Hollando-Américains
Les Hollando-Américains sont les Américains ayant partiellement ou en totalité des ancêtres néerlandais ou flamands.
Population totale | 4 009 279 (2018)[1] |
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Langues | Anglais et néerlandais |
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Religions | Protestantisme et catholicisme |
Ethnies liées | AfrikanersBelgo-Américains |
« Hollando-Américain » est une simplification abusive utilisée par commodité en français. En effet à strictement parler les Hollandais sont seulement les habitants des deux provinces de Hollande, une partie des Pays-Bas, à l'époque de la colonisation les Provinces-Unies. D'autre part une partie importante des premiers colons étaient des protestants réfugiés aux Provinces-Unies mais d'origine Wallonne ou huguenote.
Les Hollando-Américains comprennent aussi des descendants de Flamands (qui ne sont pas des Néerlandais sauf ceux de Flandre zélandaise) qui parlent la même langue mais sont généralement catholiques.
Les« Pennsylvania Dutch » ou Allemands de Pennsylvanie ne font pas partie des Hollando-Américains (Dutch Americans) ; en effet, dans ce cas, l'anglais « dutch » est dérivé de « deitsch » (en allemand de Pennsylvanie) ou de « deutsch » (en allemand standard) et signifie allemand en français[2],[3],[4],[5].
Fondations
modifierLes Néerlandais étaient parmi les premiers européens à s'être installés dans le Nouveau Monde. En 1609 la Compagnie néerlandaise des Indes orientales recherchant un passage vers le Pacifique fit reconnaître la vallée du fleuve qui sera renommé Hudson ainsi que les îles de Staten Island (Staaten Eylandt, l'île des Etats [généraux des Provinces-Unies]) et de Manhattan puis la baie de la Delaware par un de ses navires, le Halve Maen commandé par le capitaine Henry Hudson. Les Provinces-Unies revendiquèrent ensuite la possession de la région. D'autres voyages d'exploration furent effectués par Adriaen Block. Les premières compagnies de pelleterie s'installèrent en 1610 et Fort Nassau (actuelle Albany) fut érigé en 1614[6]. Le premier établissement permanent de colons néerlandais fut fondé en 1624 à Manhattan et renommé Nieuw Amsterdam (la Nouvelle-Amsterdam), sur la côte Est des États-Unis, laquelle deviendra plus tard la métropole de New York[7]. La Compagnie néerlandaise des Indes occidentales (VOOC) attribua aux acheteurs des terres, les patroons, des droits de type féodal sur les concessionnaires des terrains, comme c'était pratiqué en Nouvelle-France.
Environ la moitié des premiers colons « néerlandais » étaient des protestants (calvinistes) huguenots, rhénans ou wallons attirés ou réfugiés aux Provinces-unies[8] dont le gouverneur Pierre Minuit qui acheta Manhattan et le capitaine Jessé de Forest organisateur de la première expédition de colonisation de Manhattan[9]. Ces colons s'installèrent ensuite dans les vallées de l'Hudson et de la Mohawk, son affluent, jusqu'au-delà de Fort Orange, aujourd'hui banlieue d'Albany. Renforcée par des Puritains de Nouvelle Angleterre notamment du Connecticut, la colonie était de fait multiculturelle et tolérante mais le gouverneur Pieter Stuyveysant établit des lois discriminant les non-calvinistes[10]. Suivant le point de vue, la colonie était appelée Nouvelle-Néerlande ou Nouvelle-Belgique[11].
Les Pères pélerins du Mayflower puritains arrivés en 1620, fondateurs de la Colonie de Plymouth voisine, étaient également des protestants arrivés des Provinces-Unies mais non calvinistes et d'origine britannique avec quelques Wallons[12]. L'une des motivations de leur émigration avait été justement d'éviter que leur descendance ne soit absorbée culturellement par les Néerlandais mercantilistes, calvinistes et néerlandophones s'ils étaient restés aux Provinces-Unies[13].
