec des résonances valdésiennes[45] et avec des positions sur la justification clairement réformées : « livre de chevet » de plusieurs Pères du Concile[46].

Cependant, les débats étaient de plus en plus animés et de façon inattendue Pole, le , abandonne Trente demandant d’être exonéré de sa charge, requête qui sera acceptée par le pape le .

L’abandon de Pole avant la signature du décret sur la justification par la foi

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Officiellement, ce fut pour raison de santé que le cardinal anglais quitta Trente. Sur ce point, les historiens, au cours des siècles, ont fait couler beaucoup d’encre ; les positions de Jedin en 1947 penchaient encore sur le fait que la raison principale était sa maladie, malgré ses positionnements idéologiques[47]. Néanmoins s’il est vrai que le cardinal est fragile de santé, le doute surgit puisque c’est déjà la deuxième fois qu’il manque au rendez-vous à un moment ecclésial décisif. Aujourd’hui, grâce aux études de Fenlon et de Firpo sur ses orientations doctrinales, il ne semble plus acceptable d’imputer la cause du départ qu’à des problèmes de santé.

Selon Simoncelli[note 12], en effet, son abandon était un acte purement politique, salué d’ailleurs positivement par la poétesse Colonna[note 13], et qu’il faut lire comme « opposé à ce qu’il avait fait au consistoire de 1541 » car Pole était politiquement entre deux feux : d’une part, prendre position sur la justification l’aurait immédiatement mis en état d’accusation de la part de l’aile intransigeante de l’Église et d’autre part, assumer un attitude neutre sur la justification aurait signifié la perte définitive du leadership des Spirituels après la désillusion qu’il avait déjà procurée à ce parti lors du consistoire de 1541. Au contraire, son départ avant la signature du décret sur la justification pris un poids politique grâce auquel il devient le point de référence de ceux qui s’opposent à la politique intransigeante de la curie romaine. Or, cela est particulièrement manifeste dans le conclave de 1549.

Le conclave de 1549-50

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Dès la mort de Paul III, la rumeur publique attribuait sa succession à Réginald Pole[50]. Cela sans doute à cause de ses qualités personnelles, son origine aristocratique, son leadership reconquis au sein du parti des Spirituels dans le collège cardinalice à cause de son acte explicite du refus de signer le décret sur la foi, mais surtout parce qu'il était le candidat de Charles Quint à la papauté[note 14].

L’histoire de ce fameux conclave[53] a été le sujet de nombreux récits où les historiens ont souvent exalté l’attitude stoïque de Pole qui n’a pas cherché à compromettre son intégrité pour être élu : alors qu’il était le candidat ayant la majorité des voix tout au long du conclave et pour une seule voix, le , il n’a pu franchir le seuil pontifical[note 15].

En lisant ces récits, il est difficile de comprendre si par son tempérament Pole, en refusant de se battre, avait une certaine crainte d’assumer la responsabilité de la tiare, ou si, comme les pensent des historiens récents, il avait une telle conviction d’être l’élu selon la prophétie du pape « Anglicus-Angélicus » qu’il ne voulait pas se mêler à ces bassesses[55],[56].

Toutefois, entre l’appui impérial et les pressions politiques françaises contre l’élection du cardinal anglais, selon Simoncelli, la raison principale qui firent obstacle à l’élection sont les accusations d’hérésie lancées contre lui par le cardinal Carafa lors du conclave[57]. Par la considération que le collège cardinalice donna à ces accusations qui ne furent que temporaires et suivies par la clarification et la pacification des deux cardinaux, pour Simoncelli, il s'agit premièrement d'un renversement des équilibres d’un conclave où les enjeux religieux-doctrinaux passent désormais sur un premier plan au détriment des enjeux politiques toujours présents, mais non déterminants à l’élection ; deuxièmement, qu'il s'agit d'une augmentation progressive du pouvoir des membres de l’Inquisition dans les conclaves jusqu’à en arriver à faire élire Paul IV en 1555 ; troisièmement, qu'avec cette élection manquée de Pole, c’est la fin politique des Spirituels, même si dans les décennies qui suivent des personnages de haute valeur travaillent encore à la vigne du Seigneur d’une manière remarquable, avec l’exemple par excellence du cardinal Morone.

