Mer Rouge

mer intracontinentale entre l’Afrique et le Moyen-Orient

La mer Rouge (arabe : البحر الأحمر al-Bahr al-Ahmar, copte : ⲫⲓⲟⲙ ⲛ̀ϩⲁϩ Phiom enhah ou ⲫⲓⲟⲙ ⲛ̀ϣⲁⲣⲓ Phiom nšari, hébreu : ים סוף Yam Suf, araméen : ܝܡܐ ܣܘܡܩܐ Yammāʾ Summāqā, tigrinya : ቀይሕ ባሕሪ Qeyih Bahri, somali : Badda Cas 𐒁𐒖𐒆𐒆𐒖 𐒋𐒖𐒈.) est une mer intercontinentale bordière de l'océan Indien et située entre l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient. Elle a une superficie d'environ 450 000 km2. C'est une mer d'une grande importance stratégique et commerciale qui permet aux navigateurs en provenance de la mer Méditerranée et à destination de l'océan Indien (ou vice-versa) de ne pas être contraints de contourner l'Afrique.

Mer Rouge
Carte bathymétrique de la mer Rouge.
Carte bathymétrique de la mer Rouge.
Géographie humaine
Pays côtiers Drapeau de l'Égypte Égypte
Drapeau de l'Arabie saoudite Arabie saoudite
Drapeau du Soudan Soudan
Drapeau de l'Érythrée Érythrée
Drapeau du Yémen Yémen
Drapeau de Djibouti Djibouti
Géographie physique
Type Mer intercontinentale
Localisation Océan Indien
Coordonnées 21° nord, 38° est
Superficie 450 000 km2
Longueur 1 928 km
Largeur
· Maximale 365 km
Profondeur
· Moyenne 500 m
· Maximale 3 040 m
Géolocalisation sur la carte : Moyen-Orient
(Voir situation sur carte : Moyen-Orient)
Mer Rouge
Géolocalisation sur la carte : Afrique
(Voir situation sur carte : Afrique)
Mer Rouge
Géolocalisation sur la carte : Asie
(Voir situation sur carte : Asie)
Mer Rouge
Géolocalisation sur la carte : océan Indien
(Voir situation sur carte : océan Indien)
Mer Rouge

Étymologie

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Mer Rouge est une traduction directe du grec Erythra Thalassa (Ἐρυθρὰ Θάλασσα) et du latin Mare Rubrum.

En égyptien ancien elle était appelée Pꜣ-ym-ꜥꜣ-n(.y)-mw-ḳd[1] (Pa-yem 'Aa en Mu-Ked). Les Romains la nommaient aussi Sinus Arabicus (le « golfe Arabique »). L'écrivain latin Quinte-Curce dans l'Histoire d'Alexandre le Grand, décrivant le paysage que ce dernier traverse durant le périple qui le mènera jusqu'en Inde, parle ainsi de la mer Rouge : « Son nom lui vient du roi Erythrus, c'est pourquoi les ignares croient que ses eaux sont rouges ». Selon lui, le nom de la mer provient du roi des contrées avoisinantes, tandis qu'en grec, le terme erythros signifie « rouge », d'où la confusion.

En afar, elle est appelée Qasa bad ou Qasa bada ; en copte ⲫⲓⲟⲙ ⲛ̀ϩⲁϩ Phiom Enhah ou ⲫⲓⲟⲙ ⲛ̀ϣⲁⲣⲓ Phiom Nšari ; en hébreu ים סוף Yam Suf (soit « Mer des Roseaux », comme relevé par Rachi) ; en araméen ܝܡܐ ܣܘܡܩܐ Yammāʾ Summāqā ; en tigrinya : ቀይሕ ባሕሪ Qeyih Bahri ; en somali : Badda Cas.

Bien que normalement[2], la couleur de la mer Rouge soit d'un intense bleu-vert, une des hypothèses couramment avancées est qu'il se produit occasionnellement des blooms « d'algues » (en fait une cyanobactérie) de l'espèce Trichodesmium erythraeum. Celles-ci, lorsqu'elles meurent, donnent à l'eau une couleur rougeâtre[3] en raison d'un pigment interne rouge, la phycoérythrine[4].

Cependant, il est possible que son nom provienne de la désignation universelle du point cardinal sud selon le code géo-chromatique utilisé depuis la plus haute Antiquité. Toutefois, en Arabie, le rouge désigne le point cardinal ouest depuis la sédentarisation et la constitution des frontières[5].