La Nouvelle Suède fut créée en 1638 lors d'une expédition suédoise préparée par Samuel Blommaert (nl), un négociant flamand, et conduite par Pierre Minuit (qui évincé de son poste était alors retourné en Europe) dans la baie de la Delaware alors que les Néerlandais momentanément affaiblis s'en retiraient. Pierre Minuit en devint également le premier gouverneur. La colonie avait reçu quelques colons néerlandais avec les Suédois, Finlandais et Allemands de l'Empire suédois[14]. La Nouvelle-Suède fut conquise lors d'une expédition menée par le gouverneur Pieter Stuyveysant en 1655 puis recolonisée par les Provinces-Unies ; les Néerlandais firent cependant preuve de tolérance avec les Suédois et les Finlandais luthériens[15]. Fort Kristina, sa principale place forte, devint Fort Altena, aujourd'hui Wilmington.
La Pennsylvanie fondée en 1682 par le Quaker William Penn devait être un refuge pour les monothéistes persécutés en particulier les anabaptistes indésirables en Europe[16]. Ils comptaient aussi des Néerlandais dont William Penn lui-même par sa mère. Les Mennonites néerlandais font partie de ces anabaptistes, ultérieurement ils influenceront grandement le mouvement évangélique[17]. La Pennsylvanie reçut cependant bien plus de germanophones[18] qui par un curieux jeu de proximités linguistiques (et d'ignorance?) furent aussi appelés Dutch (Pennsylvania Dutch) car ils se nommaient eux-mêmes Deitsch, c'est à dire allemand [3].
Fin de la Nouvelle Néerlande
modifierEn 1664 la Nouvelle Néerlande fut conquise par les Britanniques. Peu aidé ni par les colons ni par la VOOC, Pieter Stuyveysant devenu impopulaire capitula. New Amsterdam fut renommée New York, les colons conservèrent leur terres, leurs coutumes et leur religion. Les patroons prirent le titre anglais de lord of the manor et s'efforcèrent de conserver leurs privilèges (voir par exemple Rensselaerswijck). Une partie de la colonie fut cependant détachée et attribuée à Lord John Berkeley (1er baron Berkeley de Stratton) et Lord Georges de Carteret, l'un des huit lords propriétaires de Caroline et natif de Jersey ; elle constituera le New Jersey. Les lords tentèrent d'imposer le système quasi-féodal en vigueur en Caroline, les colons devenant concessionnaires des terres et assujettis au paiement d'une quittance (quit-rent (en)) et à d'autres obligations. Pour y parvenir et attirer de nouveaux colons les lords instaurèrent en contre-partie la liberté religieuse (Concession and Agreement (en)).
En 1674, la Nouvelle Néerlande fut définitivement échangée avec l'Angleterre contre le Suriname, qui convenait mieux aux Provinces-Unies, désireuses de continuer une économie de plantation[8] après la perte de la Nouvelle-Hollande brésilenne au profit du Portugal en 1661. L'immigration néerlandaise cessa momentanément mais les néerlandais s'efforcèrent de garder leurs coutumes et leur foi calviniste[19].
En 1790 la population d'origine néerlandaise des Etats-Unis fut estimée à 3,1% de la population totale[20].
Nouvelles émigrations
modifierL'émigration néerlandophone reprit au XIXe siècle : émigration de paysans pauvres ou désireux d'obtenir de grandes surfaces (principalement jusque vers 1950). Aux Pays-Bas la séparation de 1834, un schisme survenu au sein de l'Église réformée néerlandaise en 1834, qui conduisit à la création des Églises reréformées favorables au Réveil fut la cause, avec la situation critique de l'agriculture, de nouvelles émigrations de groupes décidés à fuir les discriminations religieuses, la pauvreté et dans certains cas la famine. Elles concernèrent 240 paroisses et furent menées après 1845 par des pasteurs comme Albertus van Raalte et Hendrik P. Scholte vers la région des Grands Lacs où se trouvent de bonnes terres. Van Raalte est personnellement à l'origine de la création de la colonie de Holland (Michigan) et Scholte de celle de Pella (Iowa)[21].