Retour en Angleterre

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La mort d'Edouard VI le et l'accès au pouvoir de Marie Tudor mirent un terme à l'exil de Pole qui put revenir en Angleterre d'abord comme légat pontifical ; mais Marie Tudor et l'empereur Charles Quint le firent patienter jusqu'au , par crainte que l'arrivée d'un légat du pape en Angleterre ne contribuât à exacerber l'opposition populaire au mariage de Marie avec le fils de Charles, Phillippe II.

Conseiller de Marie Tudor

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Marie Tudor, surnommée « Marie la sanglante »

Sous le règne de Marie Ire, Pole fut enfin ordonné prêtre le et fut nommé archevêque de Cantorbéry, fonction qu'il allait conserver jusqu'à sa mort. En plus de ses responsabilités sacerdotales, Pole fut le premier ministre de facto de Marie et son conseiller le plus écouté. À ce titre, il contribua aux persécutions et aux exécutions de protestants sur le bûcher qui valurent à la reine le surnom de Marie la sanglante et contribuèrent à nourrir la haine de nombreuses générations de protestants envers l'Église catholique, ce que Pole n'avait pas voulu.

Il mourut à Londres le , quelques heures seulement après la reine emportée au cours d'une même épidémie de grippe. Sa dépouille repose près de l'enceinte nord de la Couronne de la cathédrale de Cantorbéry.

Œuvres

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Il est l'auteur d'un De Concilio ainsi que de plusieurs traités sur l'autorité du pontife romain, sur la Réforme anglicane et d'un corpus de lettres fort intéressantes pour l'histoire de l'époque[58].

Dans son Apologia ad Carolum V Caesarem (Apologie à l'empereur Charles-Quint, 1552), Pole fait une condamnation sans appel du livre de Nicolas Machiavel, Le Prince, au sujet duquel il écrit : « Je trouve que ce genre d'ouvrage est l'œuvre d'ennemis du genre humain. Il explique par le menu comment la religion, la justice et tout penchant à la vertu peuvent être anéantis »[59]. Cet ouvrage lui avait été signalé par Thomas Cromwell[60].