Géographie

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Limites

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L'Organisation hydrographique internationale détermine les limites de la mer Rouge de la façon suivante[6] :

  • Au nord :

Avec le golfe d'Aqaba : une ligne allant depuis le Ra’s al Qasbah (Ras al Fasma 28° 01′ 27″ N, 34° 37′ 28″ E) en direction du sud-ouest jusqu’à l’île du Requin (Jazīrāt Requin 27° 58′ 06″ N, 34° 35′ 27″ E), puis à travers l’île de Tiran (Jazīrat Tīrān) jusqu’à sa pointe sud-ouest (27° 54′ 41″ N, 34° 33′ 17″ E) et de là vers l’ouest sur le parallèle 27°54’41" de latitude nord jusqu’à la côte de la péninsule du Sinaï.

Avec le golfe de Suez : une ligne allant du Ra's Muhammad (27° 43′ 26″ N, 34° 14′ 50″ E) à la pointe sud de jazīrat Shākir (27° 26′ 53″ N, 34° 01′ 46″ E) et de là vers l'ouest sur le parallèle 27° 26 53 N jusqu'à la côte d'Afrique.

  • Au sud :

Une ligne joignant le Ra’s Ḩişn Murād (Ras Menheli) (12° 40′ 29″ N, 43° 30′ 17″ E), au Yémen, et Siyyân (Ra's Siyan) 12° 28′ 32″ N, 43° 19′ 30″ E), à Djibouti.

Localisation

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La mer Rouge se situe entre l’Afrique et la péninsule Arabique. Au sud, la mer Rouge communique avec le golfe d'Aden par le détroit de Bab-el-Mandeb. Au nord, deux golfes, séparés par la péninsule du Sinaï, lui sont adjacents : à l’ouest, le golfe de Suez (qui communique avec la Méditerranée par le canal de Suez) ; à l’est, le golfe d’Aqaba. Il est utile de préciser que, selon l'Organisation hydrographique internationale (voir ci-dessus), ces deux golfes sont des espaces maritimes à part entière et qui, par conséquent, ne font pas partie de la mer Rouge.

La mer Rouge a une longueur d’à peu près 1 928 km (depuis le ra's Muhammad jusqu'au milieu du Bab-el-Mandeb), pour une largeur maximale de 365 km (entre Arkiko, en Erythrée et Dana Bay, en Arabie saoudite) et une profondeur maximale de 2 500 mètres dans la fosse médiane centrale, avec une profondeur moyenne de 500 mètres.

Elle est parsemée de différents archipels et îles parmi lesquels, du nord au sud, on note : Giftoun, Zabargad, l’archipel des Dahlak, les îles Farasan ou les îles Hanish. Deux de ces îles, Djebel at-Teïr et Jebel Zubair, abritent chacune un volcan actif.

Les pays bordant la mer Rouge sont Djibouti, l’Érythrée, le Soudan, l’Égypte, l’Arabie saoudite et le Yémen.

Parmi les villes côtières de la mer Rouge les plus connues sont : Assab, Port-Soudan, Port Safaga, Hurghada, Charm el-Cheikh, Douba, Yanbu, Djeddah, Jizan et al-Hodeïda.

Les températures de surface de l’eau de la mer Rouge sont relativement constantes, entre 21 et 25 °C, ce qui en fait l’une des mers les plus chaudes du monde. La visibilité reste relativement bonne jusqu’à 200 mètres de profondeur mais les vents peuvent se lever rapidement et les courants marins se révéler traîtres.

Faune et flore

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Chaetodon semilarvatus, avec à l'arrière plan Pseudanthias squamipinnis et Zebrasoma xanthurum. Au sol différentes espèces de coraux, comme Stylophora pistillata ou Xenia umbellata, dans la mer rouge, près de Temple, au large de Charm el-Cheikh, mars 2022.

Il y a de nombreux hauts-fonds en mer Rouge, renommés pour l’exubérance de la vie sous-marine qui s’y abrite, que ce soient de nombreuses variétés de poissons ou de magnifiques coraux. La température y est relativement élevée et permet à ces derniers de se développer de manière luxuriante. Elle est peuplée de milliers d'espèces d’invertébrés, de 250 espèces de coraux, de 1200 espèces de poissons dont au moins 40 espèces de requins.