Après 1945 eut lieu une importante émigration de néerlandophones (partiels) en provenance des Indes néerlandaises, devenues la République d'Indonésie.
Démographie
modifierSelon l'American Community Survey (en) de 2021, 3,1 millions d'Américains se réclament d'une ascendance néerlandaise totale ou partielle[22]. Aujourd'hui, la majorité des Américains avec au moins un ancêtre néerlandais vivent dans les États de Californie, de New York, du Michigan, et de Pennsylvanie.
Influence culturelle
modifierL'influence néerlandaise se manifeste à travers :
- Des noms de lieux principalement dans l'Etat de New York : Brooklyn (Breukelen), Harlem (Haarlem) ;
- un nom d'état : Rhode Island, de Roode Eylandt, l'Île rouge, étymologie toutefois contestée ;
- des noms courants ou en rapport avec la marine : Yankee (de Jan-Kees, Jean-Cornelius en français, prénoms néerlandais les plus communs, peut servir à désigner, entr'autres, la partie de la population américaine issue des premiers colons protestants et germaniques (Néerlandais, Rhénans, Anglo-Saxons, voir aussi White Anglo-Saxon Protestant) ; dollar (de Daalder, ancienne monnaie des Pays-Bas, thaler en allemand) ; boss (de baas : patron) ; cookies (de koekje : petit gâteau)[23] ; yacht, de jachtschip, lit. : navire de chasse, ancien navire militaire rapide des Provinces-Unies ;
- Les églises réformées (Église réformée en Amérique et Église chrétienne réformée en Amérique du Nord) d'origine néerlandaise calviniste ainsi que leurs établissements d'enseignement privés souvent prestigieux comme le Hope College et le Calvin College ; l'Université Rutgers du New Jersey autrefois liée à l'Église réformée en Amérique ; l'Université Vanderbilt fondée grâce aux dons du magnat des transports Cornelius Vanderbilt, un descendant des pionniers néerlandais, et autrefois fortement liée à l'Église épiscopalienne méthodiste ; l'influence du calvinisme sur le développement du capitalisme est discutée au moins depuis Max Weber[24] ;
- l'influence du calvinisme et du mennonisme apparu aux Provinces-Unies sur le mouvement évangélique, 29% des Américains se disent de confession évangélique et ce chiffre est en progression[25] ; en 1726, le pasteur Theodorus Frelinghuysen (en) de l'Église réformée néerlandaise fut à travers ses nombreuses prédications un des précurseurs du Grand Réveil[26] ; il y aurait aujourd'hui de nouvelles convergences entre calvinisme et évangélisme[27] ;
- la tradition du Père Noël, avatar du Sinterklaas (Saint Nicolas) hollandais ou flamand transformé en Santaclaus ou Santa aux Etats-Unis ;
- les nombreux festivals aux tulipes ;
- après les îles britanniques, c'est la principale origine des présidents américains : quatre et même six si l'on inclut les Bush dont les origines néerlandaises sont très partielles ;
- des industriels et/ou inventeurs, parfois à l'origine de grandes compagnies : Thomas Edison (General Electric), Samuel Colt (famille de Wolf de Rhode Island, Colt's Manufacturing Company), Samuel P. Colt (famille de Wolf, Uniroyal), Walter Chrysler (Chrysler), Cornelius et William Henry Vanderbilt (Famille Vanderbilt, compagnies de chemins de fer), Leo Baekeland (d'origine flamande, inventeur de la bakélite), Lee De Forest (lampe triode et son sur film), Samuel Goudsmit (spin de l'électron, chef scientifique de l'opération Alsos liée au Projet Manhattan).
Littérature et cinéma
modifier- La Légende de Sleepy Hollow de Washington Irving adapté au cinéma de nombreuses fois.
- Knickerbocker's History of New York et Rip van Winkle du même auteur ; Rip van Winkle est devenu un personnage de légende du folklore américain.