Notes et références

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  1. « Cette amitié, nouée à propos d'un incident banal entre deux hommes d'âge si différent, devait durer jusqu'à la mort du chancelier, bien qu'ils se soient rarement rencontrés au cours de leur vie. More, tombé sérieusement malade, avait écrit à Oxford pour y solliciter l'avis des médecins. Pole le sut et se rendit aussitôt auprès de leur commun maître Linacre pour obtenir de lui une prescription médicale. Il s'empressa ensuite d'envoyer l'ordonnance à sa mère, la comtesse Marguerite, la priant de confectionner elle-même le remède indiqué. Son désir fut satisfait et More reçut de la comtesse de Salisbury le remède salutaire. En guise de remerciement, More écrivit au jeune Réginald Pole une lettre du tour le plus littéraire. L'amitié entre eux était née. »[2].
  2. « À en croire Beccatelli, toujours bien informé, ce serait Réginald Pole qui aurait été chargé de rédiger le plan de réforme résumant les délibérations. Toutefois Schweitzer croit que ce fut Aléandre qui mit la dernière main à ce Consilium élaboré surtout par lui avec le concours de Cortese et de Badia[18] ».
  3. Un exemple décrit par l’historien Jedin Hubert Jedin est la faillite de la réforme de la Daterie parmi les réformes non entamées. M. Firpo dit que « il celebre Consilium de emedanda Ecclesia nel quale, pur rimasto in gran parte lettera morta, si è voluto scorgere un importante incunabolo del riformismo tridentino ». Firpo 2011, p. 107.
  4. La crainte de donner raison aux protestants décida un certain nombre des cardinaux à combattre cette réforme intérieure de l'Église. Toutefois, « Ce rapport confidentiel fut imprimé en 1538 et il tomba bientôt entre les mains des protestants qui le publièrent à plusieurs reprises. Dans la préface de l'édition de Strasbourg, le luthérien Jean Sturm disait de ce rapport : « C'est une preuve que nous ne sommes pas en dissentiment avec vous sans de fortes raisons. » Luther de son côté, en donna une édition accompagnée de gloses où Rome est attaquée. »[20]
  5. Lettre de Pole à Contarini du 17 mai 1541[26]
  6. À la veille du consistoire, selon Simoncelli, Contarini fait appel à tous ses amis cardinaux afin de faire bloc et défendre le texte de l’accord[26]. Contarini lui-même dans une lettre adressée au cardinal Bembo du 28 juin 1541 avait espéré dans la présence de Pole pour contrebalancer les forces intransigeantes. Cf. Ganzer 1993, p. 48.
  7. Manuzio publie en 1542-43 un recueil de lettres qui critiquent ouvertement l’action du cardinal anglais[31].
  8. Grâce aux études de D. Fenlon et P. Simoncelli sur la correspondance entre Reginald Pole et Flaminio et entre Pole et Contarini, M. Firpo fait remarquer que l’écart idéologique entre les deux cardinaux commence déjà dans les années 1540-41 avant le colloque de Ratisbonne. Cela dit, il ne s’agit pas d’une rupture nette, car en 1542, les relations d’estime et d’amitié continuent et en témoignent les correspondances pour trouver ensemble une solution aux hérétiques de Modène. Firpo 2011, p. 123-124.
  9. Il faut noter que « Paul III ne parvient pas à abandonner complètement Contarini qui est politiquement vaincu, ni à renier ses anciens choix. […] En outre le pape comprend le danger politique que peut représenter le cardinal Carafa s’il devient trop puissant. Aussi essaye-t-il de contenir la victoire des intransigeants et de donner un gage de sa volonté modératrice par ces nominations, au bureau du concile, d’hommes appartenant à la mouvance évangélique et en faisant entrer au sacré Collège, le 2 juin 1542, Giovanni Morone, Roberto Pucci, Giovanni Vincenzo Acquaviva, Marcello Crescenzi, Tommaso Badia et don Gregorio Cortese » Cf. Viallon 2005, p. 110-142.
  10. Lors de la convocation du consistoire du 22 mai 1542 est lue la bulle Initio nostri hujus pontificatus de convocation du concile de Trente pour la Toussaint de la même année.
  11. La seconde convocation du concile par la bulle Laetare, Jerusalem du 22 novembre 1544 fixe l’ouverture au 25 mars 1545[38].
  12. Dans ces pages Simoncelli décrit les évolutions de l’historiographie sur cet événement, en particulier les recherches de Jedin et leurs évolutions entre 1947 et la deuxième édition de l’histoire du concile en 1962[48].
  13. L’auteur cite la déposition de Carnesecchi lors de son procès[49].
  14. Selon R. Biron une des raisons de l’appui de Charles Quint était la possibilité du mariage de Marie Tudor avec Reginald Pole. « Pour des raisons politiques, la question du mariage éventuel de la princesse Marie Tudor, sœur et héritière du débile Édouard VI, avec son cousin Réginald le préoccupait de longue date sachant que, cardinal sans être prêtre, Pole pouvait toujours sur simple autorisation pontificale prétendre à cette union qui lui ferait partager le trône d'Angleterre. Malgré l'attitude assez énergique prise par le cardinal vis à-vis des agents de l'Empereur dans diverses circonstances, les instructions de Charles-Quint furent donc formelles en vue d'amener son élection »[51]. Selon Simoncelli, Charles Quint et ses diplomates savaient très bien les positions doctrinales qui pouvaient les compromettre lors du conclave, mais l’empereur sans hésiter lui donna son appui[52].
  15. Il faut mentionner que « ce soir-là, en effet, 5 décembre, le cardinal Farnèse fit une démarche auprès de Pole […] Comme une voix seulement manquait à son candidat, Farnèse, après s'être assuré de la majorité des votes, se rendit avec un autre cardinal auprès de Réginald Pole, déjà retiré dans sa cellule, pour l'informer du choix que l'on faisait de lui pour le Souverain Pontificat. Il n'avait plus qu'à se rendre à la Chapelle Sixtine pour y accepter l'adoration ou accession, cette forme valide de l'élection papale qui, dans le cas de dispersion des votes, entraîne certains cardinaux à s'associer à la majorité. »[54].