Depuis l'ouverture du Canal de Suez en novembre 1869, plus d'un millier d'espèces marines en provenance de mer Rouge — plancton, algues, invertébrés, poissons — ont migré vers le nord et se sont établis en mer Méditerranée. Au point qu'un bon nombre de ces espèces introduites forment aujourd'hui une composante notable de l'écosystème méditerranéen[7].


Salinité

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Les golfes de Suez, d'Aqaba et la mer Rouge vus par un satellite de la NASA.

La mer Rouge est une des mers les plus salées du globe avec une salinité de 42 USP alors que de façon générale les océans ont une salinité de 35 USP.

L'eau de la mer Rouge étant donc plus dense, le principe d'Archimède garantit qu'un corps flottera mieux que dans l'océan, a fortiori mieux que dans l'eau douce.

Géologie

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La mer Rouge s'est formée lors de la séparation de la plaque arabique de la plaque africaine. La divergence est datée de l'Oligocène (voir l'échelle des temps géologiques) et se poursuit de nos jours, ce qui explique l’existence d’une activité volcanique dans les parties les plus profondes. L'existence d'une dorsale active au fond de la mer Rouge en fait, d'un point de vue géologique, un océan. Si l'expansion des fonds océaniques se poursuit, la mer Rouge deviendra un océan au sens géographique du terme.

Histoire

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Les Égyptiens furent les premiers à tenter une mission d’exploration de la mer Rouge.

La Bible, dans le livre de l'Exode, raconte l’histoire célèbre de la traversée de la mer Rouge selon laquelle Moïse conduit les Israélites vers la liberté à travers l’eau, en utilisant la puissance de Dieu pour partager les eaux.

Ce fut un navigateur grec, Hippalus, qui donna une dimension internationale à la mer Rouge dans son manifeste sur le voyage de la mer d’Érythrée et ainsi l’ouvrit à un commerce immense et exclusif avec l’Asie.

Durant l'antiquité, Ptolémée II créa la majorité de la douzaine de ports qui existaient alors sur la Mer Rouge, ils n'ont pas tous été identifiés, les ports connus datant de cette époque sont les suivants[8] :

Ces ports jalonnaient la côte occidentale de 200 km en 200 km, ils étaient principalement destinés à importer des éléphants de combat d'Afrique[8].

Quelques siècles plus tard fut créé le port d'Aydhab probablement par des armées musulmanes en route pour conquérir la Haute Égypte. Ce port fut ensuite utilisé pour effectuer le pèlerinage vers la Mecque[8].

Ce ne fut qu’à partir du XVe siècle environ que l’Europe commença à manifester de l’intérêt pour cette zone. Majeure comme lieu de circulation économique et militaire, la Mer Rouge devint alors un secteur d’affrontement entre Musulmans, chrétiens, Européens, etc. Les visées de conquête de l’Abyssinie notamment (actuelle Éthiopie) par les Portugais la rendirent d’autant plus difficile d’accès que les Musulmans y avaient pris le dessus et particulièrement sur le plan commercial.

En 1798, la France du Directoire envoya le général Bonaparte envahir l’Égypte dans le cadre d'une expédition militaire et scientifique.

L’ingénieur architecte Jean-Baptiste Lepère, qui prit part à l’expédition, renouvela le plan pour un canal qui avait été envisagé pendant le règne des Pharaons. Le canal de Suez fut ouvert en novembre 1869. À cette époque, les Anglais, les Français, et les Italiens partageaient les postes de commerce. Les postes furent progressivement démantelés après la Première Guerre mondiale. Après la Seconde Guerre mondiale, les Américains et les Soviétiques exercèrent leur influence pendant que le trafic pétrolier s’intensifiait. Cependant, la guerre des Six Jours culmina avec la fermeture du canal de Suez entre 1967 et 1975. Encore aujourd’hui, en dépit de patrouilles par les grandes flottes maritimes dans les eaux de la mer Rouge, le canal de Suez n’a jamais retrouvé sa suprématie sur la route du Cap, qui est maintenant considérée comme moins dangereuse.

En , l'entreprise Middle East Development, basée à Dubaï et propriété de la famille Ben Laden, annonce qu'elle souhaite construire un pont de 28,5 km de long, au-dessus de la mer Rouge, afin de relier le Yémen et Djibouti. Le projet comprend également la création de zones urbaines de part et d'autre de l'ouvrage[9].

En 2016, des attaques ont lieu en mer rouge[10].