Écrivains
modifierVoir aussi
modifier- Colonisation néerlandaise des Amériques
- Wallons de New York
- Nederlands in de Verenigde Staten (nl) (le néerlandais aux Etats-Unis)
- Démographie des États-Unis
- Maandblad de Krant (nl), publication mensuelle pour les Néerlandophones d'Amérique du Nord.
- Américain à trait d'union
Références
modifier- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Dutch American » (voir la liste des auteurs).
- ↑ (en) « People reporting ancestry », sur data.census.gov.
- ↑ Hughes Oliphant Old: The Reading and Preaching of the Scriptures in the Worship of the Christian Church, Volume 6: The Modern Age. Eerdmans Publishing, 2007, p. 606.
- Mark L. Louden: Pennsylvania Dutch: The Story of an American Language. JHU Press, 2006, p.2
- ↑ Hostetler, John A. (1993), Amish Society, The Johns Hopkins University Press, Baltimore, p. 241
- ↑ Irwin Richman: The Pennsylvania Dutch Country. Arcadia Publishing, 2004, p.16.
- ↑ (en) « First Dutch Settlers », sur American History (consulté le )
- ↑ Jaap Jacobs, New Netherland: A Dutch Colony in Seventeenth-Century America, BRILL, (ISBN 978-90-04-12906-1 et 978-1-4337-0705-6)
- Converging worlds: communities and cultures in colonial America, Routledge, (ISBN 978-1-136-59674-2, 978-0-203-33647-2 et 978-1-136-59669-8)
- ↑ Le premier nom redonné à Manhattan était la Nouvelle-Avesnes du nom du village natal de Jessé, Avesnes-sur-Helpe, bien vite remplacé par Nouvelle-Amsterdam.
- ↑ L'éthique puritaine était cependant très proche de l'éthique calviniste.
- ↑ donc, bien avant que l'état belge n'existe.
- ↑ Ainsi Philippe Delano (Maison de Lannoy, originaire de Flandres) arrivé sur le Fortune, navire qui suivit le Mayflower en 1621, se trouve être l'ancêtre des présidents Ulysses S. Grant et Franklin Delano Rooseveldt.
- ↑ Nathaniel Philbrick, Mayflower: a story of courage, community, and war, Viking, (ISBN 978-0-670-03760-5)
- ↑ John A. Munroe, History of Delaware, Univ. of Delaware Press, coll. « A University of Delaware bicentennial book », (ISBN 978-0-87413-947-1)
- ↑ (en) « Delaware living History », sur Wayback machine (consulté le )
- ↑ Voltaire, Essai sur les mœurs et l'esprit des nations (lire en ligne)
- ↑ Ed Hindson, Dan Mitchell, The Popular Encyclopedia of Church History, Harvest House Publishers, USA, 2013, p. 306
- ↑ (en) « The Dutch in British America », sur American History (consulté le )
- ↑ Thomas S. Wermuth, Rip Van Winkle's Neighbors: The Transformation of Rural Society in the Hudson River Valley, 1720–1850 (2001).
- ↑ (en) American Council of Learned Societies. Committee on Linguistic and National Stocks in the Population of the United States, Report of the Committee on Linguistic and National Stocks in the Population, (lire en ligne)
- ↑ (en) « The Founding Of The Last 'Colonies' », sur American History (consulté le )
- ↑ « B04006PEOPLE REPORTING ANCESTRY », sur United States Census Bureau - Census Data Homepage, (consulté le )
- ↑ Nicoline van der Sijs, Cookies, coleslaw and stoops, the influence of dutch on north-american languages , Amsterdam University Press, 2009, p.194.
- ↑ « Calvin, Weber et l’esprit du capitalisme », sur Université de Genève (consulté le )
- ↑ (en) Larry Eskridge, « Defining Evangelicalism », (consulté le )
- ↑ (en) F. J. Schrag, « Church History :Theodorus Jacobus Frelinghuysen : The Father of American Pietism », sur JSTOR
- ↑ « Calvin, la conversion et les évangéliques », La Revue Réformée, vol. Tome LXI, no 255, (lire en ligne)