Références

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  1. Biron et Barennes 1922, p. 5.
  2. Biron et Barennes 1922, p. 10.
  3. a et b Pole et Égretier 1965, p. 9.
  4. Biron et Barennes 1922, p. 12.
  5. Biron et Barennes 1922, p. 15.
  6. Biron et Barennes 1922, p. 23.
  7. (it) M. Firpo, Riforma protestante ed eresie nell’Italia del Cinquecento, Roma, Laterza, , p.15.
  8. Société religieuse créée à Gènes le 26 décembre 1497 par Ettore Vernazza (it) aidé par sainte Caterina Fieschie et transférée à Rome, en 1513, fut approuvée par Léon X et il se diffuse rapidement dans diverses villes italiennes.
  9. Biron et Barennes 1922, p. 74.
  10. Biron et Barennes 1922, p. 71-81.
  11. Pole et Égretier 1965, p. 25.
  12. Pole et Égretier 1965, p. 47-48.
  13. L. Pastor, Histoires des Papes, t. XI, Paris, Plon-Nourrit, , 5e éd., p. 112-114. D’ailleurs, pour renouveler son collège cardinalice, Paul III proposa la pourpre à des humanistes illustres tels qu’Érasme, qui la refusa pour raison d’âge, ou Pietro Bembo.
  14. Biron et Barennes 1922, p. 108.
  15. Biron et Barennes 1922, p. 107.
  16. J. HEDIN, Histoire du Concile de Trente, Paris, Desclée, 1965, pp. 377-378. Sur proposition de Gasparo Contarini, cette députation comprend : Gianpietro Carafa, Jacopo Sadoleto, Reginald Pole, Federico Fregoso, Giovanni Matteo Giberti, Girolamo Aleandro, Tommaso Badia et don Gregorio Cortese.
  17. M. Viallon, Italie 1541 ou l’unité perdue de l’Église, Paris, CNRS, , p.74.
  18. Biron et Barennes 1922, p. 103.
  19. Hubert Jedin 1965, p. 386.
  20. Biron et Barennes 1922, p. 105.
  21. Hubert Jedin 1965, p. 260 à 262.
  22. Hubert Jedin 1965, p. 281 à 317.
  23. (it) K. Ganzer, « Aspetti dei movimenti cattolici di riforma nel XVI secolo », dans Cristinianesimo nella storia, vol. VIX, Bologna, EDB, , p.64.
  24. Ganzer 1993, p. 46-47. Ganzer renvoie aux réponses du 15 mai de Contarini à Messer Angelo avec l’« Epistola de iustifiatione » où le cardinal explique davantage ses positions sur la doctrine de la double justification.
  25. Luther et Bugenhagen au prince électeur Johann Friedrich le 11 mai 1541. Cf. MARTIN LUTHERS WERKE, Briefwechsel, vol. 9, Weimar, 1941, p. 406.
  26. a et b Paolo Simoncelli 1977, p. 39.
  27. Paolo Simoncelli 1977, p. 40.
  28. Bembo décrit amèrement le déroulement du consistoire dans une lettre datée du jour même (27 mai) adressée à Contarini. Cf. L. Beccadelli, Monumenti di varia letteratura, tome 1, partie 2, pp. 167-169, Bologna 1799.
  29. Fenlon 1972, p. 62-68.
  30. Simoncelli dans son livre sur l’évangélisme italien au XIVe siècle voit déjà dans l’envoi de Contarini à Ratisbonne une instrumentalisation des Spirituels de la part des forces intransigeantes de Rome, pour porter à la faillite la politique de compromis entre les confessions. Cf. P. SIMONCELLI, L’Evangelismo italiano del Cinquecento. Questione religiosa e nicodemismo politico, Roma, 1979. pp. 228-281.
  31. Paolo Simoncelli 1977, p. 41 à 42.
  32. PAUL III, Bulle pontificale Licet ab initio du 21 juillet 1542. Cf. A. Del Col[réf. non conforme], « La repressione della Riforma in Italia », op. cit., pp. 484-486.
  33. Firpo 2011, p. 123.
  34. Cf. S. M. Pagano – C. Rainieri, Nouvi documenti du Vittoria Colonna e Reginald Pole (collectanea Archivi Vaticani 24), Città del Vaticano, 1989.
  35. Viallon 2005, p. 136.
  36. BIBLIOTECA ESTENSE DI MODENA, Autografoteca Campori, Lettre de Lodovico Beccadelli depuis Bologne à Carlo Gualteruzzi, secrétaire de Pietro Bembo, du 31 mai 1542.