L'implication des Houthis durant la guerre Israël-Hamas de 2023-2024 avec essentiellement des attaques de missiles et de drones contre des navires affectent sérieusement la navigation. Les marines de plusieurs pays, dont celle des États-Unis dans le cadre de l'Opération Gardien de la prospérité, escorte les navires marchands.

Un bateau norvégien reliant la France métropolitaine à la Réunion est attaqué[11],[12]. Les attaques conduisent Maersk, Hapag-Lloyd, CMA CGM et MSC à réduire leurs opérations dans cette mer[13]. BP et Evergreen ont également cessé de fréquenter le détroit de Bab-el-Mandeb[14].

Tourisme

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Famille égyptienne en camping au bord de la mer Rouge.
 
Site de plongée « Police Station » sur Giftoun Soraya à Hurghada.

La mer Rouge est une destination touristique réputée, notamment pour les amateurs de plongée sous-marine[15].

Des requins de type longimane et mako ont provoqué de graves accidents aux baigneurs (mutilation, amputation, noyade)[16].

Homonymie

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Notes et références

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  1. (en) Julien Cooper, Toponymy on the Periphery: Placenames of the Eastern Desert, Red Sea, and South Sinai in Egyptian Documents from the Early Dynastic until the End of the New Kingdom, BRILL, (ISBN 978-90-04-42221-6).
  2. Mer Rouge bleue par Denis Terver.
  3. Encyclopædia Britannica, article : "Red Sea"
  4. « Projet Référentiel Plancton en baie de Calvi II. Diversité de l'écosystème planctonique de la baie de Calvi Jean-Henri Hecq et Anne Goffart », sur matelots-vie.com (consulté le ).
  5. (en) Jacques Bačić, Red Sea - Black Russia, East European Monograph, , p. 45.
  6. « Limites des Océans et des Mers, Publication spéciale no 23, 3e édition », Organisation hydrographique internationale, (consulté le )
  7. Atlas of Exotic Fishes in the Mediterranean Sea. 2nd Edition. 2021. (F. Briand Ed.) CIESM Publishers, Paris, Monaco 366 p.[1]
  8. a b et c (en) Woźniak, M., « Lost port of the Red Sea », Academia Letters,‎ (DOI 10.20935/AL213).
  9. « Un pont sur la mer Rouge, projet pharaonique de Djibouti et du Yémen », sur djibnet.com (consulté le ).
  10. « Attaques des Houthis en mer Rouge : "On touche à la colonne vertébrale de la mondialisation", explique un spécialiste des enjeux maritimes », sur Franceinfo, (consulté le )
  11. « Tension en mer Rouge : après les missiles et les drones, les Houthis attaquent un tanker à l’aide d’un hydravion », sur La Tribune, (consulté le )
  12. « Mer Rouge : un bateau norvégien touché par «un objet non identifié» », sur Le Figaro, (consulté le )
  13. « Attaques en mer Rouge : l'armateur Maersk gagne près de 20% en Bourse en trois séances », sur Investir, (consulté le )
  14. « Attaques des Houthis en mer Rouge : les États-Unis annoncent une coalition, la France y participe », sur France 24, (consulté le )
  15. Andrea Internet Archive, Mer rouge : guide du plongeur, Gründ, (ISBN 978-2-7000-3403-5, lire en ligne).
  16. Charm el-Cheikh visée par des attaques meurtrières de requin Article du Monde du 5 décembre 2010.

Voir aussi

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Bibliographie

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  • Henry de Monfreid, Les Secrets de la mer Rouge, Grasset, 1931.
  • Romain Gary, Les Trésors de la mer Rouge, Éditions Gallimard, 1971.
  • Karl May, Les Pirates de la Mer Rouge, Alfred mame et fils editeurs, 1891.
  • (illustré par Maurice Pommier) Katia Sabet, Marwan de la mer Rouge, Gallimard jeunesse, 2008.
  • Hergé, Les Aventures de Tintin : Coke en stock, Casterman, 1958.
  • Gisèle de Monfreid, Mes secrets de la mer Rouge, France Empire, 1982.
  • (illustré par Thibaud Guyon) Patrick Joquel, Sur le bord de la Mer Rouge, Lo Païs d'Enfance, Le Rocher, 2004.
  • Joël Alessandra, Errance en mer Rouge, Casterman, 2004.

Articles connexes

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Liens externes

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G��ographie de l'Afrique