  37. Hubert Jedin 1965, Chap. X, « la première convocation à Trente », p. 397 à 433.
  38. Hubert Jedin 1965, Chap. XI, « la deuxième convocation du concile à Trente », p. 434 à 480.
  39. À la différence de 1542, Paul III nomme légats pontificaux le cardinal évêque Giovanni Maria Del Monte (1487-1555) futur Jules III, le cardinal prêtre Marcello Cervini (1501-1555) futur Marcel II et le cardinal diacre Reginald Pole.
  40. Biron et Barennes 1922, p. 179.
  41. A. Tallon, Le concile de Trente, Cerf, Paris, 2000, p. 53.
  42. Fenlon 1972, p. 116-136 et 161-173. Sur la question de la justification, la formule de la justification du Concile de Trente souligne d’une part que la justification est absolument gratuite et d’autre part, qu’elle accepte la coopération du libre arbitre et considère la grâce inhérente (infuse) et non imputative. Cf. Conciliorum Oecumenicorum Decreta, édité par G. Alberigo, 3e éd., Bologna, 1973, pp. 671-681.
  43. H. Jedin, Storia del Concilio di Trento, vol. II; Brescia, 1962, p. 248.
  44. (it) M. Firpo, « Il Beneficio di Cristo e il Concilio di Trento (1542-1546) », dans Dal sacco di Roma all’inquizione. Studi su Juan de Valdés e la Riforma italiana, Alessandria, ed. Dell’Orso, , p. 119-145.
  45. Parmi les historiens contemporains il y a un certain désaccord sur le jugement de cette œuvre. Notamment A. Prosperi renie la matrice valdésienne tandis que M. Firpo y insiste particulièrement. Cf. C. GINZBURG, A. PROSPERI, « Juan Valdés e la Riforma in Italia : proposte di ricerca », in Doce consideraciones sobre el mundo hispano-italiano en tiempos de Alfonsi y Juan de Valdés, Actas del coloquio interdisciplinar (Bolonia, abril 1976), Roma, Instituto espanol de lengue y literatura, 1979, pp. 185-195. Et pour M. Firpo, « Juan de Valdés tra alumbrados e spirituali » in Firpo 1998, p. 99-103.
  46. Simoncelli 1977, p. 18-19.
  47. H. Jedin, Il cardinal Pole et Vittoria Colonna, p. 524. Cf. Simoncelli 1977, p. 34.
  48. Simoncelli 1977, p. 32-38.
  49. Simoncelli 1977, p. 32.
  50. L'ambassadeur vénitien, Matteo Dandolo, en annonçant au doge de Venise la mort du Pape ajouta en post-scriptum cette indication à sa lettre : « Les paris chez les banquiers sont de vingt-quatre en faveur de l'Angleterre (cardinal Pole) et aucun autre cardinal n'a autant de chance que lui » Cf. Calendar of State Paper, Venetian, t. V, n. 594.
  51. Biron et Barennes 1922, p. 210.
  52. Simoncelli 1977, p. 60-62.
  53. Pour une description détaillée du conclave de 1549 voirPastor 1925, t. XIII, p. 1-45 et Simoncelli 1977, p. 62-73
  54. Biron et Barennes 1922, p. 214.
  55. Firpo 1998, p. 142.
  56. Mais aussi A. Prosperi dans le chapitre Chap. 4 « All’ombra di Reginald Pole » in A. PROSPERI, L’eresie del libro grande. Storia di Giorgio Siculo et della sua setta, Milano, coll. Storia Universale Economica, Feltrinelli, 2000.
  57. Les recherches Simoncelli montre qu’il y avait déjà une enquête sur Pole de la part de l’inquisition avant le conclave.
  58. Éditées par Quirini (5 volumes, Brescia, 1744-57)
  59. « I found this type of book to be written by an enemy of the human race. It explains every means whereby religion, justice and any inclination toward virtue could be destroyed » [Dwyer, p. xxiii]. Voir aussi cette citation dans Raimondo Spiazzi, Enciclopedia del pensiero sociale cristiano, (lire en ligne), p. 300.
  60. A. F. Artaud, Machiavel. Son génie et ses erreurs, p. 292.

Voir aussi

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Dans la fiction

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Le personnage de Pole apparaît dans plusieurs œuvres de fiction, notamment dans le roman historique The Trusted Servant (L'homme de confiance) d'Alison Macleod.

Bibliographie

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  : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • [Thomas Phillips 1767] (en) Thomas Phillips, The history of the life of Reginald Pole, vol. 2, Londres, T. Payne, , 366 p. (lire en ligne) ;
  • [Agnes M. Stewart 1882] (en) Agnes M. Stewart, The Life of Cardinal Pole, Londres, Burns & Oates, , 378 p. ;
  • [Frederick George Lee 1888] (en) Frederick George Lee, Cardinal Archbishop of Canterbury : an historical sketch, with an introductory prologue and practical epilogue, New York, G. P. Putnam's Sons, , 364 p. (lire en ligne) ;
  • Athanasius Zimmermann, Kardinal Pole: sein Leben und seine Schriften (Regensberg, 1893)
  • James Gairdner, The English Church in the Sixteenth Century (London, 1903)
  • Martin Haile, Life of Reginald Pole (New York, 1910)
  • D. Baxter, Life of Reginald Pole, Sir Isaac Pitman and Sons (London, 1910).
  •   Reginald Biron et Jean Barennes, Un prince anglais, Cardinal-Légat au XVIe siècle : Réginald Pole : avec portrait d'après un tableau attribué au Titien de la galerie de Lord Arundel Wardour, 1557, Paris, Arthur Savaète, , 322 p. (lire en ligne) ;
  •   [Hubert Jedin 1965] Hubert Jedin, Histoire du Concile de Trente, t. 1, Paris, Desclée-Mame,  ;
  •   Reginald Pole et Noëlle-Marie Égretier (traduction), Défense de l’unité de l’Église, Paris, Vrin, , 352 p. ;
  • D. Fenlon, Heresy et Obedience in Tridentine Italy : Cardinal Pole and the Counter Reformation, Cambridge, .
  •   (it) Paolo Simoncelli, Il caso Reginald Pole : Eresia e santità nelle polemiche religiose del Cinquecento, Rome, Edizioni di storia e letteratura, , 280 p. ;
  • T. Mayer, Reginald Pole : prince and prophet, (Cambridge, 2000).

Liens externes

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